DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre I
(Huitième partie)
INSTIGATION (en général)
Cf. Auteur d’une infraction -auteur principal*, Coauteur*, Complicité*, Corruption (active)*, Délits pénaux (délit accessoire)*, Fauteur*, Fomenter*, Instigations (divers délits)*, Meneur*, Ordre (donneur d')*, Propagande*, Proposition (de commettre une infraction)*, Prosélytisme*, Provocation*, Publicité*, Subornation*, Suicide*, Tentation*.
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La loi pénale » (4e éd.), n° II-208, p.331 - n°
II-214, p.338
Voir :
Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-I-205,
p.168 - n°
I-II-I-310, p.191
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-121
p.80, n° I-334 et I-335 p.186 et s., n° IV-325 p.614
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », sur l'instigation à l'avortement, n°306 1°,
p.133
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-II-222
p.513,
et les références de la Table alphabétique
Voir :
G. Le Bon, les meneurs de foules
Pour un exemple d’instigation au meurtre
non suivie d’effet, voir : Blanche Neige (Cas pratique n° 11)
- Notion. L’instigation consiste à pousser une personne précise à commettre un acte illicite ou immoral, et ce par l’emploi de dons, de promesses, de manœuvres, de machination, de menaces, de pressions, d’abus d’autorité ou d’abus de pouvoir (péchant par imprécision de vocabulaire, le législateur parle parfois en ce sens de « Provocation* »). Si les pénalistes belges emploient exactement le verbe instiguer, les pénalistes français préfèrent le verbe "soudoyer".
Dictionnaire civil et canonique (paris 1687) :
Instigateur, du mot latin « instigare », est celui qui anime un autre à faire quelque chose.
Denisart (Collection de jurisprudence, 1768) : On
appelle instigateur celui qui excite un autre à faire quelque chose ; c’est en ce sens qu’on dit en droit que l’instigateur d’un crime est complice
de celui qui l’a commis et mérite pareille punition.
Code pénal du Salvador. Art. 35 : Sont tenus pour
instigateurs ceux qui, dolosivement, ont déterminé une autre personne à commettre le délit.
Vidocq (Mémoires) rapporte cet enseignement de son chef :
Retenez bien, me dit M. Henry, que le plus grand fléau dans les sociétés est l'homme qui provoque. Quand il n'y a point de provocateurs, ce
sont les forts qui commettent les crimes, parce que ce sont les forts qui les conçoivent. Des êtres faibles peuvent être entraînés, excités. Pour les
précipiter dans l'abîme, il suffit souvent de chercher un mobile dans leurs passions ou dans leur amour-propre, mais celui qui tente ce moyen de les
faire succomber est un monstre ! C'est lui qui est le coupable, et c'est lui que le glaive devrait frapper.
Exemple (Télétexte du 18 octobre 2002) : En
Russie, 327 meurtres commandités ont été commis en 2001.
- Règle morale. La loi morale voit dans l'instigateur l'auteur principal de l'infraction, et lui attribue la plus grande part de responsabilité dans la commission de l'infraction.
Gousset (Théologie morale) : Quand il a prévu plus ou
moins confusément le dommage, l'instigateur est tenu de le réparer, quand bien même il n'aurait pas eu l'intention de le faire commettre.
Bouillier (Questions de morale) : Bien autrement
coupable est l'instigateur de l'action immorale et criminelle.
Pontas (Dictionnaire de cas de conscience) V°
Commandant : Celui qui commande un dommage c’est celui qui, pour son propre avantage, porte par ses ordres, par ses prières, ses menaces, ou par
d’autres moyens, à faire une action dommageable à un tiers. Il est certain qu’il est tenu de réparer le mal qu’il a commandé et qui a été effectivement
fait par son ordre ; car il en est manifestement la cause positive, injuste, efficace et théologiquement coupable.
- Cas I : Claudius a commandé à son domestique Francisc, homme violent, de frapper quelqu’un ; Francisc l’a tué. Caudius doit-il réparer les
suites de cet homicide ?
