DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
Dictionnaire des noms propres
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Sur l’importance du rôle social des auteurs évoqués ci-dessous, voir notre étude :
La doctrine est-elle une source du droit ?
Lettre L
LACASSAGNE Alexandre
Cf. Bertillon*, De Greeff*, Durkheim*, Ferri*, Locard*, Lombroso*, Police scientifique*, Tarde*.
Voir : A. Lacassagne, Histoire de la médecine légale
Médecin français (Cahors 1843 - Lyon 1924). C fut un éminent spécialiste de la médecine légale, qu'il enseigna comme professeur à la Faculté de médecine de Lyon à partir de 1880. Il compte parmi les membres les plus actifs de l'école anthropologique, rattachée au déterminisme ; à tel point qu'il fut cofondateur d'une revue destinée à diffuser les conceptions de ce courant doctrinal sociologique : les Archives d'anthropologie criminelle. Parmi ses principaux travaux on peut noter un Précis de médecine judiciaire. On a caricaturé sa pensée en lui faisant dire qu'il n'avait jamais trouvé la place de l'âme dans les corps qu'il avait disséqués.
Donnedieu de Vabres (Traité de droit criminel) : L'École positiviste rejette la croyance de la liberté de l'homme, elle est déterministe ; elle exclut donc l'idée de responsabilité morale, comme fondateur de la peine. Elle fait intervenir uniquement l'idée de réaction sociale. La société réagit contre le malfaiteur comme un organisme physique se défend contre les microbes. Le malfaiteur, selon l'expression de Lacassagne, est un « microbe social ».
Gassin (Criminologie) : Un médecin sociologue. - L'École du Milieu Social dont le chef de file fut Lacassagne, Professeur de Médecine légale à Lyon, a mis l'accent sur l'influence prépondérante sinon exclusive du milieu social dans l'étiologie criminelle. La théorie de Lacassagne se résume dans deux formules restées célèbres : « Les sociétés n'ont que les criminels qu'elles méritent » et « Le milieu socialest le bouillon de culture de la criminalité, le microbe c'est le criminel, un élément qui n'a d'importance que le jour où il trouve le bouillon qui le fait fermenter ».
Pinatel (Bouzat et Pinatel, Traité de droit pénal et de criminologie) : L'École du Milieu Social. - Les influences socio-culturelles sont mises en évidence par Lacassagne et par Manouvrier. C'est Lacassagne qui est le chef de École du Milieu Social ou École Lyonnaise... Le criminel est un microbe social... On voit que Lacassagne a trouvé son inspiration dans la pensée pasteurienne.
Souchon (Alexandre Lacassagne... et le concept de "milieu social" -
Rev.sc.crim. 1974 533) : Au premier Congrès d'anthropologie, à Rome en 4885, un lyonnais d'adoption, Alexandre Lacassagne, professeur titulaire de la chaire de
médecine légale, s'élève avec véhémence contre l'abus que lui paraît faire l'École italienne de l'atavisme comme chef d'explication du phénomène criminel... Il
soutient que le milieu social constitue le lieu d'émergence d'un germe - le criminel - qui ne doit qu'à des conséquences néfastes sa vocation
délinquante.
En 1897, à l'occasion d'une conférence qu'il prononce devant la Société des amis de l'Université, Lacassagne énonce "quelques uns des principes "de l'École
lyonnaise : "tout acte nuisible à l'existence d'une collectivité humaine est un crime"; "tout crime est un obstacle au progrès"; "le Milieu social est le bouillon
de culture de la criminalité ; le microbe c'est le criminel, un élément qui n'a d'importance que le jour où il trouve le bouillon qui le fait fermenter" ; "les
sociétés n'ont que les criminels qu'elle méritent" ; le criminel, avec des caractères anthropométriques et autres ne nous semble avoir qu'un importance bien
médiocre. Tous ces caractères peuvent se trouver d'ailleurs chez d'honnêtes gens" ; "au fatalisme qui découle inévitablement de la théorie anthropométrique, nous
opposons l'initiative sociale". Et Lacassagne de conclure ; "L'École lyonnaise a montré que le crime provient en somme de la société elle-même".
LAMOIGNON.- Voir : Malesherbes.
LAVERNA
Cf. Hermès*.
