DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre P
(Quinzième partie)
PROCÉDURE PÉNALE
Cf. Contraction des débats*, Débats*, Droit (droit pénal, droit pénal général, droit pénal spécial)*, Durée de la procédure*, Erreur judiciaire*, Faustin Hélie*, Formulaires*, Impartialité*, Instruction*, Langue française*, Matière pénale*, Procès*, Rôle*, Vitu*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), voir ci-dessous
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), voir ci-dessous
Voir : Faustin Hélie, De la procédure criminelle en général
Voir : A.Normand, Éléments du droit criminel romain
Voir : R. Garraud, L’objet de la procédure pénale
Voir : R. Garraud, Les divers types de procédure pénale
Voir : Merle et Vitu, Les traits fondamentaux de la procédure de jugement
- Notion. La procédure pénale est constituée par les règles déterminant, d’une part la composition et la compétence des diverses organes qui interviennent dans le procès pénal, d’autre part le déroulement de l’enquête de police, de l’instruction préparatoire et de l’instruction à l’audience, et enfin le cadre du jugement pénal.
Larguier (Procédure pénale) : La procédure pénale est la mise en œuvre concrète du droit pénal, par la recherche des auteurs d’infraction et leur jugement. Elle constitue le trait d’union entre l’infraction et la peine.
Nypels (Le droit pénal français, Bruxelles 1864) : Le but de la procédure criminelle est la manifestation de la vérité non pas formelle mais matérielle, c'est-à-dire de la vérité vraie, autant qu'il est possible à la faiblesse humaine de la connaître.
Garofalo (La criminologie) : Le vrai but d’une procédure rationnelle, c’est la recherche critique et impartiale de la vérité.
- Nécessité. Certains ont mis en doute l’utilité de la procédure pénale. Mais une doctrine unanime observe qu’elle seule permet, non seulement de faire obstacle aux caprices des parties et à la partialité des juges, mais encore de limiter les risques d’erreur judiciaire. L’absence de règles de procédure conduit à l’arbitraire.
Pussort (Ordonnance de 1670) : On ne peut apporter trop de précautions, lorsqu’il s’agit de la vie et de l’honneur des Sujets du Roi.
Merlin (Répertoire de jurisprudence, 1827) : L'observation des règles de procédure est tellement essentielle dans l'administration de la justice criminelle, que les actes où on les aurait négligées ne pourraient être considérés que comme des actes de violence et de tyrannie.
Von Jhering (L’esprit du droit romain) : Vanter la liberté des débats, c’est proclamer la liberté de l’arbitraire et de la partialité chez le juge, c’est préconiser la liberté de la chicane, c’est vouloir introduire l’obscurité et la confusion dans les procès… La procédure est fille de la réflexion.
Faustin Hélie (Traité de l’instruction criminelle) : Les formes de la procédure sont destinées, comme des phares, à éclairer la marche de l’action judiciaire ; leur but est d’arrêter les entraînements de la justice, d’attacher une sorte se solennité à chacun de ses pas, de préparer ses actes.
Macarel (Éléments de droit politique) : La procédure n’est autre chose que la forme suivant laquelle les justiciables et les juges doivent agir, les uns pour obtenir, les autres pour rendre la justice. Les règles et les formalités de la procédure doivent avoir pour effet d’écarter de l’administration de la justice le désordre, l’arbitraire et la confusion… Elles doivent arrêter la précipitation des jugements, en prescrivant de sages lenteurs, et bannir l’arbitraire, en faisant, à chaque instant, sentir au juge l’empire de la loi sous les ordres de laquelle il agit.
John Rawls (Théorie de la justice) : Un système de lois doit prévoir des règlements pour le déroulement correct des procès et des audiences ; il doit comporter des règles pour les témoignages, qui garantissent des procédures d'enquête rationnelles. Bien qu'il y ait des variantes dans ces procédures, l'état de droit exige un processus bien ordonné, c'est-à-dire un processus qui, de manière raisonnable et en accord avec les autres fins du système légal, conduise à l'établissement de la vérité, disant quand et dans quelles circonstances a eu lieu une violation de la loi.
Procès des Girondins. Fouquier-Tinville, ne parvenant pas à dominer la défense écrivit à la Convention, le 29 octobre 1793 pour demander la suppression des formes judiciaires, notamment l’obligation d’entendre les témoins : D’ailleurs on se demande, pourquoi des témoins ? La Convention, la France entière accusent ceux dont le procès est instruit ; les preuves de leurs crimes sont évidentes ; chacun a dans son âme la conviction qu’ils sont coupables. La Convention l’autorisa a faire clore les débats dès que les jurés se déclareraient convaincus.
- Caractères. On parle souvent ici de « lois de forme », mais la formule n’est que partiellement exacte. Du fait qu’elles balisent le mode de raisonnement du juge, notamment lors de la qualification des faits, nombre de règles de procédures touchent le fond du droit pratique et, symétriquement, marquent de leur empreinte les lois d’incrimination et d’imputation.
Mommsen (Le droit pénal romain) : La séparation des règles juridiques et de leur application, ou, suivant la formule habituelle, du droit et de la procédure, en général regrettable au point de vue scientifique, ne convient nullement au droit criminel, et est, au moins pour partie, responsable de la faiblesse de la littérature juridique en cette matière.
