DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre P
(Dix-septième partie)
PROVOCATION (à commettre une infraction)
Cf. Auteur*, Complicité*, Cri*, Opinion (délit
d')*, Délits pénaux (délit accessoire)*, Expression (liberté
d')*, Fauteur (de troubles)*, Fomenter*,
Instigation*, Promesse*, Propagande*,
Publicité*, Refus de l’impôt*,
Régicide*, Stupéfiants*.
- Rapprocher : Fauteur*, Instigation*, Meneur*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° II-210, p.334 / n° II-216, p.341
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-I-303, p.183 / n° I-II-I-305, p.187 / n° I-II-I-310, p.191
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.),
n° 23, p.19
sur la provocation à l'avortement, n° I-128, p.89
sur la provocation à l'incendie, n° V-612, p.663
sur la provocation au meurtre non suivie d'effet, n° I-336,
p.189
sur la provocation au vol non suivie d'effet, n° IV-326, p.614
sur la provocation au suicide, n° I-121, p.80
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents »,
sur la provocation à l'avortement, n° 306 1°, p.133
sur la provocation d'un mineur à la consommation d'alcool, n°
444, p.298
sur la provocation d'un mineur à la débauche, n° 439, p.293
sur la provocation d'un mineur à la délinquance, n° 436, p.286
sur la provocation d'un mineur à l'usage de stupéfiants, n° 442,
p.297
sur la provocation d'un mineur au suicide, n°418, p.262
sur la provocation d'un mineur au tabagisme, n°450, p.304
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société »,
sur le délit de provocation en général,n° II-II-223, p.514
sur la provocation à la guerre civile, n° I-I-209, p.110
sur la provocation à tuer un agent public n° II-II-203, p.431,
sur la provocation à une atteinte à la sûreté de l'État, n°
I-I-113, p.87
sur la provocation à renverser la Constitution, n° 18, p.20
sur la provocation de militaire à désobéir ou à déserter, n°
I-I-113, p.87
Voir : G. Le Bon, les meneurs de foules
Voir : Décret du 18 juillet 1791, contre la sédition
Voir : Décret du 29-31 mars 1793, relatif aux écrits tendant au rétablissement de la royauté
Voir : Décret du 29-31 mars 1793, relatif aux écrits provoquant au meurtre et la violation des propriétés
- Notion. La provocation (à commettre un délit) consiste dans le fait d’inciter la population, par des discours ou des écrits, à perpétrer telle ou telle infraction. Le provocateur ne s’adresse pas à une personne particulière, mais à la foule ; il s’efforce de créer un climat susceptible de faire passer à l’acte un quelconque lecteur ou un auditeur, déjà acquis à cette idée. L’Instigation*, en revanche, vise une personne précise.
Tribunal fédéral suisse 14 mai 1971 (Jour.trib. 1972 IV 59) : La provocation publique, à la différence de l’instigation, ne s’adresse pas à l’individu, en lui insufflant des mobiles personnels de commettre l’infraction, mais elle fait appel aux rumeurs et instincts des masses.
Coran (Sourate 9, verset 5, dit « du Sabre » : Les mois sacrés expirés, tuez les idolâtres partout où vous les trouverez, faites les prisonniers, assiégez les et guettez les à toute embuscade ; mais s'ils se convertissent... [En théorie, s'appuyant sur la loi de 1881 régissant la presse et sur les Conventions internationales les plus récentes, on pourrait interdire la publication de cet ouvrage lorsqu'il n'est pas expurgé de ce verset et de ceux qui en découlent].
Exemple (Télétexte TF1 15 septembre 2007) : Le chef d'un groupe irakien, proche d'Al-Qaïda, met à prix 100.000 $ la tête du dessinateur suédois qui a publié une caricature de Mahomet.
Exemple (Ouest-France 20 août 2008) : Un Britannique qui recrutait, sur Internet,des extrémistes islamiques pour la guerre sainte, et son cousin, ont été condamnés respectivement à douze ans et dix ans d'emprisonnement par le Tribunal de Londres. Le jeune homme de 23 ans avait compilé une « encyclopédie » de documents islamiques, avec notamment une fiche détaillant les adresses des membres de la famille royale. Il avait aussi en sa possession une vidéo de vingt minutes montrant comment fabriquer une veste truffée d'explosifs pour une opération suicide.
La provocation peut aussi résulter du fait de créer un climat d'excitation de nature à pousser la foule à commettre des crimes et délits. Il en est ainsi lorsque, hors le cas d'incendie ou autre calamité naturelle, l'autorité fait sonner le tocsin ou battre le tambour.
Exemple, relatif aux massacres eu 2 septembre 1792. Ils résultèrent du fait que la Commune arrêta : "que le canon d'alarme serait tiré à l'instant, le tocsin sonné et la générale battue".
- Règle morale. Une doctrine rarement aussi unanime enseigne que la responsabilité morale du provocateur (on dit parfois, improprement, instigateur) est plus grande que celle du simple exécutant.
Boeresco (Traité comparatif des délits et des peines) : Les peines à appliquer doivent être différentes dans les divers cas... On doit prendre en considération s'il s'agit d'un agent principal, d'un provocateur ou d'un simple participant.
Lombroso (Le crime politique) : Quant à la violence extérieure, nous devons porter notre attention sur l'influence des chefs, qui arrive souvent à un point tel qu'on peut la comparer à une véritable suggestion. Si cela augmente la responsabilité des instigateurs, leur oeuvre doit être considérée comme une violence morale qui atténue celle de leurs partisans.
