DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre D
(Dixième partie)
DICTATURE
Cf. Autocensure*, Censure*, Contrat social*, Coup d’État*, Démagogie*, Démocratie*, Despotisme*, Droit - droit naturel*, État*, Langue (française) - Langue nationale, arme politicienne*, Lèse-majesté*, Liberté (libertés spirituelles)*, Ordre moral*, Parti politique*, Résistance à l'oppression*, Séparation des pouvoirs*, Spoliation*, Terreur*, Théocratie*, Tyrannicide*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 4, p.7 / n° II-2, p.281 / n° II-11, p.293 / n° II-103, p.304 / n° II-I-100, p.329 / n° II-I-103, p.336
- Notion. Un État revêt la forme d’une dictature lorsqu’un ou quelques hommes sont parvenus à s’assurer de la totalité du pouvoir, c’est-à-dire ont réussi à contrôler tant la fonction spirituelle que la fonction temporelle, et, à l’intérieur de cette dernière, tant la fonction législative que la fonction judiciaire et la fonction exécutive.
Dictionnaire Petit Robert. Dictature - régime politique autoritaire établi par une individu, une assemblée, un parti, un groupe social.
Bruguès (Dictionnaire de morale) : Le totalitarisme se caractérise par les traits suivants : un parti unique, à la fois église idéologique et armée militante, qui quadrille la totalité de la société ; une orthodoxie et une discipline portées à leur limite.
Plutarque (Vie des hommes illustres - Sylla) : Sylla se proclama lui-même dictateur. Il se fit accorder une absolution générale du passé, et, pour l'avenir, le droit de vie et de mort, le pouvoir de confisquer les biens, de partager les terres, de bâtir et de détruire des villes.
Stalinisme (Encyclopédie Microsoft Encarta). La personnalité de Staline et sa pratique du pouvoir ont conduit à la mise en place d’un système de pensée et de gouvernement connu sous le nom de stalinisme. Système politique totalitaire, le stalinisme était fondé sur la dictature du prolétariat, la suprématie du parti communiste et le culte de la personnalité voué à son dirigeant. Il s’appuyait sur une économie collectivisée et planifiée, une société encadrée et dominée à tous les niveaux et dans tous les domaines par le Parti et ses différentes organisations, étroitement surveillées par un appareil policier chargé de museler toute velléité de contestation.
Leclercq
(Leçons de droit naturel - T.II) : La dictature est un
régime de salut public qui succède à une crise, et qui prétend y
mettre un terme par un gouvernement autoritaire...
L'idée de la toute
puissance de l'État et de son droit, comme de son devoir, à
intervenir dans toute la vie des individus pour assurer leur bonheur
a trouvé une expression nouvelle dans la dictature fasciste en
Italie, suivie par la dictature naziste en Allemagne...
Le Bon (Les Révolutions) : La politique jacobine dérivée de la foi nouvelle était fort simple. Elle consistait en une sorte de socialisme égalitaire, géré par une dictature ne tolérant aucune opposition.
Qiu Xiaolong (La bonne fortune de monsieur Ma), à propos de l'arrestation d'un inoffensif petit libraire sous Mao Tsé-Toung : Toute la cité finit par se poser la même question : « Mais pourquoi ? ». Les policiers étaient en droit d'arrêter quelqu'un sans donner d'explication ni montrer de mandat. C'était cela, la dictature du prolétariat. Les autorités du Parti décidaient de tout, de toutes les affaires. Pas d'avocat, pas de jury, et pas de tribunal.
- Morale. La morale s'oppose à ce qu'un homme, une assemblée ou un parti politique, dirige un pays sans se soumettre lui-même à une règle supérieure limitant sa toute puissance. Elle condamne évidemment aussi l'élimination des opposants.
Platon : Il faudrait être un Dieu pour gouverner les hommes, car l’écart entre les êtres humains est trop faible pour qu’un seul puisse commander à tous sans user de contrainte, ni tous obéir à un seul sans contestations ni murmures.
Baudin (Cours de philosophie morale) : L’État collectiviste implique la négation la plus radicale qui soit de la nation et de ses droits naturels. À cet égard on peut dire qu’il réalise en fait la pire forme du primat de l’État sur la nation. Voire, en certains cas, le primat de l’État sur le peuple qui est censé l’établir ; c’est ce qui a lieu quand le rôle politique du peuple se réduit à donner, de gré ou de force, son assentiment à une « dictature du prolétariat », la plus autocratique des dictatures.
Bentham (Déontologie ou science de la morale) : Celui qui, de son chef, se constitue arbitre souverain de la morale ; qui, comme un fou dans sa loge, agite un sceptre imaginaire ; celui-là, dans son impudence, dépasse toute mesure. Un certain sentiment de responsabilité peut contrôler le despotisme d'un gouvernant reconnu ; mais quel contrôle opposer à l'égarement et à la présomption de celui qui s'est lui-même attribué la dictature morale ?
Proal (La criminalité politique) : Une assemblée peut être aussi tyrannique qu'une dictature militaire. Transférer la toute-puissance d'un souverain à une assemblée, ce n'est pas établir la liberté, c'est déplacer le despotisme. Toutes les fois que les partis politiques veulent persécuter leurs adversaires, ils invoquent le salut public ; sous prétexte de sauver le peuple, ils satisfont leurs rancunes ; ils appellent bien public ce qui est leur bien personnel ; ils nomment loi de salut public la loi qui est faite pour le salut le leur domination. Ils confondent volontiers leurs intérêts avec celui de la société, qui sont tout différents ; ils voient un péril national là où il n'y a de péril que pour leur ambition.
- Science juridique. Les régimes dictatoriaux
s'imposent par le mensonge éhonté et la force brutale. Ils
mettent au point un ensemble d’incriminations qui ont pour objet
principal d’assurer à leurs dirigeants la conservation du
pouvoir ; elles sont le plus souvent sanctionnées par la peine de mort.
Dès lors qu'ils s'imposent par des moyens immoraux et se
maintiennent en méconnaissance du Droit naturel, leur durée de
vie est nécessairement limitée.
Leclercq
(Leçons de droit naturel, T.I, 1933) : Pour qu'un
dictateur s'impose, il ne suffit pas qu'il soit capable, il faut
encore que le peuple le croie capable ; il faut qu'il parvienne
à s'imposer à l'opinion. Dans l'avènement de la dictature
hitlérienne en Allemagne, on a pu, tout particulièrement, suivre
ce travail de l'opinion auquel le candidat dictateur a dû se
livrer pendant plusieurs années avant d'arriver au pouvoir...
Id (T.II) : La faiblesse de tous les systèmes
étatistes... c'est qu'ils impliquent toujours la perfection des
gouvernants. Malheureusement, ceux-ci sont des hommes comme les
autres, avec toutes les faiblesses. Ils sont même rarement les
meilleurs.
Voltaire (Lettre à Thiériot du 21 octobre 1736) : Il faut mentir comme un diable, non pas timidement, non pas pour un temps, mais hardiment et toujours. [On prête à Lénine ce propos : « Le mensonge est le moyen le plus éprouvé de la lutte bolchevique »].
Stuart Mill (De la liberté) : S’il rapetisse les hommes pour en faire des instruments dociles entre ses mains, même en vue d’un bienfait, un État s’apercevra vite qu’avec de petits hommes rien de grand ne saurait s’accomplir.