Laverna était la divinité romaine protectrice des biens, quelque fut le moyen dont on les avait acquis. En raison de cette particularité, elle devint la tutrice des voleurs, des escrocs et, de manière générale, de tous ceux qui s’approprient irrégulièrement le bien d’autrui.
Horace (Épitres I XVI) rapporte (ou imagine) la prière qui lui était adressée : Belle Laverne, accorde-moi de tromper tous les yeux, accorde moi de paraître juste et pur, fais la nuit sur mes fautes, déploie un voile sur mes fourberies.
Warée (Curiosités judiciaires) : Il est étrange que les romains, si judicieux dans leurs lois, consacrèrent un temple à la déesse Laverna, qu’ils croyaient être l’intendante des larcins et la protectrice des voleurs ; ce temple leur servait d’asile, et ils pouvaient en toute assurance y aller partager le fruit de leurs brigandages.
LE BON Gustave
Cf. Tarde*.
Voir : G. Le Bon, les meneurs de foules
Le Bon, né à Nogent le Rotrou en 1841, est mort à Marne-la-Coquette en 1932 ; il était médecin de formation. Esprit encyclopédique, tourné vers les faits matériels concrets et non vers les idéologies purement abstraites, il traverse de nos jours ce long purgatoire qui attend les esprits novateurs. Les juristes lui doivent pourtant des ouvrages fort instructifs ; nous en citerons trois : d'abord « La psychologie des foules », ensuite « La Révolution française et la Psychologie des Révolutions »s", et enfin « La psychologie du socialisme ». On se doute qu'ils ne sont pas dans l'esprit du temps.
Le
Bon (Introduction à la "Psychologie des foules") :
Les foules organisées ont toujours joué un rôle considérable
dans la vie des peuples ; mais ce rôle n'a jamais été aussi
important qu'aujourd'hui. L'action inconsciente des foules se
substituant à l'activité consciente des individus est une des
principales caractéristiques de l'âge actuel.
J'ai essayé d'aborder le difficile problème des foules avec des
procédés exclusivement scientifiques, c'est-à-dire en tâchant
d'avoir une méthode et en laissant de côté les opinions, les
théories et les doctrines. C'est là, je crois, le seul moyen
d'arriver à découvrir quelques parcelles de vérité, surtout
quand il s'agit, comme ici, d'une question passionnant vivement
les esprits.
Le Bon (Préface à la troisième édition à la "Psychologie du socialisme") : N'appartenant à aucune école et ne songeant à plaire à aucune, j'ai essayé d'étudier les phénomènes sociaux comme un phénomène physique quelconque, en tâchant simplement de me tromper le moins souvent possible.
Morvan (Criminologie) : Selon la théorie de Gustave Le Bon, exposée dans son ouvrage "Psychologie des foules" », l’ "âme des foules" varie "suivant la nature et le degré des excitants auxquels ces collectivités sont soumises". Ces excitants sont le nombre (qui donne à l’individu "un sentiment de puissance invincible" qui lui permet de céder à des instincts que, seul, il eût forcément réfrénés), ainsi que la contagion mentale (phénomène d’imitation qui pousse l’individu à faire comme les autres, sacrifiant son intérêt personnel à l’intérêt collectif). Ce processus de suggestion s’apparente à l’hypnose.
Pierre
Duverger (Introduction à la "Psychologie du socialisme") rapporte
cette observation de Le Bon : "Celui qui jalonne une route
au prix de rudes efforts est bien rarement appelé à contempler
les horizons où elle peut conduire".
Partant de cette autre constatation "La science crée plus de
mystères qu'elle n'en éclaircit", il écrit de sa propre plume :
Cette phrase, merveilleuse de sagesse, devrait hanter nos
esprits. Ce n'est pas le cas. L'humanité actuelle continue à
s'engager allègrement dans la direction inverse, pratiquement
sans aucun souci du devenir, en laissant l'épouvante comme
héritage à sa descendance. Ignorants du passé, indifférents à
l'avenir, nous sommes tous des Ponce-Pilate. Les sages comme Le
Bon et Alexis Carrel, qui fut son ami, sont des intrus. Alors
qu'ils devraient être des modèles et des espoirs. L'abstrait, ce
délire intellectuel, est maintenant la figure de proue des
politiciens de toutes sortes en rupture avec la réalité.
LE BRUN DE LA ROCHETTE Claude
Cf. Ayrault*, Jousse*, Muyart de Vouglans*, Rousseaud de la Combe*, Serpillon*, Tiraqueau*.
