DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre L
(Quatrième partie)
LIBELLE DIFFAMATOIRE
Cf. Calomnie*, Diffamation*, Injure*, Offense*, Outrage*, Pamphlet*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection pénale de la Personne humaine » (4e éd.), n° II-331, p.399
Voir : Digeste de Justinien, L. 47, X
Dans l'Ancien droit, on appelait « libelle diffamatoire » un écrit critique, injurieux, calomnieux ou diffamatoire de nature à porter atteinte à l’honneur et à la réputation d’autrui (certains auteurs exigeaient qu’il ne fût pas signé). La notion se rencontre encore en droit britannique et en droit canadien.
Dictionnaire civil et canonique (Paris 1687) : Les libelles diffamatoires sont des injures écrites contre l'honneur et la réputation de quelqu'un. Par la loi des Douze tables, ce crime était puni à Rome de la peine de mort. L'Empereur Auguste changea la peine de mort en celle du fouet.
De Ferrière (Dictionnaire de droit, 1779) : Les libelles diffamatoires sont des livres, écrits ou chansons faites et répandues dans le public contre l’honneur et la réputation de quelqu’un, dont le succès doit être attribué à la malignité du cœur humain.
Bentham ( Théorie des peines et des récompenses) : Faire un libelle politiquer, c'est publier sur le compte d'un homme constitué en pouvoir une chose qui ne lui pait pas.
Gousset (Théologie morale) : Il est défendu par toutes les lois de vendre et d'acheter les choses qui sont si mauvaises de leur nature, qu'elles ne peuvent servir que pour le mal ; tels sont les libelles diffamatoires.
Smith et Hogan (Criminal law, p. 726) : Un libelle est traditionnellement défini comme un écrit qui tend à avilir un homme, à en faire un objet de haine, de mépris et de ridicule.
Code pénal canadien, art. 246 : Est coupable d’un acte criminel, et passible d’un emprisonnement de deux ans, quiconque publie un libelle diffamatoire.
Montesquieu (De l’esprit des lois) : Charles II, roi d’Angleterre vit, en passant, un homme au pilori; il demanda pourquoi il était là. « Sire, lui dit-on, c’est parce qu’il a fait des libelles contre vos ministres. - Le grand sot ! dit le roi : que ne les écrivait-il contre moi? on ne lui aurait rien fait. ».
Marat (Plan de législation criminelle) : Que les libelles anonymes soient prohibés, et que la peine tombe sur l'imprimeur et ceux qui le débitent comme sur l'auteur.
LIBÉRALISME - Voir : Démocratie*.
LIBÉRATION CONDITIONNELLE
Cf. Emprisonnement*, Liberté sur parole*, Permission de sortie*, Semi-liberté*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-234, p.447
La libération conditionnelle est une mesure de faveur prise au profit d’un condamné qui a subi une partie de sa peine et qui a donné des signes d’amendement. L’intéressé est alors mis en liberté avant d’avoir fini de purger la peine d’emprisonnement à laquelle il a été condamné, mais il est placé sous un régime probatoire d’assistance et de surveillance (art. 729 et s. C.pr.pén.).
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : La libération conditionnelle vise à faciliter au condamné le passage du régime de l’incarcération au régime de la liberté. Elle incite le délinquant à bien se conduire en prison dans l’espoir d’y demeurer moins longtemps, et elle l’encourage, par la menace de réincarcération qu’elle contient, à se comporter correctement pendant la période critique qui suit la sortie de prison et qui est par excellence favorable à la récidive.
Code pénal du Luxembourg. Art. 100. 4° : Les condamnés ayant à subir une ou plusieurs peines privatives de liberté peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle s’ils ont donné des preuves suffisantes de bonne conduite et présentent des gages sérieux de réadaptation sociale.
Cass.crim. 6 mars 2002 (Bull.crim. n° 59 p.182) : En estimant que la libération conditionnelle du demandeur serait prématurée, eu égard à la date de la fin de sa peine d’emprisonnement, les juges usent de leur pouvoir souverain d’appréciation.
Exemple (Ouest-France 9 juin 2006) : Condamné dans l'affaire de la "Josacine empoisonnée", J-M. D... a quitté hier le centre de détention de Val-de-Reuil, après avoir bénéficié d'une mesure de libération conditionnelle. Agé de 54 ans, il a effectué douze ans de prison. Il avait été condamné, en 1997, à vingt ans de réclusion pour l'empoisonnement d'E. T..., 9 ans, avec du srop de Josacine contaminé au cyanure. Il a toujours clamé son innocence.
LIBÉRATION SUR PAROLE (Liberté sur parole)
Cf. Emprisonnement*, Libération conditionnelle*.
Un prisonnier est libéré sur parole lorsqu'il est autorisé à sortir du lieu où il est détenu, sous la seule condition de respecter certains engagements pris sur l'honneur. Cette expression ancienne, que l'on rencontre encore dans certains codes étrangers, ne figure plus guère chez nous que dans le vocabulaire militaire. En droit comparé, elle correspond à notre libération conditionnelle.
Fustel de Coulanges (La Ciré antique) : Régulus, qui était prisonnier sur parole, était légalement servus hostium, et par conséquent n’avait plus ni les droits de cité ni les droits de famille.
Code criminel de Bosnie-herzégovine. Art 45 (2) : La cour peut ordonner la révocation de la liberté conditionnelle si le libéré sur parole commet une ou plusieurs offenses criminelles...
Modèle de Code pénal pour l'Amérique du sud. Art. 84 : La liberté conditionnelle sera automatiquement supprimée si le libéré sur parole commet un nouveau crime intentionnel.
Code de procédure pénale de Mauritanie. Art. 235 : Si l’accusé est en liberté provisoire, le président de la Cour criminelle décerne contre lui mandat de dépôt et lui notifie ce mandat. Il peut cependant décider... de laisser l’accusé en liberté sur parole jusqu’à cette date. L’accusé qui manque à sa parole est jugé par défaut, à moins qu’il ne se présente le jour prévu pour le jugement.
Code pénal du Japon. Art. 28 : Quand une personne qui a été condamnée à l'emprisonnent donne des signes de profonde réformation, elle peut être mise en liberté sur parole, à la disposition d'un organisme gouvernemental...
Exemple (Encyclopédie Microsoft Encarta) : Condamné, en 1931, à onze ans de prison pour fraude fiscale, Al Capone fut libéré sur parole en 1939. Gravement atteint par la syphilis, il vécut, jusqu'à sa mort, dans un hôtel particulier à Miami Beach, en Floride.
