DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre S
(Huitième partie)
SONORISATION D’UN LOCAL
Cf. Écoutes téléphoniques*,
Garde à vue*, Perquisition*, Preuve (Recherche des)*.
Rappr. Géolocalisation*,
Vidéosurveillance*.
La police « sonorise » un local lorsqu’elle y installe un matériel qui lui permettra d’écouter les conversation qui s’y tiendront et d’entendre
d’éventuels appels téléphoniques. Il s’agit d’une technique proche de celle des écoutes téléphoniques.
Les art. 706-96 et s. C.pr.pén. français fixent les limites et conditions de la "sonorisation et fixation d'images dans certains lieux ou véhicules". Cette
ingérence dans la vie privée d’une personne ne peut s’effectuer qu’en application d’une commission rogatoire délivrée par un juge d’instruction contre
une personne qui apparaît déjà fortement suspecte.
Cass.crim. 15 février 2000 (Gaz.Pal. 2000 II 1517) : Sur commission rogatoire, les officiers de police judiciaire ont procédé à une perquisition dans l’appartement de M., avec l’assistance de gendarmes et du groupe d’observation et de reconnaissance de Versailles, qui y ont mis en place un équipement permettant de capter et d’enregistrer à distance les conversations. [Procédure douteuse en principe, mais légitime en l’espèce du fait qu'elle concernait un meurtre]
Cass.crim. 1er mars 2006 (Bull.crim. 1er mars 2006) : Justifie sa décision la chambre de l'instruction qui, après avoir contrôlé que l'interception des conversations échangées au parloir de la maison d'arrêt entre une personne mise en examen et ses visiteurs a répondu aux conditions et formes prévues par les art. 706-96 à 706-102 C.pr.pén., relève que les opérations ordonnées par le juge d'instruction, pour une durée limitée, ont été placées en permanence sous son autorité et son contrôle et qu'elles étaient nécessaires à la recherche de la manifestation de la vérité, relativement à des infractions portant gravement atteinte à l'ordre public.
Cass.crim. 8 juillet 2015, pourvoi n° 15-81731 : Selon l'art. 706-100 C.pr.pén, les enregistrements sonores ou audiovisuels résultant de l’exploitation d’un dispositif de sonorisation ou de fixation d’images doivent être placés sous scellés ; il s’en déduit que les officiers de police judiciaire ne peuvent détenir une copie de ces enregistrements que pour les besoins et dans le temps de l’exécution de la mission confiée par le juge d’instruction en application de l’art. 706-96 du même code.
Cass.crim. 6 janvier 2015, n° 14-85448, confirmant une annulation de pièces : L'ordonnance, prévue par l'article 706-96 C.pr.pén., par laquelle le juge d'instruction autorise les officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire à mettre en place un dispositif technique de captation et d'enregistrement des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel doit être motivée au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure ; l'absence d'une telle motivation de cette atteinte à la vie privée, qui interdit tout contrôle réel et effectif de la mesure, fait grief aux personnes dont les propos ont été captés et enregistrés.
L'autorisation donnée par le juge de sonoriser un local emporte autorisation d'y pénétrer et par suite d'inspecter superficiellement les lieux, sans pour autant pouvoir procéder à une perquisition au sens propre du terme.
Cass.crim. 23 janvier 2013, n°12-85059 (Bull.crim. n° 29 p.57) : L’officier de police judiciaire, autorisé par le juge d’instruction à mettre en place un dispositif de sonorisation d’un véhicule, et qui en constate l’impossibilité, peut régulièrement transcrire sur procès-verbal ses constatations visuelles sur le contenu du véhicule à son ouverture, dès lors qu’il n’a procédé à aucune recherche.
Ce procédé ne saurait toutefois être employé dans des conditions méconnaissant le principe de la loyauté des preuves (on sait que Denys, tyran de Syracuse, avait fait aménager l'une des salles de la prison des Latomies de manière telle qu'il pouvait entendre de l'extérieur les conversations des prisonniers politiques qui y étaient incarcérés).
Cass.crim.
7 janvier 2014, n°13-85246 (Bull.crim.) : Porte atteinte
au droit à un procès équitable et au principe de loyauté des
preuves le stratagème qui en vicie la recherche par un agent de
l'autorité publique ;
Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que,
dans le cadre d'une information ouverte à la suite d'un vol à
main armée, le juge d'instruction a, par ordonnance, prise sur
le fondement des articles 706-92 à 706-102 C.pr.pén., autorisé
la mise en place d'un dispositif de sonorisation dans les
cellules de garde à vue d'un commissariat de police ; MM. Y...
et X..., identifiés comme ayant pu participer aux faits objet de
la poursuite, ont été placés en garde à vue dans deux cellules
contiguës et ont pu, ainsi, communiquer pendant leurs périodes
de repos ; au cours de ces périodes, ont été enregistrés des
propos de M. X... par lesquels il s'incriminait lui-même ; il a
été mis en examen et placé en détention provisoire ;
En statuant écartant les moyens de nullité invoqués, alors que
la conjugaison des mesures de garde à vue, du placement de MM.
Y... et X... dans des cellules contiguës, et de la sonorisation
des locaux participait d'un stratagème constituant un procédé
déloyal de recherche des preuves, lequel a amené M. X... à
s'incriminer lui-même au cours de sa garde à vue, la chambre de
l'instruction a méconnu le principe ci-dessus énoncé.
SOPHISME
Cf. Syllogisme judiciaire (in fine)*, Raisonnement judiciaire*.
Le sophisme consiste en un raisonnement ayant toutes les
apparences de la logique, mais qui, en réalité,repose sur une
faille subtile de l'argumentation. Il aboutit donc à une
conclusion fausse, de nature à tromper les magistrats d'un
tribunal répressif.
On propose souvent comme exemple de sophisme cette formule
« À qui profite le crime ? », déjà connue des juristes romains en ces termes «
Is fecit cui prodest ». Elle donne immédiatement à penser que c'est le
bénéficiaire du crime qui en est l'auteur ; ce qui n'est
pourtant nullement certain. Un enquêteur doit sans nul doute se poser
cette question, mais seulement parce qu'elle lui offre une piste
à explorer
; en revanche, un juge ne saurait légitimement s'en tenir
à cet adage pour imputer une infraction à son bénéficiaire.
Cuvillier (Vocabulaire) : Sophisme - Raisonnement captieux, paralogisme fait avec l'intention de tromper.
Lois de Manou (IV, 30) : Les gens qui n'ajoutent pas foi à la Sainte Écriture, ceux qui l'attaquent par des sophismes, ne doivent pas être honorés par le Brâhmane, même d'une seule parole.
Proal (La
criminalité politique) : On peut dire de manière
générale que le sophisme est une maladie de la politique qui,
sous tous les régimes, cherche à masque l'immoralité des moyens
par d'hypocrites maximes...
La haine, disent ceux qui prêchent la haine et la lutte des
classes, est créatrice et libératrice. Quel sophisme !
Versailles 6 juillet 1984 (Rev.Loyers 1985 267) : Le moyen tiré par le locataire principal de ce que le juge des référés a pouvoir de constater le jeu de la clause résolutoire et de ce que l'art. 1184 C.civ. dispose que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des deux parties ne satisfait pas à son engagement est inopérant comme ne procédant que d'un pur sophisme.