Réponse : Ou Claudius a prévu ou pu prévoir que Francisc irait au-delà de son mandat, ou non. Dans le premier cas, il doit réparer tout le
dommage qui lui est attribuable ; dans le second, il n’est tenu de réparer que les suites de son mandat.
- Cas II : Alcide, homme puissant, a témoigné par ses paroles ou par d’autres signes qu’il aurait pour agréable qu’on causât du dommage à un de
ses ennemis. Narcisse, son domestique, a dévasté toutes les vignes de cet ennemi. Alcide est-il tenu de réparer ce dommage ?
Réponse : Alcide y est obligé indubitablement, parce qu’il en est la cause positive et injuste. C’est ainsi qu’on a regardé Henri II, roi
d’Angleterre, coupable de l’assassinat de saint Thomas de Canterbury.
Buddhist monastic code, par Thanissaro Bhikkhu
(2009) : Un moine peut commettre une infraction, non seulement quand il vole lui-même un objet, mais également quand il incite d'autres personne
à commettre ce vol.
- Science criminelle. Dans un système juridique qui repose sur la notion de responsabilité subjective, l’instigateur est un complice ; mieux, un Auteur* moral.
Voir :
Tableau des incriminations protégeant la
Constitution (selon la science criminelle)
Voir :
Tableau des incriminations protégeant la
fonction législative (selon la science criminelle)
Voir :
Tableau des incriminations protégeant la
fonction exécutive (selon la science criminelle)
Voir :
Tableau relatif à la
prohibition du duel (selon la science criminelle)
Voir :
Jousse, La participation à l'infraction
Les éléments constitutifs de ce mode de participation doivent être définis avec précision pour éviter que les juges ne s'arrêtent à des actes moralement
blâmables mais juridiquement imprécis.
Si l’instigateur a porté son choix sur un mineur, sa faute est moralement plus grave et appelle une augmentation de peine.
Si l’infraction a été perpétrée, il est responsable de toutes les atteintes qu’elle a pu causer, dès lors qu'il a pu les prévoir.
Si l’infraction n’a pas été commise, il ne peut être puni que sur le fondement de l’une des incriminations spéciales figurant sous la rubrique suivante.
Carrara
(Cours de droit criminel) : La manière d'être de la
participation morale varie ; il résulte de là cinq formes de
complicité. Ce sont : 1° le mandat ; 2° le commandement ; 3° la
contrainte ; 4° le conseil ; 5° la société criminelle. Ces
différentes formes de participation morale, un législateur peut,
s'il le veut, les réduire à une seule, et se contenter du mot
instigation pour les exprimer toutes.
Digeste de Justinien (48, VIII, 15, 1). Ulpien : Celui
qui ordonne de tuer est tenu pour le meurtrier.
Digeste de Justinien (48, 19, 16). Claudius-Saturninus :
C'est un crime que d'aider les autres en les persuadant.
Digeste de Justinien (47, X, 11, 4). Ulpien : Proculus dit
à juste titre : si je vous ai donné de l'argent pour perpétrer une injure, on peut intenter l'action contre chacun de nous, parce que c'est par mon
impulsion qu'elle a été faite.
Loi Salique. T. XXX, art. 1 : Celui qui aura secrètement
soudoyé quelqu’un pour tuer un homme, et lui aura payé le salaire de ce crime, sera condamné à payer 2.500 deniers, ou 30 sous d’or et demi.
Coutume de Bretagne. Art. 625 : Celui qui donne de
l’argent, et celui qui le prend pour mal faire, doivent être punis en une même manière.
Code pénal suisse (état en 2003), art.
24 :
1. Celui qui aura intentionnellement décidé autrui à commettre un crime ou un délit encourra, si l’infraction a été commise, la peine applicable à
l’auteur de cette infraction.
2. Celui qui aura tenté de décider une personne à commettre un crime encourra la peine prévue pour la tentative de cette infraction.
Modèle de Code pénal pour l’Amérique du sud, art.
34 : Quiconque aura incité autrui à commettre un acte délictueux sera puni en tant qu’auteur principal.
Code pénal du Portugal de 1886. Art. 171 : …
Si l’instigation est suivie d’effet, l’instigateur sera puni comme un auteur principal.