Donnedieu de Vabres (Traité de droit criminel) : On peut concevoir que le provocateur soit traité comme l'auteur moral de l'infraction.
- Science criminelle. La provocation peut être réprimée par le législateur selon deux techniques différentes : soit d'une manière générale mais indirecte, au niveau de l'imputation, au titre de la complicité (complicité par provocation ou par instigation), soit de manière directe mais spéciale au niveau des incriminations, en tant que délit autonome (délit de provocation au meurtre, délit de provocation à la rébellion...).
Voir : Tableau des incriminations protégeant la Constitution (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations protégeant la vie (selon la science criminelle)
Joly (La France criminelle) : Toutes les fois qu'il y a quelque opération suspecte, immorale ou à plus forte raison criminelle, qui se pratique avec un peu de régularité, les provocateurs arrivent.
Rigaux et Trousse (Les crimes et délits du Code pénal belge) : La provocation est l'une des formes les plus dangereuses de la sollicitation au crime. Pour la réprimer, le législateur exige qu'elle se soit exprimée dans certaines manifestations. Lorsque la provocation rentre dans les prévisions légales, elle est punie tantôt à titre de participation à l'infraction qu'elle a déterminée, tantôt à titre de délit spécial, tantôt par une aggravation de la peine.
Code pénal néerlandais de 1881. Art. 131 : Celui qui, oralement ou par écrit, excite en public à un fait punissable est puni d’un emprisonnement de cinq ans au plus.
Code pénal du Nicaragua. Art. 494 : Celui que de manière publique et directe incite un autre ou d'autres à commettre une infraction déterminée, encourt de deux mois à un an de détention ... à moins qu'une telle action ne soit prévue comme une infraction de plus grande gravité par une autre disposition pénale.
Code pénal suisse, Art. 276 : Celui qui aura publiquement provoqué à la désobéissance à un ordre militaire, à une violation des devoirs de service, au refus de servir ou à la désertion… sera puni de l’emprisonnement.
Code pénal du Chili. Art. 123 : Ceux qui sonnent ou ordonnent de sonner les cloches ou un autre instrument quelconque pour exciter le peuple à la rébellion... si le soulèvement est consommé, seront punis de la peine de réclusion...
La sanction varie ordinairement selon que l'acte de provocation a ou non été suivi d'effet.
Décret des 29-31 mars 1793. La Convention nationale décrète que ceux qui provoqueront par leurs écrits le meurtre et la violation des propriétés, seront punis, savoir : 1° de la peine de mort, lorsque le délit aura suivi la provocation ; 2° de la peine de six ans de fers, lorsque le délit ne l'aura pas suivie.
On peut observer que la provocation à commettre une infraction peut résulter, non seulement de paroles ou d'écrits, mais également d'une mise en scène, d'une fourberie. Pourtant, nul ne cite de texte réprimant ce procédé.
Hillairet (Dictionnaire des rues de Paris v° Bernardin n°17/19) : Le cardinal de Retz se livra, en 1649, à une petite comédie politique, afin d'exciter une sédition dans Paris. Un nommé Joli, syndic de Paris et conseiller au Châtelet, remplit son pourpoint de paille, l'adossa à une poutre et tira dessus un coup de pistolet. Après quoi il remit son habit et prit place dans son carrosse, qui sortit de la ville. Il ne tarda pas à être "attaqué". Un complice déchargea sur lui son pistolet, après que Joli eut pris soin de se coucher au fond de la voiture. Aussitôt, on cria que la Cour, Mazarin et Anne d'Autriche, venaient d'essayer d'assassiner le syndic le plus aimé des Parisiens. Joli exhiba son pourpoint percé et même son bras gauche sur lequel il avait simulé une plaie. La mystification n'eût pourtant pas le résultat escompté ; Mazarin connu vite tous les détails de l'affaire et sut en tirer vengeance.
- Droit positif français (mode d'imputation). La loi du 29 juillet 1881 sur la presse est conforme à la science criminelle. Elle exige que la provocation ait été faite, par des discours ou écrits rendus publics ; elle distingue selon que la provocation a été suivie d'effet (art. 23), ou qu'elle n'a pas été suivie d'effet (art. 24).
Voir : Tableau des incriminations visant à assurer l'existence de la Nation (en droit positif français)
Voir : Tableau des incriminations assurant la paix intérieure de la Nation (en droit positif français)
Voir : Tableau des incriminations protégeant la Nation contre les actes de terrorisme (en droit positif français)
Voir : Tableau des incriminations assurant le bon fonctionnement de l'administration (en droit positif français)
Voir : Tableau des incriminations protégeant la vie (en droit positif français)
Goyet (Droit pénal spécial) : La provocation doit avoir été directe, c'est-à-dire avoir encouragé au fait même qui a été commis... Elle doit avoir été faite soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, des imprimés vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou affiches exposés au regard du public.
Cass.crim. 29 octobre 1936 (Gaz.Pal. 1936 II 684) : Dans le délit de provocation au crime non suivi d’effet, l’élément intentionnel réside, quels qu’aient été le mobile, et le but final envisagé par l’auteur de la provocation, dans le fait d’avoir voulu créer l’état d’esprit propre à susciter le crime.