Son principal ouvrage, qui s’intitule « Les procès civil et criminel », a été publié à Rouen en 1629 ; son intérêt vient, non seulement de sa qualité scientifique, mais encore du fait qu’il nous donne une bonne image de la procédure criminelle en France à la veille de l’Ordonnance criminelle de 1670. N’oublions jamais que les expériences procédurales du passé peuvent servir à améliorer la procédure pénale d’aujourd’hui.
Le Brun de la Rochette (Le procès criminel) : Le juge est celui qui étudie et tâche de tout son pouvoir d’équitablement éteindre tous les débats et procès, et d’entretenir aux mieux la tranquillité publique et particulière, rapportant au faisable et à l’équitable ce qui est enclos dans le droit.
M. J-L. Charvet, vice-président du TGI d'Avignon, nous a gracieusement fourni les indications suivantes : Claude Le Brun, sieur de La Rochette, Jurisconsulte Beaujolais, comme il se désignait lui-même. Son principal ouvrage, qui s'intitule "Les procès civil et criminel", a été publié pour la première fois à Rouen de 1611. On a également de lui : "Divins accords de la harpe céleste, réduits en vingt spirituelles méditations sur le Miserere" et "Électuaire souverain, pour servir d'antidote contre la paillardise, peste contagieuse des âmes". En tête de l'édition de 1625 du livre "Les procès civil et criminel", une gravure le représente la main posée sur les cinq volumes de ses oeuvres, entouré de lauriers, tandis qu'une petite Renommée souffle dans sa trompette. D'après la légende, il serait né en 1560.
LE POITTEVIN Gustave
Cf. Faustin Hélie*.
Voir : Le Poittevin, L'individualisation de la peine
Magistrat français (1856 – 1930). Président de Chambre à la Cour d'appel de Paris, il s'intéressa principalement aux différents aspects de la procédure pénale, et plus particulièrement aux problèmes qui peuvent se poser aux représentants du ministère public. Ses deux principaux ouvrages sont un « Code d'instruction criminelle annoté », et surtout un « Dictionnaire-formulaire des Parquets et de la Police judiciaire » qui connut 7 éditions. Mais il n'était pas indifférent aux questions de fond, comme le montre son article sur « L'individualisation de la peine » paru dans les Mélanges Saleilles.
Le Poittevin (Dictionnaire des Parquets, Préface de la 1e éd.) : Les traités de MM. de Molènes et Ortolan sont avant tout théoriques : on doit les lire pour se pénétrer des principes, pour connaître dans leur ensemble les fonctions des magistrats de Parquet... J'ai cherché à combler une lacune qui existe. Je n'ai pas eu certes la prétention de faire une traité de droit pénal et d'instruction criminelle ; et d'entrer en lutte avec des hommes tels que MM. Blanche, Faustin Hélie et tant d'autres. Leurs ouvrages ont été mes guides et j'ai seulement fait mes efforts pour m'inspirer de leurs fortes doctrines. Mon but est bien modeste, j'ai voulu faire un recueil complet d'indications et de formules pratiques, que le magistrat pourra facilement consulter et où il trouvera immédiatement la solution des questions qu'il est appelé à résoudre à chaque instant. J'ai adopté l'ordre alphabétique, c'est celui qui facilite le plus les recherches.
LEVASSEUR Georges
Cf. Garçon*, Garraud*, Hugueney*, Merle*, Vitu*.
Voir : Levasseur, Napoléon et l’élaboration des Codes répressifs
Voir : Levasseur, La dépénalisation
Voir : Levasseur, Le principe de la séparation des fonctions
Voir : Levasseur Les conflits de lois répressives dans l'espace
Voir : Levasseur, Préméditation et guet-apens
Voir : Levasseur, La sanction de la responsabilité des complices (les systèmes rationnels)
Voir : Levasseur - Politique criminelle : Peines ou mesures de sûreté ?
