DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre P
(Quatorzième partie)
PRÉVARICATION (Prévaricateur)
Cf. Arbitraire*, Concussion*, Corruption*, Détournement* de fonds publics, Ingérence*, Pouvoir*, Prise à partie*, Trafic d’influence*, Trahison*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-134, p.379 (note 2) / n° II-I-150 (note 8) / n° II-I-155, p.420 (note 8)
- Notion. Le prévaricateur (du latin praevaricator) est celui qui trahit les intérêts qu’il a charge et mission de défendre ; en d'autres termes, qui manque à son devoir d'état ou à ses obligations professionnelles.
Locke (Traité du gouvernement civil) : Si une longue suite d'abus, de prévarications et d'artifices … donnent à entendre à un peuple qu’on a formé des desseins funestes contre lui, et qu’il est exposé aux plus grands dangers ; alors, il ne faut point s’étonner s’il se soulève.
Merlin (Répertoire de jurisprudence) : On entend principalement par le mot "prévarication", l'infraction des officiers de justice à leurs devoirs... Les mains du juge doivent être pures comme ses intentions.
- Règle morale. Puisqu'elle consiste, de la part d'un agent public, à violer ses devoirs envers la collectivité, la prévarication est fermement condamnée par la loi morale, relayée par la loi naturelle.
Bautain (Manuel de philosophie morale) : Si le pouvoir, au lieu de se dévouer au sujet, l'opprime en l'exploitant à son profit ; s'il s'engraisse de sa substance, au lieu de le nourrir, l'ordre est troublé ; il n'y a plus que le semblant de la loi et la prévarication domine.
Pontas (Dictionnaire de cas de conscience) : Alype a visiblement prévariqué. S'il est résulté de sa prévarication des inconvénients graves, il a péché mortellement et il est obligé de réparer les dommages qu'il a causés.
Schopenhauer (Le fondement de la morale) : Quand le tuteur dépouille le pupille, quand l'avocat prévarique, quand le juge se laisse corrompre... tous ces actes sont enveloppés sous ce mot de trahison ; la chose est en exécration à l'univers entier : aussi Dante place-t-il les traîtres dans le cercle le plus profond de son enfer.
Neufbourg (La loi naturelle) : Les peuples sont astreints à des devoirs comme les individus ; ils sont tenus, comme eux, à certaines règles de conduite morale, qu'ils ne transgressent pas sans prévariquer.
- Science criminelle. Le manquement à un devoir qu’il aurait dû considérer comme sacré constitue, notamment pour un agent public, une faute professionnelle d'une gravité telle qu'elle doit être réprimée par une sanction pénale lourde; d'autant que son mobile est d'ordinaire intéressé, généralement pécuniaire. Ce crime était incriminé dans l'Ancien droit, il l'est encore en Droit comparé.
Voir : Tableau des incriminations protégeant la fonction judiciaire (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations protégeant la fonction exécutive (selon la science criminelle)
Voir : Digeste de Justinien, L. 47, XV
Lois de Manou : Le roi doit confisquer tous les biens des ministres qui, chargés des affaires publiques, et enflammés de l’orgueil de leurs richesses, ruinent les affaires de ceux qui les soumettent à leur décision.
Montet (La vie quotidienne au temps des Ramsès) : Horonemheb, qui cherchait à écraser l’injustice, promulgua un édit contre les prévaricateurs. Tout magistrat convaincu d’avoir abusé de sa charge était condamné à avoir le nez coupé et était déporté dans une sorte de camp de concentration situé à Silé, dans l’isthme de Duez.
Denisart (Collection de jurisprudence, 1768) : Le prévaricateur est celui qui abuse de la confiance qu’on lui a donnée… La prévarication se dit plus particulièrement de l’abus commis dans une charge publique. Par exemple si un magistrat rapporteur omet sciemment de parler d’une pièce importante, c’est un prévaricateur.
De Ferrière (Dictionnaire de droit, 1762) : La prévarication est la malversation d’un officier dans les fonctions de sa charge. Un juge prévarique lorsque, séduit par intérêt ou par faveur, il s’écarte tant soit peu de ce qui inspirerait la justice pure, désintéressée et sans passion.
Code pénal espagnol. De la prévarication des fonctionnaires publics et autres comportements injustes. Art. 404 : L'autorité ou le fonctionnaire public qui, conscient de son injustice, prend une décision arbitraire dans une matière administrative, encourt une peine de... sept à dix ans de prison.
Marat (Plan de législation criminelle) : On doit réputer crimes d'État... vendre la justice, sous ce titre sont comprises les prévarications.
Code pénal yougoslave de 1962. Art. 322 – Prévarication : Celui qui, dans le but de se procurer à lui-même ou de procurer à autrui un avantage matériel, se sera illégalement approprié l’argent, les valeurs ou les biens qui lui ont été confiés en raison de ses fonctions … sera puni de l’emprisonnement sévère.
- Droit positif. En droit français ce crime rationnel, dont les contours ont paru trop imprécis, est couvert par plusieurs incriminations, telles que le Détournement* de fonds publics ou le Trafic d’influence*, la Corruption* ou la Concussion*.
Cass.crim. 3 décembre 1980 (Gaz.Pal. 1981 II somm. 222) : Si l’art. L. 514-9 C. trav. édicte qu’en cas de plainte en prévarication contre les conseillers prud’hommes, il est procédé contre eux suivant la forme établie à l’égard des juges par l’art. 681 C.pr.pén., le terme «prévarication», qui ne figure d’ailleurs dans aucune incrimination pénale, ne saurait s’étendre à celui de faux en écriture publique ou authentique.
PRÉVENTION (de la délinquance)
Cf. Amendement*, Châtiment dans l'Au-delà*, Clémence*, Éducation*, Enseignement (du droit)*, État dangereux*, Expiation*, Intimidation*, Jugement dans l'Au-delà*, Mesure de sûreté*, Peine*, Récompenses*, Retentum*, Témibilité*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-7, p.325
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-II-104, p.220 / n° I-II-II-213, p.224 (par exemple)
Voir : M. Rauter, Déduction philosophique du principe du droit criminel
Voir : J. J. Haus, Les Théories pénales des origines au milieu du XIXème siècle (extraits de "Principes généraux du droit pénal")
Voir : W. Jeandidier, Les Théories pénales du code de 1810 à nos jours (extraits de "Droit pénal général")
- Notion. Dans l'idéal, une sanction pénale doit chercher à atteindre ces quatre buts : expiation (remords et repentir), amendement (reclassement social), intimidation (crainte de la réaction des pouvoirs publics), et prévention. Cette dernière présente deux aspects, général et individuel.
Blackstone (Commentaires sur les lois anglaises, 1765-1769) : Les punitions sont principalement infligées dans le but de prévenir les crimes.
Ortolland (Comment prévenir le crime, 1988) : On entend par prévention : l'ensemble des moyens spécifiques à mettre en œuvre pour empêcher ou limiter les crimes et délits.
Morvan (Criminologie) : La prévention véritable vise à réduire les facteurs criminogène et les occasions de commettre des délits (prévention situationnelle) : elle est en principe "proactive", ante delictum, alors que la peine est "réactive", post delictum. Le traitement du délinquant n’est qu’un petit versant de la prévention qui englobe des actions très nombreuses et très diverses.