Taine (Les origines de la France contemporaine), La Révolution - Les Jacobins : Le Jacobin sait tout de suite quel est le gouvernement légitime et quelles sont les bonnes lois ; pour bâtir comme pour détruire son procédé rectiligne est le plus prompt et le plus énergique... Car il ne faut qu'un coup d'œil pour savoir ce que veulent les hommes abstraits de la théorie. En effet la théorie les a tous taillés sur le même patron et n'a laissé en eux qu'une volonté élémentaire ; par définition l'automate philosophique veut la liberté, l'égalité, la souveraineté du peuple... Cela suffit : désormais on connaît la volonté du peuple, et on la connaît d'avance ; par suite on peut agir sans avoir à consulter les citoyens ; on n'est pas tenu d'attendre leur vote... Le Jacobin a pour lui l'approbation de l'humanité prise en soi... C'est pourquoi, bien loin de se considérer comme un usurpateur et un tyran, il s'envisagera comme un libérateur.
Code annamite des Lé. Art. 410 : Ceux qui auront formé un complot de rébellion seront punis de la décapitation avec exposition de la tête. Leurs complices et tous ceux de leurs parents qui auront eu connaissance des faits seront punis de la décapitation. Leurs femmes, leurs enfants et leurs biens seront confisqués au profit de l’État.
Garcillasso de la Vega (Histoire des Incas) : Si quelqu’un mettait en colère l’Inca, il passait pour sacrilège et on le punissait avec la même rigueur que s’il avait été attaqué.
Dion Cassius (Histoire romaine) : Sylla afficha les noms de ses victimes... Approchait-on de cette affiche, c'était une curiosité coupable ; n'en approchait-on pas, c'était une marque de mécontentement. Lisait-on les listes ou demandait-on quels noms y étaient inscrits, c'était assez pour être soupçonné de chercher des renseignements pour soi-même ou pour autrui ; ne demandait-on aucun renseignement, c'était s'exposer à être regardé comme un ennemi de Sylla ou de ses partisans, et par là commettre un crime capital.
Blackstone (Commentaires sur les lois anglaises) : Henry VIII fit entrer dans le crime de haute-trahison le fait de faire à la Reine la moindre déclaration d’amour, ou de tenter de la séduire, et même de favoriser de quelque manière que ce fût leurs intrigues galantes, et pour une fille de se marier avec le Roi si elle n’était point vierge, à moins qu’elle n’en eût fait auparavant l’aveu.
Tribunal révolutionnaire 25 floréal an II (14 mai 1794) : Un hussard du 6e régiment comparaît. Il a répondu lors de l'interrogatoire préalable (procès-verbal) : Qu'il a toujours été royaliste, et qu'il n'a jamais été républicain. Condamné à mort séance tenante.
Wallon (Histoire du Tribunal révolutionnaire) : Dans le bourg de Bedoin, près Carpentras, l’arbre de la liberté avait été renversé pendant la nuit du 12 au 13 floréal an II. Maignet, le proconsul local, voulut que le village livrât les coupables ; comme la municipalité répondit qu’il n’y avait point de suspects dans Bedoin, le village fut condamné au feu, et le décret s’exécuta le 19 floréal.
DIFFAMATION
Cf. Adultère - droit positif français*, Amnistie (Rappel de condamnation amnistiée)*, Blogue*, Bonne foi*, Calomnie*, Caricature*, Considération*, Dénigrement*, Droit de réponse*, Exceptio veritatis*, Expression (liberté d’)*, Honneur*, Injure*, Lettre missive*, Lettre ouverte*, Libelle diffamatoire*, Lieu public*, Médisance*, Offense*, Outrage*, Réputation*, Ridiculiser*, Satire*, Vérité*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° II-330 et s., p.396 et s.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents »,
- diffamation entre époux n° 227
- envers un
mineur n° 428
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-I-114, p. 89 / n° II-I-114, p.351 / n° II-I-119, p.358 / n° II-I-212, p.441
Voir : Digeste de Justinien, L. 47, X
Voir : Garçon, Le chantage
Voir : Le "Corbeau" signait "L'oeil de tigre"
- Notion. La diffamation consiste à s’efforcer de noircir la réputation d’une personne en lui imputant des agissements ou des propos infamants. La Calomnie,* se distingue de la diffamation en ce qu’elle s’appuie sur des faits dont il est établi qu’ils ont été énoncés mensongèrement. L’Injure,* diffère de la diffamation et de la calomnie en ce qu’elle ne repose pas sur l’imputation de faits précis susceptibles de preuve.
Littré (Dictionnaire) : Terme de jurisprudence. Allégation d'un fait précis qui porte atteinte à l'honneur et à la considération.
Vitu (Traité de droit pénal spécial) : Si la médisance consiste en la révélation des fautes ou défauts d'autrui, faite sans raison ou dans l'intention de nuire, la calomnie est plus grave puisqu'elle suppose l'imputation de faits faux ou de fautes qui n'ont pas été commises, en vue de blesser l'honneur de la personne visée... La diffamation recouvre pratiquement la calomnie et la médisance.
- Règle morale. Dès lors qu'elle porte sournoisement atteinte à l'intégrité morale d'une personne, la diffamation appelle une sanction pénale. Si la peine doit être aggravée en fonction de la publicité donnée aux propos tenus, les poursuites doivent en principe être laissées à l'appréciation de la victime.
St Thomas d'Aquin (Somme théologique, II-II q.73 a.1) : On peut nuire au prochain en paroles de deux manières : en public, et c’est l’injure, nous l’avons dit ; en secret, et c’est la diffamation. Lorsque l’on tient ouvertement des propos offensants contre le prochain, on montre qu’on en fait peu de cas et on le déshonore par là même. C’est pourquoi l’injure porte atteinte à l’honneur de celui qui la subit. Mais celui qui tient ces propos dans le secret montre qu’il redoute l’autre plus qu’il ne le méprise. Il ne porte donc pas directement atteinte à son honneur, mais à sa réputation ; en ce sens que, proférant secrètement de telles paroles, il crée, autant qu’il le peut, chez ceux qui l’écoutent, une mauvaise opinion de celui qu’il dénigre. C’est bien cela, en effet, que le diffamateur semble se proposer et à quoi tendent ses efforts : que l’on croie ses paroles... Essentiellement, la diffamation est un péché mortel.
Ménant (Zoroastre, Essai sur la philosophie religieuse de la Perse) : Un mot résume la morale entière de Zoroastre, le reste n'en est plus que l'application : il y a trois mesures d'action, dit la loi, pureté de pensée, pureté de parole, pureté d'action.
Bautain (Manuel de philosophie morale) : La personne peut être attaquée... dans son honneur et sa réputation, par des outrages et par la diffamation.
Franck (La morale pour tous) : L'honneur fait tellement partie de notre être, il est si nécessaire à notre existence sociale, qu'il n'est pas permis de l'ôter à son prochain, même si l'on reste dans la vérité ou si l'on n'allègue contre lui que des faits parfaitement exacts. C'est ce que nos lois ont reconnu en punissant, non seulement la calomnie, mais la diffamation.
Vittrant (Théologie morale) : La réputation et l’honneur sont des biens (des intérêts protégés) au sens strict du mot ; biens d’autant plus estimables qu’ils sont spirituels de leur nature et se rapportent plus directement à l’âme. Arracher à un homme sa réputation ou nuire à son honneur constitue donc… une faute contre la justice grave de sa nature.