LIBERTÉ
Cf. Censure*, Conscience (Clause de)*, Contraindre*, Corps de l’homme*, Démocratie*, Despotisme*, Fichiers informatiques*, Libre arbitre*, Loi martiale*, Manipulation mentale*, Menaces*, Racket*, Responsabilité*, Secte*, Servage*, Sociétés secrètes*, Stupéfiants*, Travail,* Vidéosurveillance*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-233, p.243 / n° III-232, p.444
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-107, p.31/ n° I-I-II-107, p.133 / II-207, p.343.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine », (4e éd.), n° III-1 et s., p.421 et s.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 338 3°, p.210 / n° 451 et s., p.305 et s.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-148, p.402
Voir : Steeg, La liberté et la responsabilité
Voir : Ortolan, « Les conditions générales de la responsabilité, suivant la science rationnelle »
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
- Notion. Si on écarte le problème philosophique du Libre arbitre*, on peut dire que la liberté est la faculté de n’agir qu’après s’être exactement informé, qu'après avoir pu assimiler les différents aspects de la situation, et qu'après avoir pu effectuer sans entrave un choix souverain entre les différentes possibilités ouvertes. Par nature, elle invite toutefois à choisir la voie du Bien* plutôt que la voie du Mal*.
Cuvillier (Vocabulaire philosophique). Liberté : État de l’être qui agit avec pleine conscience et après réflexion. « Si je connaissais toujours de ce qui est vrai et bon… je serais entièrement libre » (Descartes).
Alland et Rials (Dictionnaire de la culture juridique). V° Liberté, par J. Morange : L'idée de liberté est sous-jacente, dans les mentalités contemporaines, à celle de droits de l'homme ou de droit civils et politiques. La terminologie utilisée ne reflète qu'imparfaitement le débat. Les "droits de l'homme" ou "droits fondamentaux" englobent les libertés. Parler de "droits et libertés fondamentaux" permet de mieux refléter la diversité de la matière et peut-être toute son étendue.
Harouel (Les droits de l'homme contre le peuple, Paris 2016) : Sous l'Ancien régime, le roi se fixait comme objectif le respect de la « liberté publique », de la liberté de ses sujets. [p.ex. chacun des peuples constituant la France avait pu conserver sa langue d'origine].
Déclaration des droits et devoirs de l'homme et du citoyen (5 fructidor an III) : La liberté consiste à pouvoir faire ce qui ne nuit pas aux droits d'autrui.
Catéchisme de l’Église catholique, § 1731 : La liberté est en l’homme une force de croissance et de maturation dans la vérité et la bonté… Elle implique la possibilité de choisir entre le bien et le mal, donc celle de grandir en perfection, ou de défaillir ou de pécher.
Stuart Mill (De la liberté) : La question de la nature et des limites des pouvoirs que la société peut légitimement exercer sur l’individu … divise depuis toujours l’humanité. Mais étant donné le niveau de progrès atteint aujourd’hui par les peuples les plus civilisés, elle se présente sous des formes nouvelles et requiert un traitement différent et plus fondamental… L’humanité gagnera davantage à laisser chaque homme vivre comme bon lui semble, qu’à le contraindre à vivre comme bon semble aux autres.
Proudhon (De la justice dans la révolution) : La liberté est de deux sortes : simple, c'est celle du barbare qui ne reconnaît d'autre loi que celle du "Chacun chez soi, chacun pour soi" ; composée, lorsqu'elle suppose, pour son existence, le concours de deux ou plusieurs libertés... Au point de vue barbare, liberté est synonyme d'isolement. Au point de vue social, liberté et solidarité sont termes identiques : la liberté de chacun rencontrant dans la liberté d'autrui, non plus une limite mais un auxiliaire.
- Caractères. La liberté individuelle est moins un droit qu’un attribut de la personnalité, un élément de la dignité de la personne humaine. Elle se situe sur le même plan que la vie et l’honneur. C’est pourquoi elle est indisponible, inaliénable, imprescriptible.
Voir : Cousin, Devoirs envers soi-même et devoirs envers autrui
Loi Gombette. T. LXXXVIII, art. 1 : La liberté est de tous les biens le plus précieux. [par ce texte plusieurs fois remanié de 501 à 517, le roi des Burgondes -Gondebaud- s'efforçait de concilier les lois de son peuple et les principes du droit romain ; c'est le Code le plus élaboré de l'époque des grandes invasions ; il explique pour partie la prospérité durable de la Bourgogne].
Tocqueville (De la démocratie en Amérique) :
Il
n’est rien de plus fécond en merveilles que l’art d’être libre ; mais il n’y a rien de plus dur que l’apprentissage de la liberté...
Plus j'envisage l'indépendance de la presse dans ses principaux
effets, plus j'en viens à me convaincre que chez les modernes
l'indépendance de la presse est l'élément capital, et pour ainsi
dire constitutif de la liberté.
Leclercq
(Leçons de droit naturel - T.II) : D'une façon générale, il
est juste de dire que l'homme est libre par nature, la contrainte ne
se justifie que par son utilité. La liberté est bien l'état normal
de l'homme, la contrainte est l'exception ; lorsque, dans une
situation donnée, on hésite sur le point de savoir s'il convient de
laisser l'homme libre ou de se soumettre à une contrainte, c'est la
contrainte qui doit se justifier, non la liberté.
Vis-à-vis de la société, l'homme a le droit de faire ce qu'il veut,
aussi longtemps que le bien commun ne demande pas une restriction de
sa liberté. Dans ce sens le Parlement de Paris avait raison
lorsqu'il disait : « La liberté
n'est pas un privilège, c'est un droit
».
John Rawls (Théorie de la justice, n°32) : Chaque forme de liberté de base est caractérisé par un ensemble assez complexe de droits et de devoirs. Non seulement il doit être permis aux individus de faire ou de ne pas faire quelque chose, mais le gouvernement et les autres personnes doivent être légalement tenus de ne pas faire obstruction... Si nous considérons la liberté de conscience telle qu'elle est définie par la loi, alors des individus jouissent de cette liberté de base quand ils sont libres de poursuivre leurs intérêts philosophiques ou religieux sans restrictions légales qui exigeraient d'eux dans une forme particulière de pratique religieuse ou une autre, et quand les autres hommes ont le devoir légal de ne pas s'ingérer.