Sacha
Guitry (Mémoires d'un tricheur). Dans son introduction, l'auteur met en scène 12 personnes
et développe le raisonnement suivant :
Premier élément - Puisque tu as volé
huit sous dans le tiroir-caisse pour t'acheter des billes, tu
seras privé de champignons dit mon père
;
Second élément - Ces champignons étant mortels, ce soir-là il y
eut 11
cadavres à la maison, mais pas le mien ;
Conclusion : J'étais vivant
parce que j'avais volé huit sous.
(Cette conclusion apparaît manifestement erronée
; il s'agissait d'un simple concours de circonstances : si
j'étais vivant, c'était, non pas parce que, mais simplement à la suite du fait que
j'avais volé).
SORCELLERIE (SORCIER)
Cf. Charlatan*, Divination*, Escroquerie*, Maléfice*, Torture*.
Voir : A. Lacassagne, Histoire de la médecine légale
Voir : Une provençale relaxée par l’Inquisition en 1439
Voir : Un procès fait jadis à une sorcière
Voir : Procès-verbal du crime détestable de trois sorcières surprises au Faubourg Saint-Germain-des-Prez
La sorcellerie consisterait, de la part d’un magicien, à entrer en relation avec le Démon afin d’en obtenir quelque avantage. Certains juristes de
l'Ancien droit y croyaient.
À supposer qu’une telle démarche puisse exister, elle ne pourrait être prouvée puisqu’elle ne relève pas du monde matériel.
On peut toutefois observer que nombre de femmes, jadis
poursuivies du chef de sorcellerie, l'étaient en réalité en tant
que "faiseuses d'anges" dès lors qu'elles utilisaient des herbes
pour provoquer l'avortement (et parfois causer la mort de la
mère) ; cela permettait de limiter le scandale à la coupable,
sans trop nuire à la famille de la victime .
Digeste (48, 8, 13). Modestin : Un sénatus-consulte a ordonné de punir celui qui aura pratiqué des sacrifices pour attirer des malheurs sur autrui.
Soustelle (La vie quotidienne des Aztèques) : Les sorciers étaient sévèrement condamnés par l'opinion et non moins sévèrement punis. Si on les démasquait, ou bien on les sacrifiait devant un autel en leur ouvrant la poitrine pour leur arracher le cœur, ou bien on les pendait. [il semble qu'ils utilisaient une substance, poudre ou fumée, pour endormir leurs victimes puis voler leurs biens].
Riché (La vie quotidienne dans l'empire carolingien) : Charles le Chauve ayant appris que des sorcières et des sorciers avaient causé la mort de plusieurs personnes, demande aux comtes : « de rechercher les responsables de ces crimes. S'ils sont reconnus coupables, hommes et femmes doivent périr comme l'exigences la loi et la justice. S'ils ne sont que suspects, ils seront soumis au jugement de Dieu. Seront frappés de mort, non seulement les coupables, mais aussi les complices, hommes ou femmes, afin de faire disparaître de notre royaume jusqu'au souvenir d'un si grand crime ».
Croyland Chronicle (1477) : Maître John Stacy, que l’on disait astronome, mais qui était en réalité magicien, fomenta un complot avec un certain Thomas Burdet, esquire … sur quoi il fut accusé, parmi d’autres charges, d’avoir fabriqué des figurines de cire et autres artifices afin de causer la mort de Richard, lord Beauchamp, à la requête de sa femme adultère. Après avoir subi un sévère interrogatoire sur la commission de ces actes diaboliques, il avoua des pratiques qui les impliquaient lui et le nommé Thomas Burdet. En conséquence, Thomas fut lui aussi arrêté ; et un jugement de mort fut prononcé contre les deux à Westminster.
Desmaze (Les pénalités anciennes) : La belle et luxuriante Normandie fournissait au XVIIe siècle bon nombre de sorciers. Les paroisses avoisinant Neufchâtel, Aumale, Londinières en avaient surtout le dangereux monopole. Ces charmeurs y renaissaient de leurs cendres à peines refroidies. Vainement, en 1618, la haute justice de Londinières envoyait à la potence huit sorciers ; vingt ans après ; Neufchâtel voyait exécuter à son tour quinze de ces donneurs de sorts… Le 20 octobre 1601, médecin de Saint-Lô est accusé de sortilège ; parce qu’il guérissait plus de malades que ses confrères, et qu’il sauvait les malades de la peste… Il invoqua l’autorité et les préceptes d’Ambroise Paré et fut seulement condamné à la peine du bannissement.
De Ferrière (Dictionnaire de droit, 1779) : Le sorcier est un magicien qui, dans l’opinion de quelques uns, a communication avec le diable, qui lui fait faire des choses merveilleuses… Mais les sortilèges bien approfondis ne sont que des empoisonnements ou des profanations. C’est pourquoi le jugement des accusés de sorcellerie appartient au juge laïc.
Code pénal du Cameroun. Art. 251 — Sorcellerie. Est puni d'un emprisonnement de deux à dix ans et d'une amende... celui qui se livre à des pratiques de sorcellerie, magie ou divination susceptibles de troubler l'ordre ou la tranquillité publics ou de porter atteinte aux personnes, aux biens ou à la fortune d'autrui même sous forme de rétribution.
Nigeria (Code pénal de l'État du Zamfara - Shari'ah). Art. 407. Talisman criminel - Quiconque, en connaissance de cause, détient un fétiche ou un talisman qui est sensé, ou réputé, avoir le pouvoir de protéger une personne en train de commettre une infraction sera puni de la peine de mort.
Indes, juillet 2003 (Télétexte) : Dans un village de Jharkhand, deux femmes accusées de sorcellerie sont mortes après avoir été aspergées d’essence puis brûlées vives dans un champ.
- La pratique de la sorcellerie, que l'on croyait éteinte, revient actuellement en force sur la scène du droit criminel avec la prolifération des marabouts. Elle relève dans ce cas de l’incrimination d’escroquerie.
Cass.crim. 3 juin 1998 (Gaz.Pal. 1998 II Chr.crim. 183) : Pour condamner le prévenu à une peine d’interdiction du territoire français pendant deux ans, l’arrêt attaqué et le jugement qu’il confirme sur ce point énoncent que la sanction est justifiée par la gravité de l’infraction et relèvent à cet égard que l’intéressé, qui exerce une activité clandestine de marabout, «s’est introduit sur le territoire français sans être muni des documents nécessaires, qu’il s’y est maintenu pendant plusieurs mois après que lui a été notifié un rejet de sa demande d’asile politique, d’abord par I’OFPRA puis par la Commission de recours et un arrêté de reconduite à la frontière».
- Bien plus grave : on relève en Grande-Bretagne une progression constante du nombre d'homicides résultant de pratiques exorcistes liées aux croyances diffusées par certaines sectes d'origine africaine. En droit français, on parle alors de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la causer, avec circonstance aggravante de torture (voir v° Torture, Cass.crim. 3 septembre 1996.
Exemple (Le Figaro international 2 mars 2012,
Vanlerberghe) : La sorcellerie africaine était bien au cœur du meurtre à Londres du jeune Parisien Kristy Bamu, a conclu le procès à Londres des
deux assassins, originaires de République démocratique du Congo. Avec son compagnon Eric Bikubi, Magalie Bamu avait soumis son jeune frère Kristy Bamu
(15 ans) à plusieurs jours de tortures qui avaient conduit à sa mort, par noyade dans une baignoire le 25 décembre 2010. Le jury de la cour de justice de
Londres a considéré jeudi soir qu'ils étaient tous deux coupables... Le couple de meurtriers accusait le jeune adolescent parisien d'être un sorcier et
d'avoir jeté un sort sur le plus jeune enfant de la famille. Les violences qu'ils lui avaient infligé étaient destinées d'après eux à servir d'exorcisme,
pour le « délivrer » de l'esprit malin qui le possédait.