Voir : Levasseur, La mise en œuvre de l'action civile
Voir : Levasseur, La qualification pénale
Voir : Levasseur, Les problèmes fondamentaux du droit pénal spécial
Voir : Levasseur, La charge de la preuve
Voir : Levasseur, Compétence et principe de légalité
Voir : Levasseur, Le meurtre d’une personne … déjà morte
Voir : Levasseur, Non-assistance à personne en péril
Voir : Levasseur, Le recel de choses
Voir : Levasseur, Les filouteries en matière contractuelle
Voir : Levasseur, L’abus de confiance
Voir : Comment allier la recherche et l'enseignement, étude à la mémoire du professeur G. Levasseur
Criminaliste français (23 mars 1907 - 27 octobre 2003). S’il a commencé sa carrière de chercheur en soutenant une thèse de droit international privé, puis enseigné
le droit civil et le droit du travail, le professeur Levasseur a surtout été un pénaliste. Encore a-t-il étudié cette discipline non seulement en juriste, mais
encore en comparatiste et en sociologue ; il a notamment prêté une attention particulière à la science pénitentiaire. Nombre de ses travaux ont été consacrés
au principe de la légalité criminelle, dont il a été un grand défenseur. Il a été connu d’un large public par ses manuels et précis de droit pénal général et de
procédure pénale.
NB : Pour cette photographie officielle, le Professeur Levasseur a
souhaité tenir entre les mains l'ouvrage que nous avons cosigné.
Carbonnier (Mélanges Levasseur): J’ai pu, à l’occasion de la création du Laboratoire de sociologie criminelle, admirer l’action souriante et ferme de Georges Levasseur, son habileté stratégique à passer à travers les chicanes administratives, ses talents d’organisateur, sa réussite enfin.
Levasseur (Réflexions sur la compétence) : C’est à tort que l’on énonce généralement le principe de la légalité des incriminations et des peines. En réalité c’est de « légalité de la répression » qu’il conviendrait de parler, car la répression met en péril la liberté individuelle dès le premier moment où elle s’exerce et jusqu’à l’achèvement de la peine, et cette liberté ne peut trouver de protection que dans la loi.
L'HOSPITAL (Michel de)
Cf. Pussort*.
Michel de l'Hospital, né en Auvergne en 1505 ou 1506, est mort le 13 mars 1573 près d'Étampes. D'abord connu en raison de sa virtuosité en poésie latine, il devint le protecteur de la Pléiade. Mais également réputé pour sa remarquable science juridique, il fut successivement avocat, conseiller au Parlement de Paris, conseiller au Grand conseil, Premier président de la Cour des comptes, et enfin Chancelier de France (charge dont il ne se démit que quelques mois avant sa mort). Les historiens voient en lui le plus éminent chancelier que la France ait connu. On lui doit notamment l'Ordonnance de Moulins de février 1566 qui déclara inaliénable le domaine de la couronne (donc de l'État).
A.Esmein (Histoire
du droit français) : À partir du XIVe siècle, le
chancelier dirige l'action juridique et politique du pouvoir
royal ; il passe, sous la monarchie tempérée, au premier rang
des grands officiers de la couronne. Arrivée à son complet
développement, la dignité de chancelier emportait trois
prérogatives principales.
1°/ Le chancelier avait la garde et la disposition du sceau de
France. Il en résultait que tous les actes de la volonté royale,
qui, pour avoir force obligatoire, devaient être revêtus du
sceau de France, passaient nécessairement par ses mains et
étaient ainsi soumis à son contrôle...
2°/ Le chancelier avait, comme disait Loyseau, la surintendance
de la justice ; il était le chef de la magistrature...
3°/ Le chancelier était l'inspirateur de la législation royale.
C'était lui qui proposait le plus souvent et qui faisait rédiger
les ordonnances. Cette tradition constante fut, il est vrai,
interrompue sous Louis XIV ; le grand mouvement législatif qui
se produisit alors fut dirigé par Colbert, contrôleur des
finances, non par le chancelier Séguier ; mais, sous Louis XV,
le chancelier Daguesseau reprit glorieusement la tradition
ancienne.
Martin (Histoire
de France) : En 1560 Catherine de Médicis lui confia les
Sceaux, du consentement des Guises... qui connaissaient mieux
ses talents que son caractère, et s'étaient laissés prendre aux
louanges classiques de sa muse latine et à sa déférence
apparente envers les grands. Sa belle et imposante physionomie,
qui rappelait les sages de l'antiquité, ne leur avait pas
révélé, sous le courtisan, le grand citoyen et, sous les formes
flexibles, le cœur inébranlable. L'Hospital avait pris pour
devise les vers d'Horace sur le juste: "Si fractus illabatur
orbis, impavidum ferient ruinæ".