P. Evdokimov (Une vision orthodoxe de la théologie morale) : La liberté est la sphère où se réalise la personne humaine. Comment réaliser le Bien ? Dans cette perspective, la liberté n'est pas un droit formel mais un don qui exige des efforts ascétiques... « Vous êtes appelés à la liberté » proclame St Paul qui montre la liberté comme un don et la puissance de créer le Bien.
Baudin (Cours de philosophie morale) : Le devoir de respecter la vie d'autrui a pour prolongement naturel le devoir de respecter son "autonomie", la liberté et l'indépendance de ses activités intérieures et extérieures, spirituelles et matérielles. En fait, l'homme tient à sa liberté autant, sinon plus qu'à sa vie même.
Staune (Au-delà de Darwin), par un scientifique, Paris 2009 : Nous pouvons trouver en nous-mêmes les ressources pour une vrai liberté, à partir du moment où nous savons qu'une partie du déterminisme génétique dont on nous rebat les oreilles est illusoire.
Villey (Cours de droit naturel) : La liberté est un droit naturel et imprescriptible.
Pierre et Martin (Cours de morale pour l'enseignement primaire) : La liberté est le droit naturel de tout homme d’employer ses facultés comme il lui convient. Ce droit n’est limité que par l’égale liberté des autres. Sous cette réserve, chacun de nous est libre d'agir, d'aller et de venir, de travailler, de s'amuser. Imposer arbitrairement une contrainte inutile à un autre, c'est donc violer un devoir de justice.
- Limites. Tout zélateur des libertés doit reconnaître qu’elles ne sauraient constituer un droit absolu : elles n’autorisent pas à en user pour porter atteinte à l’intégrité d’autrui, à ses prérogatives, à ses droits ou encore à sa dignité propre. Elles n’autorisent pas même l’intéressé à se nuire gravement à lui-même, p.ex. à se vendre comme esclave, voire à se droguer. Leurs limites sont ordinairement marquées par des incriminations de police (P.ex. Police de l’affichage).
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection pénale de la personne humaine » (4e éd.), n° III-106, p.434 / n° III-129 et s., p.472 et s.
Platon (La
République) : Quand un peuple, dévoré par la soif de
liberté, se trouve avoir des dirigeants qui lui en donnent
autant qu’il en veut jusqu’à l’enivrer, il arrive alors que, si
les gouvernants résistent aux requêtes toujours plus exigeantes,
on les traite de tyrans...
Le père saisi de crainte finit par traiter son fils comme son
égal et n’est plus respecté, le maître n’ose plus réprimander
ses élèves et ceux-ci se moquent de lui...
Au nom de la liberté, il n’y a plus de respect pour personne. Au
milieu de cette licence naît et croît une mauvaise herbe : la
tyrannie.
Bossuet (Discours sur l'histoire universelle) : Le bon usage de la liberté, quand il se tourne en habitude, s'appelle vertu ; et le mauvais usage de la liberté, quand il se tourne en habitude, s'appelle vice.
Stuart Mill (De la liberté) : Le principe de liberté ne peut aller jusqu’à permettre que l’on soit libre de renoncer à la liberté. Ce n’est pas la liberté que d’avoir la permission d’aliéner sa liberté.
Jules Simon (La liberté civile) : La liberté de tout faire est la négation de la liberté. En effet, si ma liberté n'a d'autre mesure que ma puissance, j'appartiens à ma passion, et le monde appartient à la force. Le droit s'enfuit, et, en s'enfuyant, il emporte avec lui la liberté.
St Paul (Lettre aux Galates) : Vous avez été appelés à la liberté. Mais cette liberté ne doit pas être un prétexte pour satisfaire votre égoïsme ; au contraire, mettez-vous par amour au service les uns des autres.
Benoît XVI, (Discours, Collège des Bernardins, 12 septembre 2008) : La tension entre le lien et la liberté se présente à nouveau à notre génération comme un défi face aux deux pôles que sont, d'un côté, l'arbitraire subjectif, et, de l'autre, le fanatisme fondamentaliste.
Rigaux
et Trousse (Les crimes et délits du Code pénal belge) :
Au point de vue historique, il est parfaitement vrai que, à peu
près inconnue à l'origine des civilisations, la liberté
individuelle s'est développée peu à peu avec les progrès du
droit... La philosophie du XVIIIe siècle s'attacha à la
vulgariser. Désormais, le principe de la liberté individuelle
fait partie intégrante du droit public et le droit pénal le
protège tant contre les abus des agents de l'autorité que contre
les atteintes par les particuliers...
Cependant, l'individualisme, tel qu'il se manifesta pendant une
bonne partie du XIXe siècle, est partout en recul. Des
aspirations sociales et économiques, d'ailleurs nécessaires et
légitimes, préoccupent souvent les esprits bien plus que le
souci des libertés classiques. Le monde est à la recherche d'un
équilibre entre les libertés et la justice sociale.
La contrepartie de la liberté individuelle, sans laquelle celle-ci ne serait pas justifiée, est la responsabilité individuelle.
Lecomte du Noüy (L'homme et sa destinée) : La liberté n'est pas qu'un privilège, c'est une épreuve.
Ravanas (Liberté d'expression et protection des droits de la personnalité - D. 2000 Chr. 459) : Le mot de "responsabilité" constitue l'indispensable corollaire du concept de "liberté".
- Protection. Dans une démocratie libérale, le législateur est tenu de protéger l’exercice des différents aspects de la liberté individuelle : libertés physiques comme libertés intellectuelles ; et parmi ces dernières : libertés temporelles et libertés spirituelles.
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (18 décembre 2000). Art. 6. Droit à la liberté et à la sûreté : Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté.
Stuart Mill (De la liberté) : Une société, quelque soit la forme de son gouvernement, n’est pas libre si elle ne respecte pas globalement l’ensemble des libertés.
Jolivet (Philosophie morale) : La liberté est un droit fondamental de la personne humaine qui, étant raisonnable et douée du libre arbitre, et à ce titre responsable de ses actes, doit pouvoir agir en toute indépendance, dans la mesure où il ne porte pas atteinte aux droits du prochain.
Pruner (Théologie morale) : Nul législateur n’a le droit de restreindre la liberté au-delà de ce qu’exige le bien commun.
Mais on a justement fait observer que la concentration de nombreuses personnes, en un ou plusieurs lieux, entraîne nécessairement une limitation des libertés, ne serait-ce que pour des raisons de sécurité publique.