Franck (Philosophie du droit pénal) : Comment la société, dans l’intérêt de sa conservation, arrive-t-elle à comprimer la bête humaine, je veux dire cette force intelligente qui, se plaçant hors du droit, n’a plus d’autre règle que la passion et est devenue pour l’homme véritable un danger de chaque instant ? Ce n’est pas en tenant constamment sous son regard, en lui faisant subir une contrainte perpétuelle, en engageant avec elle une lutte sans trêve et sans relâche. Cela, elle ne le peut pas, c’est au-dessous de sa dignité, et dépasse la mesure de ses forces. Il faut donc qu’elle se borne à infliger à son adversaire, après chaque agression, un traitement tel qu’il n’ait pas envie de recommencer, et que d’autres ne soient pas tentes de l’imiter. Ce traitement sera toujours assez rigoureux si les souffrances qu’il amène avec lui l’emportent sur les avantages du délit ou du crime. Eh bien, c’est en cela précisément que consiste l’intimidation ; c’est par là que le droit d’intimidation rentre, pour la société qui l’exerce, dans le droit de conservation ou de légitime défense.
Plutarque rapporte que : une mode poussant au suicide sévissait à Milet, les autorités prescrivirent que toute fille qui se donnerait la mort serait exposée nue sur la place publique. L'épidémie cessa immédiatement.
- La prévention générale. On parle de prévention générale pour indiquer que la peine doit être déterminée de manière à dissuader l’ensemble de la population d’entrer en délinquance. G Le Bon a justement fait observer dans ses "Aphorismes du temps présent" : Un délit généralisé devient bientôt un droit.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-III-II-10,p.305 (individualisation de la peine et prévention générale).
Voir : Loi du 22 prairial an IV (10 juin 1796), portant des peines contre la tentative de crime
Pufendorf (Le droit de la nature) : Il est clair que la crainte des peines ne saurait produire l'effet que l'on se propose, que si elles ne sont assez grandes pour contrebalancer le profit ou le plaisir que les sujets peuvent espérer d'une action contraire aux lois.
Ahrens (Cours de droit naturel) : La peine, envisagée par rapport à la totalité des citoyens, est un moyen de prévention générale et même d’intimidation, parce que les mesures qu'elle implique sont propres à frapper l’esprit de tous ceux qui sont encore dominés par des motifs sensibles, et à les retenir dans la voie du bien.
Buddhist monastic code, par Thanissaro Bhikkhu (2009) : Le système des pénalités vise à la réadaptation des contrevenants et la prévention des infractions.
Ferri (Sociologie criminelle) : La peine ne peut et ne doit pas être le châtiment d’une faute morale, mais seulement un moyen de défense sociale contre les délits, avec cette triple efficacité préventive, que les criminalistes allemands, Bentham et autres, appellent prévention spéciale (contre le renouvellement du délit par le condamné), prévention générale (contre l’imitation du délit par les prédisposés) et prévention indirecte (en tant que encouragement des honnêtes gens et ravivement de la répugnance au crime).
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : Les théoriciens du droit pénal classique ont beaucoup insisté sur la fonction de prévention générale … la peine remplirait d’abord une fonction d’intimidation collective. Le châtiment, inscrit dans la loi sous la forme d’une menace abstraite, et concrétisé quotidiennement dans les jugements de condamnation portés contre les coupables, serait pourvu d’une valeur exemplaire et tiendrait ainsi en respect les velléités criminelle d’une masse de citoyens.
Commission de réforme du droit du Canada (Document n° 11, 1975) : Quant à l'objectif éducatif et socio-pédagogique de la sanction,nous croyons qu'il constitue l'un des aspects de la prévention générale. La sanction représente en effet une expression très explicite de la désapprobation par la société de certains actes. En démontrant que des comportements sont inacceptables, on réaffirme certaines normes sociales, on contribue à les faire intérioriser et on réitère aux citoyens respectueux de la loi qu'ils ont raison d'agir ainsi.
Code pénal de Colombie. Art. 4°. Fonctions de la peine - La peine remplira les fonctions de prévention générale, de rétribution, de prévention spéciale, de réinsertion sociale et de protection du condamné.
Amiens (4e Ch.) 30 juillet 1991 (Gaz.Pal. 1992 I 7) : Le délit incriminé par l’art. 284 al. 2 C.pén. a été édicté dans un but de prévention générale.
Le Foyer (Le droit pénal normand au XIIIe siècle) : Wace rapporte que Rollon, dans la législation qu'il imposa à son nouveau duché, disposa que tout vol serait puni de la mort et que cette peine porta de tels fruits que, peu après, des bracelets d'or restèrent longtemps suspendus à un arbre sur le grand chemin sans que personne osât y toucher. Mais ce n'est là qu'une fable édifiante... Rollon prit sous sa protection spéciale les faibles, femmes, marchands et laboureurs, prince pacificateur parce que sévère, il repeupla sa province et fit régner l'ordre entre normands vainqueurs et neustriens vaincus.
La doctrine contemporaine a donné un nom aux dispositions pénales qui laissent un bénéfice appréciable à l'auteur d'une infraction, et qui en conséquence ne font pas obstacle à ce qu'un individu peu scrupuleux commette le délit envisagé ; ce phénomène est connu à tout le moins depuis le droit romain (voir Doucet, « La loi pénale » 3e éd. p.423 et p.433). Cette doctrine parle de "faute lucrative".
Mésa (Note sous Cass.crim. 16 mai 2012, Gaz.Pal. 28 juin 2012) : La décision commentée permet de mettre en avant la question de la faute lucrative... qui montre que la commission de certaines infractions peut se révéler économiquement plus rationnelle ou plus intéressante que le respect de la loi pénale dès lors que le montant de la peine encourue est inférieur, parfois substantiellement, à celui de l'infraction.
- La prévention individuelle. On parle de prévention individuelle, ou prévention spéciale, pour marquer que la peine infligée à un coupable doit être étudiée de façon à écarter de lui toute idée de récidive ou de réitération.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-III-II-9, p.304 (sur l'individualisation de la peine et la prévention individuelle)
Pufendorf (Le droit de la nature) : La sûreté et l'utilité publique, qui est le troisième but des peines que l'on inflige demande... que le coupable soit puni d'une manière qui empêche qu'il ne fasse plus de mal à personne.
Ahrens (Cours de droit naturel) : La peine est, par rapport au délinquant, le meilleur moyen de prévention spéciale, parce que l’amendement suppose le retour sincère à l’ordre moral.
Ferri (Sociologie criminelle) : Les délinquants d’occasion méritent des égards, au point de vue de la prévention spéciale.
Haus (Principes de droit pénal) : Par la prévention spéciale, la peine est destinée à empêcher les délits que le délinquant qui est puni serait tenté de commettre dans la suite, et de prévenir les récidives.
La prévention individuelle peut aussi consister à prendre des mesures positives visant à écarter la tentation de commettre un délit, tel que la corruption ou la prévarication.
Bentham (Traité de législation civile et pénale) : La liste civile des rois d'Angleterre, qui parait exorbitante à des calculateurs vulgaires, est aux yeux d'un politique une mesure de sûreté générale.