- Science criminelle. Dès lors qu'elle porte sournoisement atteinte à l'intégrité morale d'une personne, la diffamation appelle une sanction pénale. Si la peine doit être aggravée en fonction de la publicité donnée aux propos tenus, les poursuites doivent en principe être laissées à l'appréciation de la victime.
Voir : Décret du 12 floréal an III (1er mai 1795), visant toute provocation à l'avilissement de la représentation nationale (extraits)
Voir : Tableau des incriminations protégeant l'honneur et la considération (selon la science criminelle)
Code criminel d'Albanie. Art. 120 - Diffamation - Répandre intentionnellement des rumeurs, ou toute autre information sciemment fausse, qui affectent l'honneur et la dignité d'une personne... est passible d'une amende ou jusqu'à un an d'emprisonnement. Le même acte, accompli publiquement... est passible d'une amende ou jusqu'à deux ans d'emprisonnement.
Code pénal du Brésil. Art. 139 - Diffamer quelqu'un, en lui imputant un fait nuisible à sa réputation : Peine - détention, de trois mois à une année.
Code pénal italien de 1930. Art. 597 : Les délits d'injure ou de diffamation sont punissables sur la plainte de la personne offensée.
Cass.crim. 19 janvier 2010 (Gaz.Pal. 17 juin 2010) : La bonne foi doit être appréciée en tenant compte notamment du caractère d'intérêt général du sujet sur lequel portent les propos litigieux, et du contexte politique dans lequel ils s'inscrivent.
On a pu observer qu'il convient de distinguer entre les simples particuliers et les personnes qui ambitionnent de tenir des emplois publics, notamment de faire une carrière politique. La pureté des mœurs constituant un fondement de la démocratie, les actes de ces derniers doivent pouvoir être exposés aux citoyens qu'ils vont représenter et diriger. Mais la Cour EDH limite les critiques aux actes accomplis dans l'exercice des fonctions (sans tenir compte semble-t-il des addictions au jeu, à la drogue, à l'alcool..., qui le rendent pourtant vulnérable à de nombreux égards).
Franck (Philosophie du droit pénal) :La vie publique de celui qui est chargé, dans une mesure quelconque, des intérêts de l’État, de celui qui participe, n’importe à quel degré et sous quel titre, à l’exercice du pouvoir, appartient à la société ; elle est placée sous le contrôle de l’opinion ; autrement, la société et l’État seraient la propriété de ceux qui l’administrent, le gouvernent et le représentent soit au dedans, soit au dehors. La conséquence de ce principe, c’est qu’il est non seulement permis, mais méritoire, de dénoncer toute action qui peut paraître une dérogation à la loi et un abus d’autorité.
Cour EDH. 6 octobre 2011 (Gaz.Pal. 2 février 2012 note Piot) sommaire : Les limites de la critique admissible sont plus larges à l'encontre d'un responsable politique dans l'exercice de ses fonctions. Dans ce domaine, la Conv.EDH "ne laisse guère de place à des restrictions au droit à la liberté d'expression".
En ce qui concerne l'imputation de l'infraction, elle peut varier d'une législation à une autre selon qu'il existe ou non une réglementation propre à la presse écrite, radio, ou télévisuelle. Mais, les règles de droit commun subsistent à titre subsidiaire.
Cass.crim. 6 décembre 2011, n° 10-87556 : Après avoir souverainement constaté que le prévenu avait effectivement tenu les propos diffamatoires incriminés à un journaliste, en sachant qu'ils seraient publiés, la cour d'appel a justifié sa décision de condamnation, dès lors que le fait de livrer des informations à un journaliste au cours d'un entretien en toute connaissance de cause constitue un fait personnel, positif et conscient de complicité au sens de l'article 121-7 du code pénal.
L'expérience montre que des poursuites en diffamation ne vont pas sans risque pour celui qui les intente. Les débats peuvent en effet donner en pâture à la presse à scandale des faits que ce dernier aurait eu intérêt à garder secrets.
Exemple : Le journaliste Rochefort avait publié sur la baronne Kaula, épouse Jung, des articles virulents où elle était traitée de "scélérate, espionne prussienne, femme perdue", et où il était dit que "la France était livrée à la Prusse par le général Cissey, puisque c’était la fille Kaula sa maîtresse, qui livrait les plans des fortification de Paris à la Prusse". L'intéressée agit en injures et diffamation , mais les débats la noircir à un point tel que, tout en lui donnant raison en droit strict, le tribunal crut devoir énoncer dans son jugement que La dame Jung aurait peut-être dû garder le silence dans l'intérêt bien entendu de sa réputation et du nom que portent ses enfants.
- Droit positif français. Le législateur distingue entre la diffamation touchant une personne vivante, et celle visant la mémoire d'un mort.
- Diffamation envers une personne vivante. - Notion. La diffamation consiste à tenir sur une personne précise, en connaissance de cause, des propos reposant apparemment sur des faits susceptibles de preuve, et de nature à porter atteinte à la son honneur et à sa réputation.
Voir : J-P. Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° II-331 et s., p.398
Voir : Tableau des incriminations protégeant l'honneur et la considération (en droit positif français)
Voir : Beaumarchais, "Éloge de la calomnie"
Pour un exemple, voir le Cas pratique n°61.
Larguier (Droit pénal spécial) : La diffamation est l’allégation ou l’imputation d’un fait précis qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel il est imputé.
Cass.ass.plén. 25 juin 2010 (Gaz.Pal. 30 septembre 2010) : La diffamation suppose l'imputation de faits de nature à être, sans difficulté, l'objet d'une preuve et d'un débat contradictoire.
TGI Paris 15 avril 1992 (Gaz.Pal. 1995 I somm. 218) : Pour constituer une diffamation, une allégation ou une imputation doit se présenter sous la forme d’une articulation précise de faits de nature à être, sans difficulté, l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire.
Cass.crim. 30 mai 2007 (Bull.crim. n° 143 p.631) : Il appartient aux juges, saisis d'une poursuite pour diffamation ou injure, d'identifier d'après les circonstances de la cause la personne diffamée ou injuriée, et cette appréciation est souveraine lorsqu'elle porte sur des éléments extrinsèques aux propos incriminés.
Cass.crim. 4 décembre 2007 (D. 2008 298) : Selon l'art. 29, al. 1er, de la loi du 29 juillet 1881, la reprise d'une imputation diffamatoire constitue elle-même une diffamation qui implique l'intention de nuire, et cette présomption ne peut disparaître qu'en présence de faits justificatifs de nature à faire admettre la bonne foi.
Régime. Celui qui s'estime victime d'une diffamation peut se constituer partie civile, qu'il s'agisse d'une personne de droit privé ou de droit public. Mais le délai de prescription est en principe de trois mois.
Cons.Const. 25 octobre 2013 n° 2013-350 QPC (Gaz.Pal. 6 février 2014) résumé : Les autorités publiques dotées de la personnalité morale autres que l'État, à l'instar d'une commune, peuvent dorénavant mettre en mouvement l'action publique d'initiative et agir devant les juridictions civiles pour demander réparation de leur préjudice.