- Droit positif français (délits spéciaux). On peut citer à cet égard les délits suivants :
- Provocation à abandonner un enfant. Voir : Instigation à abandonner un enfant*.
- Provocation à la désobéissance. L’art. 413-3 C.pén. réprime le fait, en vue de nuire à la défense nationale, de provoquer à la désobéissance, par quelque moyen que ce soit, des militaires ou des personnes affectées au service national. Voir : Désobéissance*.
Cass.crim. 2 mai 1956 (Bull.crim. n° 338 p.625) : La provocation de militaires à la désobéissance peut être indirecte et résulter de ce que la mission de l’armée est présentée comme condamnable et honteuse.
- Provocation à la haine raciale. À la suite des diverses Conventions internationales s’efforçant de prévenir les conflits entre les hommes, de nombreux législateurs incriminent le fait de pousser à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Voir : Racisme*.
Trib.corr. Mulhouse 15 décembre 2011 (Gaz.Pal. 16 février 2012 p.9 note Poissonnier) sommaire : Le fait d'interpeller des clients d'un supermarché et de les inviter à ne pas acheter des produits en provenance d'Israël ne constitue pas l'infraction de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence au sens de l'art. 24 al.8 de la loi du 29 juillet 1881. [Il a déjà été jugé que n'est pas répréhensible le fait de critiquer la politique d'un État étranger, s'agirait-il de l'État d'Israël ]
Exemple (Le Figaro, 9 février 2006) : H. a été condamné avant-hier à Londres à sept années de détention pour incitation au meurtre et à la haine raciale … ses pêches ayant contribué à créer une atmosphère dans laquelle tuer n’est pas considéré seulement comme un droit légitime, mais comme un devoir moral et religieux … « Tuer un kafir (infidèle) pour quelque raison que ce soit, et même sans raison, est permis » proclamait H.
Provocation publique. En France, c’est l’art. 24 al.6 de la loi du 29 juillet 1881 qui sanctionne le fait de provoquer publiquement à la haine raciale ou religieuse.
Cass.crim. 17 février 1998 Gaz.Pal. 1998 I Chr.crim. 97) : Tombe sous de coup de l’art. 24 al.6 un écrit qui est de nature à faire naître dans l’esprit du lecteur des sentiments de discrimination et de haine à l’égard du peuple juif.
Cass.crim. 30 mai 2007 (Bull.crim. n° 140 p.622) : Justifie sa décision la cour d'appel qui, saisie de poursuites pour provocation à la discrimination raciale en raison de la diffusion, à l'initiative de deux conseillers régionaux, d'un tract intitulé "Pas de cathédrale à la Mecque, pas de mosquée à Strasbourg" protestant contre le vote, par le conseil régional d'Alsace, d'une subvention destinée à la construction d'une mosquée à Strasbourg, a infirmé le jugement de condamnation et prononcé une relaxe, dès lors que les propos dénoncés n'excédaient pas les limites admissibles de la liberté d'expression au sens de l'article 10 Conv. EDH.
Trib.corr. Paris 22 octobre 2002 (Gaz.Pal. 2003 J 3069, affaire Houellebecq), on reprochait au prévenu d’avoir dit qu’il éprouvait de la « haine » à l’égard de l’Islam : L’énonciation d’une opinion personnelle relativement à une religion, envisagée au sens conceptuel du terme, et qui n’est accompagnée d’aucune exhortation ni appel à la partager, ne constitue pas une provocation à la haine, à la violence…
Provocation non publique. C’est l’art. R.625-7 C.pén. qui réprime la provocation non publique à la discrimination, à la haine… Il fait de cette infraction une contravention de la 5e classe.
Berthiau (Juris-classeur Pénal, art. R.627-5-7) : Par le sens non équivoque du message délivré, le provocateur doit viser à créer, dans l’esprit de celui qui le perçoit, un choc incitatif à la discrimination, à la haine ou à la violence.
- Provocation à s’armer illégalement. L’art. 412-8 C.pén. vise le fait de provoquer autrui à s’armer contre l’autorité de l’État ou contre une partie de la population. La provocation non suivie d’effet est un simple délit ; mais la provocation suivie d’effet devient un crime.
Vitu (Juris-classeur Pénal, art.412-1 et s.) : La seconde forme de l’infraction consiste à provoquer la population à se livrer une guerre civile. L’expression « guerre civile » avait été utilisée avant 1960 dans l’art. 91, mais elle avait été abandonnée car la doctrine n’avait pas pu en donner le sens exact… L’infraction suppose la provocation à des combats de quelque envergure et d’une continuité suffisante pour que l’on puisse parler d’une véritable guerre civile. Mais il importe peu que les combats aient ou non un but purement politique : le simple fait d’exciter les citoyens à s’armer suffit.
- Provocation à la trahison et à l’espionnage. Voir : Instigation à la trahison et à l’espionnage*.
- Provocation à l’insurrection. Voir : Insurrection*.
- Provocation à la désertion. Voir : Désertion*.
- Provocation à la haine raciale. Voir : Racisme*.
- Provocation à l’usage d'alcool. Voir : Alcoolisme*.
- Provocation à l’usage de stupéfiants. Voir : Stupéfiants*.
Voir : Tableau des incriminations en matière de stupéfiants (en droit positif français)
- Provocation au génocide. Voir : Génocide*.
- Provocation au suicide. Voir : Instigation au suicide*.