Hérodote (Histoires) à propos de la capitale de Darius, Suse : Aussitôt qu'une ville capitale tend à absorber la vie d'une nation et à attirer à elle les forces répandues primitivement sur la surface entière du territoire, la liberté faiblit avec les prérogatives individuelles, et quel que soit le nom dont se décore l'usurpation, de quelque excuse que se colore la tendance à faire tout aboutir à un centre unique, il n'est pas possible de méconnaître que la liberté s'en va, en même temps sans doute que le bon ordre, la meilleure administration et l'opulence générale augmente.
- Les libertés physiques. Les libertés physiques comportent la faculté de mouvoir son corps, de se déplacer et
de fixer sa résidence à son gré. Ce qui ne fut pas toujours le
cas au fil des siècles (mon père m'a transmis le passeport
intérieur de l'un de nos aïeux).
Ces libertés sont protégées de manière générale par l’art. 224-1 C.pén. (art. 341 de l’ancien Code). Les art. 432-4 et s. (art.
114 ancien) visent les atteintes à la liberté individuelle commises par des personnes exerçant une fonction publique.
Cf. Arrestation arbitraire*, Contrainte*, Détention provisoire*, Incarcération*, Internement*, Kidnapping*, Lettre de cachet*, Précaution (principe de)*, Sauf conduit*, Séquestration*, Travail - Liberté du travail*, Voie publique*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection pénale de la Personne humaine » (4e éd.), n° III-202 et s., p.477 et s.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 338 3°, p.210 / n° 452 et s., p.305 et s. (sur la liberté physique des mineurs)
Voir : Convention prohibant l’esclavage du 25-09-1926, amendée le 7-12-1953
Voir : Décret du 25 brumaire an III (15 novembre 1794), concernant les émigrés (extraits)
Voir : Loi du 28 vendémiaire an VI (19 octobre 1797), relative aux passeports (extraits)
Voir : Tableau des incriminations protégeant la liberté physique (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations protégeant la liberté physique (en droit positif français)
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme (de droit commun)
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme (en cas de poursuites pénale)
Jean XXIII (Encyclique Pacem in terris § 25) : Tout homme a droit à la liberté de mouvement et de séjour à l'intérieur de la communauté politique dont il est citoyen.
Loi Salique. T. XXXIII, art. 1 : Celui qui se sera opposé au passage d’un homme, ou aura embarrassé sa marche, sera condamné à payer 600 deniers, ou 15 sous d’or.
Constitution
italienne de 1947. Art. 13 : La liberté de la personne est
inviolable.
Il n’est admis aucune forme de détention, d’inspection ou de
fouille sur la personne ni aucune autre restriction de la
liberté de la personne, si ce n’est par un acte motivé de
l’autorité judiciaire et dans les cas et sous les seules formes
prévus par la loi.
Dans des cas exceptionnels de nécessité et d’urgence,
expressément prévus par la loi, l’autorité de police peut
prendre des mesures provisoires, qui doivent être communiquées
dans les quarante-huit heures à l’autorité judiciaire.
Code de procédure pénale espagnol, Art. 489 : Un espagnol ou un étranger ne peut être arrêté, que dans les cas et dans le respect des formes que prescrivent les lois.
Cass.crim. 11 mai 1995 (Gaz.Pal. 1995 II Chr.crim. 431) : Selon les énonciations de l’arrêt attaqué, les auteurs du vol avec arme au préjudice de la société D. auraient attaché H. sur son siège à l’aide de menottes. Dès lors que, selon l’arrêt, les auteurs n’auraient pas eux-mêmes volontairement rendu la liberté à leur victime, ces faits, à supposer qu’ils soient établis, sont de nature à constituer le crime d’arrestation ou détention illégale prévu par l’art. 3412° C.pén. alors applicable, et par l’art. 224-1 al. 1 C.pén. entré en vigueur le 1er mars 1994.
Atteinte au principe (Dépêche AFP 21 novembre 2012) : Privées du droit de conduire et de voyager sans autorisation, les Saoudiennes sont désormais soumises à une nouvelle mesure de contrôle avec un système électronique mis en place par les autorités avertissant leur famille dès qu'elles quittent le royaume. Depuis la semaine dernière, le "gardien" de la femme saoudienne - père, époux, frère ou tuteur - reçoit sur son téléphone un message SMS l'informant que la femme placée sous sa garde légale a franchi les frontières du royaume, même si elle voyage en sa compagnie.
Garcillasso de la Vega, « Histoire des Incas » T.II p.141 : Ceux qui, vivant dans l'empire des Incas, voyageaient sans une cause légitime, étaient châtiés comme vagabonds... Il était défendu aux Indiens d'aller vivre d'une province, d'une ville ou d'un quartier à un autre... L'Inca ayant partagé la province de Huanca en trois régions, comme les habitants de cette province portaient un bonnet d'une même façon, il ordonna que l'on marquerait la différence de région par une différence de couleur.
- Les libertés intellectuelles. Les libertés intellectuelles se répartissent en libertés temporelles et en libertés spirituelles. Elles s’imposent (en principe), non seulement d’un point de vue individuel, en raison de la dignité de la personne humaine, mais encore d’un point de vue social, car c’est la confrontation des idées qui permet le progrès. Toute atteinte portée à l'exercice de ces libertés doit être sanctionnée, qu'elle soit physique ou psychique (allant jusqu'aux images subliminales).
Voir: Jean-Paul Doucet, « La protection pénale de la personne humaine » (4e éd.), n° III-218 et s., p.497 et s.
Voir : Tableau des incriminations protégeant les libertés intellectuelles (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations protégeant les libertés intellectuelles (en droit positif français)
Voir : Décret du 4 décembre 1792, relatif à ceux proposeraient de rétablir la royauté
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (18
décembre 2000).
Art. 10. Liberté de pensée, de conscience et de religion. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit
implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou
collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites.
Exemple
(Le Figaro 15 mai 1988 ), lors d'une campagne électorale :
Mitterrand 2.949 fois sur Antenne 2 - La CNCL, qui a été
saisie de l'insertion dans le générique du journal d'Antenne 2
de photographies de personnalités, dont celle de M. Mitterrand
examinera la question lundi en séance plénière.
Dans un communiqué la CNCL indique
« qu'elle a demandé copie de la bande mère de ce générique,
réalisé en 1987 à la demande de la rédaction de la chaîne et
diffusé depuis 2.949 fois ».
La CNCL, qui a également reçu un rapport établi par la direction
technique d'Antenne 2, est en mesure « de constater qu'une
cinquantaine d'images défilent dans un délai de huit secondes
dans le chiffre 2 du sigle de la chaîne. L'image de François
Mitterrand y figure indiscutablement ».