Cass.crim. 28 octobre 2014, n° 13-86303 : Le point de départ du délai de prescription de trois mois fixé par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 pour les infractions de presse, qui sont des infractions instantanées, court du jour de la première diffusion de l'écrit incriminé ; la rediffusion d'un même écrit, sans reproduction ni réimpression, ne constitue pas une nouvelle publication.
Pour sa défense, le prévenu peut chercher à établir la vérité des faits par tout moyen à sa disposition.
Cass.crim. 19 janvier 2010 (pourvoi n° 09-84408) : Le droit à un procès équitable et la liberté d'expression justifient que la personne poursuivie du chef de diffamation soit admise à produire, pour les nécessités de sa défense, les pièces de nature à établir la vérité des faits ou sa bonne foi, sans qu'elles puissent être écartées des débats au motif qu'elles auraient été obtenues par des moyens déloyaux.
Cass.crim. 27 avril 2011, n° 10-93771 (Gaz.Pal. 16 juin 2011 p. 20 note Michalski) sommaire : Les propos litigieux, portant sur un sujet d'intérêt général relatif à l'histoire récente du Cambodge, et au comportement d'un personnage important lors des événements tragiques qu'a connus ce pays de 1975 à 1979, ne dépassait pas les limites admissibles de la liberté d'expression dans la critique de l'action d'un homme politique, en vertu de l'art. 10 de la Conv. EDH et du principe selon lequel la liberté d'expression ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires au regard du paragraphe 2 de cet article.
- Mais le défendeur n'était pas recevable à établir la vérité de ses propos, dans trois cas disait la loi de 1881 (art. 35 al.3) jusqu'à ces dernières années : a) Lorsque l'imputation concerne la vie privée des personnes ; b) Lorsque l'imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de dix années ; c) Lorsque l'imputation se réfère à une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a été effacée par la réhabilitation ou la révision. Fin 2013, seul le premier cas subsiste .
Cass.crim. 18 novembre 1986 (Bull.crim. n° 345 p.901) : L'un des cas exceptionnels où la preuve de la vérité du fait diffamatoire est interdite est celui où ce fait concerne la vie privée. L'imputation portée contre un médecin au sujet des diagnostics posés et des traitements prescrits ne saurait être considérée comme relative à la vie privée.
Chavanne (Juris-classeur pénal annexes v° Presse, fasc. 90 n°195) : Les hypothèses prévues par l'art. 35, amnistie, réhabilitation ou révision n'appellent pas d'observation particulière, si ce n'est qu'il ne faut pas oublier que le fait que l' "exceptio veritatis" ne soit pas possible n'exclut pas la possibilité d'une relaxe au bénéfice de la "bonne foi".
Il ne l'est pas non plus en cas de diffamation raciale :
Cass.crim. 16 mars 2004 (Bull.crim. n° 67 p.257) : La preuve de la vérité des allégations diffamatoires n’est pas admise en matière de diffamation raciale.
En revanche le défendeur peut soulever l'exception de la liberté d'expression dans un débat démocratique :
Cass.crim. 8 avril 2014, n° 12-88095 : Ne constitue pas une diffamation le propos qui s'inscrit dans la suite d'un débat sur un sujet d'intérêt général relatif à la politique municipale concernant la mise en œuvre de la législation sur les nuisances sonores et le respect de l'environnement dans une localité rurale dépendante de l'économie touristique, et qui ne dépasse pas les limites admissible de la liberté d'expression dans la critique, par un administré, de l'action du maire de la commune [en ce qui concerne la nuisance provenant d'un centre de loisir et d'une école de pilotage automobile].
N.B. Le cas b) a donné lieu à de vives discussions, en raison de l'opposition entre un prétendu "droit à l'oubli" et un prétendu "devoir de mémoire" ; pour trancher un tel conflit, n'est-ce pas la manifestation de la vérité qui devait servir de critère ? D'où les arrêts ci-dessous, parfaitement justifiés.
Cass.crim. 15 mars 2011 (n° 10-90129 QPC) : La question présente un caractère sérieux dès lors qu'en interdisant au prévenu de diffamation de rapporter la preuve de la vérité des faits diffamatoires lorsque l'imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de dix années, l'art. 35 3° al. b) est susceptible de mettre en cause la liberté d'expression, l'exercice des droits de la défense et le droit à un procès équitable.
Conseil constitutionnel 20 mai 2011 (n° 2011-131 QPC, Gaz.Pal. 12 juillet 2011 note Briand) : En interdisant de rapporter la preuve des faits diffamatoires lorsque l'imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de dix ans, le cinquième alinéa de l'article 35 de la loi du 29 juillet 1881 a pour objet d'éviter que la liberté d'expression ne conduise à rappeler des faits anciens portant atteinte à l'honneur et à la considération des personnes qu'elle vise ; aussi, la restriction à la liberté d'expression qui en résulte poursuit un objectif d'intérêt général de recherche de la paix sociale. Toutefois, cette interdiction vise sans distinction, dès lors qu'ils se réfèrent à des faits qui remontent à plus de dix ans, tous les propos ou écrits résultant de travaux historiques ou scientifiques, ainsi que les imputations se référant à des événements dont le rappel ou le commentaire s'inscrivent dans un débat public d'intérêt général ; par son caractère général et absolu, cette interdiction porte à la liberté d'expression une atteinte qui n'est pas proportionnée au but poursuivi et méconnaît l'article 11 de la Déclaration de 1789.
Le cas c) a donné lieu lui aussi à controverse. Non sans raison, on a observé que l'impossibilité pour la personne prévenue de diffamation, de rapporter la preuve de la vérité d'un fait diffamatoire constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision, porte atteinte à la liberté d'expression et aux droits de la défense. Le Conseil constitutionnel s'est prononcé en ce sens.
Conseil constitutionnel 7 juin 2013, (n° 2013-319 QPC) : L'interdiction prescrite par la disposition en cause vise sans distinction, dès lors qu'ils se réfèrent à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision, tous les propos ou écrits résultant de travaux historiques ou scientifiques ainsi que les imputations se référant à des événements dont le rappel ou le commentaire s'inscrivent dans un débat public d'intérêt général ; par son caractère général et absolu, cette interdiction porte à la liberté d'expression une atteinte qui n'est pas proportionnée au but poursuivi ; ainsi, elle méconnaît l'article 11 de la Déclaration de 1789.
Diffamation envers un particulier. La diffamation visant un simple particulier est sanctionnée de manière différente selon qu'elle est publique ou non publique. La diffamation publique est réprimée par l’art. 29 al.1 de la loi du 29 juillet 1881.
Cass.crim. 12 juillet 1972 (Bull.crim. n° 239 p.627) : L’expression « repris de justice », qui implique par elle-même que la personne visée a été l’objet de condamnations pénales, doit être considérée non comme une injure mais comme une diffamation.
Cass.crim. 28 juillet 1949 (Bull.crim. n° 263 p.418) : L’arrêt qui déclare que des propos diffamatoires ont été tenus à haute voix dans un débit où étaient présents des consommateurs caractérise la publicité.
- La diffamation non-publique est sanctionnée par l’art. R.621-1 du Code pénal.