- Provocation de mineurs à se droguer, à s’enivrer, à commettre des crimes. Voir : Instigation de mineurs*.
PROVOCATION (Excuse de)
Cf. Attaque*, Excuse*, Partage de responsabilité*, Victimologie*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-331, p.498
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-325, p.91 / n° I-I-II-216, p.152 / n° I-III-I-307, p.281 / n° I-III-II-7, p.302
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-238, p.137 / Table alphabétique, p.678
- Notion. On parle d'excuse de provocation lorsque l'auteur d'un acte tombant sous le coup de la loi pénale n'a pas agi avec tout son sang froid, mais sous l'effet d'une agression qui lui a fait perdre le contrôle de lui-même et l'a conduit à accomplir un geste qu'il n'aurait pas commis spontanément.
- Règle morale. Du fait que, victime d'une provocation, l'agent n'a pas agi spontanément et encore moins avec préméditation la sanction qu'il encourt doit être allégée.
Code de droit canon. Can. 1324 : L’auteur d’une violation n’est pas exempt de peine, mais la peine prévue par la loi ou le précepte doit être tempérée, ou encore une pénitence doit lui être substituée, si le délit a été accompli... contre l’auteur d’une grave et injuste provocation.
Tiercelin (Théorie générale de l'imputabilité et de la responsabilité) : Il est une situation qui a quelquefois des analogies avec la légitime défense incomplète, mais qu'il faut bien se garder de lui assimiler. C'est la provocation ! ... Dans la provocation, l'acte est postérieur à l'affront et déterminé par un sentiment de vengeance... Lorsque la réaction a eu lieu spontanément, surtout après une offense grave, on comprend que la peine doit être atténuée à cause de l'impression vive et du sentiment presque insurmontable qui porte l'homme à venger l'insulte reçue sur la personne même de l'insulteur.
- Science criminelle. L'excuse de provocation, qui légitime un abaissement de la peine légalement encourue, peut
être envisagée de deux manières différentes.
Du point de vue de la responsabilité objective, on considère que le trouble social causé par l'acte reproché est mathématiquement atténué par la
réprobation attachée à l'agression commise : une gifle heurte moins les spectateurs d'une altercation quand elle répond à une injure que lorsqu'elle est
donnée sans raison apparente.
Du point de vue de la responsabilité subjective, on estime que l'élément moral de l'acte délictueux est atténué en proportion de l'effet que l'agression
a pu avoir sur l'équilibre nerveux de l'agent.
Coutume de Bretagne. Art. 673 : En injures verbales y a compensation, si l’une injure est aussi grande que l’autre.
Carrara (Cours de droit criminel) : Dans le langage de la pratique, la colère excitée par un mal causé à notre personne constitue l'excuse dite de provocation. La colère excitée par une offense à la propriété, ou à des personnes qui nous sont chères, constitue ce qu'on appelle l'excuse du juste ressentiment.
Code pénal du Brésil. Art 121 : Homicide … Si l’agent commet le crime à la suite d’une injuste provocation de la victime, le juge peut réduire la peine d’un sixième à un tiers.
Code criminel du Canada. Art. 232 : Une action injuste ou une insulte, de telle nature qu’elle suffise à priver une personne ordinaire du pouvoir de se maîtriser, est une provocation.
- Droit positif français. Le Code pénal de 1810 avait retenu quelques cas d'excuses de provocation ; ainsi son art. 321 abaissait la peine encourue du chef de meurtre, quand ce crime avait été provoqué par des violences graves. Dans le silence du nouveau Code, cette excuse relève de l’appréciation souveraine des juges du fond.
Ortolan (Éléments de droit pénal) : Fréquemment il arrive que l’homme lésé dans quelques uns de ses droits, au moment où cette lésion lui est faite, sous le coup de l’irritation qu’elle lui cause, se laisse emporter par son ressentiment et réagit par quelque acte coupable contre celui par qui il vient d’être lésé. Nous disons qu’il a été provoqué, c’est-à-dire excité, poussé à l’acte qu’il a commis par la lésion du droit qu’il venait d’éprouver… La provocation ne fait point disparaître la culpabilité… mais cette culpabilité s’en trouve notablement diminuée.
Cass.crim. 17 février 1981 (Bull.crim. n° 64 p.179) : Le temps écoulé entre la provocation et les injures ne rend pas nécessairement celles-ci inexcusables.
PROVOCATION POLICIÈRE
Cf. Loyauté*, Pièges et artifices policiers*, Preuve (recherche des)*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-208, p.45 / n°I-II-II-109, p.228
S’il est permis aux policiers d’user de procédés contournés pour traquer les malfaiteurs sur leur terrain, il leur est en revanche interdit de les inciter à commettre un délit auquel il ne songeaient pas. La police peut s’insinuer dans le sillage d’une infraction en cours de réalisation ; mais elle ne saurait en être l’initiatrice.
X… (Mémoires d’un agent de police, 1868) : Lorsque la police politique a besoin de prouver son zèle et son habilité, elle choisit un ou deux conspirateurs, leur fournit des complices et même de l’argent, et assiste à leurs évolutions, comme un oisif regarde des poissons rouges dans un aquarium.
Cass.crim. 5 mai 1999 (Gaz.Pal. 1999 II Chr.crim. 128) : La provocation à l’infraction par un agent de l’autorité publique exonère le prévenu de sa responsabilité pénale, lorsqu’elle procède de manœuvres de nature à déterminer les agissements délictueux, portant ainsi atteinte au principe de la loyauté des preuves.