Les libertés temporelles comprennent : la liberté d’expression, la liberté d’association, la liberté de réunion et de manifestation, et enfin la liberté politique.
Cf. Aristocratie (voir : Cour EDH 13 juillet 2012, n° 16354/06)*, Associations*, Attroupement*, Autocensure*, Commerce*, Censure*, Contrainte*, Désinformation*, Droit de réponse*, Expression (liberté d’)*, Manifestation (liberté de)*, Presse*, Réunion (liberté de)*, Travail (liberté du)*, Syndicat*.
Voir : La liberté d’expression orale ou écrite : 1° Ésope - 2° Milton - 3° Vitu
- La liberté d’expression, pour ne souligner que la première, consiste en la faculté de prononcer des discours publics ou de rendre des écrits publics. Elle est protégée non seulement par l’art. 431-1 C.pén., mais encore par la Loi du 29 juillet 1881 sur la presse.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection pénale de la Personne humaine » (4e éd.), n° III-220 et s., p.501 et s.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 455, p.309 (sur la liberté d'expression des mineurs)
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 30, p.30 / n° 44, p.46 / n° I-I-102, p.71 / n° II-I-114, p.351 (note 4) / n° II-I-119, p.357
Voir : Loi du 7 thermidor an V (25 juillet 1797) interdisant les associations politiques
Voir : Deuxième dénonciation de Giacomo Casanova à la police secrète de Venise
Cuvillier (Vocabulaire philosophique). La liberté est la propriété de soi ; on distingue trois sortes de libertés : la liberté naturelle (liberté externe, liberté de conscience et liberté du travail) ; la liberté civile (état de l’individu qui jouit de ses droits civils, donc qui n’est sujet que de la loi) ; la liberté politique (état de l’individu qui jouit de ses droits civiques, i.e. qui contribue à la confection des lois).
Pierre et Martin (Cours de morale pour l'enseignement primaire) : La liberté de la parole et de la presse sont la conséquence nécessaire de la liberté de pensée et en sont inséparables... Il est nécessaire, dans une démocratie, que les actes du gouvernement puissent être discutés, critiqués, blâmés au besoin et, dans un pays de suffrage universel, où la majorité détient le pouvoir, que la minorité fasse entendre librement sa voix.
Tribunal révolutionnaire rénové 23 pluviôse an III : La manifestation de pensées doit être libre et ne peut être criminelle qu’autant qu’elle tendrait à troubler l’ordre public.
Code pénal du Pérou, Exposé des motifs : La liberté d’expression constitue un bien juridique qui bénéficie de la consécration constitutionnelle.
Code pénal du Salvador, Art. 293 : Le fonctionnaire ou l'autorité publique, qui hors des cas permis par la Constitution de la République, établit des examens préalables, censure ou soumet à caution un moyen de communication sociale destiné à la diffusion de la pensée, que ce soit de nature écrite, orale ou télévisuelle, sera sanctionné de deux à quatre ans de prison et frappé d'une interdiction d'exercice de sa charge ou de son emploi pour le même temps.
Cour
EDH 7 février 2012, n° 39954/08 : La liberté d’expression
constitue l’un des fondements essentiels d’une société
démocratique, l’une des conditions primordiales de son progrès
et de l’épanouissement de chacun. Sous réserve du § 2 de l’art.
10, elle vaut non seulement pour les "informations" ou "idées"
accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou
indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou
inquiètent : ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et
l’esprit d’ouverture sans lesquels il n’est pas de « société
démocratique ».
Telle que la consacre l’article 10, la liberté d’expression est
assortie d’exceptions qui appellent toutefois une interprétation
étroite, et le besoin de la restreindre doit se trouver établi
de manière convaincante.
Cass.crim. 22 août 2012, n° 12-90043 (QPC) : L'interprétation de l'art. 431-1, al 2, C.pén., qui définit de manière intelligible et accessible le délit d'entrave à la liberté d'expression, entre dans l'office du juge pénal, les termes de violences ou de voies de fait, qui constituent l'un des éléments constitutifs de cette infraction, étant suffisamment clairs et précis pour ne pas méconnaître le principe de légalité des délits et des peines.
Cass.crim.
1er septembre 2010, n° 10-80584 (Bull.crim. n° 127 p.558) :
Justifie sa décision la cour d’appel qui, pour déclarer un maire
coupable du délit de discrimination, en raison de l’appartenance
religieuse, retient qu’il résulte des propos tenus par celui-ci,
lors d’une
réunion du conseil municipal, qu’il a privé une élue de
l’exercice de son droit de parole en raison du port par cette
dernière d’un insigne symbolisant son appartenance à la religion
chrétienne, qu’il n’est nullement établi qu’en l’espèce le port
d’une croix ait été un facteur de trouble susceptible de
justifier que le maire, usant de son pouvoir de police, la prive
de son droit à s’exprimer, et qu’aucune disposition législative,
nécessaire en vertu de l’article 9 de la Convention européenne
des droits de l’homme, pour que des restrictions soient
apportées à la liberté de manifester sa religion ou ses
convictions, ne permet au maire d’une commune, dans le cadre des
réunions du conseil municipal, lieu de débats et de
confrontations d’idées, d’interdire aux élus de manifester
publiquement, notamment par le port d’un insigne, leur
appartenance religieuse.
Cass.crim. 27 septembre 2000 (Gaz.Pal. 2001 J 67) : Si l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, en son premier paragraphe, reconnaît à toute personne le droit à la liberté d’expression, ce texte prévoit, en son second paragraphe, que l’exercice de cette liberté comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi, qui constituent dans une société démocratique, des mesures nécessaires, notamment, pour garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire. Tel est précisément l’objet de l’article 434-24 du Code pénal qui incrimine l’outrage à magistrat.
Cass.1e civ. 10 avril 1013, n° 12-10177 : La liberté d'expression est un droit dont l'exercice ne revêt un caractère abusif que dans les cas spécialement déterminés par la loi.
Cass. 1e civ. 7 février 2006 (Gaz.Pal. 28 avril 2007) : Les abus de la liberté d'expression qui portent atteinte à la vie privée peuvent être réparées sur le fondement de l'art. 9 du Code civil.
Cass. 1e civ. 31 janvier 2008 (Gaz.Pal. 2008, somm. 27 novembre 2008) : Les abus de la liberté d'expression, prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 et par l'art. R.621-1 C.pén., ne peuvent être poursuivis et réparés sur le fondement de l'art. 1382 C.civ.