Plusieurs experts britanniques mettent en garde sur la recrudescence de ce genre d'affaires liées à des pratiques issues de la sorcellerie africaine.
Lors du procès, Scotland Yard a annoncé avoir enquêté sur 83 affaires de violences sur des enfants liées à des croyances religieuses depuis dix ans. Le
nombre de cas est en croissance constante sur cette période. Malgré quelques autres affaires hautement médiatisées en Grande Bretagne, la police estime
qu'il ne s'agit que du sommet de l'iceberg. « Je sais que ce sont des cas qui sont sous-déclarés », a déclaré le superintendant Terry Sharpe, en charge
de la lutte contre ce genre de crimes à la police métropolitaine de Londres. « Ce sont des crimes cachés. Nos renseignements venant des communautés
concernées montrent que se sont des violences plus courantes que ce que montrent les rapports officiels ».
SORORICIDE
Cf. Atricide*, Famille*, Fratricide*, Homicide*, Meurtre*, Parricide*, Uxoricide*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-244, p.257
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 347, p.229
Voir : Platon, L'homicide (extrait du "Traité des lois")
Le sororicide est une variété aggravée de l’homicide* : il s’agit du meurtre* d’une
sœur par son propre frère ou par sa propre sœur.
- L’actuel Code pénal français ne lui ayant pas consacré une disposition particulière, il constitue un simple meurtre en dépit de la gravité du
trouble social qu’il entraîne.
Horace meurtrier de sa sœur Camille (Corneille,
« Horace ») :
Camille :
Rome, l’unique objet de mon ressentiment !
Rome, à qui vient ton bras d’immoler mon amant !
Rome qui t’a vu naître et que ton cœur adore !
Rome enfin que je hais parce qu’elle t’honore !…
Puissé-je de mes yeux … voir ses maisons en cendres
Voir le dernier Romain à son dernier soupir,
Moi seule en être cause, et Mourir de plaisir !
Horace (mettant la main à son épée et poursuivant sa sœur) :
C’en est trop, ma patience à la raison fait place ;
Va dedans les enfers plaindre ton Curiace.
SOUDOYER - Voir : Corruption de fonctionnaire*, Instigation*, Subornation*.
SOUFFLET
Cf. Affront*, Camouflet*, Gifle*, Honneur*, Voie de fait*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° II-319, p.378
Alors que la Gifle* est un coup donné, à main ouverte, sur la joue d’une personne en vue de la corriger ; le soufflet est un simulacre de coup porté, du revers de la main, sur la joue d’une personne en vue de lui faire affront. Ce dernier, pour autant qu’il soit encore de mode, relèverait dès lors de la notion d’injure plutôt que de celle de violence.
Von Jhering (L’esprit du droit romain) : Selon la loi des XII Tables, la composition pour un soufflet est payée par 25 as.
Bentham (Traité de législation civile et pénale) : L'ancienne loi romaine qui infligeait un écu de dédommagement pour un soufflet reçu ne mettait pas l'honneur en sûreté. La réparation n'ayant pas de commune mesure avec l'outrage, son effet était précaire, tant comme satisfaction privée, que comme peine publique.
Jousse (Traité de la justice criminelle) : Un soufflet est regardé comme une injure des plus graves, surtout entre personnes qualifiées.
Corneille, « Le Cid » :
- Don Diègue : Viens, mon fils, viens mon sang, viens réparer ma honte ; Viens me venger.
- Don Rodrigue : De quoi ?
- Don Diègue : D’un affront si cruel, Qu’à l’honneur de tous deux il porte un coup mortel : D’un
soufflet.
Il est une preuve historique que le soufflet consiste un coup léger, n'emportant aucun trouble physique, et qui n'est punissable que si l'agent a eu l'intention d'humilier sa victime. Jadis, lorsqu'un maître affranchissait un esclave devant les magistrats, il lui donnait publiquement un petit soufflet pour confirmer matériellement la déclaration qu'il venait de faire.
Bourg Saint-Edmes (Dictionnaire de la pénalité) : Affranchissement. En présentant son esclave au magistrat, le maître le tenait par la main, ensuite il le laissait aller, et lui donnait en même temps un petit soufflet sur la joue, ce qui était le signal de la liberté ; puis le consul ou le préteur frappait doucement l'esclave de sa baguette, en lui disant : " dis te esse liberum more quiritum " [je déclare que tu es un homme libre dans la tradition romaine].
SOUPÇON
Cf. Agissements suspects*, Calomnie*, Chose suspecte*, Conjecture*, Diffamation*, Doute*, Intime conviction*, Mort suspecte*, Suspect*.
- Notion. Littré définit le soupçon comme le fait de ressentir une opinion défavorable, sur une personne ou sur une chose, tout en éprouvant un certain doute. Cicéron voyait dans le soupçon une faute morale, lorsqu’il repose sur de trop légers indices.
Pontas (Dictionnaire de cas de conscience) : Le soupçon est une pensée douteuse que l’on a de la bonne conduite ou de la probité de quelqu’un, et qui incline à en former un jugement désavantageux.
St Thomas d'Aquin (Somme théologique) : Comme le dit Cicéron, le soupçon doit être considéré comme une faute lorsqu'il n'est fondé que sur de légers indices... Mais il peut provenir d'une longue expérience et être retenu... s'il approche de la certitude, laquelle est contraire à la notion de soupçon.
Montesquieu (Considérations sur les causes de la grandeur des romains et de leur décadence) : Comme il n’est jamais arrivé qu’un tyran ait manqué d’instruments de sa tyrannie, Tibère trouva toujours des juges prêts à condamner autant de gens qu’il en put soupçonner.
Exemple (Ouest-France 14 novembre 2008) : Les soupçons pesant sur le V... se précisent. Les inspecteurs du Centre de sécurité des navires de Brest ont découvert des installations non autorisées à bord de ce cargo libérien. Débouchant sur l'arrière et à tribord, elles offrent la possibilité de rejeter en mer des eaux mazouteuses sans qu'elles soient traitées. Une mesure de rétention du navire a été prise. Celui-ci ne pourra pas reprendre la mer tant que son armateur n'aura pas fait les travaux nécessaires pour le mettre en conformité.
- Le soupçon en droit pénal spécial. Jeter délibérément le soupçon du public sur une personne innocente constitue une calomnie ou une diffamation selon la législation considérée.
Code pénal suisse. Art 173 : 1. Celui qui, en s’adressant à un tiers, aura accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l’honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, celui qui aura propagé une telle accusation ou un tel soupçon, sera, sur plainte, puni de l’emprisonnement pour six mois au plus ou de l’amende.
Cass.crim. 15 octobre 1985 Gaz. Pal., Rec. 1986 somm. p. 124) : Lorsque des imputations ont été formulées d’une manière vague de nature à faire planer le soupçon sur plusieurs personnes, chacune de celles-ci a qualité pour demander la réparation du préjudice qui lui a été ainsi causé.
- Le soupçon en procédure pénale. Le soupçon de l’existence d’une infraction suffit à autoriser des mesures conservatoires de la part de l’autorité publique ; mais il ne saurait justifier une condamnation pénale, car le doute doit bénéficier à la défense.
Thomas d’Aquin (Somme théologique II-II q.60 a.3) : Qu’un juge envisage de condamner sur un simple soupçon, cela relève directement de l’injustice… Tant que des indices de perversité ne sont pas évidents chez un homme, nous devons le tenir pour vertueux et interpréter en bonne part ce qui est douteux.
