CONVENTION RELATIVE À L’ESCLAVAGE
Signée à Genève le 25 septembre 1926,
( entrée en vigueur le 9 mars 1927 )
Amendée par le Protocole du 7 décembre 1953
(convention amendée entrée en vigueur le 7 juillet 1955 )
I - Convention de Genève du 25 septembre 1926
Considérant que les signataires de l’Acte général de la Conférence de Bruxelles de 1889-1890 se sont déclarés également animés de la ferme intention de mettre fin au trafic des esclaves en Afrique,
Considérant que les signataires de la Convention de Saint-Germain-en-Laye de 1919, ayant pour objet la révision de l’Acte général de Berlin de 1885, et de l’Acte général de la Déclaration de Bruxelles de 1890, ont affirmé leur intention de réaliser la suppression complète de l’esclavage, sous toutes ses formes, et de la traite des esclaves par terre et par mer,
Prenant en considération le rapport de la Commission temporaire de l’esclavage, nommée par le Conseil de la Société des Nations le 12 juin 1924,
Désireux de compléter et de développer l’oeuvre réalisée grâce à l’Acte de Bruxelles et de trouver le moyen de donner effet pratique, dans le monde entier, aux intentions exprimées, en ce qui concerne la traite des esclaves et l’esclavage, par les signataires de la Convention de Saint-Germain-en-Laye, et reconnaissant qu’il est nécessaire de conclure à cet effet des arrangements plus détaillés que ceux qui figurent dans cette Convention.
Estimant, en outre, qu’il est nécessaire d’empêcher que le travail forcé n’amène des conditions analogues à celles de l’esclavage,
Ont décidé de conclure une convention et ont désigné comme plénipotentiaires à cette effet : ... Lesquels sont convenus des dispositions suivantes :
Article premier
Aux fins de la présente Convention, il est entendu que :
1° L’esclavage est l’état ou condition d’un individu sur lequel s’exercent les attributs du droit de propriété ou certains d’entre eux ;
2° La traite des esclaves comprend tout acte de capture, d’acquisition ou de cession d’un individu en vue de la réduire en esclavage; tout acte d’acquisition d’un esclave en vue de le vendre ou de l’échanger; tout acte de cession par vente ou échange d’un esclave acquis en vue d’être vendu ou échangé, ainsi que, en général, tout acte de commerce ou de transport d’esclaves.
Article 2
Les Hautes Parties contractantes s’engagent, pour autant qu’elles n’ont pas déjà pris les mesures nécessaires, et chacune en ce qui concerne les territoires placés sous sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté ou tutelle :
a) À prévenir et réprimer la traite des esclaves;
b) À poursuivre la suppression complète de l’esclavage sous toutes ses formes, d’une manière progressive et aussitôt que possible.
Article 3
Les Hautes Parties contractantes s’engagent à prendre toutes mesures utiles en vue de prévenir et réprimer l’embarquement, le débarquement et le transport des esclaves dans leurs eaux territoriales, ainsi que, en général, sur tous les navires abordant leurs pavillons respectifs.
Les Hautes Parties contractantes s’engagent à négocier, aussitôt que possible, une convention générale sur la traite des esclaves leur donnant des droits et leur imposant des obligations de même nature que ceux prévus dans la Convention du 17 juin 1925 concernant le commerce international des armes (articles 12, 20, 21, 22, 23, 24 et paragraphes 3, 4, 5 de la section II de l’annexe II), sous réserve des adaptations nécessaires, étant entendu que cette convention générale ne placera les navires (même de petit tonnage) d’aucune des Hautes Parties contractantes dans une autre position que ceux des autres Hautes Parties contractantes.
Il est également entendu que, avant comme après l’entrée en vigueur de ladite convention générale, les Hautes Parties contractantes gardent toute liberté de passer entre elles, sans toutefois déroger aux principes stipulés dans l’alinéa précédent, tels arrangements particuliers qui, en raison de leur situation spéciale, leur paraîtraient convenables pour arriver le plus promptement possible à la disparition totale de la traite.
Article 4
Les Hautes Parties contractantes se prêteront mutuellement assistance pour arriver à la suppression de l’esclavage et de la traite des esclaves.
Article 5
Les Hautes Parties contractantes reconnaissent que le recours au travail forcé ou obligatoire peut avoir de graves conséquences et s’engagent, chacune en ce qui concerne les territoires soumis à sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté ou tutelle, à prendre des mesures utiles pour éviter que le travail forcé ou obligatoire n’amène des conditions analogues à l’esclavage.