Code pénal de Finlande de 1889. V-1 : Celui
qui aura amené autrui à commettre une infraction sera puni, en tant qu’instigateur, comme s’il était l’auteur principal.
Code pénal de Chine. Art. 29 : Une personne
qui en incite d’autres à commettre un crime sera punie selon le rôle qu’elle a joué dans le crime commun. Celui qui incite une personne âgée de moins de
dix-huit ans à commettre un crime se verra infliger une punition plus lourde.
Code pénal du Japon. Art. 61 : Une personne qui en
incite une autre de commettre une infraction sera condamnée en tant qu'auteur principal. Il en ira de même pour la personne qui aura poussé un
intermédiaire à inciter un tiers.
Code pénal du
Nicaragua. Art. 496 : Celui qui propose à un autre de
commettre une infraction encourt de un mois à trois ans de
détention. La même sanction est encourue par celui qui accepte
la proposition .
Cass.crim. 21 mai 1996 (Gaz.Pal. 1996 Chr.crim.
164) : Le prévenu a dû prévoir toutes les circonstances pouvant accompagner le délit dont il était l’instigateur.
- Droit positif français. L’instigation est punie de manière générale par le Code pénal au titre de la
complicité, donc seulement si elle a été suivie d’effet.
Elle n’est pas visée par la loi du 29 juillet 1881, qui réprime uniquement la Provocation* par écrits ou discours.
Cependant, l’art. 221-5-1 C.pén. incrimine, depuis 2004, le fait de faire à une personne des offres ou des promesses ou de lui proposer des dons,
présents ou avantages quelconques afin qu’elle commette un assassinat ou un empoisonnement, dans le cas où ce crime n’a été ni commis ni tenté.
Voir au mot Instigation (divers délits).
Voir :
Le contrat d'assassinat
Cass.crim.
28 novembre 1856 (S. 1857 I 160) : Celui qui, sous forme
de pari, s’engage à donner à un autre une somme d’argent, pour
le cas où celui-ci commettrait une action qualifiée délit, fait,
par cela même, une promesse, et provoque ainsi à l’action
délictueuse.
Cass.crim.
7 mai 1991 (Gaz.Pal. 1992 I somm. p.20) : Pour condamner la
prévenue en tant que complice, la Cour d'appel énonce sans
insuffisance que c'est à son instigation que l'auteur matériel
s'est livré aux exactions qui lui sont reprochées, qu'elle lui a
donné les numéros de téléphone et des détails sur la vie
professionnelle des victimes qui ont fait l'objet de menaces, et
enfin que "par un chantage au sentiment" elle l'a provoqué à
l'action commise par lui.
Exemple
(Ouest-France 24 mars 2017) : Il commandite l'incendie du
véhicule de son ex. - Alors qu'il était incarcéré... il avait
chargé un homme d'incendier le véhicule de son ex-compagne. Il a
été condamné à quatre ans de prison ferme.
INSTIGATION (Divers délits)
L’instigation à commettre telle ou telle infraction donne parfois lieu à une incrimination spéciale.
Voici les principales ; à côté des incriminations de droit commun figurent des dispositions protégeant spécialement les mineurs.
- I - Incriminations de droit commun
1° Instigation à commettre un assassinat ou un empoisonnement. Depuis une loi du 9 mars 2004, l’art. 221-5-1 C.pén. incrimine l’acte consistant, soit à faire à une personne des offres ou des promesses, soit à lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques afin qu’elle commette un assassinat ou un empoisonnement.
Sur l’instigation au meurtre, voir :
Jean-Paul
Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n°
I-335, p.187
Voir notre article intitulé :
Le contrat d'assassinat
Voir :
Tableau des
incriminations protégeant la vie (selon la science criminelle)
Voir :
Tableau des incriminations
protégeant la vie (en droit positif français)
Pour un exemple, voir le
Cas pratique n° 86
Exemple d'acte équivoque : Callisthène,
historiographe d’Alexandre le Grand, voulant se venger de son roi, se tourna vers le crédule Hermolaos ; insidieusement, il flatta sa vanité en
l’assurant qu’il était son meilleur disciple, s’indigna qu’Alexandre trahisse les lois grecques au profit des usages perses, et finit pas déplorer qu’il
n’y eut plus un seul homme assez courageux pour mettre fin à ce scandale. Le malheureux releva le défi, mais complota si maladroitement qu’il fut
démasqué et condamné à mort. Si son indigne mentor fut lui aussi exécuté, c’est uniquement parce que l’on était en présence d’une tentative de
régicide.