Cass.crim. 27 février 1996 (Gaz.Pal. 1996 I Chr.crim. 105) : Ayant établi que l’interpellation de M. a procédé d’une machination de nature à déterminer ses agissements délictueux et que, par ce stratagème, qui a vicié la recherche et l’établissement de la vérité, il a été porté atteinte au principe de la loyauté des preuves, la chambre d’accusation a pu étendre la nullité des écoutes téléphoniques aux actes de procédure qui les ont suivies.
Cass.crim. 23 novembre 1999 (Gaz.Pal. 2000 J 1156) : La participation simulée d'un fonctionnaire de police à une action illicite ne vicie pas la procédure lorsqu'elle ne détermine pas la personne intéressée à commettre le délit.
Cass.crim. 9 août 2006 (Gaz.Pal. 28 mars 2007) : Porte atteinte au principe de la loyauté des preuves et au droit à un procès équitable la provocation à la commission d'une infraction par un agent de l'autorité publique ou par son intermédiaire. La déloyauté d'un tel procédé rend irrecevables en justice les éléments de preuve ainsi obtenus.
Cass.crim. 7 février 2007 (Bull.crim. n°37 p.241) : Porte atteinte, notamment, au principe de la loyauté de la preuve, la provocation à la commission d'une infraction par un agent public étranger, en l'espèce un service de police new-yorkais, réalisé par un site pédophile créé et exploité par ce dernier aux fins de découvrir tous internautes pédophiles...
PROXÉNÈTE
Cf. Entremetteur*, Maquereau*, Non-justification de ressources*, Proxénétisme*, Ruffian*, Souteneurs*, Vagabondage spécial*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-112, p.169 et s.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », quant au mari proxénète de sa femme n° 211, p.93
Un proxénète est un individu qui s’adonne au Proxénétisme*. Il peut s’agir d’un homme ou d’une femme ; d’une personne extérieure à la famille de la personne livrée à la débauche, ou de l’un de ses parents (éventuellement de son conjoint).
Code pénal du Luxembourg. Art. 379bis : Est
proxénète celui ou celle :
a) qui d’une manière quelconque aide, assiste ou protège sciemment la prostitution d’autrui ou le racolage en vue de la
prostitution ;
b) qui, sous forme quelconque, partage les produits de la
prostitution d'autrui ou reçoit des subsides d'une personne se
livrant à la prostitution ;
c) qui embauche, entraîne ou entretient, même avec son
consentement, une personne même majeure en vue de la
prostitution ou la livre à la prostitution ou à la ébauche ;
d) qui fait office d'intermédiaire, à un titre quelconque, entre
les personnes se livrant à la prostitution ou à la débauche et
les individus qui exploitent ou rémunèrent la prostitution ou la
débauche d'autrui;
e) qui, par menace, pression, manoeuvre ou par tout autre moyen
entrave l'action de prévention de contrôle, d'assistance ou de
rééducation entreprise par les organismes qualifiés en faveur de
personnes se livrant à la prostitution.
Joly (Le crime, étude sociale) : D’une manière générale, la prostitution masculine a la même organisation que la prostitution féminine. Toutes les deux ont leurs insoumises, leurs proxénètes, leurs maisons, leurs souteneurs, leurs recruteurs, prêts à toutes les complaisances comme à toutes les complicités.
Rigaux et Trousse (Les crimes et délits du Code pénal belge) : Les tribunaux ont condamné comme souteneur, tant celui qui oblige sa femme à se prostituer, la surveille et se fait remettre ce qu’elle retire de son commerce, que le chômeur occasionnel dont l’épouse ou la concubine trouve dans la prostitution tout ou partie des revenus du ménage.
Exemple (Ouest-France 21 décembre 2007) : Le proxénète filmait les clients de sa femme. Celle-ci était inscrite comme "modèle libre" à la Chambre des métiers. En réalité, elle se prostituait à son domicile de Pleuven. Son mari a été condamné à un an de prison avec sursis et 15.000 € d'amende pour proxénétisme et atteinte à la vie privée, par le Tribunal correctionnel de Quimper. De sa chambre, le quinquagénaire filmait les ébats de son épouse avec ses nombreux clients : 225 en dix mois, à raison de trois à cinq par jour.
L'article 321-6 C.pén. répute proxénète celui qui mène un train de vie que ses ressources ne justifient pas, alors qu'il entretient des relations habituelles avec des personnes se livrant à la prostitution.
Cass.crim. 13 juin 2012, n° 12-90027 : Les termes utilisés dans les art. 321-6 et 321-6 C.pén. définissent de façon claire et précise l'incrimination contestée de non-justification de ressources ; d'autre part, ces textes n'édictent aucune présomption de responsabilité pénale mais créent un délit spécifique dont il appartient à l'accusation de rapporter la preuve.
- En revanche, lorsque deux prostituées collaborent, l’une ne saurait être considérée comme la proxénète de l’autre. Le simple fait de se livrer à la Prostitution* est en effet condamné par la morale, mais n’est pas sanctionné par la loi pénale positive.
Constant (Manuel de droit pénal) : Les employées d’une maison de débauche ou de prostitution ne peuvent être considérées comme coauteurs ou complices du délit de tenue d’une maison de débauche ou de prostitution ; les poursuivre, ce serait en effet faire indirectement ce que le législateur n’a pas voulu faire directement.