R. et P. Garraud (Précis de droit criminel) : Le but de la procédure pénale est d’assurer la complète manifestation de la vérité judiciaire en protégeant, par les formalités dont elle entoure la poursuite, l’instruction et le jugement, l’intérêt de l’accusation et l’intérêt de la défense.
Code de procédure pénale bulgare de 1974 : Le code de procédure pénale détermine l’ordre que doit suivre la procédure en vue d’assurer la découverte des crimes, de démasquer les coupables et d’assurer une application exacte de la loi.
Commission de réforme du droit canadien : Le
Code de procédure régira l’ensemble des formalités, règles et pratiques applicables aux personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction ou contre qui
pèsent des accusations criminelles...
La procédure pénale ne répond pas simplement à des
considérations pratiques : elle détermine et reflète tout à la
fois la qualité du système judiciaire d'une société, la nature
même de celle-ci. Il ne faudrait pas croire que les règles de
procédure aient pour fonction de rendre plus difficile la tâche
des poursuivants, en permettant aux criminels d'échapper à la
condamnation pour de simples questions accessoires. En réalité,
leur but consiste à préciser dans quelles limites l'État devrait
être autorisé à porter atteinte aux droits individuels.
Correctement formulées, ces règles ne peuvent en fait
qu'accroître la qualité des investigations policières et des
éléments de preuve qui en découlent.
- On peut rêver d'un système procédural qui parviendrait à garantir les intérêts de la société, ceux de la victime et ceux de la personne poursuivie ; mais il ne saurait constituer qu'un idéal. Le législateur n'est en effet pas vraiment libre de ses choix : il doit tenir compte du type de délinquance auquel il doit présentement faire face. Deux modèles extrêmes s'offrent à lui : la procédure inquisitoire et la procédure accusatoire.
Alland et Rials (Dictionnaire de la culture juridique, éd. 2003). V° Procédure pénale, par Maistre du Chambon : La procédure pénale, par les enjeux qui s'y attachent, est au centre de toutes les controverses qui secouent la société française contemporaine, en étant la discipline juridique la plus médiatisée. Il est vrai que l'on demande beaucoup aux règles de procédure, puisqu'elles doivent tendre à la condamnation des coupables tout en préservant la liberté des innocents. Il s'ensuit un constant mouvement de balancier entre rigueur et libéralisme, sévérité et indulgence.
- Procédure inquisitoire. La procédure inquisitoire (ou inquisitoriale) est le type de procédure placée sous l’autorité souveraine du juge, qui décide d’ouvrir un dossier, qui conduit l’instruction de l’affaire, qui dirige le déroulement des débats, puis qui prononce la sanction. Certes efficace, et même pleinement justifiée en période de crise vitale pour la Nation, elle n'en présente pas moins les graves dangers de dérive autoritariste, de préjugé et de partialité.
Cf. États d'exception*, Preuves légales*, Tribunaux d'exception*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale », (4e éd.) n° 7, p.12
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° 2, p.1
Dictionnaire civil et canonique (Paris 1687) : Inquisition est une recherche que le juge fait d’office sur la commune renommée, sans qu’il y ait aucun dénonciateur, ainsi qu’il se pratique en Espagne ou en Italie, et non pas en France, où personne n’est poursuivi criminellement qu’il n’y ait une partie civile ou que le procureur du Roi ne soit lui-même l’accusateur.
Ortolan (Éléments de droit pénal) : Système inquisitoire.- Ici, c’est le juge qui, sur des dénonciations, sur des plaintes secrètes, sur des bruits, sur des soupçons, se met en enquête, c’est-à-dire à la recherche des preuves, par audition de témoins, par examen des lieux, par investigations de toutes sortes, dont les résultats sont couchés par écrit en des procès-verbaux clos dans des sacs, le tout secrètement. Plus d’accusation, plus d’accusateur, plus d’accusé ; la personne impliquée dans ces poursuites, capturée, mise au cachot, en ignore la cause, le but, ne sachant ni qui l’incrimine, ni de quoi elle est incriminée, jusqu’aux dernières phases de la procédure. Alors arrive, pour obtenir des aveux et des révélations, un effroyable développement de la torture ; et pour dicter la sentence, ce que l’on appelle les preuves légales, c’est-à-dire preuves dont la valeur est légalement déterminée, de manière à enchaîner même la conscience de ceux qui doivent prononcer. Finalement, c’est le jugement, qui se fait sur le sac de toutes les pièces écrites, sans débat oral, sans plaidoirie, sans publicité.
Bloch
(La législation d'exception en Irlande - Revue de science
criminelle et droit comparé 1987 p.629). Sur la loi de 1939 et
ses compléments :
Tout policier en
uniforme ou en civil a le pouvoir, sans mandat, d'interpeller,
de fouiller, d'interroger et de mettre en état d'arrestation
toute personne qu'il soupçonne d'avoir commis ou d'être sur le
point de commettre l'une des infractions spécifiées par la loi,
ou qu'il soupçonne d'être porteur d'un document en rapport avec
l'infraction projetée, ou d'être en possession d'une information
sur cette infraction...
Les pouvoirs de la police dans les locaux de la police ne sont
guère limités. Pendant cette détention, le policier peut
interroger le suspect, le fouiller, le photographier, prendre
ses empreintes digitales, le soumettre au test de la paraffine
pour déterminer s'il a été en contact récent avec des armes à
feu ou des explosifs, effectuer sur lui des prélèvements de
poils, de cheveux ou même de peau, saisir tout objet qu'il a sur
lui.