Exemple d'acte condamnable (Ouest-France 11 avril
2008) : À Rennes l'épouse d'un concierge, soupçonnée d'avoir voulu faire supprimer son mari, avait déjà contacté un tueur à gages, au cours des mois
précédents. Cet homme aurait accepté les 2.500 € proposés par l'épouse ; mais une fois l'argent en poche, il avait disparu dans la nature.
2° Instigation au suicide. L’art. 223-13 C.pén. vise, de manière très imprécise, le fait de provoquer au suicide d’autrui, mais seulement dans le cas où cette incitation a conduit à un suicide ou du moins une tentative de suicide. Il semble que le législateur ait entendu viser à la fois l’instigation et la Provocation*. Ce texte vise à combler la lacune répressive provenant de la position du législateur qui se refuse à incriminer le suicide, ce qui entraîne l’impunité de la complicité de suicide.
Sur l’instigation au suicide, Voir :
Jean-Paul
Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-121, p.80.
Voir :
Tableau relatif à la
prohibition du suicide (selon la science criminelle)
Buddhist monastic code, par Thanissaro Bhikkhu
(2009) : Commet une infraction le moine qui intentionnellement... incite une personne à mourir en lui disant : « Mon bon homme, de quel intérêt
est cette vie mauvaise et malheureuse pour vous ? La mort serait meilleure pour vous que la vie ».
Angevin (Juris-classeur pénal, art. 223-13) :
Contrairement à la provocation [l’instigation] mode de complicité, qui pour être caractérisée doit être « qualifiée », en ce sens que l’acte
qui la constitue doit consister en l’un de ceux limitativement énumérés par l’art. 121-7 al.2 C.pén., la « provocation » au suicide n’est pas
soumise à l’un de ces adminicules. L’acte de provocation peut être réalisé par tout moyen, oral, écrit ou gestuel, public ou privé, y compris par voie de
presse.
3° Instigation à la trahison ou à l’espionnage. L’art. 411-11 C.pén. (art. 73 al.2 ancien) incrimine le fait d’inciter directement une personne à commettre un crime relevant de la trahison ou de l’espionnage, lorsque cette manœuvre n’a pas été suivie d’effet indépendamment de la volonté de son auteur (si elle a aboutit, elle constitue un acte de complicité).
Vitu (Juris-classeur pénal, art. 411-11 et s.) : Pour
que le complice [l’instigateur] soit punissable, il faut que l’auteur ait commis, ou du moins tenté de commettre l’infraction ; s’il a refusé
d’agir, le complice est impunissable comme l’est l’auteur [l’instigué] lui-même. Pour éviter cet angle mort de la répression, l’art. 411-1 érige en délit
correctionnel la provocation à commettre l’un des crimes prévus et réprimés par les art. 411-2 à 411-10 lorsque la provocation [l’instigation] a échoué
en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur.
Cass.crim. 1er mars 1951 (Bull.crim. n° 366
p.647) : La provocation est punissable, à la condition qu’elle soit intentionnelle.
4° Instigation tendant à détourner des militaires de leurs devoirs (article ci-dessous).
Code de
la défense, art. L.322-18 : Le fait pour tout militaire ou
toute personne embarquée d'inciter, par quelque moyen que ce
soit, un ou plusieurs militaires à commettre des actes
contraires au devoir ou à la discipline est puni, en temps de
paix, d'un emprisonnement de deux ans.
Si le coupable est d'un grade supérieur à celui des militaires
qui ont été incités à commettre lesdits actes, il encourt un
emprisonnement de cinq ans.