PRÉVENTION (des infractions)
Cf. Avertissement*, Choses suspectes ou dangereuses*, Contravention de police préventive*, Exemple (Peine prononcée pour l’)*, Non-dénonciation de crime*, Obvier*, Police (administrative)*, Politique criminelle*, Publicité de la peine*,Vidéosurveillance*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-203 p.205
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-I-324, p.205
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-440 et s., p.227 et s. (par exemple)
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 327, p.178 / n° 426, p.274
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 31, p.30 / n° I-I-105, p.74 / I-I-220, p.123 (prévention du terrorisme) / n° II-II-243, p.533
Voir : Tableau des incriminations luttant contre l'alcoolisme (selon la science criminelle, dernier tableau)
Voir : Beccaria, Des délits et des peines
Voir : Platon, Les sanctions pénales dans l’au-delà
- Notion. Tant l’intérêt social que les intérêts privés invitent les pouvoirs publics à prendre des mesures
susceptibles d’éviter, pour l’avenir, la survenance de dommages résultant, soit d’agissements volontaires, soit s’agissements imprudents. On distingue à
cet égard, d’une part la prévention individuelle, qui vise un individu particulier et consiste en des mesures adaptées à sa personnalité (p.ex.
l’institution du sursis), d’autre part la prévention générale, qui concerne l’ensemble de la population et peut prendre des formes très diverses (p.ex.
la publicité de la sanction infligée à un délinquant).
- Toute la doctrine s’entend pour dire qu’il vaut mieux anticiper les délits plutôt que les sanctionner. Certains auteurs ont toutefois tendance à
méconnaître qu’une Peine* prononcée de manière solennelle, qu’une Sanction pénale*
effectivement appliquée joue un rôle préventif majeur.
Servant (Discours sur l’administration de la justice criminelle) : Occupons-nous d’abord de prévenir les maux, il sera temps ensuite de les punir.
Stuart Mill (De la liberté) : C’est une des fonctions incontestées du gouvernement que de prendre des précautions contre le crime avant qu’il ne soit perpétré, au même titre que de le découvrir et de le punir après coup.
Égypte ancienne (Grands procès). Le Tribunal de Deir el-Medineh juge que la femme d’un artisan a volé un outil à un autre artisan. Il ordonne la restitution de cet outil à son propriétaire et transmet le dossier au vizir pour sanction : « Le vizir fera infliger un châtiment à cette femme, qui a volé l’outil, et semblablement un encensoir, de façon qu’aucune femme de son espèce ne répète un pareil acte ».
- La prévention juridique résulte d’incriminations de prévention qui tendent à stopper une activité dangereuse alors qu’il en est encore temps. On peut en donner comme exemple les Délits-obstacles* (tel le port d’Arme*), ou des Contraventions de police* (telle l’interdiction d’allumer des feux dans les forêts).
Cf. Armes*, Délits pénaux (Délits-obstacles)*, Masque*, Travail (Sécurité du)*.
Voir notre article : Les infractions de prévention
Rigaux et Trousse (Les crimes et délits du Code pénal belge T.I) : Dans le but de prévenir certains crimes ou délits graves, le législateur institue parfois en infraction des faits qui peuvent conduire à la perpétration de ces crimes ou délits. C'est à ces infractions que nous donnons le nom d'infractions préventives. Les infractions préventives constituent un aspect caractéristique de la politique criminelle... Cette politique criminelle a inspiré la répression des complots, de l'offre de former un complot, des actes préparatoires révélant la résolution de commettre un attentat...
Code général des États prussiens (éd. Paris an X). XX-512 : La violation des lois de police établies par l'État pour prévenir les dommages parmi les citoyens, doit être punie, encore qu'il n'en soit résulté aucun préjudice réel.
De Tocqueville (De la démocratie en Amérique). Sur le Code du Connecticut de 1650 : Ce Code abonde en mesures préventives. La paresse et l'ivrognerie y sont sévèrement punies. Les aubergistes ne peuvent servir plus d'une certaine quantité de vin à chaque consommateur ; l'amende ou le fouet répriment le simple mensonge quand il peut nuire... On trouve dans le même Code une loi qui prohibe l'usage du tabac.
Exemple : Une ordonnance de la Ville de Paris du 21 janvier 1729 défendait aux personnes masquées de porter des épées, bâtons ou autres armes.
Elle peut aussi viser les citoyens innocents, en leur interdisant de laisser à la libre disposition des malfaiteurs quelque instrument que ce soit leur permettant de commettre des délits. Le droit français contemporain va plus loin, indulgent envers les délinquants et par ailleurs hostile à la légitime défense, il fait de plus en plus peser la charge de la prévention sur les victimes.
Lugan (Le monde à l'envers - Gaz.Pal. 1er mars 1986): Il en est ainsi de la publicité relative aux fermetures les plus sophistiqués de nos résidences pour faire échec aux cambrioleurs. Est-il normal qu'au lieu de prévenir les vols et agressions par la mise en place d'une législation appropriée et de mesures de sécurité adéquates, on demande aux citoyens qui paient des impôts pour être protégés des agissements de ceux qui, en général, n'en paient pas, de délier leur bourse en des frais frustratoires... En un mot, la prévention désormais ne vise plus les délinquants mais leurs futures victimes. Et encore cette prévention doit être passive seulement car, malheur à celui qui la mènerait à son stade ultime en s'opposant par la force à ses agresseurs.
Code pénal de Côte d'Ivoire. Contraventions de 1e classe, art. 1, 3° : Sera puni d'une amende de 1.000 à 10.000 francs inclusivement, quiconque aura... laissé dans les rues, chemins, places, lieux publics ou dans les champs, des outils, bancs ou tous autres instruments ou armes dont puissent abuser les voleurs et autres malfaiteurs.
- La prévention matérielle consiste à dresser des obstacles physiques (bandes rugueuses à l’approche d’un carrefour)
ou psychologiques (inscription « le tabac tue » sur les paquets de cigarettes) pour contraindre ou inciter les gens à se conduire de manière
conforme à l’intérêt général et à leur intérêt propre.
On sait depuis longtemps que l'éclairage des rues freine la
délinquance dans les villes, et que la seule présence effective
des personnels de police sur la voie publique fait baisser le
nombre des infractions. Dans les temps troublés on a vu des villes se ceindre de murailles ; on voit de nos jours se
constituer des domaines résidentiels entièrement clos, dotés
d'une police privée et équipés d'un système de Vidéo-surveillance*.
Toureille (Crime et châtiment au Moyen-âge) : La guerre a transformé des hommes en brutes ; elle a aussi engendré la terreur du crime. Il est d'ailleurs assez patent que, une fois les hostilités passées, les bourgs et les villages qui en étaient jusque là dégarnis, se dotent de murailles. Dans la demande qu'elles forment au roi pour en obtenir l'autorisation, le motif est toujours le même : se protéger des voleurs et des brigands.
Hillairet (Dictionnaire historique des rues de Paris) : En 1667 La Reynie distribua 6500 lanternes, garnies d'une chandelle, pour être posées sur des fenêtres ; le bris de ces lanternes était passible des galères. L'éclairage de Paris connut alors une très nette amélioration, ainsi qu'en témoigne madame de Sévigné dans une de ses lettres, datée du 4 décembre 1672 : « Nous trouvâmes plaisant d'aller ramener madame Scarron à minuit au fond du boulevard Saint-Germain. Nous revînmes gaiement, à la faveur des lanternes et de la sécurité des voleurs ».