Aux termes de l'art. 52, il peut exiger de la personne détenue
un compte rendu complet de ses faits et gestes, de son emploi du
temps et de ses activités pendant un temps que le policier
détermine lui-même, ainsi que toute information en sa possession
sur une infraction commise ou projetée par un autre individu. Le
suspect n'a pas droit au silence. Tout refus de répondre ou une
réponse mensongère constitue une infraction spéciale punissable
de six mois d'emprisonnement. La police possède aussi des
pouvoirs très étendus en matière de perquisition, de saisie, de
contrôle et d'interdiction de manifestations ou de
rassemblements.
Le pouvoir le plus exorbitant de la police concerne la phase
judiciaire. La simple déclaration faite devant le tribunal par
un officier de police d'un certain grade (au moins chief
superintendant) qu'il est convaincu que l'accusé a été à une
certaine date membre d'une organisation illégale est admise
comme preuve de l'appartenance à cette oganisation illégale.
La Cour criminelle
spéciale de Dublin est maîtresse de sa procédure. Elle établit
elle-même, avec le concours du ministre de la Justice, ses
propres règles de procédure. La seule règle légale est que la
décision doit être prise à la majorité ou à l'unanimité mais
qu'aucun juge n'a, contrairement à la procédure anglo-saxonne,
le droit de donner un avis dissident. Le secret le plus absolu
doit entourer la délibération et personne ne doit savoir si la
décision a été prise à l'unanimité ou à la majorité...
Les débats sont publics, mais la Cour peut elle-même décider que
la présence du public sera subordonnée à certaines conditions.
Elle peut décider de siéger à huis clos...
Elle peut autoriser un témoin à ne décliner son nom que par
écrit aux membres de la Cour et peut interdire la divulgation de
son nom. Elle peut aussi interdire la publication de tout ou
partie du témoignage. Elle peut interdire la présence de tous
les autres témoins lors de l'audition d'un témoin ou prescrire
la séparation des témoins...
- Procédure accusatoire. La procédure accusatoire est le type de procédure dans lequel, sous le contrôle d’un juge qui s’en tient à un rôle d’arbitre impartial, le demandeur et le défendeur (ou plutôt leurs avocats) jouent un rôle déterminant aussi bien pour le déclenchement du procès que pendant le déroulement de l’instruction. Elle présente l’inconvénient de favoriser le riche aux dépens du pauvre, le puissant aux dépens du faible, le scélérat aux dépens du citoyen respectueux des lois. De surcroît, elle ne se fixe pas pour but la recherche de la vérité, mais se plie à la loi du plus fort ou du plus rusé ; elle favorise l'agresseur qui a eu tout loisir pour préparer sa défense dès le départ de l'action.
Cf. Droit au silence*, Égalité des armes*, Formules*, Oralité des débats*, Plaider coupable*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd), n° 11, p.20
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° 3, p.2
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
Voir : Lysias, Sur l'Olivier sacré
Du Boys (Histoire du droit criminel de la France), quelque peu optimiste : Dans une procédure accusatoire, on ne voit jamais poindre chez le juge l'esprit de persécution, les sentiments de l'homme de police, le désir excessif de venger la société, l'instinct du chasseur qui se pique au jeu. Conformément à l'esprit de la loi, lorsque le juge prononce, c'est avec l'autorité et l'impartialité d'une conscience profondément convaincue. Il ne déclame ni n'invective, il ne dissimule pas les points faibles de la preuve, il n'exagère pas sa certitude. Il mesure son expression, il traduit avec scrupules, en paroles précises, son opinion bien mûrie ; et quand enfin, à la sentence légale il ajoute le blâme moral, la gravité et la noblesse de son accent deviennent admirables.
Garraud (Traité
d'instruction criminelle et de procédure pénale) : Le
juge, dans le système accusatoire, ne peut procéder, de sa
propre initiative, ni pour se saisir ni pour s'éclairer ; son
rôle consiste à répondre aux questions qui lui sont posées, à
examiner les preuves produites devant lui, et à décider sur ces
preuves. Il assiste en témoin à la lutte entre les parties ; il
dirige le combat pour qu'il soit et reste loyal ; il dit qui est
le vainqueur ; mais à aucun moment de la procédure, il ne prend
un rôle actif, soit pour poursuivre, soit pour enquérir.
L'instruction a trois caractères essentiels : elle est contradictoire,
orale, publique. Les adversaires sont mis en présence dans un
débat qui a lieu au grand jour. Chacun d'eux produit librement
ses moyens de preuve, et l'instance ressemble à un duel à armes
égales et loyales.
Donnedieu de Vabres (Traité de droit criminel) : La procédure accusatoire ramène le procès pénal à un duel entre deux parties privées : la personne lésée par le délit, qui est demanderesse, et l’auteur de l’infraction, qui joue le rôle de défendeur. Les deux parties font valoir leurs prétentions librement, oralement, publiquement, devant le juge.
Villey (Cours de droit criminel) : A l’opposé de la procédure inquisitoriale, se place le système de la procédure accusatoire, absolument publique et contradictoire dès le début.
Garofalo (La criminologie) : C’est dans la nature du système d’accusation qu’il y ait un antagonisme entre deux parties, de sorte qu’on ne s’y propose pas la recherche de la certitude, ni l’hommage de la vérité ; on ne s’y demande pas s’il y a un innocent et un coupable, mais quel a été le vaincu.