Ce fier engagement de la vertu envers elle-même ne fut pas
démentie... L'Hospital n'apporta au pouvoir qu'une seule
passion, le dévouement à cette patrie qu'il voyait entraînée
loin de sa route véritable.
Lors de l'ouverture des États généraux le 13 décembre 1560, le
chancelier de L'Hospital adressa aux Trois Ordres un discours où
de nobles sentiments et de sages maximes étaient exprimés avec
un éloquence grave, simple et digne : le monarchisme un peu
exagéré qu'on lui a reproché n'était pour lui qu'une forme de
patriotisme ; le roi, pour lui, c'était l'unité vivante de
l'État.
Crouzet (La
sagesse et le malheur - Michel de L'Hospital, Chancelier de
France) : Michel de L'Hospital analyse le pouvoir comme
un devoir. Le prince n'est pas qu'une image, il est action, il
est un principe de conservation qui doit être toujours en action
pour maintenir le bon fonctionnement de la société d'hommes
qu'il gouverne pas la volonté de Dieu. Il doit être un mouvement
produisant un équilibre constant entre les quatre ordres qui
composent le peuple de France et qui font de ce royaume le
meilleur des royaumes. C'est, dans cette logique d'une puissance
créatrice, en termes d'harmonie, que l'ordre de la cité est
conçu... Le bon prince façonne prioritairement son autorité afin
de pouvoir faire vivre ses sujets dans la paix.
Pour lui, le pouvoir royal a le devoir de faire vivre les quatre
ordres en accord harmonique, en empêchant que l'un d'eux ne
cherche à nuire aux autres. Pour lui, plus encore que chez
Érasme, rien ne doit échapper à son contrôle parce que les
gouvernants doivent veiller à l'intérêt public des peuples qui
leur sont confiés et dont ils sont responsables...
La justice est aussi abordée : si le roi n'est pas juste, les
dieux l'abandonneront. Le souverain doit faire attention à ce
que les juges soient hommes d'expérience, ayant fait leurs
preuves, se contentant de leurs gages. Il faudra qu'il mette fin
à tous les abus des cours de justice. Et Michel de L'Hospital
pense qu'il y a une voie à suivre, celle qu'a montré l'empereur
Alexandre Sévère, qui s'était entouré "pour son conseil" de
nombreux légistes à commencer par Papinien...
Il doit encore favoriser les Arts, cultiver les vertus, la
piété, la justice, la foi.
Le pouvoir est un art difficile. L'expliquer revient d'abord à
mettre en garde celui qui le détient. Il est l'art de "savoir
les sujets gouverner et défendre".
LOCARD Edmond
Cf. Bertillon*, Criminalistique*, Lacassagne*, Police scientifique*.
Voir : Le "Corbeau" signait "L'oeil de tigre"
Spécialiste français de la médecine légale, élève de Lacassagne (1877 – 1966). Il a créé en 1910, puis dirigé pendant une quarantaine d’année, le Laboratoire de police scientifique de Lyon (le seul laboratoire existant à l’époque, avec celui de Paris). Il a accompli des expertises dans des procès très médiatisés, ce qui l’a conduit à patronner une collection consacrée à des « Causes célèbres ».
Cabal (Rapport sur la valeur des empreintes génétiques) : En 1910, Edmond Locard crée à Lyon le premier laboratoire de police scientifique et y met en application le principe selon lequel « tout individu, à l'occasion de ses actions criminelles en un lieu donné, dépose et emporte à son insu des traces et des indices : sueur, sang, poussière, fibres, sperme, salive, poils, squames, terre, etc.. Qu'ils soient de nature physique, chimique ou biologique, ces indices, une fois passés au crible d'examens de plus en plus sophistiqués, parlent et livrent le récit du crime avant de permettre au lecteur-enquêteur de déchiffrer la signature de l'auteur-coupable ».
Buquet (Manuel de criminalistique) : Le principal précurseur de la criminalistique en France est sans aucun doute Edmond Locard, qui fut stagiaire puis préparateur et chef de travaux du célèbre Alexandre Lacassagne… Dès 1910 il créa le premier laboratoire français de police scientifique appliquant les méthodes scientifiques aux problèmes de police. Locard édite un principe d’ "échange" fondé sur le fait qu’un individu laisse toujours sur les lieux des traces de son passage et que, réciproquement, lorsqu’il repart ; il emporte de la même manière des éléments parfois microscopiques du milieu dans lequel il se trouvait, sur ses vêtements, sur sa peau, sur ses semelles, etc. L’exploitation de tous ces indices demande des compétences pluridisciplinaires.