Hillairet (Dictionnaire historique des rues de Paris) : Le guet Royal, formé d'archers, d'arbalétriers à pied et à cheval, faisait des rondes et des patrouilles. Mais le tintamarre qui provenait de la ferraille que ces hommes portaient était tel que les malandrins, prévenus de loin de leur venue, n'avaient nulle peine à s'esquiver en temps utile. [sa présence constituait néanmoins un frein]
Exemple
(AFP 1er février 2011): Des villageois de
l'est de la Chine se sont inspirés de l'époque impériale pour
construire autour de leur village une enceinte fortifiée afin de
se protéger des vols... Un mur crénelé de 70 centimètres
d'épaisseur, formé de 70.000 briques d'argile, entoure désormais
le village d'Aodi, dans la province du Zhejiang, a précisé le
quotidien officiel China Daily. L'ouvrage s'inspire de la Grande
Muraille de Chine. Le village d'Aodi, qui comptait auparavant
dix accès, n'en possède maintenant qu'un seul, une imposante
porte en fer haute de sept mètres, fermée après 22 heures. Les
270 habitants d'Aodi peuvent l'ouvrir de nuit avec une carte
d'accès électronique.
Ce sont les villageois eux-mêmes, excédés par les vols dont ils
étaient victimes, qui ont financé leur muraille d'un coût de
500.000 yuans (55.000 euros). Les résidents d'Aodi ont vu leurs
revenus augmenter depuis la construction en 2007 d'une autoroute
proche et de dizaines d'usines. « Les vols se sont multipliés
car les gens sont plus riches et ils possèdent chez eux
davantage de mobilier de qualité, de matériel électrique et
d'argent en liquide », a expliqué un responsable local.
Ortolland (Comment
prévenir le crime) : En tant que victime potentielle d'un
crime ou délit, tout habitant doit abandonner son attitude
passive et prendre un minimum de précautions pour décourager les
vols et agressions : doter son logement de fermetures et volets
adéquats, ne pas laisser des objets dans sa voiture et la fermer
à clé.
Ces précautions n'empêchent nullement de penser avec nostalgie
au temps pas si lointain où maisons et voitures... se trouvaient
placés sous la foi publique [on enseignait alors l'honnêteté
et la probité tant au catéchisme qu'à l'école publique au cours
de morale, et les pouvoirs publics ne montraient pas tant de
pusillanimité à lutter contre les malfaiteurs].
L’un des procédés actuels consiste, dans les quartiers sensibles, à confier une mission d’instruction civique à des éducateurs spécialisés.
Cass.crim. 9 juillet 1980 (Bull.crim. n° 223 p.585) : Des éducateurs spécialisés, mis à la disposition d’une municipalité par l’association reconnue d’utilité publique qui les emploie, en vue d’une action préventive de la délinquance, collaborent à une mission de service public.
PRÉVENU
Cf. Accusé*, Coupable*, Défendeur*, Délinquant*, Détenu*, Inconnu*, Inculpation*, Innocent*, Justiciable*, Malfaiteur*, X (Poursuites contre)*, Sujet de droit*, Supplicié*, Suspect*, Vérification de l'identité du prévenu*.
Le prévenu est une personne citée ou renvoyée devant un tribunal correctionnel (ou un tribunal de police), pour y répondre d’un délit (ou d’une contravention). Il bénéficie des droits de la défense, notamment du droit d’être assisté d’un conseil.
De Ferrière (Dictionnaire de droit, 1762) : Le prévenu est celui qui est accusé d’un crime, et qui n’a point encore été condamné. Cette accusation ne lui fait point perdre son état : il conserve ses honneurs et dignités, quoique l’exercice en soit en suspens.
Cass.crim. 22 septembre 1999 (Gaz.Pal. 2000 J 662) : L’article 417 C.pr.pén. impose au président de commettre un défenseur d’office au prévenu comparant qui en fait la demande; l’inobservation de cette formalité substantielle porte atteinte aux droits de la défense.
PRÉVÔT
Cf. Archers*, Bailli*, Sénéchal*, Châtelet de Paris*.
Le prévôt était, à l’origine de l'Ancien droit français, un agent nommé pour assurer la gestion du domaine royal. C’est pour remédier aux abus des
prévôts que furent institués les Baillis* et sénéchaux. Dans les derniers temps de l’Ancien régime, en matière judiciaire,
le prévôt était principalement chargé des affaires civiles.
C’étaient les prévôts des maréchaux qui connaissaient des crimes commis par les vagabonds et des infractions commises par
les gens de guerre.
De Ferrière (Dictionnaire de droit, 1762) : Le prévôt est un juge inférieur, et premier juge royal, qui juge les affaires civiles en première instance.
A.Esmein (Histoire du droit) : Les prévôts, placés chacun à la tête d'une circonscription, furent d'abord et pendant longtemps les seuls juges locaux de la monarchie capétienne... Mais ils n'étaient pas seulement des juges. Conformément à la tradition antérieure et à la loi naturelle des gouvernements peu développés, ils concentraient entre leurs mains tous les pouvoirs : ils avaient des attributions administratives, militaires et financières.
- Cette dernière institution s’est perpétuée nos jours dans le cadre militaire. La police judiciaire militaire est assurée par la gendarmerie (prévôté). Des tribunaux prévôtaux peuvent encore être institués, à l’étranger, en temps de guerre.
Cass.crim. 14 novembre 1989 (Gaz.Pal. 1990 I somm. 234) : Il résulte des dispositions de l'art. 480 C.just.milit. que les Tribunaux prévôtaux connaissent des infractions de police… commises par toute personne justiciable des Tribunaux aux armées ou des Tribunaux militaires aux armées. Tel est le cas en l'espèce, où il est reproché au prévenu d'avoir déposé sans autorisation des ordures sur le palier du logement d'un locataire voisin, contravention réprimée par l'art. R 30-14° C.pén., dès lors que la contravention reprochée, constatée dans un bâtiment militaire, constitue une infraction commise contre un établissement des forces armées françaises.
PRINCIPE D'ÉGALITÉ - Voir : Égalité*.
PRINCIPE DE LÉGALITÉ - Voir : Légalité*.
PRINCIPE DE MATÉRIALITÉ - Voir : Matérialité*.
PRINCIPE DE PRÉCAUTION - Voir : Précaution (principe de)*.
PRINCIPE DE SUBJECTIVITÉ - Voir : Responsabilité*.
PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT
Cf. Application de la loi dans le temps*, Beau*, Bien*, Coutume*, Doctrine*, Droits de l’homme*, Égalité*, Jurisprudence*, Légalité des incriminations et des peines*, Loi*, Non bis in idem*, Personnalité des peines*, Sources du droit*.
Voir : La jurisprudence est-elle une source du droit ?
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-104, p.26 (sur le contrôle par le juge de la conformité des lois aux principes généraux du droit)
- Notion. L’expression « principe général du droit » est employée pour désigner, de manière solennelle, une règle juridique qui se situe au sommet de la hiérarchie des sources du droit. À titre d'exemple on peut citer le principe selon lequel « Nul ne peut se faire justice à soi-même »*.