Cass.crim. 7 novembre 1973 (Gaz.Pal. 1974 I 81) : Ne constitue pas le délit de proxénétisme le fait par une prostituée de se rendre au domicile d’une autre prostituée, à la demande de celle-ci, et de participer à des scènes de débauche collectives et rétribuées avec différents « clients » de cette dernière.
PROXÉNÉTISME
Cf. Bordeau (bordel)*, Délits pénaux (Délit accessoire, Délit de conséquence)*, Dignité de la personne humaine*, Enfant*, Esclavage*, Mœurs*, Personne humaine*, Personnes vulnérables*, Pornographie*, Prostitution*, Proxénète*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-112 et s., p.169 et s.
- Notion. Au sens large, le terme proxénétisme vise toute activité tirant profit de la Prostitution* d’une autre personne.
Lambert (Traité de droit pénal spécial) qualifie le proxénète de courtier en débauche, d'entremetteur, d'intermédiaire de corruption.
- Règle morale. Si la prostitution encourt la condamnation de la règle morale, le proxénétisme l'encourt bien
davantage. En effet, loin d'aider la personne qui se prostitue à retrouver sa dignité, le proxénète contribue voire l'oblige à perpétuer son
activité.
La réprobation est à son comble lorsque des malheureuses sont amenées à suivre une armée en campagne (B.M.C.). Ainsi, pendant la seconde guerre
mondiale, l’armée d’occupation japonaise en Asie aurait contraint quelque 200.000 femmes coréennes et chinoises à se prostituer dans des maisons closes
tenues par des militaires ; on peut alors parler de crime contre l’humanité.
Ahrens (Cours de droit naturel) : Il y a des mesures à prendre... par rapport à la moralité, par la défense des jeux de hasard, d'exhibitions indécentes, des maisons publiques de prostitution.
Joly (Le crime, étude sociale) souligne l'alliance universelle de la prostitution et du crime. Il parle également des parasites du vice et en particulier de la prostitution.
Corre (Les criminels) : Ici, c'est un père qui, après... avoir rendu sa fille aînée victime de ses débauches, trafique d'elle et vit de sa prostitution forcée.
Proal (Le crime et la peine) : N'est-il pas effrayant de voir des voleurs avec effraction, des souteneurs, des assassins, en si grand nombre, parmi des jeunes gens de 15, 16, 17 ans ?
Vitu (Traité de droit pénal spécial) : Plus que la prostituée, le proxénète est un individu dangereux, paresseux, débauché, participant à toutes les formes de la délinquance : trafic de stupéfiants, de publications obscènes ou d'armes, escroqueries, vols, faux-monnayage, meurtres, etc.
- Science criminelle. Au regard de la technique juridique, le proxénétisme consiste en l’accomplissement d’actes accessoires à la prostitution ; il peut dès lors prendre toutes les formes de la Complicité*.
Voir : Tableau des incriminations protégeant les mineurs (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations luttant contre la dépravation des mœurs (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations luttant contre la dépravation des mœurs (en droit positif français)
Garraud (Traité de droit pénal) : Dans le sens le plus
large du mot, on désigne par proxénétisme le fait de faciliter ou de favoriser les passions d’autrui ; dans un sens plus restreint, c’est le fait de
favoriser, de manière habituelle et dans un but lucratif, la débauche d’autrui.
Considéré dans les législations anciennes comme un acte de
complicité et généralement frappé d'une peine plus grave que
le délit principal, le proxénétisme est aujourd'hui considéré
comme un délit sui generis, qui peut et doit être poursuivi
indépendamment des faits de débauche qui en ont été le résultat.
Digeste, 48 5, 2, 2. Ulpien : Le crime lenocinii, qui consiste à favoriser la prostitution, est compris dans la loi Julia sur les adultères, qui a statué des peines contre le mari qui aura retiré quelque profit de l'adultère de sa femme ; et aussi contre celui qui aura gardé sa femme surprise en adultère.
Code
italien de 1930. Il a retenu une circonstance aggravante,
résultant d'une atteinte aux liens familiaux.
Art. 532 : Quiconque, pour satisfaire la débauche d'autrui,
incite à la prostitution sa descendante, son épouse, sa soeur,
ou bien son alliée en ligne directe ascendante, ces personnes
étant majeures, est puni de la réclusion de 6 mois à 4 ans et
d'une amende.
Code polonais de 1932. Son art. 209 était particulièrement extensif : Quiconque tire des profits de la débauche d’autrui est puni de la réclusion de moins de cinq ans.
Éléments constitutifs des incriminations. Tout délit de proxénétisme suppose donc une condition préalable (la
prostitution d’autrui), un élément moral (la conscience de profiter de la prostitution d’autrui) et un élément matériel (l’un des divers actes
caractéristiques de la complicité).
Le Code pénal français vise le proxénétisme dans ses article 225-5 et s. (art. 334 et s. anciens).
Cass.crim. 22 juillet 1959 (S. 1959 223) : L’aide à la prostitution par fourniture de local suppose qu’il soit établi que certaines des personnes accueillies se sont livrés à des actes de prostitution rétribuée.
Rassat (Juris-classeur pénal, art. 225-5) : Le proxénétisme est manifestement une infraction intentionnelle. L’ancien Code pénal précisait pour certains des comportements visés que ceux-ci devaient avoir été commis sciemment. Toute précision a disparu de la lettre du nouveau code sans que le caractère intentionnel des infractions soit devenu douteux.