Cons. d'État (réf.) 26 février 2010 (requête n° 336837, Gaz.Pal. 13 mai 2010) : Si la commune fait valoir que le spectacle de l'artiste Dieudonné était susceptible de donner lieu à des troubles, ces allégations ne sont étayées par aucun élément, en dehors d'une référence d'ordre général aux polémiques que certaines positions publiques de cet artiste ont pu susciter. En particulier, il n'est pas soutenu que le contenu de ce spectacle serait par lui-même contraire à l'ordre public ou se heurterait à des dispositions pénales. La décision du maire, qui revient à interdire la tenue d'un spectacle, constitue une atteinte grave à la liberté d'expression.
Olympe de Gouges, femme de lettres, a été traduite devant le Tribunal révolutionnaire pour avoir écrit une pièce « La France sauvée ou le tyran détrôné », où elle mettait dans la bouche de Marie-Antoinette des propos hostiles à Marat et à Robespierre. Elle se défendit en faisant valoir qu’elle ne pouvait faire parler la femme Capet avec le langage d’une sans-culotte. Argument rejeté ; auteur guillotinée.
Exemple (Ouest-France 18 janvier 2015) : La femme d'un blogueur saoudien, condamné à mille coups de fouet en public, pour insulte à l'islam, a dû fuir au Québec avec leurs trois enfants .
La liberté politique n'a été qu'exceptionnelle dans l'histoire. Si elle est officiellement reconnu dans les temps présents, elle n'en demeure pas moins plus théorique que réelle en raison de l'influence grandissante des groupes de pression au détriment de l'autonomie individuelle et du Bien commun.
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
Bluntschli (Droit public général) : La liberté politique est la détermination de l'activité propre de la nation, de ses organes et des citoyens dans la vie publique.
Hauriou (Aux sources du droit) : C'est des principes du droit naturel qu'ont été déduites directement les règles classiques du droit international et les garanties constitutionnelles de la liberté politique.
Guizot (Histoire de la Révolution en Angleterre) Paris 1856 T.I p.31: Le Long Parlement imposa le serment de fidélité à tout anglais du dessus de dix-huit ans ; et quiconque le refusa ne fut plus même admis à paraître devant une Cour de justice pour y soutenir ses intérêts ; en sorte que la dissidence politique entraîna l'incapacité civile.
Wallon (Histoire du Tribunal révolutionnaire) : Dom Deforis, Bénédictin de 61 ans, l'un des plus érudits de ce temps fut condamné à mort le 7 messidor an II (25 juin 1794) pour n'avoir pas prêté le serment de fidélité. Le juge lui fait observer "que le serment d'être fidèle à la République n'engage point les opinions, mais que chaque citoyen doit être soumis au Gouvernement et aux lois du pays qu'il habite".
Loi du 14 mars 1872. Art. 1 : Toute association internationale qui, sous quelque dénomination que ce soit et notamment sous celle d' "Association internationale des travailleurs", aura pour but de provoquer à la suspension du travail, à l'abolition du droit de propriété, de la famille, de la patrie, de la religion ou du libre exercice des cultes, constituera, par le seul fait de son existence et de ses ramifications sur le territoire français, un attentat contre la paix publique.
Rossi (Traité de droit pénal) : La liberté politique a surtout besoin de la justice; elles sont deux conditions sociales inséparables l'une de l'autre ; Dès que l'une a existé pendant un certain temps, l'autre prend nécessairement naissance ; et si l'une d'elles vient à manquer, l'autre ne tarde pas à être dénaturée ou à disparaître.
Ahrens (Cours de droit naturel) : La liberté politique est la sauvegarde de toutes les autres libertés, c'est la liberté dans laquelle la nation, dans sa totalité et dans la conscience publique, protège toutes les parties, tous les membres, c'est l'atmosphère commune dans laquelle respirent et se développent toutes les autres libertés. Quand ces libertés ne sont pas pénétrées et incessamment nourries par l'air bienfaisant de la liberté politique, ou quand un art machiavélique, cultivé maintenant avec grand succès, s'ingénie à fausser cette liberté qu'il n'ose plus nier en principe, la corruption gagne bientôt tout l'organisme social qui souvent ne peut revenir à l'état de santé que par de grandes crises et de grandes secousses internes ou extérieures.
Manifeste de Nicolas II du 17 octobre 1905 : Nous imposons au gouvernement... 1° D'accorder à la population la liberté civile, établie d'une manière inébranlable sur les bases de l'inviolabilité personnelle, des libertés de conscience, de parole, d'assemblées et d'association. 2° De ne pas entraver les élections à la Douma impériale... [Mémoires du Comte Witte]
Les libertés spirituelles comportent la liberté de conscience (liberté d’adhérer à telle philosophie ou à quelque religion non contraire à l’ordre public et à la dignité de la personne humaine) et la liberté du culte (liberté d’organiser et d’assister à des cérémonies religieuses ne heurtant ni l’ordre public ni la dignité de la personne humaine).
Cf. Apostasie*, Culte*, Déicide*, Être suprême*, Incriminations (exclusions)*, Opinion (délit d')*, Pensées*, Religion*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection pénale de la Personne humaine », n° III-233 et s., p.522 et s.
Voir : Discours du Pape Benoît XVI aux représentants des Nations-Unies le 18 avril 2008
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
Pour un abus de la liberté de croyances, voir le Cas pratique n° 43
Montaigne (Essais) : Il n’y a pas d’autre liberté que la liberté intérieure.
Gratieux (Khomiakov et le mouvement slavophile) : Pour Khomiakov, " la liberté d'opinion crée la force de l'esprit, le triomphe de la vérité et le règne de la raison dans le peuple".
Baudin (Cours de philosophie morale) : C'est l'objet de la liberté de conscience qui fait son importance et qui lui vaut son relief. Elle est proprement la liberté de la vie spirituelle. Si on l'appelle "liberté de conscience", c'est parce qu'historiquement elle a toujours paru intéresser davantage la conscience morale et la conscience religieuse ; en fait, elle n'intéresse pas moins les consciences philosophique et scientifique, la conscience esthétique, la conscience politique etc.
Pierre et Martin (Cours de morale) : La tolérance consiste à accepter que les autres pensent et sentent autrement que nous, à reconnaître que leurs opinions et leurs croyances, même différentes des nôtres, peuvent être légitimes et raisonnables.
Morin (Répertoire du droit criminel) v° Culte : La liberté religieuse est un droit naturel garanti par les lois de l'État. Par là, il ne faut pas entendre seulement la liberté de conscience... Le législateur doit aussi garantir le libre exercice des cultes, puisque nulle religion n'existe sans la pratique de certains devoirs religieux.