- Procédure de synthèse. La procédure idéale, selon la science criminelle, est de type intermédiaire, mixte ou
composite ; elle s’appuie sur la procédure inquisitoire, qui assure la protection des plus faibles ; mais elle fait une place importante à la
procédure accusatoire, qui garantit notamment les droits de la défense.
Au stade de l’instruction préparatoire, c’est le caractère inquisitoire qui
doit l’emporter afin de faciliter la recherche de la vérité. Mais le juge
d’instruction ne saurait, ni se saisir lui-même, ni tenir la défense dans l’ignorance de ses démarches, ni se prononcer sur la culpabilité du
défendeur ; il doit toujours informer tant à charge qu’à décharge.
Au stade de l’instruction à l’audience, en
revanche, c’est le caractère accusatoire qui doit dominer. Mais le président du tribunal jouit d’un
indispensable pouvoir
discrétionnaire qui lui permet, d’une part d’assurer l’équilibre entre l’accusation et la défense, d’autre part de s’assurer que les débats tendent
toujours à la recherche de la vérité.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n°13, p.25
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n°4, p.3
Vitu (Manuel de procédure pénale) : On appelle mixte une procédure qui combine, en des proportions variables, les traits des deux procédures précédemment décrits. C’est une procédure de ce genre que s’est efforcé d’instituer le Code d’instruction criminelle.
Larguier (Procédure pénale) : Le Code d’instruction
criminelle de 1808 avait adopté certaines règles du système accusatoire (procédure de jugement publique, orale et contradictoire), avait adopté certaines
règles du système inquisitoire (rôle du juge d’instruction dans la recherche des preuves), avait parfois combiné les deux systèmes (cour d’assises
composée de magistrats professionnels et de simples particuliers, les jurés).
Le Code de procédure pénale de 1958 s’est efforcé de synthétiser les différents courants.
Mais il ne faut pas se bercer d'illusions. Aucun système procédural, aussi soigneusement qu'il ait pu être élaboré par le législateur, aussi consciencieusement qu'il ait pu être appliqué par les magistrats, ne conduira en toute hypothèse à un jugement irréprochable. On aura toujours à déplorer des Erreurs judiciaires*, même en l'absence de toute erreur humaine.
John Rawls (Théorie
de la justice, n° 14) : L'exemple d'une justice
procédurale imparfaite est fourni par un procès criminel. Le
résultat souhaité est que l'accusé soit déclaré coupable si, et
seulement si, il a commis le crime dont on l'accuse. La
procédure criminelle est faite pour rechercher et établir la
vérité de ce point de vue. Mais il paraît impossible de
trouver des règles légales qui conduisent toujours à un résultat
correct... Même si la loi est soigneusement appliquée et que le
procès est conduit comme il faut et en toute équité, on peut
arriver à une erreur. Un innocent peut être déclaré coupable, un
coupable peut être relâché.
Dans de tels cas nous parlons d'erreur judiciaire ; l'injustice
ne vient pas d'une faute humaine, mais d'une combinaison
fortuite de circonstances qui va à l'encontre du but fixé par
les règles légales.
PROCÈS
Cf. Instruction*, Jugement*.
- Au sens large le mot procès, qui vient du latin procedere (aller de l’avant, progresser), signifie étudier une question en suivant un plan rationnel qui permet de la poser dans des termes corrects et de lui donner une réponse adéquate. Il évoque les idées de phases successives, d’enchaînement, d’ordre, de méthode et de logique.
Littré (Dictionnaire). Procès : dans le langage scientifique, développement, progrès – le procès de la formation embryonnaire, le procès de l’évolution intellectuelle.
- Au sens étroit, l’expression « procès pénal » vise l’instruction et le jugement d’une personne pour certains faits dont elle est accusée. La notion d’ordre domine les deux stades de l’intervention de la justice : l’information sur les faits reprochés doit suivre un chemin précis, qui a été balisé pour permettre d’approcher la vérité dans le respect des droits de la défense ; le jugement doit être bâti sur un plan qui part de l’observation scrupuleuse des faits matériels pour aboutir à l’appréciation souveraine de la responsabilité morale du prévenu.
Voir : Doucet, Le raisonnement judiciaire
Perrot (Institutions judiciaires) : Le procès évoque l’idée d’un combat entre deux parties qui s’affrontent devant les tribunaux… L’objet de ce combat est d’obtenir du juge qu’il tranche la contestation au moyen d’un acte solennel, que l’on appelle un jugement… Pour parvenir à ce résultat, il faut accomplir une succession d’actes qui achemineront le procès vers son dénouement. De là d’ailleurs l’étymologie du mot procès…
Cass.crim. 28 mai 1990 (Bull.crim. n° 213 p.540) : Le principe de la libre discussion des éléments de preuve domine tout le procès pénal.
PROCÈS ÉQUITABLE
Cf. Égalité des armes*, Équité*, Procédure accusatoire*.
L’expression « procès équitable » a été consacrée par l’art. 6 Conv. EDH. Elle se rattache à la règle, fondamentale dans une procédure accusatoire, voulant que l’accusation et la défense soient placées sur un même pied et que ni l’accusateur ni l'accusé ne puissent user de moyens déloyaux.
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
Convention européenne des droits de l’homme. Art. 6 1 : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement…
Cour EDH 23 octobre 1990 : Le droit à un procès équitable occupe une place si éminente dans une société démocratique qu’une interprétation restrictive de l’art. 6.1 de la Convention ne se justifie pas.