Il est entendu :
1° Que, sous réserve des dispositions transitoires énoncées au paragraphe 2 ci-dessous, le travail forcé ou obligatoire ne peut être exigé que pour des fins publiques;
2° Que, dans les territoires où le travail forcé ou obligatoire, pour d’autres fins que des fins publiques, existe encore, les Hautes Parties contractantes s’efforceront d’y mettre progressivement fin, aussi rapidement que possible, et que, tant que ce travail forcé ou obligatoire existera, il ne sera employé qu’à titre exceptionnel, contre une rémunération adéquate et à la condition qu’un changement du lieu habituel de résidence ne puisse être imposé;
3° Et que, dans tous les cas, les autorités centrales compétentes du territoire intéressé assumeront la responsabilité du recours au travail forcé ou obligatoire.
Article 6
Les Hautes Parties contractantes dont la législation ne serait pas dès à présent suffisante pour réprimer les infractions aux lois et règlements édictés en vue de donner effet aux fins de la présente Convention s’engagent à prendre les mesures nécessaires pour que ces infractions soient punies de peines sévères.
Article 7
Les Hautes Parties contractantes s’engagent à se communiquer entre elles et à communiquer au Secrétaire général de la Société des Nations les lois et règlements qu’elles édicteront en vue de l’application des stipulations de la présente Convention.
Article 8
Les Hautes Parties contractantes, conviennent que tous les différends qui pourraient s’élever entre elles au sujet de l’interprétation ou de l’application de la présente Convention seront, s’ils ne peuvent être réglés par des négociations directes, envoyés pour décision à la Cour permanente de Justice internationale. Si les États entre lesquels surgit un différend, ou l’un d’entre eux, n’étaient pas parties au Protocole du 16 décembre 1920, relatif à la Cour permanente de Justice internationale, ce différend sera soumis à leur gré et conformément aux règles constitutionnelles de chacun d’eux, soit à la Cour permanente de Justice internationale, soit à un tribunal d’arbitrage constitué conformément à la Convention du 18 octobre 1907 pour règlement pacifique des conflits internationaux, soit à tout autre tribunal d’arbitrage.
Article 9
Chacune des Hautes Parties contractantes peut déclarer, soit au moment de la signature, soit au moment de sa ratification ou de son adhésion, que, en ce qui concerne l’application des stipulations de la présente Convention ou de quelques-unes d’entre elles, son acceptation n’engage pas soit l’ensemble, soit tel des territoires placés sous sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté ou tutelle, et peut ultérieurement adhérer séparément, en totalité ou en partie, au nom de l’un quelconque d’entre eux.
Article 10
S’il arrivait qu’une des Hautes Parties contractantes voulût dénoncer la présente Convention, la dénonciation sera notifiée par écrit au Secrétaire général de la Société des Nations, qui communiquera immédiatement une copie certifiée conforme de la notification à toutes les autres Hautes Parties contractantes, en leur faisant savoir la date à laquelle il l’a reçue.
Le dénonciation ne produira ses effets qu’à l’égard de l’Etat qui l’aura notifiée, et un an après que la notification en sera parvenue au Secrétaire général de la Société des Nations.
La dénonciation pourra également être effectuée séparément pour tout territoire placé sous sa souveraineté, juridiction, protection, suzeraineté ou tutelle.
Article 11
La présente Convention, qui portera la date de ce jour et dont les textes français et anglais feront également foi, restera ouverte jusqu’au 1er avril 1927 à la signature des États Membres de la Société des Nations.
Le Secrétaire général de la Société des Nations portera ensuite la présente Convention à la connaissance des États non signataires, y compris les États qui ne sont pas membres de la Société des Nations, en les invitant à y adhérer.
L’État qui désire adhérer notifiera par écrit son intention au Secrétaire général de la Société des Nations en lui transmettant l’acte d’adhésion, qui sera déposé dans les archives de la Société des Nations.
Le Secrétaire général transmettra immédiatement à toutes les autres Hautes Parties contractantes une copie certifiée conforme de la notification ainsi que de l’acte d’adhésion, en indiquant la date à laquelle il les a reçus.
Article 12
Le présente Convention sera ratifiée et les instruments de ratification en seront déposés au Bureau du Secrétaire général de la Société des Nations, qui en fera la notification aux Hautes Parties contractantes.
La Convention produira ses effets pour chaque État dès la date du dépôt de sa ratification ou de son adhésion.
EN FOI DE QUOI les plénipotentiaires soussignés ont signé la présente Convention.
FAIT à Genève, le vingt-cinq septembre mil neuf cent vingt-six, en un seul exemplaire qui sera déposé aux archives de la Société des Nations. Une copie certifiée conforme sera transmise à chaque État signataire.