Code criminel de Macédoine. Art. 399 : Quiconque, illégalement, entrave le déroulement d'une cérémonie religieuse sera puni d'une amende, ou d'un emprisonnement pour un an au plus.
Code pénal d'Afghanistan (1976). Art. 347 : Sera punie de l'emprisonnement... la personne qui aura, en usant de la violence et guidé par la haine, aura troublé ou stoppé le déroulement d'une cérémonie religieuse ou de rites de quelque religion que ce soit.
Parnell (History of the penal laws against the irish catholics) cite une Exhortation du Clergé catholique du 2 octobre 1757 : Nous condamnons, comme non chrétien, le principe selon lequel il serait légitime de tuer, frapper ou blesser qui que ce soit, au motif qu'il s'agit d'un hérétique.
La liberté de conscience a souvent été mise en échec, et l'est encore de nos jours par des États membres des Nations Unies ! Elle l'est notamment lorsque le pouvoir pouvoir politique est dominé par une religion intolérante (théocratie) ou par une philosophie athée (laïcité de façade).
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
Charlemagne (1er capitulaire saxon) : Si, dans l’avenir, un membre de la nation saxonne demeure non-baptisé, se cache et refuse le baptême, voulant rester païen, qu’il soit puni de mort.
Loi du Massachusetts du 8 mars 1792 (portant atteinte à la liberté religieuse). Art. 4 : Celui qui, étant en bonne santé et sans raison suffisante, omettra pendant trois mois de rendre à Dieu un culte public, sera condamné à 10 shillings d’amende.
Code pénal des Comores (1995). Art. 229-8 : Quiconque divulgue, propage, enseigne à des musulmans une religion autre que la religion musulmane, sera puni d'un emprisonnement de trois mois et d'une amende... Seront punies des mêmes peines, la vente, la mise en vente, la distribution même gratuite à des musulmans, des livres, brochures, revues, disques et cassettes divulguant une religion autre que l'islam.
Ali Sina (La psychologie de Mahomet et des musulmans) : L'ex-musulmane Nonie Darwi, dans un article intitulé "Sharia for dummies", met en exergue quelques lois : Un musulman qui quitte l'Islam doit être tué immédiatement.
Benoît XVI (TV 16, 19 novembre 2010) : Le laïcisme, une dictature qui peut détruire la liberté religieuse.
Minois (La Révolution Française) : Voici un exemple. Louise Barré, paysanne du Maine-et-Loire est interrogée par le Comité révolutionnaire de Cholet ; on lui pose deux questions : « As-tu assisté à la messe du prêtre constitutionnel ? » Réponse : « Non » - « As-tu assisté à celle de l'ancien curé ? » Réponse : « Oui ». Cela suffit. Elle est condamnée à mort et exécutée. L'Église la béatifiée, comme martyre, en 1983.
Atteinte à la liberté religieuse (Ouest-France 10 mars 2004) : Les chrétiens du Laos communiste font l’objet d’un harcèlement permanent afin qu’ils renoncent à leur foi. La répression anti-chrétienne s’est intensifiée depuis le début de l’année dans une province du sud du pays, en particulier auprès des minorités ethniques. Selon des témoignages recueillis auprès des exilés, les autorités ont confisqué le cheptel et les rizières de certains villages, en annonçant leur intention « d’éradiquer totalement le christianisme ».
Atteinte à la liberté religieuse (Ouest-France 9 mai 2008) : Deux mois de prison avec sursis, au lieu d'un an avec sursis : la justice algérienne a réduit, en appel, la peine prononcée contre le prêtre catholique qui était poursuivi pour avoir organisé, fin décembre 2007, un culte auprès de migrants chrétiens camerounais entrés sur le territoires algériens. Côté protestant, le synode national s'est ému, le week-end dernier, de la "situation difficile" vécue par l'Église protestante d'Algérie.
La liberté d’expression a longtemps été
déniée sur le plan religieux en vertu de l’adage ejus regio, ejus religio,
qui s’appuie sur l’idée qu’une communauté de pensée renforce les liens sociaux. Voir : Expression (liberté
d')*.
Elle peut en revanche être légitimement refusée, après que l’on ait fait
une tentative loyale d'ouverture, à ceux qui refusent d’appliquer le principe de
réciprocité.
Cass.crim. 7 juin 2011 (Gaz.Pal. 13 octobre 2011) : Les restrictions à la liberté d'expression sont d'interprétation étroite et des propos sur une question d'intérêt public relative aux difficultés d'intégration de la communauté rom ne dépassent pas les limites admissibles de la liberté d'expression.
Cass.crim. 6 octobre 2011 (Gaz.Pal. 13 octobre 2011 p.25) : Les abus de la liberté d'expression ne peuvent être réprimés que par la loi du 29 juillet 1881.
Cons. d’État 27 juillet 2001 (Gaz. Pal. 2002 somm. 1112) : En vertu de l’art. 10 de la déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 à laquelle renvoie le Préambule de la Constitution, de l’art. 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et de l’art. 1er de la loi du 9 décembre 1905, le port du voile ou du foulard, par lequel les femmes de confession musulmane peuvent entendre manifester leurs convictions religieuses, peut faire l’objet de restrictions notamment dans l’intérêt de l’ordre public. Les restrictions que prévoient les dispositions de l’art. 4 du décret du 22 octobre 1955 dans sa rédaction issue de l’art. 5 du décret du 25 novembre 1999, qui visent à limiter les risques de falsification et d’usurpation d’identité, ne sont pas disproportionnées au regard de cet objectif et ne méconnaissent aucune des dispositions précitées ni aucun des principes de la liberté de conscience et de la liberté religieuse.
Cass.crim 27 avril 2011 n° 10-83771 (Gaz.Pal. 9 juin 2011 p.25) : La liberté d'expression ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires au regard du § 2 de l'art. 10 de la Conv. EDH. Viole ce principe et l'article précité l'arrêt qui, après avoir relevé, à juste titre, le caractère diffamatoire des propos dénoncés par la partie civile, refuse le bénéfice de la bonne foi au prévenu, alors que le passage incriminé, portant sur un sujet d'intérêt général relatif à l'histoire récente du Cambodge, et au comportement d'un personnage important lors des événements tragiques qu'a connus ce pays de 1975 à 1979, ne dépasse pas les limites admissibles de la liberté d'expression dans la critique de l'action d'un homme politique.