Carrara (Cours de droit criminel - éd. française) : La justice ne peut pas imputer une infraction sur un simple soupçon.
Bluntschli (Droit public général) : Une saisie des papiers personnels n’est admissible que s’il y a soupçon grave de crime, et sous des formes protectrices.
Cass.crim. 23 mars 1992 (Gaz.Pal. 1992 II somm. 491) : Il y a délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au délit.
De plus, pour faire échec au blanchiment d'argent, il a justement été décidé par les autorités européennes qu'un avocat est tenu de déclarer aux organismes compétents (tel le "tracfin") les soupçons que peuvent lui inspirer certaines situations peu claires où on lui demande d'intervenir.
Cour EDH . 6 décembre 2012, n° 12323/11 (Gaz.Pal. 11 décembre 2012 p.13 note Repiquet) sommaire : L'obligation de déclaration de soupçon poursuit un but légitime de la défense de l'ordre et de la prévention des infractions pénales dès lors qu'elle vise à lutter contre le blanchiment de capitaux et les infractions pénales associées, et qu'elle est nécessaire pour atteindre ce but.
SOURCES DU DROIT
Cf. Arrêté*, Avis de la Cour de cassation*, Capitulaire*, Circulaire*, Constitution*, Convention européenne des droits de l'homme*, Coutume*, Décret*, Doctrine*, Droit (droit naturel)*, Jurisprudence*, Législateur*, Légistique*, Loi*, Normes (hiérarchie des)*, Principes généraux*, Règle*, Règlement*, Traités*, Usages*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd) - ouvrage consacré à l'élaboration des règles de droit pénal.
Voir : J-P. Doucet, « Les tribunaux répressifs peuvent-ils prononcer une condamnation pénale en s'appuyant sur une incrimination légale formulée en termes inconstitutionnels ? »
Voir : J-P. Doucet, L'entrée en vigueur d'une nouvelle loi d'incrimination
Voir : J-P. Doucet, La doctrine est-elle une source du droit ?
Voir : La jurisprudence est-elle une source du droit ?
- Notion. On appelle traditionnellement « sources du droit » les diverses « fontaines » d’où proviennent les normes juridiques. Elles varient en importance selon les époques et en raison des dispositions de la Constitution locale. Mais, à des degrés variables, presque toutes se retrouvent dans chaque pays.
Alland et Rials (Dictionnaire de la culture juridique), v° Sources du droit par Deumier et Revet) : Classiquement utilisée, l’expression « sources du droit » n’est jamais étudiée pour elle-même mais pour ses éléments constitutifs. Le terme « source » désigne « l’endroit où l’on puise » et, par extension, les « principe, cause, origine ». Appliquée au Droit (la métaphore viendrait de Cicéron), l’idée de « source » désigne les « forces d’où surgit le droit objectif », ce qui l’engendre.
Exemple (Télétexte du 6 février 2005) : Des ayatollahs chiites irakiens, après que leur liste d’alliance ait remporté les élections générales du 20 janvier dernier, ont réclamé que la source de la législation irakienne soit l’Islam.
- Diverses sources du droit.
Au premier rang figurent les règles fondamentales régissant la société concernée (Constitution*, Principes généraux du droit*, voire Coutumes*).
Suivent les dispositions émanant des trois pouvoirs temporels : législatif (Loi*), exécutif (Règlements*, Décrets*, Arrêtés*, voire Circulaires*) et judiciaire (Jurisprudence* et même autrefois Arrêts de règlement*).
Ces sources officielles ne doivent pas faire oublier les principes éternels de justice et d’équité qui composent le Droit naturel* ; ils qui doivent toujours servir de guide au législateur, aux juges et à la Doctrine*.
Un peu en marge, figurent : d'une part les Traités internationaux, dont l’autorité est supérieure aux lois ; d'autre part les Normes* et les Usages*, qui ne peuvent guère que compléter lois et règlements.
Cass.crim. 26 septembre 1994 (Bull.crim. n° 303 p.737) : L’autorité du Traité des Communautés européennes est telle, dans la hiérarchie des sources du droit, qu’il appartient au juge répressif d’écarter l’application d’un texte d’incrimination de droit interne lorsqu’il apparaît clairement que ce dernier méconnaît une disposition du Traité ou un texte pris pour son application.
La dernière née des sources du droit est la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, qui s'impose immédiatement aux tribunaux des États adhérents à la Conv.EDH. On peut s'inquiéter du fait que cette jurisprudence, parfois discutable, ne fasse l'objet d'aucun contrôle.
Cass. (Ass.plén.) 15 avril 2011 (Gaz.Pal. 4 mai 2011 p.28) : Les États adhérents à la Conv.EDH sont tenus de respecter les décisions de la Cour EDH, sans attendre d'être attaqués devant elle ni d'avoir modifié leur législation.
Le fait de falsifier une loi, une ordonnance, un arrêté... constitue le crime de faux en écritures publiques.
Digeste de Justinien (48, 10 32 pr.) Modestin : Aujourd'hui ceux qui altèrent par fraude des édits donnés au public, sont punis de la peine de faux.
- Voir la Table des rubriques :
Constitution et Principes généraux du droit, voir : Textes fondamentaux, et Adages classiques
Législation, voir : Code pénal, Code de procédure pénale, lois spéciales
Jurisprudence, voir : Grands arrêts
Doctrine, voir : Science criminelle
SOURD-MUET
On s’est longtemps demandé si la surdi-mutité faisait obstacle, quant au fond à la responsabilité pénale, et quant à la forme à la possibilité d’une inculpation. La réponse à ces questions dépend à l’évidence du cas d’espèce, et n’appelle pas de réponse abstraite et générale de la part du législateur.
Villey (Droit criminel) : En vertu des principes, le sourd-muet devra être à l’abri de la peine s’il n’a pas eu l’intelligence nécessaire pour comprendre le caractère délictueux de l’acte qu’il a commis.
Garraud (Précis de droit criminel n° 121) : La surdi-mutité n'est point par elle-même exclusive, chez celui qui en est atteint, du discernement, c'est-à-dire de l'intelligence de ce qui est permis ou défendu : par conséquent, elle n'est pas une cause d'irresponsabilité pénale.
Pour la bonne forme la loi doit toutefois prévoir, au profit d’une personne atteinte de surdité (qu’il s’agisse d’un plaignant, d’un prévenu ou d’un témoin), le droit absolu d’être assistée d’un interprète (art. 63-1 C.pr.pén.).
Ordonnance criminelle de 1670 (T XVIII, art. 1er) : Si l’accusé est muet, ou tellement sourd qu’il ne puisse ouïr, le juge lui nommera d’office un curateur qui saura lire et écrire.
Cass.crim. 15 décembre 1999 (Gaz. Pal., Rec. 2000, jur. p. 1495) : L’interprète a prêté son concours au témoin, qui est un sourd-muet ne sachant pas écrire, chaque fois qu’il a été nécessaire. La déposition est régulière.
SOUSCRIPTION
Cf. Amende*, Délits pénaux – délits de conséquence*, Apologie*, Jugement*, Mépris (des décisions de justice)*, Peine*, Personnalité des peines*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-116, p.407
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-127, p.368 / n° II-II-231, p.520
Pour un exemple de souscription, voir le Cas pratique n° 46
- Notion. Il s'agit ici du fait de lancer une souscription destinée à couvrir la peine d’amende prononcée contre l'auteur d'une infraction à la loi pénale.