Tarde (Les lois de l’imitation) : Les principes généraux du droit, qui finissent par se faire jour au milieu du pêle-mêle des lois et usages, sont eu nombre toujours limité.
Conseil constitutionnel 20 juillet 1988 : La tradition républicaine ne saurait être utilement invoquée pour soutenir qu'un texte qui la contredit serait contraire à la Constitution, qu'autant que cette tradition aurait donné naissance à un principe fondamental reconnu par les lois de la République.
Code de droit canon. Can. 19 : Si, dans un cas déterminé, il n’y a pas de disposition expresse de la loi universelle ou particulière, ni de coutume, la cause, à moins d’être pénale, doit être tranchée en tenant compte : des lois portées pour des cas semblables, des principes généraux du droit appliqués avec équité...
Von Jhering (L’esprit du droit romain) : Dans la formation des principes du droit, deux lois ont servi de guide : la loi de la simplicité élémentaire des corps juridiques, la loi de la simplification analytique des conditions légales.
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : La place reconnue aux principes généraux est essentielle, en ce qu’ils assurent la continuité et la cohérence de l’ordonnancement criminel ; ils ont la même valeur que la loi elle-même et, comme elles, ils donnent ouverture au pourvoi en cassation lorsqu’ils sont méconnus ou violés.
- Exemples. Les principes généraux du droit visent, notamment, la Légalité* des délits et des peines, la non-rétroactivité de la loi (Application de la loi dans le temps*), ou l’Égalité* des citoyens devant la Loi*.
Villey (Cours de droit criminel) souligne que, en cas difficulté, il faut demander la solution aux principes généraux du droit pénal : la loi n’a pour mission que de maintenir l’ordre social elle ne peut réprimer que les faits qui troublent cet ordre.
Garraud (L’anarchie et la répression) parle des principes généraux du droit pénal français, d’après lesquels la tentative de crime est punie comme le crime même et le complice assimilé à l’auteur principal au point de vue de la répression.
Code pénal du Luxembourg. Art. 71-2 Commentaire officiel : 11° Dans le système des principes généraux du droit pénal… la contrainte morale est constituée par une force irrésistible en ce sens qu’une résistance y opposée eût exposé l’auteur du fait à un mal grave, certain, imminent et inévitable.
Cass.crim. 26 janvier 1984 (Bull.crim. n° 34 p.90), sommaire : L’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité se déduit notamment des principes généraux du droit reconnus par l’ensemble des nations.
Cass.crim. 18 mai 1989 (Bull.crim. n° 206 p.526) : Il se déduit des art. 710 et 711 C.pr.pén. ainsi que des principes généraux du droit que devant la Chambre d’accusation saisie d’une demande de confusion de peines, le conseil de la partie doit avoir la parole le dernier. Il en est de même de la partie elle-même si elle est présente.
Cons. d’État 4 octobre 1974 (Gaz.Pal. 1975 I 117) : La publicité des débats judiciaires est un principe général du droit ; il n’appartient, dès lors, qu’au législateur d’en déterminer, d’en étendre ou d’en restreindre les limites (à l’exclusion du pouvoir réglementaire).
Cons. d’État 5 juillet 2000 (Gaz.Pal. 2001 J 952), statuant en matière disciplinaire : En vertu d’un principe général du droit, une sanction ne peut être légalement prononcée à l’égard d’un agent public sans que l’intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense.
Cass.crim. 2 mars 2010 (Bull.crim. n° 42 p.31) : Il se déduit des dispositions des art. 6 de la Conv.EDH, 199 C.pr.pén. et des principes généraux du droit que, devant la chambre de l’instruction, la personne mise en examen doit avoir la parole en dernier lorsqu’elle est présente aux débats.
- Autorité. Les principes généraux du droit s'imposent à toute autorité habilitée à édicter une règle de droit. Il n'appartient qu'au législateur d'en préciser le domaine, sous le contrôle du Conseil constitutionnel.
Conseil d'État 4 octobre 1974 (Gaz.Pal. 1975 I 117) : La publicité des débats judiciaires est un principe général du droit ; il n’appartient, dès lors, qu’au législateur d’en déterminer, d’en étendre ou d’en restreindre les limite.
PRISE À PARTIE
Cf. Magistrat*, Prévarication*.
La procédure de la prise à partie était une voie de recours ouverte aux parties contre un juge prévaricateur, tendant à le faire déclarer responsable du préjudice qu’il leur avait causé. Un loi du 11 juillet 1972 (épaulée par une loi du 18 janvier 1979) l’a remplacée par le recours de droit commun en responsabilité de la puissance publique.
Denisart (Collection de jurisprudence, 1768) : Prendre un juge à partie, c’est l’intimer en son nom, toutes les fois qu’il a agi par fraude, par faveur, par inimitié, ou par vilenie… Le juge n’est pas responsable des erreurs de l’esprit, inséparablement attachées à la condition humaine.
Cass. (1re civ.) 16 mai 2000 (Gaz.Pal. 2000 II somm. 1728) : Les dispositions des art. 505 et s. C. pr. civ. relatives à la prise à partie ont cessé de recevoir application, en ce qui concerne les magistrats du corps judiciaire, depuis l’entrée en vigueur de l’art. 11-1 ajouté à l’ordonnance du 22 décembre 1958 par la loi organique du 18 janvier 1979, texte d’où il résulte que, désormais, la responsabilité de ces magistrats, à l’occasion de leurs fautes personnelles se rattachant au service public de la justice, ne peut être engagée que sur l’action récursoire de l’État. Il en résulte qu’un justiciable, à qui il appartenait de mettre en jeu la responsabilité de l’État s’il estimait pouvoir invoquer une faute lourde ou un déni de justice, ne pouvait être admis à former un recours contre la décision de rejet du Premier Président d’une Cour d’appel d’une requête en prise à partie d’un magistrat, qui aurait dû être déclarée irrecevable. Son recours ne peut donc être accueilli.
PRISE DE CORPS - Voir : Ordonnance de prise de corps*.
PRISE DE SANG - Voir : Examens corporels*.
PRISE D’INTÉRÊT
Cf. Association de malfaiteurs*, Complicité*, Fonctionnaire*, Ingérence*, Marché public*, Probité*, Proxénétisme*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-152, p.411
- Notion générale. Au sens large la prise d’intérêt consiste dans le fait de prendre part, de manière marginale, à une activité industrielle, commerciale ou para-commerciale menée par une autre personne. Elle relève du droit criminel dans deux cas.
- La prise d’intérêt, mode de participation à l’infraction. En premier lieu, la prise d’intérêt est punissable
quand elle consiste à favoriser un acte principal délictueux, en tirant de cette participation un profit pécuniaire, moral ou affectif. Puisqu’elle
s’analyse alors en un acte accessoire à l’infraction principale, elle peut être sanctionnée, soit en tant qu’acte de
Complicité*, soit en tant que Délit accessoire*.
Ainsi il y a prise d’intérêt dans le fait pour un proxénète de « protéger » l’activité d’une prostituée, contre partage de ses profits.
Véron (Droit pénal spécial) : La prise d’intérêt ne nécessite pas une activité prolongée et peut se limiter à un acte isolé.