Locard (Présentation de l’affaire de « La malle à Gouffé ») : Un crime atroce qui eut le plus fort retentissement. Une névrosée sans conscience et sans remords. L’enquête la plus difficile, barrée par les mensonges des faux témoins, par les erreurs de la police parisienne, par un autopsie mal faite… mais remise sur la bonne voie par la plus brillante expertise d’un médecin légiste.
LOMBROSO Cesare
Cf. Biologie criminelle*, Criminel*, Criminel-né*, Criminologie*, De Greeff*, Doctrines criminelles*, Durkheim*, Ferri*, Garofalo*, Lacassagne*, Sociologie criminelle*, Sutherland*.
Exemple des illustrations figurant dans l’atlas complétant « L’homme criminel ».
Autres illustrations figurant dans l’atlas complétant « L’homme criminel ».
Criminologue italien, psychiatre de formation, fondateur de l’anthropologie criminelle (1835 – 1909). Il a été fort influencé par l’ouvrage de Darwin portant sur
l’origine des espèces, et il s’est vite orienté vers la défense de la société contre ceux qui ne veulent ou ne parviennent pas à s’y insérer.
Il a surtout vu dans le délinquant, tantôt un sous-évolué, tantôt un malade ; ce qui l’a conduit à répartir les criminels entre des catégories telles que le
« criminel-né », le « criminel par passion », le « criminel fou » et le « criminel d’occasion ». Son principal ouvrage,
« L’homme criminel » (1875), paraît fort dépassé de nos jours ; mais il a eu le mérite d’attirer l’attention des criminalistes sur la personnalité
des criminels et a contribué à une répression à la fois plus juste et plus efficace. Ses théories (connues sous le nom d’anthropologie criminelle) ont toutefois
servi de justification à la doctrine prônant l’élimination des criminels dangereux pour la société.
Lombroso (préface à L’homme criminel) : Les législateurs, les philosophes, hommes dont l’âme est nourrie des spéculations les plus sublimes de l’esprit humain, jugent les autres d’après eux-mêmes : répugnant au mal, ils croient que tous y répugnent ; ils ne veulent ni ne peuvent descendre des nébuleuses régions de la métaphysique au terre à terre humble et aride des maisons pénales. De son côté le juge succombe tout naturellement à ces préoccupations momentanées, communes à nous tous dans les vicissitudes de la vie et qui nous surprennent tellement par leur intérêt actuel, qu’elles nous enlèvent la perception de leur connexité avec les lois générales de la nature. Je crois que, pour réconcilier tant de divergences, pour résoudre le problème s’il existe ou non une vraie nécessité dans le crime, et si l’homme criminel appartient à un monde tout à lui, il faut laisser de côté toutes les théories philosophiques et étudier, en somme, plus que le crime, le criminel.
Pinatel (Bouzat et Pinatel, Traité de droit pénal et de criminologie, T.III n
138) cite Lombroso : "En 1870, je poursuivais depuis plusieurs mois dans les prisons et les asiles de Pavie, sur les cadavres et sur les vivants, des recherches
pour fixer les différences substantielles entre les fous et les criminels sans pouvoir bien y réussir : tout à coup, un matin d'une triste journée de décembre, je
trouve dans le crâne d'un brigand toute une longue suite d'anomalies atavistiques, surtout une énorme fossette occipitale moyenne et une hypertrophie du vermis
analogues à celles qu'on trouve chez les vertébrés inférieurs. À la vue de ces étranges anomalies, comme apparaît une large plaine sous l'horizon enflammé, le
problème de la nature et de l'origine du criminel m'apparut résolu : les caractères des hommes primitifs et des animaux inférieurs devaient se reproduire de notre
temps".
Ainsi le criminel serait-il dans nos sociétés évoluées une survivance du sauvage primitif. Il se reconnaîtrait par des stigmates anatomiques, morphologiques,
biologiques et fonctionnels.
Gassin (Criminologie) : La biologie criminelle. Le premier aspect du phénomène criminel qui a retenu l’attention des criminologues est son aspect biologique. Il a donné lieu à la théorie fameuse du « criminel né » imaginée par le fondateur de la criminologie, l’italien Cesare Lombroso, selon laquelle il existerait chez les délinquants des stigmates anatomiques et physiologiques qui les distingueraient des non-délinquants.