Lorsque les faits sont commis en temps de guerre ou sur un
territoire en état de siège ou d'urgence, la peine est de cinq
ans d'emprisonnement dans les cas prévus au premier alinéa du
présent article et de dix ans d'emprisonnement dans celui prévu
au deuxième alinéa .
5° Instigation à porter un faux témoignage. L’art. 434-15 C.pén. (art. 365 ancien) incrimine le fait d’user de promesses, offres, présents, pressions, menaces, voies de fait, manœuvres ou artifices en vue de déterminer autrui à faire une déposition mensongère. On parle ici de Subornation de témoin*.
Goyet (Droit pénal spécial) : La loi du 28 juillet 1949
a érigé la subornation de témoins en un délit distinct, caractérisé par le fait même de la subornation, et punissable quel qu’en ait été l’effet.
Code pénal du Luxembourg. Art. 223 - Le coupable
de subornation de témoins, d’experts ou d’interprètes sera passible des mêmes peines que le faux témoin.
Cass.crim. 4 février 1997 (Gaz.Pal. 1997 I
225) : Pour déclarer à bon droit le président d’un club de football coupable d’une subornation de témoin commise à l’égard de X, l’arrêt attaqué
énonce que, lors d’une entrevue, le prévenu a demandé à l’intéressé de faire des déclarations mensongères au cours d’une procédure relative aux faits de
corruption dénoncés, les juges ajoutent que «dans la suite de la conversation» le prévenu lui a proposé une place d’entraîneur ; ils en déduisent
que le témoin «a fait l’objet de la part du président de promesses et de pressions en vue d’apporter un faux témoignage en justice».
- II - Incriminations protégeant les mineurs.
Les art. 227-18 et suivant visent des instigations (puisqu’elles concernent des enfants abordés individuellement) dirigées vers des mineurs choisis en raison de leur vulnérabilité et tendant à leur faire accomplir des actes, soit illicites, soit immoraux ou dangereux pour leur santé. Voir : Enfants*, Mineurs*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », sur l'instigation à faire le mal : n° 426,
p.274
Renucci (Droit pénal des mineurs) : L’objectif du
législateur est d’atteindre toutes les personnes qui entendent exploiter la vulnérabilité des mineurs.
1° Instigation à abandonner un enfant. L’art. 227-12 C.pén. sanctionne le fait de pousser, soit dans un but lucratif, soit par instigation, des parents à abandonner leur enfant né ou à naître.
Voir,
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents »,
n° 317 1°, p.151
Cass.crim. 24 décembre 1942 (Gaz.Pal. 1943 I
117) : Le simple conseil donné de commettre une action qualifiée crime ou délit ne constitue pas l’un des actes de complicité prévus par l’art.
60 C.pén.
2° Instigation de mineur à délinquer. L’art. 227-21 C.pén. incrimine le fait de provoquer directement un mineur à commettre un crime ou un délit. Le législateur a évidemment eu en vue les jeunes étrangers qui sont formés à voler en bande.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », sur l'instigation à la délinquance, n° 436,
p.286
Voir :
Dickens, Un cours de vol à la tire
Pradel et Danti-Juan (Droit pénal spécial) : Le
législateur semble avoir surtout voulu atteindre ici l’embrigadement mafieux des enfants et des adolescents.
Exemple (Ouest-France 20 janvier 2012) : Une
fillette de 10 ans a été arrêtée après un vol dans une maison... Elle n'a pas réussi à prendre la fuite quand les gendarmes sont arrivés sur les lieux du
cambriolage, où plus de 40.000 € de bijoux ont été dérobés. Sa comparse et l'homme (sans doute son père) qui l'attendaient dans une voiture sont partis
en trombe avec le butin... « On est face à des réseaux. Des adultes qui ne cambriolent pas eux-mêmes, qui utilisent des enfants » a expliqué
la procureure d'Angers.