- La prise d’intérêt, délit-obstacle. - En second lieu, la prise d’intérêt peut être réprimée avant même qu’elle n’ait produit des effets nocifs. L’incrimination s’analyse alors en un délit-obstacle. Tel est le cas du Délit de prise illégale d’intérêt (art. 432-12 C.pén.), traditionnellement connu sous le nom de délit d’Ingérence* (voir ce mot).
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société » - n° II-I-152, p.411
Vitu (Juris-classeur pénal, art. 432-12) : Pour lutter contre la corruption, la concussion ou le détournement de fonds publics, il est apparu nécessaire de compléter cet arsenal répressif par un ensemble de dispositions préventives, véritables délits-obstacles : les incriminations de prise illégale d’intérêts.
Seconds (Les apports de la jurisprudence au délit de prise illégale d'intérêts - Gaz.Pal. 21 avril 2012 p.12) : La Chambre criminelle de la Cour de cassation se livre, depuis une dizaine d'années, à une interprétation éclairante du délit de prise d'intérêts, délit-obstacle destiné à prévenir la vénalité des agents publics.
Cass.crim. 4 avril 2001 (Gaz.Pal. 2001 somm. 199) : Une personne exerçant les fonctions d’adjoint au maire, puis de maire d’une ville et qui est, par ailleurs, administrateur d’une société, commet le délit de prise illégale d’intérêt en participant à des délibérations du conseil municipal au cours desquelles ont été prises des décisions en vue de l’implantation dans ladite ville de la société dont il est administrateur.
Cass.crim. 14 décembre 2005 (Bull.crim. n° 333 p.1147) : Le délit de prise illégale d'intérêts est consommé dès que le prévenu a pris, reçu ou conservé, directement ou indirectement, un intérêt dans une affaire dont il avait l'administration ou la surveillance, celles-ci se réduiraient-elles à de simples pouvoirs de préparation ou de proposition de décisions prises par d'autres.
Cass.crim. 14 novembre 2007 (Bull.crim. n° 279 p.1148) : La participation, serait-elle exclusive de tout vote, d'un conseiller d'une collectivité territoriale à un organe délibérant de celle-ci, lorsque la délibération porte sur une affaire dans laquelle il a un intérêt, vaut surveillance ou administration de l'opération au sens de l'art. 432-12 C.pén.
Cass.crim. 30 janvier 2013, n° 11-89224 : Doit être regardée comme chargée d'une mission de service public, au sens de l'article 432-12 du Code pénal, toute personne chargée, directement ou indirectement, d'accomplir des actes ayant pour but de satisfaire à l'intérêt général, peu important qu'elle ne disposât d'aucun pouvoir de décision au nom de la puissance publique.
Cass.crim. 29 juin 2011 (n° 10-87498, Gaz.Pal. 25 août 2011 note Lasserre Capdeville) sommaire : Est coupable des délits de favoritisme et de prise illégale d'intérêts le maire qui demande à l'entreprise attributaire d'un marché public de réaliser des travaux non compris dans le marché initial sans respecter le formalisme prévu afin de favoriser l'un des membres du conseil municipal.
Cass.crim. 27 juin 2012, n° 11-86920 : L'art. 432-13 C.pén. n'exige pas que l'intervention du fonctionnaire s'inscrive dans le processus formalisé des décisions administratives.
- La prise d'intérêts par d'anciens fonctionnaire. Cette pratique, connue sous le nom de "pantouflage", est fort dangereuse. Il est en effet à craindre qu'un fonctionnaire, chargé de surveiller une entreprise commerciale ou industrielle, n'effectue que superficiellement son office lorsqu'il a la perspective d'entrer dans cette entreprise à la fin de son service (et ce avec une rémunération supérieure à celle qui lui est attribuée présentement). Les rédacteurs du Code pénal sont intervenus, pour sanctionner les abus, à l'art. 432-14 (ancien art. 175).
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-153, p.415
Dezeuze (Le passage du public au privé à l'épreuve du droit pénal - Gaz.Pal. 21 avril 2012 p.126) : Incriminé depuis le Code pénal napoléonien, le délit de prise illégale d'intérêts ou "délit de pantouflage" connaît ces dernières décennies un regain d'intérêt, notamment parce qu'il est à l'origine d'affaires médiatiques impliquant des personnes publiques.
Cass.crim. 15 novembre 1982 (Gaz.Pal. 1983 panor.cass. p.96 ) : Entre dans les prévisions de l'art. 175-1 al.1er C.pén. le fait pour un fonctionnaire public, agent ou préposé d'une Administration publique, d'avoir dans le délai de cinq ans à compter de la cessation de la fonction, pris ou reçu une participation par travail, conseils ou capitaux, dans une entreprise privée sur laquelle il était en droit d'exercer, en raison même de ses attributions, une surveillance ou un contrôle général.
PRISE D’OTAGE - Voir : Otages*.
PRISON (Prisonnier)
Cf. Administration pénitentiaire*, Asile psychiatrique*,
Cachot*, Chaîne*, Chambre de dégrisement*, Détention
criminelle*, Détention provisoire*, Écrou*,
Emprisonnement*, Ergastule*, Établissement pénitentiaire*,
Évasion*, Geôle*, Maison centrale*, Maison
d'arrêt*, Panoptique*,
Pénitencier*, Pistole*, Réclusion
criminelle*, Violon*.
Bastille (La)*, Châtelet de Paris*.
Voir : Loi du 4 vendémiaire an VI (25 septembre 1797), relative aux préposés à la garde des détenus.
- Notion générale. La prison est un lieu destiné à l’incarcération et à la détention, soit de prévenus ou d’accusés, soit de condamnés. De nos jours, on dit plutôt Établissement pénitentiaire* ; mais on appelle toujours les détenus des prisonniers.
Ordonnance criminelle de 1670 (T.XIII, art. 1) : Nous voulons que les prisons soient sûres, et disposées en sorte que la santé des prisonniers n’en puisse être incommodée.
(T.XIII, art. 20): Les hommes prisonniers, et les femmes, seront mis en des chambres séparées.
Morin (Répertoire de droit criminel) : Les prisons sont les lieux destinés par l’autorité à la garde et détention, soit des prévenus ou accusés, soit des condamnés.
Vitu (Traité de droit pénal spécial) : Le terme prison doit s’entendre, non seulement des établissements pénitentiaires classiques, mais également de tous les locaux régulièrement affectés à la garde des prisonniers, c’est-à-dire des personnes arrêtées en qualité d’inculpés, de prévenus, d’accusés ou de condamnés. Il en va de même des locaux dans lesquels sont effectuées les gardes à vue, des chambres de sûreté des commissariats ou des casernes de gendarmerie, des violons municipaux … ou encore d’une voiture cellulaire destinée au transport des prisonniers : l’important est que le local dont s’agit ait reçu administrativement la destination de prison.
- Prisons célèbres. Certaines prisons ont marqué l’histoire. Pour n’en citer que quatre : les Latomies de Syracuse, situées dans d’anciennes carrières ; les Plombs de Venise, établis au dernier étage du Palais des doges ; la Bastille, une ancienne forteresse royale ; la Conciergerie du Palais de justice, où furent enfermés notamment les victimes de la Terreur. Ajoutons les In pace que l'on trouvait dans quelques monastères, et que Michelet a vivement dénoncés non sans quelque exagération.