Cass.crim. 11
avril 2012, n° 11-87688 : Les imputations diffamatoires
contenues dans une correspondance personnelle et privée, et
visant le seul destinataire de la lettre qui les contient, ne
sont punissables, sous la qualification de diffamation non
publique, que si ladite lettre a été adressée dans des
conditions exclusives de tout caractère confidentiel ;
Pour confirmer le jugement entrepris, et dire établie la
contravention de diffamation non publique, l'arrêt retient que
dans le courrier du 19 décembre 2009, M. X... écrit , notamment,
"votre attitude relève de la dictature" ; que, dans le second
courrier, M. X... écrit, notamment, "il y a chez vous, comme une
sorte de maladie mentale, à toujours vouloir vous couvrir" ;
que, le courrier du 27 février 2010 contient, notamment, le
passage suivant : "ne comprenez vous pas que vous avez utilisé
le bien public des Andrésiens pour faire passer vos convictions
personnelles maçonniques et influencer secrètement vos
concitoyens" ?, puis plus loin : "vous mentez, vous travestissez
la réalité, vous êtes incompétent " ; que même si elle est
présentée sous une forme qui semble relativiser la portée du
propos, une expression qui contient l'imputation d'un fait
précis et déterminé de nature à porter atteinte à l'honneur ou à
la considération de la personne visée, constitue une diffamation
;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il résulte de la
procédure que les trois lettres litigieuses ont revêtu le
caractère de correspondances personnelles et privées et ont
conservé une nature confidentielle, la cour d'appel a méconnu
les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ; D'où il
suit que la cassation est encourue.
Diffamation envers un corps ou un agent public. La diffamation visant les cours, les tribunaux, les armées les corps
constitués ou les administrations publiques tombe sous le coup de l’art. 30 de la loi du 29 juillet 1881.
La diffamation visant un membre d’un ministère, un membre d’une Chambre, un fonctionnaire public, un dépositaire ou agent de l’autorité publique, un
citoyen chargé d’un service ou d’un mandat public, un juré ou un témoin, est régie par l’art. 31 de la même loi.
Voir : J-P. Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-212, p.441
Cass.crim. 16 juillet 2010 (pourvoi n° 10-90081) : Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations distinctes ; si l'amende encourue pour la diffamation publique envers un fonctionnaire public est plus élevée que celle encourue pour la diffamation publique envers un particulier, elle sanctionne, sans disproportion manifeste, l'atteinte portée non seulement à celui qui est visé par les propos incriminés, mais aussi à la fonction qu'il incarne.
Cass.crim. 3 décembre 2002 (Bull.crim. 2002 n° 217 p.803), sur l’art. 30 : En proférant des accusations graves à l’encontre de la police nationale et en procédant à des comparaisons avec les méthodes employées par la Gestapo ou la Milice du régime de Vichy, un avocat s’est exprimé sans prudence ou modération en jetant l’opprobre sur l’ensemble du corps des fonctionnaires de police.
Cass.crim. 27 septembre 1995 (Gaz.Pal. 1996 I Chr.crim. p.2) : Les imputations diffamatoires mettant en cause un fonctionnaire public doivent s'apprécier, non d'après le mobile qui les a inspirées ou le but recherché par leur auteur, mais d'après la nature du fait sur lequel elles portent ; elles entrent dans les prévisions de l'art. 31 de la loi du 29 juillet 1881, dès lors qu'elles contiennent la critique d'actes des fonctions, ou d'abus des fonctions. Il en est ainsi en l'espèce, où l'imputation incriminée visait L. en raison de son appartenance à l'Université et de son activité d'enseignant.
Cass.crim. 15 janvier 1998 (Gaz.Pal. 1998 I Chr.crim. 72), sur l’art. 31 : Les juges ont, à bon droit, retenu le caractère diffamatoire envers le plaignant, fonctionnaire de police, des passages de l’écrit incriminé lui imputant une garde à vue abusive et un comportement violent et humiliant envers une commerçante.
Cass.crim. 5 décembre 1935 (Bull.crim. n° 139 p.252) : Si le fait imputé ne constitue ni un acte, ni un abus de la fonction ou du mandat public, la diffamation n’atteint que l’homme privé.
- Diffamation envers la mémoire d’un mort. - La diffamation envers la Mémoire d’un mort* n’est punie par l’art. 34 de la loi du 29 juillet 1881 que si leur auteur a eu l’intention de porter indirectement atteinte à l’honneur ou à la considération des héritiers, époux ou légataires universels vivants.
Cf. Cadavre*, Sépulture*.
Voir : J-P. Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° 45 p.43
Franck (Philosophie du droit pénal) : Il est permis de divulguer, à la charge d’en faire la preuve, les actions et même les paroles des morts qui ont joué un rôle, quel qu’il soit, capable d’intéresser la postérité et l’histoire. Qu’on défende de produire au grand jour des faits plus ou moins honteux pris dans la vie d’un homme obscur, qui n’est jamais sorti de la vie privée, et cela dans le seul but de déshonorer une famille, de faire injure à un vivant, rien de plus juste. Mais que la loi ou la justice interdise de juger et de faire connaître ceux qui ont disparu de ce monde après avoir pris une part à la vie publique, après avoir joué un rôle parmi leurs concitoyens ou leurs contemporains, après avoir occupé une place dans les lettres, dans les sciences, dans les arts, c’est une prétention qui ne peut se soutenir ; car elle a pour conséquence la suppression de l’histoire ou tout au moins de cette partie de l’histoire sans laquelle nous ne possédons que des faits bruts, dépourvus de la lumière morale qui les éclaire et qui en fait jaillir des leçons profitables à la conscience humaine.
Digeste de Justinien, 47 X, 1, 4. Ulpien : Si l'on a fait injure au cadavre d'un défunt, dont nous sommes héritiers ou possesseurs de biens, nous avons en notre nom l'action d'injures : car l'injure qu'on leur fait attaque notre réputation. Il en est de même si l'on attaque la mémoire de ceux dont nous sommes héritiers.
Code pénal du Paraguay (état en 1997). Art. 153 : Celui qui dénigre gravement la mémoire d'un mort, par calomnie, diffamation ou injure sera puni de la privation de liberté jusqu'à un an.
Cass.crim. 22 mars 1961 (Bull.crim. n°160 p.338) : Le délit n’est réalisé que si l’auteur de l’article a eu l’intention de porter atteinte à l’honneur et à la considération des héritiers vivants.
Cass.crim. 10 mai 2011 (Gaz.Pal. 13 octobre 2011 note Fourment) sommaire : L'action en diffamation ou injure contre la mémoire d'un mort implique que soit établie la qualité d'héritier ayant accepté la succession.
Exemple (La Meuse 21 septembre 1977) : La Haute Cour de Taipeh a confirmé un jugement condamnant l'éditeur d'une revue, pour diffamation. En s'appuyant sur des textes anciens, cette revue avait affirmé que le lettré Han Yu, qui vivait sous la dynastie des Tang (618 à 907 av. J.-C.) avait mené une vie dissolue... L'un des descendants du lettré, M. Han Tsy-tao a porté plainte pour diffamation. Il a gagné. Dans ses attendus, le tribunal a estimé que "les vertus de Han avaient été calomniées sans rien apporté à l'éducation du public".
DIFFUSION DE FAUSSE NOUVELLE - Voir : Fausse nouvelle*.