* *
*
II - Protocole du 7 décembre 1953
Les États parties au présent protocole,
Considérant que la Convention relative à l’esclavage signée à Genève le 25 septembre 1926 (ci-après dénommée «la Convention») a confié à la Société des Nations certains devoirs et certaines fonctions, et
Considérant qu’il est opportun que ces devoirs et ces fonctions soient assumés désormais par l’Organisation des Nations Unies,
Sont convenus des dispositions suivantes :
Article premier
Les États parties au présent Protocole prennent l’engagement qu’entre eux-mêmes, conformément aux dispositions du présent Protocole, ils attribueront plein effet juridique aux amendements à cet instrument qui figurent à l’annexe au présent Protocole, les mettront en vigueur et en assureront l’application.
Article II
1. Le présent Protocole sera ouvert à la signature ou à l’acceptation de tous les États parties à la Convention auxquels le Secrétaire général aura communiqué à cette fin un exemplaire dudit Protocole.
2. Les États pourront devenir parties au présent Protocole :
a) En le signant sans réserve quant à l’acceptation;
b) En le signant sous réserve d’acceptation et en l’acceptant ultérieurement;
c) En l’acceptant.
3. L’acceptation s’effectuera par le dépôt d’un instrument formel auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.
Article III
1. Le présent Protocole entrera en vigueur à la date à laquelle deux États y seront devenues parties; il entrera par la suite en vigueur, à l’égard de chaque État, à la date à laquelle cet État deviendra partie au Protocole.
2. Les amendements qui figurent à l’annexe au présent Protocole entreront en vigueur lorsque vingt-trois États seront devenus parties audit Protocole. En conséquence, tout État devenant partie à la Convention après que les amendements à cette Convention seront entrés en vigueur deviendra partie à la Convention ainsi amendée.
Article IV
Conformément au paragraphe 1 de l’Article 102 de la Charte des Nations Unies et au règlement adopté par l’Assemblée générale pour son application, le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies est autorisé à enregistrer, aux dates respectives de leur entrée en vigueur, le présent Protocole ainsi que les amendements apportés à la Convention par ledit Protocole, et à publier, aussitôt que possible après l’enregistrement, le Protocole et le texte amendé de la Convention.
Article V
Le présent Protocole, dont les textes anglais, chinois, espagnol, français et russe feront également foi, sera déposé aux archives du Secrétaire de l’Organisation des Nations Unies. Les textes de la Convention, qui doit être amendée comme prévu à l’annexe, faisant foi seulement en anglais et en français, les textes français et anglais de l’annexe feront également foi, et les textes chinois, espagnol et russe seront considérés comme des traductions.
Le Secrétaire général établira des copies certifiées conformes du Protocole, y compris l’annexe, aux fins de communication aux États parties à la Convention, ainsi qu’à tous les autres États Membres de l’Organisation des Nations Unies. Dès que les amendements prévus à l’article III seront entrés en vigueur, il établira de même des copies certifiées conformes de la Convention ainsi amendée aux fins de communication aux différents États, y compris les États non membres de l’Organisation des Nations Unies.
EN FOI DE QUOI les soussignés, dûment autorisés par leurs gouvernements respectifs, ont signé le présent Protocole aux dates figurant au regard de leurs signatures respectives.
FAIT au Siège de l’Organisation des Nations Unies, à New York, le 7 décembre mil neuf cent cinquante-trois.
Annexe au Protocole amendant la Convention relative à l’esclavage signée à Genève le 25 décembre 1926
A l’article 7, remplacer les mots « au Secrétaire général de la Société des Nations » par les mots « au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies ».
A l’article 8, remplacer les mots « la Cour permanente de Justice internationale » par les mots « la Cour internationale de Justice »; remplacer les mots « au Protocole du 16 décembre 1920, relatif à la Cour permanente de Justice internationale » par les mots « au Statut de la Cour internationale de Justice ».
A l’article 10, dans les premier et deuxième alinéas, remplacer les mots « la Société des Nations » par les mots « l’Organisation des Nations Unies ».
A l’article 11, remplacer les trois derniers alinéas par le texte suivant :
« La présente Convention sera ouverte à l’adhésion de tous les Etats, y compris les Etats non membres de l’Organisation des Nations Unies, auxquels le Secrétaire général aura communiqué une copie certifiée conforme de la Convention. »
« L’adhésion s’effectuera par le dépôt d’un instrument formel auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, qui en avisera tous les États parties à la Convention et tous les autres États visés dans le présent article, en leur indiquant la date à laquelle chacun de ces instruments d’adhésion a été déposé. »
A l’article 12, remplacer les mots « la Société des Nations » par les mots « l’Organisation des Nations Unies ».