Principales incriminations. La complicité pouvant se manifester de manières très différentes, notamment en fonction des particularités locales de la vie sociale, nous nous bornerons à relever les incriminations les plus fréquentes.
- L’instigation à la prostitution. Un proxénète est d’abord quelqu’un qui pousse autrui à se prostituer ; que ce soit par la force, par la ruse ou par des dons et promesses. L’usage de violences constitue même une circonstance aggravante du délit.
Convention de New-York du 2 décembre 1949, art.1 : Les Parties à la présente Convention conviennent de punir toute personne qui, pour satisfaire les passions d’autrui, embauche, entraîne ou détourne, en vue de la prostitution, une autre personne même consentante.
Code pénal polonais de 1932, art. 210 : Quiconque incite une autre personne à se livrer à la débauche professionnelle est puni de la réclusion de moins de cinq ans.
- L’entremise à la prostitution. L’exemple type de l’entremise est donné par le vieux terme de maquerellage. Un intermédiaire, homme ou femme, conclut avec un client un contrat en vertu duquel il s’engage à lui livrer telle ou telle personne aux fins de débauche. L’entremetteur (désigné par le mot leno à Rome) accomplit à l’évidence une faute grave aux regard de la morale.
- L’art. 225-6 de l’actuel Code pénal (ancien art. 334 6°) assimile au proxénétisme le fait de servir d’intermédiaire entre deux personnes dont l’une se livre à la prostitution et l’autre exploite ou rémunère la prostitution d’autrui.
Denisart (Collection de jurisprudence, Paris 168) : Un arrêt du 7 janvier 1756 a déclaré Thérèse Legrand convaincue d’avoir fait un commerce de débauche et de prostitution publique dans sa maison ; pour réparation de quoi, la Cour la condamne à être conduite dans les lieux ordinaires, même rue Saint-Martin… montée sur un âne, ayant le visage tourné vers la queue, étant coiffée d’un chapeau de paille, et ayant écriteaux devant et derrière, portant ces mots : « Maquerelle publique »… à être fustigée de verges… et flétrie d’un fer chaud … et, ce fait, bannie pour cinq ans.
- Le délit prend une gravité particulière lorsque l’entremetteur livre une jeune fille encore vierge à un débauché.
Châtelet de Paris 23 octobre 1389 : Katerine
du Roquier, née à Compiègne, demeurant à Paris, rue des Estuves, conduisit sa nièce Margot du Roquier, âgée de dix-sept ans, à messire Jehan Braque,
chevalier, qui fut successivement maître des Eaux et Forêts en Normandie, maître d’hôtel et chambellan du Roi. Le chevalier la dépucela, la connut
charnellement et eut sa compagnie par deux fois, et lui bailla deux livres.
Ladit Katerine fut condamnée, comme maquerelle, à être tournée au pilori et brûlée, et que, audit lieu du pilori, fut criée la cause pour laquelle
ledit jugement a été donné.
- L’aide et assistance à la prostitution. Ce type de proxénétisme se traduit par des formes très différentes. Quelques exemples suffiront à en donner une idée.
L’engagement dans une maison de débauche ou dans un réseau de prostitution
Garraud (Traité de droit pénal) : L’embauchage est un accord intervenu entre une femme et un proxénète en vue de livrer cette femme à la débauche. Peu importe que ce soit l’un ou l’autre, la femme ou le proxénète, qui ait provoqué l’accord par une démarche initiale. Le délit se trouve complet dès que la femme est engagée.
Cass.crim. 15 avril 1975 (Gaz.Pal. 1975 II 505) : Ont commis le délit de proxénétisme les prévenus qui ont recruté par voie d’annonces des jeunes femmes pour se livrer, à l’intérieur de l’établissement qu’ils avaient créé, à des actes de débauche.
La fourniture d’un local. Voir aussi : Bordeau*, Maison de tolérance*.
Convention de New-York du 2 décembre 1949, art. 2 : Les Parties à la présente Convention conviennent de punir toute personne qui donne ou prend sciemment en location, en tout ou en partie, un immeuble ou un autre lieu, aux fins de la prostitution d’autrui.
Ordonnance de Saint-Louis de 1254 : Défendons à tout propriétaire de louer sa maison à d’autres qu’à des gens bien famés et nommés, et de souffrir en celle-ci aucun mauvais train de vie et bordel, secret ou public, sous peine de 60 livre parisis d’amende pour la première fois, 120 livres parisis pour la seconde fois, et, pour la troisième fois, de la confiscation de la propriété.
Exemple (Ouest-France 26 février 2016) : Le Tribunal correctionnel de Saint-Malo a jugé deux chinoises d'une trentaine d'années qui avaient loué des appartements pour la prostitution en Bretagne, démarché les clients sur Internet, et mis ceux-ci en relation avec des prostituées. Elles ont écopé, pour proxénétismes aggravé, l'une de vingt-six mois de prison ferme, l'autre à six-huit mois. Une interdiction du territoire pendant cinq ans complète la peine.
La fourniture de matériels, notamment le fait de procurer un véhicule.