Stéfani, Levasseur et Bouloc (Procédure pénale) : Sur le fondement de l’art. 6-1, combiné avec l’art. 6-3, la Cour européenne a dégagé une notion de procès équitable qui conduit, notamment, à écarter comme preuves suffisantes les dénonciations anonymes.
Code criminel du Canada. Art. 587 : Si le tribunal est convaincu que la chose est nécessaire pour assurer un procès équitable, il peut ordonner que le poursuivant fournisse des détails … sur les faits allégués.
Cass.crim. 11 février 2003 (Bull.crim. n° 29 p.) : Le droit à un procès équitable et la liberté d’expression justifient que la personne poursuivie du chef de diffamation soit admise à produire, pour le nécessités de sa défense, les pièces d’une information en cours de nature à établir sa bonne foi.
PROCESSUS CRIMINEL
Cf. Cheminement criminel*, Iter criminis*, Modus operandi*, Passage à l’acte*, Tentative*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-133, p.189 / n° I-242, p.253
Voir : R. Merle et A. Vitu, Le passage à l'acte
Le Processus criminel, ou Cheminement criminel*, est ordinairement désigné en droit pénal par l’expression Iter criminis*. Il est constitué des différentes étapes que parcourt un délinquant lorsqu’il commet une infraction.
R.Simon (Éthique de la responsabilité) : Les termes de démarche et de procès désignent le trajet que l’agent est appelé à parcourir, quand il se propose délibérément d’effectuer un choix, de prendre une décision. Il s’agit de situer les « moments » qui jalonnent le parcours de l’agent moral, en partant de la situation qui est la sienne initialement jusqu’à sa transformation par l’action.
Rigaux et Trousse (Les crimes et délits du Code pénal belge) : À l'origine de toute infraction intentionnelle se trouve la conception de l'infraction, née souvent des circonstances et dont l'homme n'est pas maître. Mais cette conception, l'homme normal est libre de l'accueillir ou de la rejeter. S'il l'accepte comme guide de son activité, il lui faut franchir un pas : c'est la résolution criminelle qui, elle, est imputable à son auteur. Toutefois la résolution a laissé le processus criminel dans l'intérieur de la conscience. La conception comme la résolution appartiennent à la phase interne du processus criminel. S'il poursuit sa résolution, son auteur pourra la communiquer à d'autres, accomplir certains actes en harmonie avec elle, actes qui pourtant sont encore trop éloignés du but pour être considérés comme des actes d'exécution. À ces stades, la résolution criminelle a franchi le seuil de la conscience, elle a perdu son caractère intime et personnel en s'extériorisant. Manifestation orale et actes préparatoires forment la deuxième phase du processus criminel que nous qualifierons de phase préparatoire externe. Enfin, l'agent entrera dans la phase de l'exécution. Celle-ci pourra être poussée jusqu'au bout : ce sera la consommation du crime ou du délit. L'agent pourra être arrêté avant la consommation du crime malgré sa volonté : c'est la tentative. Il pourra aussi manquer son but malgré qu'il ait accompli tous les actes que nécessitait l'exécution du dessein criminel : c'est l'infraction manquée...
Cass.crim. 18 février 1991 (Bull.crim. n° 83 p.208) : La Cour d’appel, après avoir décrit le processus de fraude réalisée à l’occasion de divers transports de produits vinicoles réceptionnés par la société en cause, a pu retenir la responsabilité du prévenu en raison de l’importance des quantités livrées et du nombre de livraisons ainsi réalisées.
PROCÈS-VERBAL
Cf. Police - police judiciaire*, Preuves légales*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-205, p.42
Voir : Procès-verbal du crime détestable de trois sorcières surprises au Faubourg Saint-Germain-des-Prez
- Notion. Un procès-verbal est un écrit dans lequel un officier ou un agent de police judiciaire rapporte les constatations qu’il a pu faire.
Denisart, citant Furetière : Un procès-verbal est un acte dressé et attesté par des officiers de justice, qui contient ce qui s’est passé lors d’une arrestation, d’une descente sur les lieux, ou de l’exécution d’une commission particulière.
Code de procédure pénale allemand, § 168a
(Procès-verbaux des actes d’instruction judiciaire) :
1) Le procès-verbal doit mentionner le lieu et la date de l’acte ainsi que les noms des personnes participantes et concernées et il doit permettre de
vérifier le respect des formalités essentielles de la procédure.
2) Le contenu du procès-verbal peut être enregistré provisoirement à l’aide d’une forme courante de sténographie sur une machine appropriée, d’un
appareil d’enregistrement sonore ou d’abréviations compréhensibles. Dans ce cas, le procès-verbal doit être établi dès la fin de l’acte.
Les notes provisoires sont à faire figurer aux actes ou, si elles ne s’y prêtent pas, à conserver au greffe avec les actes. L’effacement des
enregistrements sonores est autorisé après la clôture définitive de la procédure ou son extinction pour toute autre raison.
3) Lecture ou présentation du procès-verbal doit être faite aux personnes concernées, dans la mesure où elles sont en cause, afin que celles-ci
puissent approuver le procès-verbal.