DIGNITÉ DE LA PERSONNE HUMAINE
Cf. Âme*, Anthropophagie*, Bigamie*, Bizutage*, Cadavre*, Conscience*, Corps de l’homme*, Débauche*, Défendeur*, Devoirs*, Discrimination*, Droits de l'homme*, Droits intangibles et droits fondamentaux*, Embryon*, Esclavage*, Hébergement*, Humanité*, Ivresse*, Jeu*, Libre arbitre*, Logement insalubre*, Manipulation mentale*, Marchandage*, Personne humaine*, Polygamie*, Prostitution*, Proxénétisme*, Racisme*, Servage*, Stupéfiants*, Traite (d'êtres humains)*, Travail (conditions)*, Travail forcé*, Vices*.
Voir : J-P. Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° 49 et s., p.48 et s.
Voir : J-P. Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 11, et Table alphabétique
Voir : J-P. Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-302, p.221/222
Voir : J-P. Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-109, p.391 (et voir Table des matières)
Voir : J-P. Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-II-101, p.220 - n° I-II-II-203 p.233/234
Voir : Le lit de Procuste
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
Voir : Convention prohibant l’esclavage du 25-09-1926, amendée le 7-12-1953
Voir : Les limites de la chirurgie esthétique : un patient ne peut servir de matériel publicitaire
- Notion. La dignité de la personne humaine découle de ses facultés spirituelles, qui se manifestent notamment
dans sa conscience du bien et du mal. Il en résulte des devoirs : devoir de faire le bien et de lutter contre le mal, de ne pas nuire à autrui et de
rendre à chacun ce qui lui revient, de ne pas s'avilir soi-même et de faire progresser l’humanité dans la voie de la moralité.
Tout être humain est sans doute égal en dignité dans l'abstrait
; mais, concrètement, il appartient à chacun de progresser
personnellement dans
le sens d'une plus profonde moralité, d'une plus totale loyauté,
d'une plus intense spiritualité.
Cicéron (Traité des lois) 24 : Au fil des siècles, il s'est produit un certain instant de maturité propre à l'ensemencement de la race des hommes ; race qui, une fois répandue à la surface des terres, s'est enrichie par le don de l'âme qu'elle a reçue des Dieux.
Pierre et Martin (Cours de morale pour l'enseignement primaire) : Les tendances impérieuses de notre âme vers le bien, comme la répugnance que le mal lui inspire, prouvent la grandeur et la dignité de la nature humaine.
Lecomte du Noüy (L'homme et sa destinée) : Le respect de la personne humaine implique la reconnaissance de la dignité de l'homme en tant qu'artisan de l'évolution de l'Homme et collaborateur de Dieu. Cette dignité repose sur le nouveau mécanisme qui, né avec la conscience, oriente l'évolution dans une direction spirituelle : à savoir la liberté de choix.
Dreyer (La dignité opposée à la personne, D. 2008 n° 39) : La dignité correspond à l'essence de l'homme ; c'est ce qui permet de distinguer l'homme de l'animal et des choses en général. Reconnaître dans l'autre son frère et agir en conséquence avec respect à son égard, voilà de quoi il s'agit. La dignité suppose d'admettre un rapport d'égalité, de voir en autrui également une personne, de ne jamais dénier en lui toute part d'humanité.
Les temps contemporains ne lui paraissent pas favorables, en raison de la progression des dictatures politiques et des fanatismes religieux.
Max Gallo (Caïn et Abel, Le premier crime) : Les prophéties qu'énonce Jean décrivent notre XXe et le XXIe siècles qui commence... Tout est désordre et crime... Partout la mort rôde... L'homme est devenu une marchandise.
- La théologie morale est pourtant bien évidemment en ce sens :
Voir : Discours du Pape Benoît XVI aux représentants des Nations-Unies le 18 avril 2008
Triade druidique : L’homme doit : Faire le bien, lutter contre le mal, avancer en spiritualité.
St Augustin (La Cité de Dieu, 12-23) : Dieu a donné à l'homme une âme qui, par le privilège de la raison et de l'intelligence, l'élève au-dessus de tous les animaux de la terre, des eaux et de l'air.
Jean XXIII (Pacem in terris) : Le fondement de toute société bien ordonnée et féconde, c’est le principe que tout être humain est une personne, c’est-à-dire une nature douée d’intelligence et de volonté libre. Par là même il est sujet de droits et de devoirs découlant de sa nature ; aussi sont-ils universels ; inviolables et inaliénables. Si nous considérons la dignité humaine à la lumière des vérités révélées par Dieu, nous pouvons la situer bien plus haut encore.
Jean-Paul II (La splendeur de la vérité) : Il n’est jamais permis d’avilir ou de contredire la dignité humaine, même avec une intention bonne, quelles que soient les difficultés.
Le Pape François (Discours devant le Parlement européen du 25 novembre 2014) : La dignité est le mot clé qui a caractérisé la reprise du second après-guerre. Notre histoire récente se caractérise par l'indubitable centralité de la promotion de la dignité humaine contre les violences multiples et les discriminations qui, même en Europe, n'ont pas manqué dans le cours des siècles. La perception de l'importance des droits humains naît justement comme l'aboutissement d'un long chemin, fait de multiples souffrances et sacrifices, qui a contribué à former la conscience du caractère précieux, de l'unicité de toute personne humaine individuelle.
Bruguès (Dictionnaire de morale catholique) : Avec raison notre époque fait découler de la dignité humaine les droits premiers de la personne. La dignité humaine n’est pas conférée par la société. Il convient de dénoncer la tentation récurrente de toute société à se vouloir « sacrale », c’est-à-dire première origine de la dignité humaine ; l’arbitraire et le totalitarisme en deviendraient moralement justifiés. Il faut voir dans la dignité une propriété intrinsèque de la nature humaine. L’homme est digne par lui-même, et cette dignité s’impose à l’autorité publique.
Maritain (Les droits de l’homme et la loi naturelle) : La dignité de la personne humaine résulte du lien entre la notion de droit et la notion d’obligation morale : si l’homme est moralement obligé aux choses nécessaires à l’accomplissement de sa destinée, il a droit aux choses nécessaires pour cela.
Dalaï-lama, (Tout l’univers dans un atome - Science et bouddhisme, une invitation au dialogue ) : Le matérialisme scientifique radical pose un problème majeur, celui d’engendrer une vision étroite, ainsi qu’un possible nihilisme. Dans une perspective philosophique et tout particulièrement humaniste, le nihilisme, le matérialisme et le réductionnisme présentent le risque d’appauvrir la façon dont nous nous voyons, nous, humains. Ainsi, nous pouvons nous envisager comme des créatures biologiques nées du hasard ou comme des êtres particuliers dotés de conscience et de capacité morale. La vision choisie aura un impact sur l’idée que nous nous faisons de nous-mêmes et sur notre comportement vis-à-vis d’autrui. De nombreuses dimensions de l’humain – art, éthique, spiritualité, bonté, beauté et par-dessus tout conscience – se retrouvent alors réduites ou à des réactions chimiques neuronales ou à des constructions purement imaginaires. Il y a un danger que les êtres humains soient réduits à n’être rien de plus que des machines biologiques, les produits du pur hasard dans une combinaison aléatoire de gènes, sans autre but que l’impératif biologique de reproduction.