Voir : M. Alboize et A. Maquet, La conspiration du Doge Faliero et « Les Plombs de Venise »
Voir : B.Saint-Edme, Un exemple de traitements inhumains : "Les pontons"
Lombroso (L’homme criminel) : Settembrini, dans les prisons de Naples, parlait à ses compagnons un argot formé de mots grecs ou allemands; il disait : latomies pour prison.
Zorzi (Venise) :Quant aux prisons, elles n’étaient autres que les combles du palais des Doges. Les « puits » de sinistre réputation se trouvent à la même hauteur que les bureaux. Les Plombs et les Puits constituaient la force de dissuasion du Tribunal des Dix.
Desmaze (Les pénalités anciennes) : Le 12 janvier 1645 François de Montescot, conseiller du Roy en ses conseils, ayant reçu commandement de Sa Majesté de voir et visiter tous les prisonniers qui sont dans le château de la Bastille et en dresser procès-verbal, en trouve 24, dont l'un, M. le chevalier de Lorraine, est détenu depuis huit ou neuf ans (comme aliéné d'esprit). Les autres sont détenus depuis 18 ou 19 mois, mais il est mentionné qu'ils ont été interrogés.
Warée (Curiosités judiciaires) : Le procès de Cartouche dura plusieurs mois ; pendant sa détention à la Conciergerie, il fut visité par plusieurs grands personnages, et principalement par les dames de la Cour.
Merle (La pénitence et la peine) : Mathieu, prieur de Saint-Martin des camps, inventa les "in pace", caves souterraines obscures, où le prisonnier vivait isolé.
Michelet (Histoire de France) : Un capucin de Dijon, qui a prêché la réforme de son ordre, écrit au pape que ses supérieurs vont le mettre in pace pour le reste de ses jours.
Les conditions de détention ont depuis longtemps retenu l'attention des pouvoirs publics, mais sans grand effet si l'on s'en réfère aux préoccupations actuelles.
Desmaze (Les pénalités anciennes) - 27 février 1549 : Arrêt du Parlement portant que deux conseillers de la Cour... par elle commis, devront, chaque mois une fois, se transporter ès prisons du Grand Châtelet et du Petit Châtelet pour visiter les prisonniers qui seront enfermés ès dites prisons et d'iceux s'enquérir de leurs traitements et comme ils sont, pour faire, le lendemain de leur visite, leur rapport.
Les gardiens de prisons, on n'y songe pas assez lorsque l'on débat de la nature des peines et de leurs modalités d'exécution, travaillent dans des conditions dangereuses.
Exemple (Ouest-France 12 janvier 2018) : Trois gardiens de la prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) ont été légèrement blessés, hier au cours d'une agression commise par un détenu. Il s'agirait... de l'Allemand G..., considéré comme le cerveau des attentats de Djerba (Tunisie) en 2002. Il s'agit d'un détenu qui finit de purger une longue peine, et qui risque de faire l'objet d'une extradition vers les États-Unis.
PRIVATION DE DROITS - Voir : Interdiction de droits*.
PRIVATION DE SOINS OU D’ALIMENTS
Cf. Enfant*, Mineur (protection des)*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 320, p.159
En droit français l’art. 227-15 C.pén. (ancien art. 312 al.3) incrimine le fait, par un ascendant ou toute autre personne ayant autorité sur un mineur de quinze ans, de le priver de soins et d’aliments au point de compromettre sa santé. La sanction, qui est en principe de sept ans, passe à trente ans de réclusion criminel en cas de mort de la victime (art. 227-16).
Roman (Juris-classeur pénal, art. 227-15) : Défini comme « la privation d’aliments ou de soins à l’égard d’un enfant de moins de quinze ans, pratiquée par ses parents ou par d’autres personnes ayant autorité sur la victime, et ayant entraîné soit une altération de sa santé soit sa mort », le fait incriminé constitue l’exemple type de ce que les auteurs appellent une infraction de commission par omission.
Paris 15 juin 1951 (D. 1951 568, Gaz.Pal. Tables v° Enfants 14) : Commettent le délit prévu et puni par l’art. 312 C.pén. la directrice et la surveillante d’un foyer d’enfants, coupables d’avoir détourné des aliments destinés à ceux-ci et d’avoir insuffisamment veillé à l’hygiène des locaux.
Exemple (Ouest-France 6 février 2015) : À Saint-Pol-sur-Mer, près de Dunkerque, un bébé né quelques jours plus tôt a été retrouvé mort, mardi. L'enfant n'aurait pas été nourri. Sa mère, âgée de 34 ans, qui a déjà un garçon de 14 ans, avait nié sa grossesse et avait accouché seule. Elle devrait être mise en examen pour privation de soin ayant entraîné la mort.
PRIVILÈGES
Cf. Égalité*, Quiconque*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 116 p.84 / n° III-110 p.393
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-105, p.29 / n° II-103, p.312
- Notion. Les privilèges sont des avantages, des faveurs, des passe-droits accordés par la loi à certains individus ou à certaines catégories de personnes. Ainsi, dans l'Ancien droit français, le noble qui avait commis un crime avait le privilège d’être décapité (peine non infamante), là où un roturier aurait été pendu (peine infamante).
Loi romaine dite des XII tables : La loi ne peut créer de privilège.
Code pénal chinois (en 1997), Article 4. Chacun est égal devant la loi lorsqu’il commet un crime. Nul ne peut prétendre bénéficier du privilège de transgresser la loi.
Il n’y a toutefois pas privilège lorsque des personnes se trouvant dans des situations différentes sont soumises à des régimes, certes différents, mais découlant de cette différence même ; p.ex., l’arrêté qui réserve des places de stationnement au personnes souffrant d’un handicap moteur est justifié par cette difficulté de se déplacer.
Von Jhering (L’esprit du droit romain) : Il est évident que la loi doit et peut attacher des différences juridiques à certaines distinctions naturelles existant entre les hommes et entre les choses. La position de la femme réclame d’autres dispositions que celle de l’homme ; l’enfant ne peut être traité juridiquement comme un adulte… Mais il y a lieu d’établir une distinction entre ces différences juridiques et les inégalités devant la loi. Ces dernières sont des déviations de la règle de droit. Elles ne sont pas le produit de causes matérielles ; elles ne tendent qu’à privilégier une classe de personne au détriment d’une autre ; leur raison dernière consiste dans la prépondérance sociale et dans l’influence que cette classe a su exercer sur le pouvoir législatif et exploiter dans son intérêt égoïste.
- Droit positif. Depuis la nuit du 4 août 1789, il n’est plus théoriquement permis de créer des privilèges, en France, que ce soit par des lois de fond ou par des lois de procédure. Le droit romain était déjà en ce sens.
H.Martin (Histoire de France). La nuit du 4 août suffit à renverser le chêne antique de la féodalité… C’était là le fruit de cette philosophie du XVIIIe siècle qui avait fait pénétrer dans les esprits et dans les cœurs les principes de droit, de justice et d’humanité, et qui avaient fini par faire sentir aux privilégiés eux-mêmes l’iniquité des privilèges.
Cass.crim. 11 juillet 1994 (Gaz.Pal. 1994 II Chr.crim. 698) : La loi du 4 janvier 1993 a expressément abrogé les privilèges de juridiction.