Trib.corr. Paris 2 mai 1991 (Gaz.Pal. 1992 II Chr.crim. 487) a retenu comme proxénétisme par aide et assistance le fait d’avoir mis à la disposition de cinq prostituées un certain nombre de véhicules destinés à permettre à ces femmes, exerçant au Bois de Vincennes, de travailler dans des conditions plus confortables.
Le financement, par exemple le fait de prêter de l’argent à une prostituée pour qu’elle achète un appartement où elle pourra recevoir ses « clients ».
Convention de New-York du 2 décembre 1949, art. 2 : Les Parties à la présente Convention conviennent de punir toute personne qui finance une maison de prostitution.
Cass.crim. 30 octobre 1990 (Gaz.Pal. 1991 I Chr.crim. 177) : Constitue une contribution au financement d’un établissement de prostitution, au sens de l’art. 335-1° C.pén., le fait de prêter, en connaissance de cause, des fonds pour son acquisition.
La publicité faite au profit d’une prostituée, notamment par la publication de petites annonces dans un journal.
Zorzi (Venise) : Au XVIe siècle, on pouvait se procurer auprès des libraires de Venise un ouvrage intitulé : « Catalogue de toutes les principales et plus honorables courtisanes de Venis ; leur nom, le nom de leur entremetteuse et la maison où elles habitent ; vous indique en plus le quartier où se situe leur demeure, ainsi que le nombre de deniers que doivent payer les gentilshommes qui désirent entrer dans leurs bonnes grâces ».
Aix-en-Provence 24 mai 1993 (Gaz.Pal. 1993 II Chr.crim.
456) : Lors de contrôles inopinés sur «STEL 1» les enquêteurs étaient amenés à constater que de nombreux pseudonymes (prés d’une trentaine), de
caractère pornographique n’étaient pas censurés sur l’écran dont certains concernant des mineurs... - La dame D..., s’étant prostituée par le truchement
de «STEL 1», expliquait aux enquêteurs que deux mois après avoir débuté sur «STEL 1», elle avait été contactée par téléphone par un homme se prénommant
Christian disant travailler comme informaticien pour V. sur «STEL 1» ; venu en moto la voir à Villeneuve-Loubet, cet homme lui avait proposé d’avoir des
heures gratuites sur son serveur, tout en étant parfaitement au courant de ce qu’elle faisait sur le minitel... ;.
Le caractère illusoire de l’apparente auto-censure arguée par le prévenu... est amplement démontré par le déferlement sur «STEL 1» des communications
télématiques à des fins prostitutionnelles, ainsi que par la notoriété acquise par ce service en matière de racolage au moyen du minitel.
Il ressort en conséquence des pièces de la procédure et des débats que sous couvert de cette autocensure, le prévenu, à la tête du centre serveur
«STEL 1», a en fait largement favorisé, en toute connaissance de cause, un abondant réseau prostitutionnel dont il tirait de considérables profits ; le
délit de proxénétisme aggravé reproché à V. est ainsi caractérisé en tous ses éléments...
T.G.I. Nanterre 18 mai 2000 (Comm. com. électr., 2000, comm. n° 117, note J.-C. Galloux) : Se rend coupable du délit de proxénétisme celui qui diffuse des messages sur le réseau Internet afin d’attirer des clients potentiels au bénéfice d’un individu se livrant à la prostitution.
- Le partage des produits de la prostitution. Doit enfin être considéré comme proxénète celui qui profite consciemment des fonds provenant de la prostitution d’autrui.
Cass.crim. 14 mars 2012, n° 12-90002 QPC (Gaz.Pal. 28 juillet 2012 note Detraz) : L'art. 225-5, 1° et 2° C.pén. ne fait pas obstacle au droit au respect de la vie privée ni à celui de mener une vie familiale normale, seul étant réprimé le fait de sciemment favoriser ou tirer profit de la prostitution d'autrui, le juge contrôlant, en fonction des circonstances de l'espèce, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à l'exercice des droits précités.
Cass.crim. 18 octobre 1995 (Gaz.Pal. 1996 I Chr.crim. 37) : Pour déclarer à bon droit R. coupable « d’avoir partagé les produits de la prostitution d’autrui ou reçu des subsides d’une personne pratiquant habituellement la prostitution »., l’arrêt confirmatif attaqué,, énonce que le prévenu avait accepté « que la femme avec qui il vivait se prostituât », qu’il a reconnu « que celle-ci contribuait avec lui à l’entretien de leur ménage, participant notamment au paiement des loyers ». Les juges précisent enfin que cette personne, ayant fait l’acquisition de deux voitures, en laissait une en permanence à la disposition de R.
Cass.crim. 17 mars 2004 (Bull.crim. n° 72 p.273) : Le délit de partage des produits de la prostitution d’autrui est une infraction instantanée qui se prescrit à compter du jour où les faits le consommant ont été commis.
- La sanction du proxénétisme. La sanction pénale varie avec la gravité des actes commis et est donc précisée cas par cas par le législateurs. La sanction civile comporte notamment la confiscation des sommes provenant de la prostitution.
Cass.crim. 20 avril 1983 (Gaz.Pal. 1983 II somm. 393) : A justifié sa décision l’arrêt qui après avoir constaté qu’une somme d’argent saisie au domicile d’un proxénète provenait de la prostitution, a rejeté la requête en restitution formée par la prostituée. En effet, aux termes mêmes de l’art. 335-I quater, alinéa 4 C.pén., « les produits de la prostitution seront saisis et confisqués à quelque personne qu’ils appartiennent ».