Exemple (Ouest-France
12 octobre 2013) : Vingt-sept Tziganes, originaires de
Croatie, âgés de 19 à 55 ans et organisés en trois clans
familiaux étaient jugés devant le Tribunal correctionnel de
Nancy. Ils ont tous été condamnés hier, sauf une femme, à des
peines de prison de 2 à 8 ans, pour avoir forcé leurs enfants à
voler. Les petits cambrioleurs, âgés d'une dizaine d'années, ont
dérobé bijoux, montrer, argent liquide pour plusieurs millions
d'euros lors d'une centaine de casses dans des maisons de l'est
de la France, en Allemagne ou en Belgique. Un prévenu a, en
outre, été condamné pour « traite d'êtres humains
» concernant l' « achat
» d'épouses.
Ce texte peut être rapproché de la Convention de New York, du 26 janvier 1990, interdisant d'incorporer des mineurs dans une armée. Plus une recrue est jeune, plus elle peut être manipulée (d'où en France l'abaissement de l'âge de la majorité électorale).
Qiu
Xiaolong (La danseuse de Mao) : Pour reprendre le pouvoir à
ses rivaux Mao a enrôlé les jeunes étudiants dans les Gardes
rouges, comme socle de la lutte... Dans la campagne de la
Révolution culturelle, ils ont été appelés à balayer les Quatre
vieilleries - vieilles idées, vieille culture, vieilles coutumes
et vieilles habitudes. Les ennemis de classe tels que
capitalistes, propriétaires terriens, artistes et intellectuels
sont devenus les cibles désignées... Tous les livres de mon père
ont été brûlés. Et le collier de ma mère lui a été arraché du
cou.
Courtois
(Le livre noir du communisme) : Les jeunes scolarisés dans le
secondaire, le supérieur et les instituts de formation
professionnelle sont autorisés à former des unités de Gardes
rouges... Ceux qui ont entre quatorze et vingt-deux ans seront
pour Mao des instruments enthousiastes... Des millions d'élèves
et d'étudiants s'organisent alors et trouvent sans peine en
leurs professeurs, leurs responsables d'université, puis les
autorités municipales ou provinciales qui tentent de les
défendre, les « monstres et démons
» à pourchasser.
3° Instigation de mineur à la débauche. L’art. 227-22 C.pén. (ancien art. 334-2) concerne réprime le fait de favoriser ou de tenter de favoriser la corruption d’un mineur. Il s’applique avec plus de vigueur lorsque les actes de corruption sont perpétrés à l’intérieur ou aux abords d’un établissement scolaire.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », sur l'instigation à la débauche : n° 439,
p.293
Cass.crim. 19 juin 1996 (Gaz.Pal. 1996 II Chr. crim.
171) : Pour déclarer à bon droit le prévenu coupable de tentatives de corruption de mineurs, l’arrêt attaqué énonce que le prévenu a abordé à
trois reprises des jeunes garçons âgés de treize et seize ans et leur a proposé de monter dans son autocaravane pour leur montrer des photographies
pornographiques qui s’y trouvaient et pour les initier à la jouissance.
4° Instigation de mineur à l’alcool. L’art. 227-19 C.pén. incrimine le fait de provoquer directement un mineur à la consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », sur l'instigation à faire le mal : n° 446,
p.301
Desportes (Juris-classeur pénal, art. 227-18 et s.) :
L’objet du législateur est d’éviter que des mineurs ne soient placés peu à peu dans un état de dépendance à l’égard de l’alcool et donc amenés à
l’alcoolisme.
5° Instigation de mineur à se droguer. L’art. 227-18 sanctionne le fait de provoquer directement un mineur à faire un usage illicite de stupéfiants. Là encore, la peine encourue est plus lourde si la provocation a lieu à l’intérieur ou aux abords d’un établissement scolaire.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », sur l'instigation à user de stupéfiants, n°
442, p.297
Voir :
Tableau des incriminations
en matière de stupéfiants (selon la science criminelle)
Voir :
Tableau des incriminations en
matière de stupéfiants (en droit positif français)
Desportes (Juris-classeur pénal, art. 227-18 et s.) :
La provocation est une forme particulière de complicité ; dans ce cadre la provocation doit être accompagnée de « don, promesse, menace,
ordre, abus d’autorité ou de pouvoir ».
6° Instigation de mineur à fumer. L’art. L.3511-2-1 du Code de la santé publique interdit de vendre du tabac ou des produits du tabac à des jeunes de moins de 18 ans.