Bautain (Philosophie des lois, 1860) : Il est évident que par sa pensée et sa liberté, l'homme est plus que la pierre, plus que le végétal, plus que l'animal, qu'en lui l'instinct divin de la liberté, et l'instinct plus divin encore de la justice et de la charité, sont plus nobles que ceux de l'animalité, les appétits de la nourriture, de la reproduction ...Il y a en lui quelque chose qui domine le corps et tout ce qui en ressort ; c'est sa nature spirituelle qui est au-dessus de sa nature organique, comme l'esprit est supérieur à la matière. Donc, tout en accordant à la partie inférieure ce qu'elle a le droit d'exiger pour subsister, il faut, pour qu'elle reste dans l'ordre, la soumettre à la partie supérieure, il faut que l'âme gouverne le corps, que l'intelligence et la liberté dirigent les instincts, et qu'ainsi satisfaction ne soit donnée à l'animal que conformément à la nature de l'être raisonnable. Voilà comment s'explique la loi naturelle de l'homme, qui ne prescrit en définitive que ce qui est conforme à sa nature spirituelle.
- La philosophie morale spiritualiste également. Elle est appuyée sur ce point par des scientifiques qui considèrent que l'homme est porteur dans ses gênes d'une logique interne qui lui permet encore d'évoluer et même de se perfectionner dans le Bien*.
Voir : Cousin, Devoirs envers soi-même et devoirs envers autrui
Voir : A. Pierre et A. Martin, Cours de morale à l'usage des écoles primaires supérieures
Montaigne (Essais III-11) ajoute que Chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition.
Anne Cheng (Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale). V° Confucius. Mencius perçoit la nature humaine comme portée au bien, non pas seulement de par sa réalité donnée, mais aussi de par sa destinée. Dire que la vie humaine n’est pas qu’un donné biologique, auquel nous nous accrocherions avec un instinct animal de conservation, c’est dire qu’elle est douée d’un destin moral, autrement dit qu’elle a un sens, et que ce sens est moral.
Thomas (Cours de philosophie morale) : À mesure que s'opère l'évolution de l'humanité, l'homme prend de plus en plus conscience de sa valeur et de sa propre dignité. Il se persuade peu à peu qu'il ne vaut pas seulement par la société dont il fait partie, mais qu'il vaut aussi pour lui-même ; en un mot qu'il est respectable parce qu'il est un être raisonnable et libre.
Simon Foucher (La morale de Confucius selon Zong zi) : Conduisez-vous toujours avec la même précaution et avec la même retenue que vous auriez, si vous étiez observé par dix yeux et que vous fussiez montré par dix mains.
Kant (Traité de pédagogie) : C'est le devoir de l'homme de ne pas méconnaître dans sa propre personne la dignité de l'humanité.
Steeg (L’honnête homme) : Quelle est la fin de l’homme ? C’est de mûrir pleinement toutes ses facultés. Être homme, au sens complet du mot, c’est être, non un animal ou une chose, mais une personne, c’est-à-dire une créature intelligente, raisonnable et libre, au caractère droit et ferme… J’ai des droits, mais ces droits reposent sur des devoirs.
Lecomte du Noüy (La dignité humaine) : Le seul but que doive se proposer un homme est d'atteindre à la dignité humaine par le perfectionnement de soi-même. J'entends par là que toutes ses acquisitions intellectuelles, toutes les facilités que la société met à sa disposition, écoles, universités ; toutes celles que lui offrent les religions... doivent être considérées par lui comme des outils destinés à améliorer, à faire progresser sa personnalité et sa conscience.
Staune (Notre existence a-t-elle un sens ? ) autre scientifique, écrit en 2007: La chose la plus importante dans la vie n'est pas de lutter pour la conquête du pouvoir ou des richesses matérielles... Non, le plus important c'est de développer notre esprit.
Baudin (Cours de philosophie morale) : Le devoir de respect de la dignité morale d'autrui n'a point de limites. Et il est le seul à n'en pas avoir.
Cuvillier (Manuel de philosophie) : Nous avons déjà vu l’individualisme absolu aboutir, par une sorte de contradiction interne, à la négation même de son principe : la valeur de la personne humaine. Il ne faut pas oublier que cette valeur, l’individu ne la tient pas de lui, mais de sa dignité d’être humain, d’être raisonnable, à laquelle il a été élevé par la vie sociale.
Dante (La Divine Comédie) observe que : L’espèce humaine n’est pas faite pour vivre comme des bêtes, mais pour rechercher la vertu et la connaissance.
- En revanche les philosophies matérialistes voient dans l'homme une simple machine, un animal comme tout autre, sans dignité particulière. Pour eux, puisqu'il est de même nature que les animaux et que rien ne les en distingue, il n'y a pas lieu de lui reconnaître un statut particulier. Cette doctrine fait le bonheur des régimes totalitaires, qu'elle autorise à voir dans la peuple une masse indifférenciée d'êtres vivants à leurs ordres. Une variante actuelle consiste ranger les animaux et les hommes dans une même catégorie appelant un régime juridique identique ; on parle alors des droits des animaux comme on parle des droits de l'homme (de ce fait, la notion parallèle de devoirs disparaît, en dehors bien évidemment de l'obligation d'obéir aux représentants de l'État). Il est clair que telle n'est pas notre position.
La Mettrie (L'homme machine) in fine : Concluons hardiment que l'Homme est une Machine, et qu'il n'y a dans tout l'Univers qu'une seule substance diversement modifiée. Ce n'est point ici une hypothèse élevée à force de demandes et de suppositions... L'expérience m'a parlé pour la raison ; c'est ainsi que je les ai jointes ensemble. On a dû voir que je ne me suis permis le raisonnement le plus rigoureux et le plus exactement tiré, qu'à la suite s'observations physiques qu'aucun savant ne contestera ; c'est eux seuls que je reconnais comme juges des conséquences que j'en tire, récusant ainsi tout homme à préjugés, et qui n'est ni anatomiste, ni au fait de la seule philosophie qui est ici de mise, celle du corps humain... Voilà mon système, ou plutôt la vérité, si je ne me trompe fort.
Conséquence (Ouest-France 3 juin 2011) : À Gaoping, dans le sud de la Chine, les autorités locales ont, pendant des années, enlevé puis revendu des bébés dont les parents avaient contrevenu au strict planning familial. Une vingtaine de cas ont été recensés... L'enjeu est surtout financier : les bébés, réinsérés dans le circuit légal d'adoption, auraient été revendus 3.000 $ par l'orphelinat à des couples en majorité américains... Jingnan témoigne : "Ici, les bébés sont des marchandises échangeables".
- Conséquences juridiques. Les devoirs qui pèsent sur l’homme, en raison de sa dignité éminente, engendrent et délimitent des privilèges que l’on nomme de nos jours les Droits de l’homme,*. Reposant sur des devoirs, ces droits ne sauraient toutefois être regardés comme des absolus sans limites et sans contreparties.
Voir : Tableau des incriminations luttant contre la dépravation des moeurs (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations luttant contre la dépravation des mœurs (en droit positif français)
Voir : Tableau des incriminations luttant contre l'alcoolisme (selon la science criminelle)
Voir : Décret du 16 pluviôse an II (4 février 1794), abolissant l’esclavage dans les colonies
Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948. Dans son préambule, elle vise la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine.
Convention internationale des droits de l'enfant, 1989. Préambule : La reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine ainsi que l'égalité et le caractère inaliénable de leurs droits sont le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde.