Bentham (Traité de législation civile et pénale) : En 1760, un libraire fut mis au pilori pour avoir vendu quelque ouvrage impie ou séditieux : une souscription ouverte en sa faveur pendant l'exécution même lui valut plus de cent guinées. Quel affront pour la justice !
Bourg Saint-Edme (Dictionnaire de la pénalité) : Deux actes du Parlement défendent de faire représenter des opéras dans les maisons particulières sans la permission du Lord chambellan, et condamnent à une amende de 50 livres sterling ceux qui y donnent des représentations pour de l'argent. Il signor Guadigni ayant refusé de s'engager avec les entrepreneurs de l'Opéra de Londres, fut attaqué en justice par ceux-ci, pour avoir chanté dans un opéra de société. On condamna Guadigni à l'amende portée par la loi, et les personnes qui l'avaient employé la payèrent pour lui ; mais aussitôt ces mêmes personnes, pour ne pas être privées du plaisir de l'entendre et de le voir jouer sur leur théâtre, firent entre elles une souscription pour payer six nouvelles amendes.
- Science criminelle. Dès lors qu'un prévenu, reconnu coupable de l'infraction reprochée par l'accusation, s’est
vu infliger une peine, il doit l’assumer personnellement. C’est pourquoi nombre de législateurs interdisent de lancer une souscription en faveur d'un
condamné. Lorsqu’un tel fait est incriminé il peut l’être, soit en tant que délit de conséquence de l’infraction venant d’être sanctionnée, soit en tant
qu’outrage au pouvoir judiciaire.
Dans le même but, il est interdit de souscrire une assurance
afin de se garantir contre les Amendes* pénales dont on pourrait
faire l'objet dans l'avenir.
Tableau des incriminations protégeant la fonction judiciaire (selon la science criminelle)
Tableau des incriminations protégeant le pouvoir judiciaire (selon la science criminelle)
Guillot (Encyclopédie Dalloz, éd. 1978, v° Presse) n° 508 : Ce que prohibe cette incrimination, c'est la publicité donnée à l'ouverture d'une souscription ou à l'annonce de cette ouverture, constituant, soit une atteinte à l'exemplarité de la peine, soit une apologie déguisée du condamné et de ses actes.
Code pénal du Liechtenstein de 1859 : Quiconque organise des collectes ou des souscriptions en vue de couvrir des amendes pécuniaires, prononcées à la suite d’un acte punissable, se rend coupable d’une contravention.
Code pénal grec de 1950, a. 194 : Celui qui, dans l’intention d’exprimer sa désapprobation au sujet d’un jugement infligeant une sanction pécuniaire … a sollicité une contribution du public est puni d’une peine d’emprisonnement de six mois.
Code pénal de Côte d'Ivoire. Art. 175 2° : Est puni des peines... quiconque organise des collectes en vue du paiement des condamnations pécuniaires prononcées pour l'une de ces infractions.
Qu'il ait été reconnu coupable d'un délit au regard de la loi pénale ou d'un péché au regard de la loi religieuse, le condamné doit purger personnellement sa peine.
Vittrant (Théologie morale) : Le fidèle qui s'est confessé est tenu d'accomplir la pénitence qui lui a été définitivement donnée, et de la manière qui lui a été prescrite... La pénitence doit, bien entendue, être faite par l'intéressé et non par un autre.
- Droit positif français. L’art. 40 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 interdit d’ouvrir ou d’annoncer publiquement des souscriptions ayant pour objet d’indemniser des amendes, frais et dommages-intérêts prononcées en matière criminelle ou correctionnelle.
Goyet (Droit pénal spécial - 8e éd.) : En vertu de l'art.40 il est interdit d'ouvrir ou d'annoncer publiquement des souscriptions ayant pour objet d'indemniser des amendes, frais et dommages-intérêts prononcés par des condamnations judiciaires en matière criminelle ou correctionnelle.
Cass.crim. 21 février 1891 (Gaz.Trib. 8 mars 1891) : La prohibition d’ouverture de souscriptions publiques ayant pour objet d’indemniser des amendes … s’étend aux amendes prononcées pour infraction à la loi sur l’exercice de la médecine qui sont déférées à la juridiction correctionnelle.
Alger 13 mai 1948 (D. P. 1948 somm. 34) : L’art. 40 de la loi du 29 juillet 1881 a été édicté en vue d’empêcher de rendre public le fait d’indemniser un individu de tout ou partie des condamnations qu’il a encourues, le terme souscription doit être entendu dans un sens large et couvrir tout procédé aboutissant au même résultat ; tombe, notamment, sous le coup de la loi, la quête faite au profit d’un condamné, au cours d’une réunion publique organisée pour protester contre la condamnation.
Exemple (Ouest-France 18 janvier 2015) : Le polémiste Dieudonné a été condamné hier à 6.000 € d'amende pour avoir lancé sur Internet un appel aux dons pour payer de précédentes amendes. La loi punit le fait d'ouvrir ou d'annoncer publiquement des souscriptions ayant pour objet d'indemniser des amendes prononcées par des condamnations pécuniaires.
SOUSTRACTION
Cf. Dépôt public*, Détournement*, Possession*, Vol*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-108, p.156
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-225, p.62
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° II-217, p.320 / n° IV-2, p.543 / n° IV-109 p.555
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-147, p.399
Tableau des incriminations assurant le bon fonctionnement de l'administration (en droit positif français)
- Notion. La soustraction consiste dans le fait de dessaisir une personne d’un bien qu’elle détient, sans son accord, par la violence ou par la ruse.
Dupin (Règles de droit et de morale) parle du fait de porter la main sur la chose de son prochain pour consommer la soustraction.
Garçon (Code pénal annoté), plus technique : La soustraction est une prise de possession « invito domino ».
- Droit positif français. Cet acte constitue notamment l’élément matériel du délit de vol.
Gattegno (Droit pénal spécial) : Au sens propre, soustraire c’est faire passer la possession d’un objet de la main de son détenteur légitime dans celle de l’auteur du délit, c’est « prendre », « enlever ». Il s’agit d’un acte matériel.
Cass.crim. 27 mai 1999 (Gaz.Pal. 1999 II Chr.crim. 122) : Toute appropriation de la chose d’autrui, contre le gré de son propriétaire ou légitime détenteur, caractérise la soustraction frauduleuse constitutive de vol (art. 379 ancien et 311-1C.pén.).
Il peut également constituer le délit de soustraction de biens par une personne exerçant une fonction publique (art. 432-15 C.pén., art. 169 ancien), le délit de soustraction de biens contenus dans un dépôt public (art.433-4 C.pén., 254 et 255 anciens), ou encore le délit de soustraction d’une pièce produite en justice (art. R.645-7).
Cass.crim. 7 novembre 1991 (Gaz.Pal. 1992 I somm. 103) : Pour renvoyer à bon droit le défendeur devant la Cour d’assises sous l’accusation de complicité et de recel de soustraction de deniers publics, la Chambre d’accusation a pu relever que l’inculpé aurait participé à un circuit de fausses factures réglées avec des deniers publics détournés par un dépositaire public de fait et qu’il aurait conservé personnellement une partie de ces fonds.
Rapprocher le fait pour une personne de « se soustraire » à une obligation légale ou à un mandement de justice, p.ex. le fait de se dérober à une décision de reconduite à la frontière.