Pinatel (Bouzat et Pinatel, Traité de droit pénal et de criminologie T.III) : Il est incontestable que l'œuvre lombrosienne est fondée sur de longues et patientes recherches. Durant sa vie Lombroso a examiné 383 crânes de criminels italiens, et 5.907 délinquants vivants. Il a complété ses investigations par des recherches sur les enfants des écoles. En raison de la richesse et de l'originalité de son œuvre, il peut être considéré comme le fondateur de l'école anthropologique.
Morvan (Criminologie) : Lombroso est le plus célèbre dans l’histoire de la criminologie. Son œuvre n’est pourtant qu’une imposture scientifique, un tissu d’inepties qui bénéficia sans beaucoup de mérite du succès considérable, à la fin du XIXe siècle, du darwinisme et des sciences du vivant.
L’affaire Troppmann (Les grands procès), qui tué une femme et ses cinq enfants à Pantin : Le procès du jeune homme, qui est suivi par les journalistes de tous les pays, permet aux experts d’utiliser les méthodes d’anthropologie criminelle, qui commencent à se répandre grâce aux travaux de l’italien Lombroso. Si la stature frêle est loin de correspondre à celle d’un meurtrier violent, expliquent les médecins, sa main présente les caractéristiques du criminel-né ; de même, sa démarche, la forme de sa mâchoire, traduisent les stigmates d’une cruauté congénitale. [il fut condamné à mort fin 1869]
St LOUIS - Voir : Saint-Louis.
LYSIAS
Cf. Aréopage*, Cicéron*, Jurisconsulte*, Logographe*.
Voir : Lysias, Sur l'Olivier sacré
Orateur grec, né à Athènes vers 440 av. J.-C. et mort à Athènes vers 378. Après avoir passé quelques années à Thurium en Italie du sud, il revint à Athènes pour y enseigner l'art oratoire. Mais il dut s'enfuir lors de la tyrannie des Trente pour éviter d'être condamné à mort. Il put revenir en 403 et vivre dans sa ville natale jusqu'à sa mort vers 360. Ses biens ayant été confisqués, il gagna sa vie en tant que logographe*. C'est-à-dire qu'il écrivait les discours que ses clients devaient prononcer devant un tribunal : ceux-ci n'avaient plus qu'à les apprendre par cœur et à les déclamer de leur mieux. Mon professeur de grec le tenait en très haute estime, comme bien avant lui les grecs et les romains.
Platon (La République) : Le père de Lysias, Céphale, n'était pas Athénien de naissance. Riche fabricant d'armes syracusain venu se fixer au Pirée sur le conseil de Périclès, il appartenait à cette classe d'hommes de négoce qui cherchent un titre de noblesse dans la culture de la philosophie et des belles-lettres. Après sa mort ses fils furent victimes de la tyrannie des Trente. On sait que Lysias parvint à s'enfuir, mais Polémarque fut condamné à boire la ciguë (404 av. J.-C.).
Bizos (Introduction à l'édition bilingue des "Discours de Lysias") : Pour le juriste, les plaidoyers de Lysias sont d'un prix inestimable. Les causes auxquelles ils se rapportent sont d'une extrême diversité : meurtres, coups et blessures, injures, désertion, sacrilège, accaparement, concussion, et ils nous apportent des documents quelquefois uniques sur toutes sortes de questions de procédure ou de droit.
Lysias (Contre Théomnestos) § 30 : Le législateur n’accorde aucune excuse à la colère.
Lysias (Sur l'Olivier sacré) : Si l'olivier a été arraché par d'autres que par nous, il ne serait pas juste que nous soyons inculpés pour un délit qui n'est pas le nôtre.
Cicéron (De l'orateur) : Lysias, orateur éloquent, avait présenté à Socrate un plaidoyer qu'il avait composé, afin qu'il l'apprît par cœur, s'il le jugeait à propos, et s'en servît pour sa défense. II ne refusa pas de le lire, et en loua la diction ; mais n'en usa pas.
Du Boys (Histoire du droit criminel des peuples anciens) : L'orateur Lysias était venu offrir ses services à Socrate, qui les avait refusés. Socrate ne voulut pas être défendu comme un accusé ordinaire; il lui répugnait de chercher à surprendre par des moyens oratoires la pitié de ses juges.