PROBABILITÉ - Voir : Doute*, Opinion, Vérité-véracité*.
Cuvillier (Vocabulaire philosophique). Caractère de ce qui nous paraît vraisemblable, de ce qui nous semble devoir se réaliser de préférence à d'autres possibles, ou avoir le plus de chance d'être vrai, sans cependant qu'on puisse le prouver.
PROBITÉ
Cf. Avocat, Chevalier d'industrie*, Concussion*, Corruption*, Diffamation*, Favoritisme*, Honnête*, Ingérence*, Initié (délit d')*, Prévarication*, Trafic d’influence*, Véreux*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-152, p.412
- Notion. La probité est le louable trait de caractère d’une personne qui s’efforce constamment de respecter les règles de la vie sociale et de ne pas nuire à autrui. Cependant, elle revêt un certain aspect terne et passif ; ce qui la place un degré au dessous de l’intégrité, vertu rayonnante que rien ne semble pouvoir entamer.
Littré (Dictionnaire). Probité : Exacte régularité à remplir tous les devoirs de la vie civile… Elle est uniquement relative aux devoirs envers autrui et aux devoirs de la vie civile.
- Morale. La probité figure au rang des devoirs sociaux de l'homme, elle est mise à l'honneur par les moralistes.
Ahrens (Cours de droit naturel) parle des devoirs que tous les hommes ont à remplir : devoirs individuels de modération et de tempérance dans l’usage des biens ; devoirs sociaux de bienfaisance, d'aide, de secours des riches envers les pauvres ; enfin, devoirs de probité, de loyauté et de justice.
Baudin (Cours de philosophie morale) : Le devoir de probité dans les actions. Les devoirs de probité (ou d'honnêteté au sens restreint de ce mot) nous obligent à répondre à la confiance d'autrui en agissant toujours envers lui avec droiture et conscience, en servant ses droits comme ils exigent de l'être, en nous montrant en particulier fidèles à nos engagements, à nos promesses, à notre parole donnée, et plus encore à nos serments.
Frank (La morale pour tous) : Payer l'impôt n'est donc pas seulement une obligation imposée par la loi, c'est un devoir de conscience, c'est une dette à laquelle on ne peut se soustraire en totalité ou en partie, par la fraude ou par le mensonge, sans manquer à la probité aussi bien qu'à la vérité.
Liard (Morale et enseignement civique) : Le respect de la parole donnée, c'est la probité en ce qu'elle a de plus élevé, de plus scrupuleux et de plus délicat.
Bentham (Déontologie ou science de la morale) : Il serait logique de comprendre le mot de probité dans celui de justice, car ces mots sont évidemment synonymes.
- Déontologie. Les Codes de déontologie se réfèrent encore à cette qualité morale quelque peu désuète aux yeux de certains. Plusieurs activités et professions exigent de leurs membres que leur conduite se situe toujours sur le plan de l'honnêteté et de l'intégrité. Le fait d’y manquer peut entraîner des sanctions lourdes, et comporte même exclusion du domaine des lois d’amnistie.
Code de droit canonique. Canon 492 : Dans chaque diocèse sera constitué le conseil pour les affaires économiques que préside l’Évêque diocésain ; il sera composé d’au moins trois fidèles… vraiment compétents et remarquables par leur probité.
Code de déontologie médicale : Art. 3 - Le médecin doit, en toutes circonstances, respecter les principes de moralité, de probité et de dévouement indispensables à l’exercice de la médecine.
Cass.crim. 6 juillet 1994 (Gaz.Pal. 1994 II somm. 695) : L’Ordre des médecins légalement chargé, en vertu de l’art. L. 382 C. santé publ., de veiller au maintien des principes de moralité, de probité, de dévouement indispensables à l’exercice de la médecine et d’assurer la défense de l’honneur de la profession médicale, est recevable à se constituer partie civile dans les poursuites exercées contre l’un de ses membres pour des infractions commises dans l’exercice de ses fonctions et de nature à porter atteinte à la considération de l’ensemble de la profession.
Cass. (1e civ.) 3 novembre 1996 (Gaz.Pal. 1997 I panor. 186) : La Cour d’appel qui a pu prononcer contre un administrateur judiciaire la peine disciplinaire de radiation de la liste nationale des administrateurs judiciaires après avoir relevé des manquements graves et répétés de l’intéressé à la probité et à ses obligations professionnelles.
Cons. d’État 29 décembre 1999 (Gaz.Pal. 2000 J. 2013) : Le fait pour une chirurgien-dentiste de s’être abstenue pendant trois années consécutives de souscrire les déclarations de ses revenus auprès de l’administration fiscale, et d’avoir cessé de verser à l’URSSAF pendant au moins deux ans les cotisations sociales dont elle était redevable au titre de son activité professionnelle, constitue des manquements à la probité et à l’honneur et se trouvent exclus du bénéfice de l’amnistie.
Plus que les simples particuliers les fonctionnaires, qui ont accepté de prendre en charge le Bien commun et l'intérêt général, sont tenus d'un strict devoir de probité.
Vitu (Traité de droit pénal spécial) : On exige des fonctionnaires l'observation stricte du devoir de probité dans l'exercice de leurs fonctions.
- Science criminelle. Certains manquements à la déontologie ont paru si graves au législateur qu'il les a sanctionnés sur le plan pénal. Il en est notamment ainsi de la violation du secret professionnel, ou des entorses à la probité commises par des agents publics dans l'exercice de leurs fonctions.
Vitu (Juris-classeur pénal, art. 432-10) : La concussion appartient au groupe des infractions d'atteinte au devoir de probité auquel sont astreints ceux qui gèrent des fonds ou des valeurs ressortissant au patrimoine de l'État ou des collectivités publiques.
Code de procédure pénale de Madagascar. Art. 132 : Les officiers du ministère public, prêtent serment de remplir avec conscience, exactitude et probité les fonctions qui leur sont confiées.
Code de procédure pénale de Colombie. Art. 142 : Les devoirs des employés judiciaires sont les suivants :... 2° Éviter la lenteur de procédure, en sanctionnant et en rejetant de plano les manœuvres dilatoires... ainsi que tous les actes contraires aux devoirs de loyauté, probité, véracité, honnêteté et bonne foi.
Un accusé peut demander à ce que soit établie sa réputation de probité.
Code des délits et des peines de 1795. Art. 357 : L'accusé peut faire entendre des témoins pour attester qu'il est homme d'honneur, de probité, et d'une conduite irréprochable.
Liée à la réputation, la probité d’une personne ne peut être publiquement mise en doute sans preuves à l’appui. Constitue dès lors une Diffamation* le fait de dire que telle personne a manqué à la probité.
Cass.crim. 7 avril 1994 (Gaz.Pal. 1994 II Chr.crim. 415) : Pour déclarer J. coupable du délit de diffamation, le jugement et l’arrêt confirmatif relèvent notamment que l’utilisation de l’article «le» devant le nom propre du plaignant a été fait dans une intention de dérision et de mépris confirmant l’imputation de malhonnêteté faite à M., à l’égard duquel il est insinué qu’il s’est conduit, lors de sa déposition à l’audience de telle façon qu’on pouvait désormais mettre en doute son intégrité et sa probité.