Mention de cette approbation doit être faite. Le procès-verbal doit être signé par les personnes concernées, sinon il faut indiquer le motif d’une
absence éventuelle de signature. Si le contenu du procès-verbal a seulement fait l’objet d’un enregistrement provisoire, la lecture ou l’écoute des notes
est suffisante. Le procès-verbal doit signaler que cette lecture a été effectuée et que l’approbation a été donnée ; il doit également préciser, le cas
échéant, la nature des objections soulevées. La lecture, la présentation ou l’écoute peuvent ne pas avoir lieu, si les personnes concernées, dans la
mesure où elles sont en cause, y renoncent après l’enregistrement; le procès-verbal doit indiquer que les personnes ont délibérément renoncé à la lecture
ou à l’écoute.
4) Le procès-verbal doit être signé par le juge et par le responsable de rédaction. Si le contenu du procès-verbal a été enregistré entièrement ou
partiellement à l’aide d’un appareil d’enregistrement sonore, sans qu’il soit fait appel à un responsable de rédaction, signent le procès-verbal le juge
et la personne qui l’a établi. Cette dernière ajoute à sa signature une mention certifiant l’exactitude de la transcription. La preuve de l’inexactitude
de la transcription est admissible.
Cass.crim. 18 mai 1994 (Bull.crim. n° 191 p. 438) : Un procès-verbal de contravention est régulier en la forme lorsqu’il comporte, outre les constatations de l’infraction, la signature de l’agent verbalisateur, son numéro matricule et l’indication de son service.
- Autorité en droit positif français. Ce document a valeur probatoire ; il peut toutefois être librement combattu par une preuve contraire.
Cass.crim. 21 juillet 1977 (Bull.crim. n°271 p.680) : En matière de crimes et délits prévus par le Code pénal, les procès-verbaux, de quelques agents qu’ils émanent, ne font pas foi par eux-mêmes et n’ont que la valeur d’un simple renseignement.
Cass.crim. 28 octobre 2014, n° 13-14840 (Gaz.Pal.13 novembre 2014 p.25 ) : Selon l'art. 430 C.pr.pén., sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les procès-verbaux et les rapports constatant les délits ne valent qu'à titre de simple renseignement.
Son autorité est légèrement plus accentuée en matière de contraventions : en ce domaine la preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins (art 537 C.pr.pén.). On notera que si l'auteur d'une contravention encourt une peine délictuelle du fait qu'il se trouve en état de récidive, les faits eux-mêmes n'en conservent pas moins leur caractère contraventionnel.
Cass.crim. 15
janvier 2014, n°13-90032 (Bull.crim.) : La question
prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée : "
L'article 537 du code de procédure pénale porte-t-il atteinte
aux droits et libertés garantis par l'article 66 de la
Constitution et l'article 7 de la Déclaration des droits de
l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ?
" ;
La question posée ne présente pas, à l'évidence, un
caractère sérieux dès lors que, d'une part, seuls font foi
jusqu'à preuve contraire les procès-verbaux régulièrement
établis, sous le contrôle de l'autorité judiciaire, et
rapportant des faits que leur auteur a personnellement
constatés, ce qui exclut tout risque d'arbitraire, que, d'autre
part, cette présomption ne revêt pas de caractère irréfragable,
et qu'enfin, le respect des droits de la défense, devant la
juridiction de jugement, assure l'équilibre des droits des
parties.
Cass.crim.
15 décembre 2015, pourvoi n° 15-81322
: Selon l'art. 429 C.pr.pén., tout procès verbal ou rapport a
valeur probante s'il est régulier en la forme, si son auteur a
agi dans l'exercice de ses fonctions et a rapporté sur une
matière de sa compétence ce qu'il a vu ou constaté
personnellement.
Selon l'art. 537 C.pr.pén., les procès-verbaux ou rapports
dressés par les officiers ou agents de police judiciaire font
foi jusqu'à preuve du contraire des contraventions qu'ils
constatent ; que la preuve contraire ne peut être rapportée que
par écrit ou par témoins.
Cass.crim. 15 février 2000 (Gaz.Pal. 2000 II 1514) : Selon les articles 537 du Code de procédure pénale et R. 253 du Code de la route, les procès-verbaux constatant les infractions à la police de la circulation routière font foi jusqu’à preuve du contraire; cette preuve ne peut toutefois être rapportée que par écrit ou par témoin.
Cass.crim. 13 juin 2007 (Bull.crim. n° 161 p.692) : L'art. 537 C.pr.pén., qui dispose que les procès-verbaux dressés par les officiers et agents de police judiciaire font foi jusqu'à preuve contraire des contraventions qu'ils constatent et que cette preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins, trouve à s'appliquer lorsque les faits n'acquièrent un caractère délictuel qu'en raison de l'état de récidive dans lequel ils ont été commis.
Cass.crim. 16 février 2005 (Bull.crim. n° 64 p.236) : Une juridiction de proximité ne peut, sans violer les dispositions de l’art. 537 C.pr.pén., prononcer la relaxe d’un contrevenant sans constater expressément que la preuve contraire aux énonciations du procès-verbal a été rapportée par écrit ou par témoins.
PROCÈS-VERBAL D'AUDITION DES TÉMOINS
Cf. Témoignage*, Instruction pénale (instruction préparatoire)*.
Suivant les art. 102 et s. du Code de procédure pénale français, l'audition des témoins donne lieu à établissement d'un procès-verbal établi par le greffier.
Pradel (L'instruction préparatoire) : Actes écrits, malgré leur nom, les procès-verbaux sont des documents rédigés par le greffier, sous la dictée et le contrôle du juge d'instruction, et qui constatent l'accomplissement des opérations effectuées par ce magistrat dans sa recherche de la vérité.