Denisart (Collection de jurisprudence, Paris 1768) tirait de la dignité de la personne humaine une conséquence de pure technique juridique : L’ordre du droit veut que l’on parle d’abord des personnes, puis des biens.
La dignité de la personne humaine constitue un Intérêt juridique* qui s’impose à l’État, et que le législateur doit donc protéger. En raison de son imprécision, la dignité humaine ne peut cependant susciter que des incriminations éparses (p.ex. prohibition de la vente d'êtres humains, interdiction de faire des expériences sur des êtres humains, interdiction de l’esclavage, exigence d’un hébergement décent...).
Constitution
italienne de 1947. Art. 3 : Tous les citoyens ont une même
dignité sociale et sont égaux devant la loi, sans distinction de
sexe, de race, de langue, de religion, d’opinions politiques, de
conditions personnelles et sociales.
Il appartient à la République d’éliminer les obstacles d’ordre
économique et social qui, en limitant de fait la liberté et
l’égalité des citoyens, entravent le plein développement de la
personne humaine...
Code pénal de Colombie. Art. 1 : Dignité humaine. Le droit pénal aura pour fondement le respect de la dignité humaine.
Code de procédure pénale du Venezuela. Préambule : Le Venezuela appartient à la famille des peuples du monde qui reconnaissent dans la dignité de la personne humaine une valeur essentielle, qui doit servir de fondement à la création, l'interprétation et l'application de l'ordre juridique positif. Cette valeur morale, telle une étoile polaire, doit guider le travail szq législateurs, des administrateurs et des juges.
Conseil d’État 27 octobre 1995 (Gaz.Pal. 1996 II panor.adm. 64) : L’attraction de «lancer de nain» consistant à faire lancer un nain par des spectateurs conduit à utiliser comme projectile une personne affectée d’un handicap physique et présentée comme telle. Par son objet même, une telle attraction porte atteinte à la dignité de la personne humaine. L’autorité investie du pouvoir de police municipale pouvait dès lors l’interdire.
Exemple (Ouest-France 15 juillet 2011) : Un couple néerlandais qui avait acheté un bébé belge via Internet en juillet 2008 a été condamné à 8 mois de prison avec sursis par un tribunal des Pays-Bas. Il leur est reproché une fausse déclaration de naissance et une adoption illégale. Pas de poursuite pour la transaction elle-même, aucun article du Code pénal néerlandais n'interdisant d'acheter un enfant. Les parents belges du nourrisson, en difficulté financière, l'avaient cédé pour 7.500 €.
Exemple (Ouest-France 23 juillet 2010) : Des Allemands de l'Est cobayes humains. Des groupes pharmaceutiques occidentaux ont utilisé des Allemands de l'Est en échange d'argent versé au régime communiste de RDA, a révélé une chaîne de télévision allemande. Les tests de médicaments, non homologués à l'Ouest, auraient duré de 1985 à la chute du mur de Berlin, en 1989, ils concernaient plus de 2.000 patients.
Exemple (Ouest-France 11 août 2006) : Un bar de Nankin, dans l'est de la Chine, propose un service d'un genre un peu particulier à ses clients. En échange de 50 à 300 yuans (5 à 30 €), ceux-ci peuvent assouvir leur colère sur les serveurs, en les utilisant comme des punching-ball humains. Le tarif comprend les poussées de hurlements sauvages. Le patron assure que les serveurs ont accepté d'être brutalisés et ont reçu un entraînement physique spécial.
La dignité de la personne humaine doit notamment être respectée au cours du procès pénal.
Code pénal du Nicaragua. Art. 3. Respect de la dignité humaine - Dans le déroulement du pénal toute personne doit être traitée avec le respect dû à la dignité propre de la personne humaine, avec protection des droits qui en dérivent et ce dans des conditions d'égalité.
DILATOIRE - Voir : Moyen dilatoire*.
DIPSOMANIE
Cf. Alcoolisme*, Cause de non-imputabilité*, Démence*.
Voir : J-P. Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-II-213, p.243
La dipsomanie est une maladie consistant en une impulsion irrésistible à absorber, par accès mais en grande quantité, des boissons alcooliques. Dans la mesure où elle est médicalement constatée, elle peut constituer une cause de non-imputabilité.
Dictionnaire médical Larousse : La dipsomanie est une tendance, un entraînement, une impulsion irrésistible à boire, survenant par accès et s'exerçant le plus souvent sur des boissons alcoolisées.
Maxwell (Le crime et la société) : Il faut distinguer l'ivrognerie, besoin acquis et artificiel, des impulsions [maladives] caractéristiques de la dipsomanie.
Lombroso (L'homme criminel) : La tendance à l'ivresse habituelle a sa figure psychiatrique dans la dipsomanie.
Tarde (La philosophie pénale) : En quoi l'ivrognerie pure et simple diffère-t-elle de la dipsomanie, qui seule est une variété de folie ? En ce que l'ivrogne a plaisir et se réjouit de se sentir entraîné à boire, sa volonté et sa passion étant d'accord, tandis que le dipsomane est forcé, malgré lui, de s'enivrer, s'en attriste et en souffre.
DIRECTION DES DÉBATS
Cf. Président de la juridiction de jugement*.
Voir : R. et P. Garraud, Le pouvoir discrétionnaire du président de la cour d'assises
Les art. 309 et 401 C.pr.pén. reconnaissent au président de la cour d’assises et à celui du tribunal correctionnel le pouvoir de mener l’instruction en fonction des particularités du cas d’espèce. C’est à lui qu’il appartient d’apprécier l’opportunité présente de telle ou telle mesure d’instruction. Ce qu’il doit avoir toujours en vue, c’est d’obtenir la manifestation de la vérité.
Angevin (La pratique de la cour d’assises) : Le pouvoir de direction des débats, reconnu par l’art. 309 C.pr.pén., est celui en vertu duquel le président conduit l’instruction à l’audience de telle manière que la discussion contradictoire se déroule dans l’ordre et que l’enchaînement des opérations qui la constitue mène logiquement à la découverte de la vérité.
Code de procédure pénale allemand, § 238 : Il revient au président de diriger les débats, d’interroger l’accusé et de recevoir les preuves… Si une décision prise par le président relativement à la direction de l’affaire est contestée par l’une des personnes parties aux débats, comme ne lui étant pas permise, c’est le tribunal qui statue.
Code de procédure pénale espagnol, Art. 683 : Le président dirigera les débats en veillant à empêcher les discussions sans pertinence et qui ne tendent pas à établir la vérité, mais sans restreindre ainsi la liberté nécessaire aux défenseur.
Cass.crim. 26 février 1992 (Gaz.Pal. 1992 II Chr.crim. 368) : Aucun texte ne prescrit d’ordre obligatoire à suivre entre les auditions des experts, les dépositions des témoins ou les observations des parties civiles, qui n’ont pas à être reçues après achèvement de l’instruction à l’audience. En déterminant l’ordre de ces opérations, le président a régulièrement usé du pouvoir de direction des débats qu’il tient de l’art. 309 C.pr.pén.
Cass.crim. 5 mars 1986 (Bull.crim. n° 92 p.226) sommaire : Il appartient au président, en vertu de son pouvoir de direction des débats, de rejeter tout ce qui tendrait à en compromettre la dignité, et de s’opposer à toute pratique qui pourrait nuire à l’équité du procès.