Cass.crim. 11 janvier 1996 (Gaz.Pal. 1996 I Chr.crim. 75) : Le seul fait de se placer sous un régime fiscal indu, dans l’intention de se soustraire à l’impôt, constitue le délit prévu par l’article 1741 du Code général des impôts.
SOUSTRACTION D'ENFANT - C'est le fait d'enlever un enfant en méconnaissance du droit de garde du père ou de la mère à qui il a été confié (art. 227-7 et 227-8 C.pén.).
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents »,
- soustraction par un ascendant n° 519 2°, p.344
- soustraction par
toute autre personne n° 519 3°, p.345
SOUTENEUR
Cf. Maquereau*, Proxénète*, Ruffian*, Vagabondage spécial*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-113 et s., p.170 et s.
Tableau des incriminations luttant contre la dépravation des moeurs (selon la science criminelle)
Tableau des incriminations luttant contre la dépravation des mœurs (en droit positif français)
Dans le langage courant on nomme souteneur un individu qui prétend assurer la protection d’une personne se livrant à la Prostitution* pour justifier qu’il vit à ses dépens (on dit aussi maquereau ou maquerelle). Ce mot est employé par la loi pénale belge (la loi canadienne parle d’entremetteur) ; mais il ne l’est pas par le législateur français, qui lui préfère le terme équivalent de Proxénète*.
Joly (Le crime, étude sociale) : D'une manière générale, la prostitution masculine a la même organisation que la prostitution féminine... Toutes les deux ont leurs proxénètes, leurs maisons, leurs souteneurs, leurs recruteurs, prêts à toutes les complaisances comme à toutes les complicités.
Corre (Les criminels) : Que de meurtres commis par des amants-souteneurs sur des filles publiques !
Rigaux et Trousse (Les crimes et délits du Code pénal belge) : Vivre à la charge d’une personne qui se livre à la prostitution, tel est le trait caractéristique du souteneur.
Constant (Manuel de droit pénal) : La loi qui définit le souteneur ne fait pas de distinction de sexe. Par conséquent, une femme peut être condamnée comme souteneur d’une prostituée aux dépens de laquelle elle vit.
SOUVERAIN (POUVOIR)
Cf. Arbitraire*, Discrétionnaire*, Séparation des pouvoirs*.
Le pouvoir souverain est l’autorité qui appartient en propre à un législateur, à un membre du gouvernement, à un fonctionnaire, à un tribunal ou à un magistrat. Ainsi, les juges du fond apprécient souverainement, tant l’existence et le sens des faits reprochés, que le montant du dommage subi par la victime et de l’indemnité qui lui est due.
Locke (Traité du gouvernement civil) a défendu une thèse dont l’expérience a montré l’extrême dangerosité : Le pouvoir législatif est le pouvoir souverain. Car ceux qui peuvent proposer des lois à d’autres doivent nécessairement leur être supérieurs : et puisque l’autorité législative n'est l’autorité législative de la société politique que par le droit qu’elle a de faire des lois pour tous les membres de la société … il est nécessaire que le pouvoir législatif soit souverain, et que tous les autres pouvoirs des différents membres de l’État dérivent de lui et lui soient subordonnés.
Cass.crim. 9 octobre 1996 (Gaz.Pal. 1997 I Chr.crim. 51) : La Cour d’appel n’a fait qu’user, par des motifs exempts d’insuffisance ou de contradiction, de son pouvoir souverain
d’appréciation des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus.
Cass.crim. 11 février 1985 (Bull.crim. n° 67 p.174) : La Cour d’appel n’a fait qu’user de son pouvoir souverain d’apprécier le montant de l’indemnité due aux parties civiles, dans les limites de leur demande.
SPADASSIN
Cf. Assassinat*, Sicaire*, Stipendier*, Tueur*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° I-319, p.173 / n° I-331, p.184.
Un spadassin était un escrimeur, un bretteur, un ferrailleur particulièrement habile qui se plaisait à livrer des duels. Les moins scrupuleux en venaient aisément à devenir des Tueurs* à gages.
Bautain (Manuel de philosophie morale) : L'homme d'honneur dans la société saura, surtout s'il est chrétien, se faire respecter par d'autres voies qu'un spadassin.
Du Boys (Histoire du droit criminel) note qu'un spadassin n'avait pas les qualités légales pour être choisi pour champion dans un duel judiciaire.
Garçon (Code pénal annoté, art. 328) : Un
spadassin avait été soudoyé pour commettre un assassinat. Pour une raison quelconque, il n’accomplit pas son crime et avoua tout à celui auquel il devait
donner la mort, ajoutant qu’on lui avait promis cinquante ducats. Effrayée du danger qu’elle courait, la personne ainsi menacée en donna cent au
spadassin qui tua son premier instigateur.
[question d’école : l’assassinat du premier instigateur était-il couvert par la légitime défense, sachant que ses manœuvres n’étaient pas
punissables faute de commencement d’exécution ?]
SPÉCULATION
Cf. Agiotage*.
- Notion. Au sens premier la spéculation consiste à effectuer des opérations commerciales ou financières, notamment en bourse, en anticipant d’éventuelles hausses ou baisses du marché.
Savatier et Leloup (Droit des affaires) : La spéculation. Pour beaucoup des habitués de la Bourse, il s’agit toujours d’une sorte de jeu. Il tend à deviner, d’avance, l’évolution des cours d’après les prévisions de la conjoncture ; et, dès avant qu’ils ne soient fixés, à vendre ou à acheter avantageusement. Ainsi joue-t-on à la hausse ou à la baisse.
- Science criminelle. La spéculation se situe dans la logique d’une économie de marché. Elle ne peut de ce fait être contrôlée que par la voie d'incriminations de police commerciale, assurant notamment la transparence et la loyauté du marché ; on parle alors de l'incrimination de la spéculation illicite.
Ripert et Roblot (Traité de droit commercial) : La spéculation est de l’essence des marchés de bourse. Il faut fermer la bourse si on veut la supprimer. Mais il existe une spéculation illicite qui consiste … notamment à répandre sciemment dans le public des faits faux ou calomnieux pour troubler les cours.
Ces incriminations doivent être rigoureuses, car la spéculation illicite est de nature à nuire, non seulement aux intérêts privés, mais encore à l'économie nationale.
Proal (Le crime et la peine) : Au siècle dernier un grand, nombre d’études de notaires sont devenues des maisons de banque, de jeu et de spéculations, où se sont englouties les économies de bien des familles.
Lombroso (Le crime politique et les révolutions) parle des crises économiques produites par les spéculations exagérées sur les chemins de fer.
Le législateur doit incriminer les diverses formes de manœuvres frauduleuses, notamment la diffusion de fausses informations.
Code pénal du Guatemala. Art. 342 : Celui qui, en répandant de faux bruits, en propageant de fausses nouvelles, ou en usant de tout autre stratagème semblable, détourne ou fausse les lois économiques naturelles de l'offre et la demande, ou porte atteinte aux conditions ordinaires du marché, et produit par ces manoeuvres une augmentation ou une baisse injustifiée de la valeur de la monnaie ayant cours légal, ou du prix courant des marchandises, des rentes publiques ou privées, des valeurs cotables en bourse, des salaires ou de quelqu'autre chose qui peut faire l'objet d'un contrat, sera sanctionné de six mois deux ans de prison...
Code pénal d’Andorre. Art. 133 : Quiconque, abusant de l’inexpérience ou de l’ignorance d’autrui, l’aura incité malicieusement à effectuer des investissements ou des opérations spéculatives notoirement risqués ou évidemment disproportionnés avec sa fortune, sera puni d’un emprisonnement d’un maximum de deux ans et six mois.