Cass.crim. 14 septembre 1985 (Bull.crim. n°285 p.736) : Si le magistrat instructeur est amené, lors d'un transport sur les lieux, à recueillir les déclarations des inculpés, de la partie civile ou celles des témoins et à procéder à des confrontations, il soit observer les formes prescrites par les art. 106, 107 et 121 C.pr.pén. Il suit de l'inobservation de ces formalités que le procès-verbal est nul et que la Chambre d'accusation doit constater ce vice de l'information.
PROCÈS-VERBAL DES DÉBATS
Cf. Greffier*.
Voir : Procès de Charlotte Corday (n°II-17)
Voir : Procès de M-O de Gouges devant le Tribunal révolutionnaire
Suivant l’art. 378 C.pr.pén.français, le greffier près la cour d’assises dresse un procès-verbal des débats, dans le but de permettre le contrôle de l’accomplissement des formalités prescrites par la loi.
Selon Plutarque (Vie de Caton le Jeune), le premier Procès-verbal des débats a été dressé lors du procès de Catilina : Cicéron avait pris les copistes les plus habiles et les plus expéditifs et les avait placés en divers endroits de la salle du Sénat. On ne s’était point encore servi de ces écrivains par notes, et c’est alors que si fit le premier essai d’écriture abrégée.
Code de procédure pénale allemand, § 272 : Le
procès-verbal des débats contient :
1. les lieu et jour des débats;
2. les noms des juges et échevins, du fonctionnaire du ministère public, du fonctionnaire du greffe et de l’interprète qui a apporté son
concours ;
3. la description de l’infraction aux termes de l’accusation;
4. les noms des accusés, de leurs défenseurs, des accusateurs privés, des plaignants par intervention, des victimes, les créances que l’on a fait
valoir à cause de l’infraction, les autres intervenants, représentants légaux, mandataires et personnes apportant leur assistance;
5. l’indication que les débats ont été publics ou que l’on a décidé le huis-clos.
Code de procédure pénale espagnole Art. 743 :
Le greffe du tribunal établira un procès-verbal de chaque séance qui s’est tenue, en y consignant succinctement tout ce qui est survenu
d’important.
À la fin de la séance, le procès-verbal sera lu et on y fera les rectifications que les parties demandent, si le tribunal, décidant sur le champ, les
considère comme justifiées.
Les procès-verbaux seront signés par le président, les membres du tribunal, le ministère public et les défenseurs des parties.
Cass.crim. 9 janvier 1963 (Bull.crim. n°14 p.25) : L’absence de procès-verbal des débats rend impossible la vérification de l’accomplissement des formalités substantielles imposées par la loi ; ce qui entraîne l’annulation des débats et de l’arrêt.
Cass.crim. 12 septembre 2007 (Bull.crim. n° 202 p.850) : Le greffier doit signer avec le président la minute des arrêts rendus par la cour d'assises, ainsi que le procès-verbal des débats.
PROCHAIN
Cf. Autrui*, Humanité*, Omission* de porter secours à autrui.
Notre prochain est tout être humain autre que nous ; particulièrement celui qui se trouve près de nous, surtout s’il se trouve en péril. Sa présence fait naître à notre charge une responsabilité active, un devoir moral d’intervention (parabole du bon Samaritain) ; on dit, en droit, qu’il existe une obligation de porter assistance à autrui.
Règle de St Benoît (Chap. 4, n° 2) : Aimer ton prochain comme soi-même.
Calvin (Sermon sur le Deutéronome) : Jésus Christ dit que, quand la Loi parle de nos prochains, elle n’entend pas ceux qui nous sont alliés et parents… elle n’entend seulement pas nos voisins que nous connaissons privément, mais elle entend en général tous les hommes.
Caro Elme-Marie (Problèmes de morale) : Faire pour son prochain plus que pour soi- même, jusqu'à tout lui donner, son bonheur, sa vie même, tout, sauf sa dignité propre qui est inaliénable, se sacrifier en un mot, voilà le trait décisif d'une nature supérieure où les fins désintéressées prédominent, voilà le trait de l'idéal dans l'homme.
Bakounine (Catéchisme révolutionnaire) : Respecter la liberté de son prochain, c’est le devoir ; l’aimer, l’aider, le servir, c’est la vertu.
Hauriou (Aux sources du droit) : L'homme abuse, au détriment de son prochain, des privilèges que lui confère l'organisation individualiste de la société et il provoque ainsi des désordres sociaux. Ainsi, l'individualisme et la liberté ont besoin de correctifs.
Cour EDH 25 septembre 1993 (Gaz.Pal. 1994 477) : Aux termes de l’art. 9, la liberté de manifester sa religion comporte en principe le droit d’essayer de convaincre son prochain, par exemple au moyen d’un «enseignement», sans quoi «la liberté de changer de religion ou de conviction», consacrée par l’art. 9, risquerait de demeurer lettre morte.
Un proche est une personne qui possède un étroit lien de parenté, d’amitié ou de confraternité avec le prévenu.
Code pénal de Pologne (1932). Art. 91 al.2 : Est réputé « proche » quiconque, du fait de la parenté, de l’affinité, de l’amitié ou du devoir de gratitude, a droit à des égards particuliers de la part de la personne dont il s’agit.
Code pénal de Côte d'Ivoire. Art. 411 : Est puni d'un emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende...quiconque, à l'aide de menace écrite ou orale, de révélations ou d'imputations diffamatoires concernant la victime elle-même ou un de ses proches, exige de celle-ci l'exécution de l'une des obligations visées aux premier et deuxième paragraphes du premier alinéa de l'article précédent.