Benoît XVI (Ouest-France 12 novembre 2010) : Dans une « Exhortation apostolique » publiée hier, le pape demande que la liberté de conscience soit « garantie dans les faits pour tous les croyants ». Cet appel vise surtout les pays musulmans, comme l'Arabie saoudite. Estimant que les musulmans bénéficient de la liberté de culte partout dans le monde, Benoît XVI réclame la « réciprocité » afin que chacun puisse professer sa religion « en privé comme en public ».
Décret chinois de 1842 relatif à la prédication du christianisme : Tout européen qui, dans l'intérieur de l'Empire, enseignera la religion chrétienne, gravant ou imprimant privément des livres de prière ou de chants, faisant des instructions sur les âmes, et qui aura troublé l'esprit de beaucoup de personnes du peuple, sera puni de la décapitation.
Code pénal marocain. Art. 220 : Est puni d'un emprisonnement de 6 mois à 3 ans et d'une amende de 100 à 500 dirhams, quiconque emploie des moyens de séduction dans le but d'ébranler la foi d'un musulman ou de le convertir à une autre religion, soit en exploitant sa faiblesse ou ses besoins, soit en utilisant à ces fins des établissements d'enseignement, de santé, des asiles ou des orphelinats. En cas de condamnation, la fermeture de l'établissement qui a servi à commettre le délit peut être ordonnée, soit définitivement, soit pour une durée qui ne peut excéder 3 ans.
Exemple d'atteinte (Ouest-France 8 avril 2016) : Encore un blogueur libéral assassiné au Bangladesh - Samad, 28 ans, un étudiant en droit qui défendait la laïcité et critiquait les islamistes radicaux, a été tué mercredi soir, par cinq hommes armés de machettes. Cinq blogueurs libéraux et un éditeur ont été assassinés l'an dernier au Bangladesh. Ces meurtres ont été revendiqués par un groupuscule islamiste interdit.
L'autorité publique ne peut faire obstacle à la liberté d'expression que lorsque l'ordre public risque à l'évidence d'être troublé, et qu'il n'existe aucun autre moyen convenable d'assurer la paix publique.
Cons. d’État (réf.) 26 février 2010 (Gaz.Pal. 12 mai 2010) : Si la commune fait valoir que le spectacle de l'artiste Dieudonné était susceptible de donner lieu à des troubles, ces allégations ne sont étayées par aucun élément, en dehors d'une référence d'ordre général aux polémiques que certaines positions publiques de cet artiste ont pu susciter. En particulier, il n'est pas soutenu que le contenu de ce spectacle serait par lui-même contraire à l'ordre public ou se heurterait à des dispositions pénales. La décision du maire, qui revient à interdire la tenue d'un spectacle, constitue une atteinte grave à la liberté d'expression.
LIBERTÉ SURVEILLÉE
Cf. Mineur (délinquant)*.
La liberté surveillée est une mesure de sûreté, prise à l’encontre d’un mineur délinquant, qui est placé sous la surveillance d’un éducateur désigné par le juge des enfants.
Pradel (Droit pénal général) : Instituée par la loi du 22 juillet 1912 et maintenue dans l’ordonnance du 2 février 1945, la liberté surveillée consiste à laisser le mineur libre, tout en chargeant une personne d’assurer sa surveillance, et surtout sa rééducation.
Cons. d’État, 5 décembre 1997 (Gaz.Pal. 1998 II panor. adm. 127) : Il résulte de l’ensemble des prescriptions de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, modifiée par la loi du 24 mai 1951, que le législateur a entendu généraliser dans ce domaine des méthodes de rééducation fondées sur un régime de liberté surveillée. Appliquées à un mineur pour lequel la prévention est établie dans les cas visés aux art. 15 et 16 de l’ordonnance précitée, leur emploi crée un risque spécial et est susceptible, en cas de dommages causés aux tiers par les enfants confiés soit à des établissements spécialisés soit à une personne digne de confiance, d’engager, même sans faute, la responsabilité de la puissance publique à leur égard.
LIBERTINAGE (Libertin)
Cf. Attentat à la pudeur*, Bonnes mœurs*, Débauche*, Pornographie*, Prostitution*, Turpitude*, Viol*.
Le libertinage se distingue de la débauche en ce qu'il est couvert d'un vernis de culture et de raffinement, mais il n'en est pas moins attentatoire à la dignité de la personne humaine car il voit en autrui un objet de jouissance qu'il se plaît à dégrader. Teinté d'athéisme, il est marqué par une perversion de l'esprit.
Bourg Saint-Edme (Dictionnaire de la pénalité) : Cette dénomination de libertins, appliquée aux débauchés, est venue d'une secte dont les partisans reçurent ce nom. Elle s'éleva en Hollande, vers l'an 1528. Ces libertins avaient pour chef un tailleur de Picardie, nommé Quentin, et un nommé Coppin ou Chopin, qui s'associa à lui. Leurs disciples prétendaient que l'esprit de Dieu étant répandu dans toutes les créatures, c'était Dieu qui faisait le bien et le mal ; qu'en conséquence, la régénération spirituelle consistait à s'affranchir, sinon extérieurement, du moins pour le for intérieur, des règles qui n'étaient que l'ouvrage des hommes, et à étouffer les remords de la conscience. Ce furent ces maximes qui leur méritèrent le nom de libertins, qui a depuis lors été pris en un mauvaise part.
Le libertinage est bien évidemment condamné par la loi morale. À Genève, du temps de Calvin, le simple fait d'avoir des rapports hors mariage était puni de l'emprisonnement de 6 jours au pain et à l'eau, et d'une amende de 5 florins.
Gousset (Théologie morale) : Les discours déshonnêtes qu'on tient à une personne pour la porter au libertinage, à l'impureté, sont certainement des péchés mortels.
Joly (Le crime, étude sociale) : On fournit au vice une amorce, en exposant les jeunes gens à la brutalité des vieux libertins, qui ne manquent jamais d'en abuser par ruse, par promesse ou par violence.
Proal (Le crime et la peine) : Sur le tombeau de Rhamsès V on lit : " Le roi, soleil modérateur de. justice, n'a point été libertin ".
En droit comparé contemporain, le libertinage est sanctionné principalement dans le cas où la victime est un mineur.
Code pénal de l'Équateur. Art. 521 (Loi de 1998) : Celui qui commet un attentat contre les bonnes mœurs, en facilitant de manière habituelle le libertinage ou la corruption de mineurs de l'un ou l'autre sexe, sera puni de deux à cinq ans de prison.