Code pénal suisse. Art. 165 : Le créancier qui aura entraîné le débiteur à se livrer à des spéculations hasardées n’aura pas le droit de porter plainte.
Montesquieu (Considérations sur les causes de la grandeur des romains et de leur décadence) : Comme il n’est jamais arrivé qu’un tyran ait manqué d’instruments de sa tyrannie, Tibère trouva toujours des juges prêts à condamner autant de gens qu’il en put soupçonner.
La spéculation illicite était autrefois sanctionnée en France par l’art. 419 du Code pénal de 1810. Elle l’est aujourd’hui par les art. L-420-1 et s. du Code de commerce visant les pratiques anticoncurrentielles.
Goyet (Droit pénal spécial) : Pour assurer le libre jeu de l’offre et de la demande et pour empêcher les variations injustifiées des cours des marchandises, les art. 419 et s. du Code pénal (ancien) frappent de peines correctionnelles les individus qui exercent sur le marché une action destinée à leur procurer un gain anormal.
Paris 28 juin 1984 (Gaz.Pal. 1984 II 649) : La spéculation, même hasardeuse, n’est pas en elle-même un délit, sauf en cas de manipulation des cours.
SPHÈRE D’INTIMITÉ - Voir : Intimité*, Vie privée*.
SPOLIATION (Spolier, Spoliateur)
Cf. Exaction*, Pillage*, Proscription*, Vol*.
- Notion. Le verbe
spolier est presque synonyme de voler ; il vise cependant deux situations
distinctes.
Dans son sens large il désigne le fait, soit pour un ennemi
vainqueur, soit par un homme ou un clan politique ayant acquis un pouvoir
absolu, de déposséder quelqu'un, et plus généralement le clan
averse, de l'ensemble de ses biens. Ainsi Sylla, après avoir
proscrit ses adversaires, décida la confiscation de l'ensemble
de leurs biens. La Révolution française en a fait un instrument
de son maintien au pouvoir.
Dans un sens plus étroit il ne vise guère que la spoliation
d'hérédité, ou, plus rarement, des manœuvres commerciales visant à ruiner
autrui.
Dictionnaire Larousse des synonymes : Spolier est un terme didactique ; c'est déposséder, dépouiller par ruse ou par force.
Taine (Les origines de la France contemporaine) La Révolution - La fin du Gouvernement révolutionnaire : Sur le squelette de la France desséché par cinq ans de spoliations, comment nourrir la fourmilière armée qui, depuis deux ans, ne subsiste qu'en dévorant les nations voisines... Seule une guerre prolongée peut alimenter les armées, soutenir au pouvoir la faction régnante.
J.Minois (La Révolution Française) : Pour ce qui est de la « nationalisation des biens du clergé », il s'agit d'un terme pudique pour qualifier une véritable spoliation, d'autant que les 9/10 de ces biens étaient le fruit de la donation des fidèles. Ces offrandes, destinées au clergé, étaient des biens privés, qui ne lésaient personne, et sur lesquels l'État n'avait nul droit de regard.
Mallet (Histoire - Cours de 6e, 1906). Précisons que la proscription d'une personne emporte le plus souvent spoliation. La vengeance de Sylla fut terrible. Il dressa une liste de ses ennemis et il fut permis de les tuer ; leurs biens furent confisqués et vendus ; leurs enfants furent exclus à jamais des magistratures. Pendant six mois, les soldats égorgèrent et pillèrent ; les amis de Sylla achetèrent à vil prix les biens des condamnés. On obtenait un domaine de 20.000.000 [francs-or] pour 570 et le total des confiscations monta malgré cela à plus de 100.000.000. Les noms des condamnés étaient affichés (proscrits) ; ces exécutions ont gardé le nom de proscriptions.
- Droit naturel. La Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a placé le droit de propriété parmi les valeurs devant être protégées par les pouvoirs publics.
Protocole n° 1 du 13 mai 1955. Art. 1 Respect du droit de propriété : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour quelque cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international...
Cour
EDH 9 décembre 1994 (D.1996 329 note Fiorina), décision rendue
relativement à la spoliation des Monastères orthodoxes par le
Gouvernement grec : Le droit des monastères requérants au
respect de leurs biens subit une ingérence qui s'analyse en une
privation de propriété au sens de l'art.1er...
Une mesure d'ingérence dans le droit au respect des biens doit
ménager un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt
général de la communauté et les impératifs de la sauvegarde des
droits fondamentaux de l'individu...
Exemple de spoliation (Ouest-France 22 janvier 2016) : Le ministre israélien de la Défense, qui administre la Cisjordanie occupée, a confirmé son intention de saisir 154 ha de terres fertiles dans la vallée du Jourdain, près de Jéricho. Israël utilise, pour maquiller ces spoliations des terres palestiniennes, un tour de passe-passe juridique, qui consiste à déclarer ces zones "terres d'État". Autrement dit à décréter qu'elles n'ont pas de propriétaire privé. Elles sont ensuite attribuées à des colonies juives. Cette saisie est condamnée par l'ONU.
- Domaine ordinaire. On parle d'abord de spoliation à propos des manœuvres employées par un individu sans scrupule, afin de priver une personne de son patrimoine ou d'un héritage qui lui revient de droit.
Digeste de Justinien, 47, XVIII 1, 1. Ulpien : Les spoliateurs, qui sont des voleurs atroces (c'est ce que signifie le mot expoliator), ont coutume d'être condamnés aux travaux publics à perpétuité, ou pour un temps.
Décret
haïtien du 30 septembre 1983 : Considérant que la
multiplicité des cas de spoliation commise après l'exécution des
décisions de justice rendues en matière immobilière, met en
péril l'institution de la propriété privée garantie par la
Constitution ; Considérant que, pour le maintien de l'ordre
public et le respect des décisions de justice, il y a lieu
d'ériger la spoliation en délit...
Art. 1er.- Sera reconnu coupable du délit de spoliation et puni
d'un emprisonnement d'un an à trois ans et d'une amende ...
quiconque par force ou violence, se sera emparé d'un immeuble,
maison d'habitation, parcelle ou pièce de terre, d'où il a été
expulsé en exécution d'un jugement définitif.
Cons d'État 26 janvier 2000 (Gaz.Pal. 2000 2684) : L'intéressé s'est rendu coupable pendant une durée de trois mois de spoliations, destructions et détournements répétés de paquets postaux. Eu égard à la nature des missions de La Poste et aux obligations incombant à ses agents en ce qui concerne l'inviolabilité des correspondances ... le président du conseil d'administration de La Poste n'a pas entaché son appréciation d'une erreur manifeste, en lui infligeant la sanction de la révocation.
Lyon 28 juillet 1997 (Gaz.Pal. II Chr.crim. 189) : Une telle manipulation mentale est de nature à faciliter la spoliation des sujets qui en sont victimes et constitue une forme de manœuvre frauduleuse.
Paris 16 mars 1987 (D. 1987 IR 95) : Le recel successoral s’entend de toute fraude commise volontairement par un indivisaire en vue de diminuer en apparence l’actif de la communauté pour spolier son coïndivisaire, par exemple en dissimulant sciemment l’existence de biens communs et sujets au partage.
- Domaine historique. Par ailleurs on parle de spoliation lorsqu'un individu sinon le Gouvernement en place, profite de sa position de force sur le plan économique, social, politique ou législatif pour déposséder une personne physique ou morale, ou toute une catégorie de la population, de l’un de ses biens voire de l'ensemble de son patrimoine.