Paris 11 juillet 1988 (D. 1988 IR 234) : Il y a lieu de réparer cette atteinte portée au souvenir d’un proche.
Bourges 3 juin 1996 (JCP 1997 IV 1486) : Il y a lieu de prendre en considération la douleur morale qui peut être ressentie par un enfant au moment du décès d’un proche.
PROCUREUR
- Cf : Magistrat (judiciaire)*, Ministère public*, Parquet*, République*, Substitut*.
- Dans un sens large, un procureur est une personne qui a reçu pouvoir d’agir en justice pour le compte d’une autre.
- Dans un sens étroit, intéressant particulièrement le droit criminel, un procureur est un représentant de l’État* qui est chargé d’assurer la défense de la Société*, ou plutôt de la Nation*, en exerçant l’Action publique*, pour obtenir des juges l’application des Peines* encourues par ceux qui ont enfreint une loi pénale.
- Comme il appartient à l’appareil de l’État, on devrait le désigner sous le nom de Procureur d’État (comme en droit luxembourgeois) ; mais pour des raisons politiques on a parlé selon les époques de procureur du Roi (ou procureur fiscal), de procureur Impérial ou de procureur de la République.
Merlin (Répertoire de jurisprudence) : Le procureur, c’est celui qui a le pouvoir d’agir pour autrui, qui est fondé de la procuration d’un autre pour faire quelque chose pour lui.
Denisart (Collection de jurisprudence, 1768) : C’est le procureur du Roi qui est chargé par état de déférer et de poursuivre en justice les crimes qui demandent une punition publique. Il ne doit être occupé que de ce qui a rapport à l’ordre public.
De Ferrière (Dictionnaire de droit, 1762) : Le procureur fiscal est un officier établi dans les justices des seigneurs, pour défendre et soutenir leurs droits et ceux du public, et faire les mêmes fonctions dans les justices des seigneurs, que font les procureurs du Roi dans les justices royales.
Décret du 30 mars 1808 : Notre procureur impérial près chaque tribunal doit veiller à ce que les lois y soient exécutées.
Code d’instruction criminelle du Luxembourg. Art. 22. (L. 16 juin 1989) Le procureur d’État représente en personne ou par ses substituts le ministère public près le tribunal d’arrondissement et les tribunaux de police.
Troyat (La vie quotidienne en Russie au temps du dernier tsar) : Auprès de chaque tribunal, le ministre avait un agent particulier, nommé par lui et immédiatement révocable, le procureur, dont les fonctions étaient analogues à celles du procureur de la République en France : il veillait à l'exécution des lois, défendait les intérêts de l'État et ceux des personnes incapables de le faire par elles-mêmes et requérait en matière de crimes et de délits. C'était d'ailleurs parmi les procureurs que se recrutaient souvent, comme en France, le haut personnel de la magistrature assise. Alexandre Vassiliévitch notait là un inconvénient, car un homme habitué à considérer les prévenus du point de vue de l'accusation ne pouvait, du jour au lendemain, acquérir l'esprit d'impartialité nécessaire à un juge.
- Procureur de la République. Magistrat du Ministère public*, le procureur de la République est le chef du Parquet* attaché à un tribunal de grande instance. C’est lui qui, en principe, possède la maîtrise de l’action publique : il déclenche l’action publique après avoir apprécié l’opportunité des poursuites, puis il requiert l’application de la peine qui lui paraît adéquate dans les limites établies par la loi. Sa mission est dominée par l’idée de recherche du bien commun, ce qui explique qu’il peut requérir l’acquittement du prévenu lorsque les débats ont fait apparaître son innocence. Voir les art. 39 et s. C.pr.pén.
Cf. Accusateur*, Bien commun*, Exécution des lois*, Opportunité des poursuites*, Réquisitoire - réquisitoire introductif*.
Treilhard (Exposé des motifs du Code d’instruction criminelle) : C’est le procureur impérial qui est spécialement chargé de la recherche et de la poursuite de tous les crimes et délits.
Cour EDH 10 juillet 2008 (Gaz.Pal. 28 octobre 2008) : Le procureur de la République n'est pas une "autorité judiciaire" au sens que la jurisprudence de la Cour donne à cette notion ; il lui manque en particulier l'indépendance à l'égard du pouvoir exécutif.
Une loi organique du 7 décembre 2013 a institué un procureur de la République financier. Cette création a été contestée ; l'avenir dira si elle renforce effectivement la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, ou si elle aura pour effet de freiner les poursuites qui pourraient être envisagées contre certains hauts personnages.
Conseil constitutionnel 4 décembre 2013, n° 2013-679 : La circonstance que des faits identiques puissent donner lieu à plusieurs enquêtes placées sous la direction de différents procureurs de la République ne méconnaît pas, en elle-même, le principe d'égalité devant la justice.
- Procureur général. Le procureur général est un magistrat du Ministère
public*. Il est le chef du parquet attaché à une cour d’appel. Sur ses attributions, voir les art. 34 et s.
C.pr.pén.
C’est également un procureur général qui est chef du parquet de la Cour de cassation.
Stéfani, Levasseur et Bouloc (Procédure pénale) : Auprès de la cour d’appel, c’est le Procureur général, ou un avocat général, ou un substitut du Procureur général qui représente le ministère public.