Plutarque (Vie de Crassus) : Les calamités publiques furent pour Crassus une large source de revenus. Ainsi lorsque Sylla, maître de la ville, mettait en vente les biens de ses victimes, qu'il considérait comme les dépouilles d'ennemis vaincus, et dont il voulait faire partager l'usurpation au plus grand nombre possible de romains et surtout aux plus considérables, Crassus ne refusa ni d'accepter un don, ni d'acheter aucun de ces biens [ce précédent a dû inspirer la notion de « Biens nationaux » sous la Révolution de 1789].
Proal (La criminalité politique) Chap. IX, La corruption des lois : La politique a transformé les lois en instruments de proscription et de spoliation. Pour tuer et voler, les peuples barbares se servent des armes ; les peuples qui se croient civilisés se servent des lois. On assassine par les lois, comme à coups de fusil ; on démolit par les lois comme à coups de haches ; on vole par les lois comme au coin d'un bois. L'assassinat et le vol ont été convertis en lois : la proscription et la spoliation ont revêtu des formes légales.
Ahrens (Cours de droit naturel) : En Irlande, la force brutale du vainqueur britannique a spolié les vaincus de leur propriété.
Cassation civile du Luxembourg 15 octobre 1947 (Pas.lux. 14 347) : Les mesures de dépossession prises par l'occupant l'ont été en violation de notre Constitution et de la quatrième convention de La Haye du 18 octobre 1907 sur les lois et coutumes de la guerre sur terre. Loin de reconnaître les mesures de spoliation édictées par l'occupant, le législateur luxembourgeois les a au contraire assimilées au pillage prévu aux articles 128 à 130 et 132 du Code pénal.
Bourg Saint-Edme (Dictionnaire de la pénalité) : Les proscriptions religieuses, les proscriptions politiques entraînaient toujours la confiscation ; l'histoire de tous les peuples civilisés ou barbares n'en montre que de trop nombreux exemples. La Révolution se fit une ressource de ce moyen odieux ; on entendit dire dans le sein de la Convention : " Le bourreau bat monnaie sur la place de !a Révolution". Le Code pénal était souillé de cette peine spoliatrice.
Bautain (Manuel de philosophie morale) : Sauf la ressource odieuse et passagère de la spoliation des autres peuples par la guerre, l'État ne peut donner aux uns qu'en prenant aux autres.
Proal (La criminalité politique) : Pour acquérir la popularité ou la conserver, un grand nombre d'hommes politiques ne reculent devant aucun mensonge. Ils suivent docilement toutes les passions de la foule ... si elle exige des spoliations, ils s'empresseront de satisfaire toutes les convoitises et toutes les haines.
Taine (Les origines de la France contemporaine) : Les violences de la Révolution avaient été trop grandes ; il y avait eu trop de spoliations, d'emprisonnements, d'exils et de meurtres, trop d'attentats contre toutes les propriétés et toutes les personnes, publiques et privées.
Décret
des 28 octobre et 5 novembre 1790. Art. 1er :
L'Assemblée nationale décrète qu'elle entend par biens nationaux :
Tous les biens des domaines de la couronne ;
Tous les biens des apanages ;
Tous les biens du clergé ;
Les biens des fabriques ;
Les biens des fondations établies dans les églises paroissiales ;
Les biens des séminaires, des collèges, des établissements d'études
ou de retraites ;
Les biens des hôpitaux, maisons de charité et autres établissements
destinés au soulagement des pauvres...
Art. 2 : L'Assemblée décrète que tous lesdits biens
déclarés nationaux seront vendus dès à présent... [au profit,
non de la Nation, mais de l'État ! ]
De
Viguerie (in « Le livre noir de la Révolution française » , p. 213/214) : Ne
l'oublions pas, la nationalisation des biens du clergé n'affecte
pas seulement celui-ci. La spoliation du clergé va contre les
intentions des donateurs et des fondateurs qui, en constituant
par leur libéralités le patrimoine ecclésiastique, ont donné à
l'Église et non à l'État.
[Observons à cette occasion l'altération du vocabulaire : lorsque le décret
ci-dessus parle de « biens nationaux »,
c'est pour autoriser leur vente à de simples
particuliers pour une poignée d'assignats, et ce au profit de
l'État ; en réalité il s'agit donc d'une étatisation aliénable]
SPORT
Cf. Coups et blessures*, Déontologie*, Fait justificatif*, Usurpation de titre*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-II-105, p.131
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-111, p.70 / n° I-123, p.83 / n° I-210, p.104 / n° I-218, p.114 / n° I-221, p.119 / n° I-253, p.154 / n° I-336, p.190 / n° I-403, p.198/ n° IV-212, p.575
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 332, p.168 / n° 336, p.205 / n° 402, p.232
Voir : Fédération Française de Football, Règlement disciplinaire
La police des sports est assurée tant par des dispositions disciplinaires, pour les manquements à la déontologie, que par les textes pénaux de droit commun, pour les infractions de droit commun.
Cons. d'État 29 octobre 2007 (Gaz.Pal. J 263) : L'art. 129 des Règlements généraux de la FFF impose aux clubs de football, qu'ils soient organisateurs d'une rencontre ou visiteurs, une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité dans le déroulement des rencontres. Le club organisateur est ainsi tenu d'assurer la police du terrain et de prendre toutes mesures permettant d'éviter les désordres pouvant résulter, tant avant, pendant qu'après le match, de l'attitude de ses dirigeants, des joueurs ou du public. Le club visiteur est, quant à lui, responsable de l'attitude de ses dirigeants, joueurs ou supporters. Il est, en particulier, responsable des désordres imputables à ses supporters à l'occasion d'une rencontre.
Cass.crim. 10 octobre 2006 (Bull.crim. n° 245 p.967) : Nul ne peut se prévaloir d'un dan ou d'un titre équivalent dans des disciplines sportives relevant des arts martiaux s'il n'a pas été délivré par la commission spécialisée.
S'il entre dans le domaine d'application d'une incrimination pénale, l'acte dommageable accompli par un sportif au mépris des règles du jeu peut être reproché à son auteur devant les tribunaux répressifs.
Cass.crim. 16 octobre 1984 (Gaz.Pal. 1985 I somm 158) : Ont donné une base légale à leur décision les juges du fond qui pour condamner pour blessures involontaires un joueur de football ayant blessé un adversaire au cours d'un match, ont considéré à bon droit que le prévenu avait méconnu les règles du sport pratiqué, ainsi que les principes élémentaires de prudence qu'elles consacrent, en méconnaissant le fait qu'un «tacle glissé» ne peut être effectué qu'en gardant les pieds au ras du sol, en direction du ballon et dans le seul but de pousser celui-ci, sans toucher l'adversaire.
Trib.corr. Annecy 9 octobre 1991 (D.S. 1993 SC 337) :En taclant un adversaire "par derrière" avec un pied décollé du sol, alors que son action avait pour but de provoquer la chute de son adversaire, un joueur de football commet un acte de violence volontaire en violation des règles du football.
En revanche, l'acte accompli dans le strict respect des règles du jeu ne peut être pénalement imputé à son auteur, même s'il a causé un dommage à autrui.
Poitiers 3 mai 1974 (Gaz.Pal. 1974 II 784) : L'absence de sanction pénale pour des fautes habituellement répréhensibles pénalement, dérogation au droit commun, est la reconnaissance de l'essence même du sport en vue de permettre à l'athlète, libre de toute sujétion, de tendre sa volonté et ses forces vers la réalisation de sa performance.