Page d'accueil > Table des rubriques > Dictionnaires de droit criminel > Lettre I : table d'accès > Lettre I (Douzième et dernière partie)

DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL

- Professeur Jean-Paul DOUCET -

Lettre  I
(Douzième et dernière partie)

INTIME CONVICTION

Cf. Conjecture*, Conviction*, Doute*, Preuve*, Procès-verbal*, Soupçon*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-211 et s., p.47 et s.

- Notion. Dans la théorie des preuves, on parle d'intime conviction lorsque la loi reconnaît aux juges le droit de statuer sur les faits de l'espèce après avoir apprécié, en leur âme et conscience, la valeur des preuves de leur existence produites tant par l'accusation que par la défense.

Signe Doctrine Faustin Hélie (Traité de l’instruction criminelle) fait reposer la technique de l’intime conviction sur la conscience éclairée par la loi morale : La conscience a été définie avec justesse : une espèce de tact qui, dans chaque circonstance, fait sentir le caractère bon ou mauvais des actions. C’est une perception de l’ordre moral incomplète, mais suffisante néanmoins pour servir de guide ; une lumière intérieure qui se projette sur tous les faits de la vie, un juge qui apprécie toutes les actions et les approuve ou les blâme… Comme le dit un vieil auteur : le for de la conscience est le for de la vraie justice. Tout homme porte en soi un secret instinct de la beauté morale, de la vertu, du bien ; il s’incline au fond de son âme devant ces idées et leur rend hommage. Il trouve en lui-même un amour naturel de la vérité, il la recherche en toutes choses, il fait des efforts pour la pénétrer, il est satisfait quand il croit l’avoir reconnue.

- Science criminelle. Par méfiance envers les juges, qui n'étaient pas tous des professionnels, notre Ancien droit leur imposait de tenir pour acquis les faits établis par certains types de preuves réputées sûres. Par inclination doctrinale, l’opinion contemporain invite au contraire les juges à statuer en leur âme et conscience, selon leur intime Conviction*.

Signe Philosophie Brissot de Warville (Théorie des lois criminelles) : Ne cherchons point l’art théorique d’estimer les preuves. C’est la pierre philosophale de la jurisprudence criminelle. Il est impossible de les réduire à un genre déterminé, d’établir des règles fixes et certaines pour distinguer une preuve complète d’une incomplète, les indices vraisemblables des incertains. L’Empereur Hadrien a dit : « Vous ne devez pas vous en tenir à un seul genre de preuve pour fonder votre sentence ; mais consulter intérieurement votre conscience, pour déterminer ce que vous croyez bien ou mal prouvé ».

Signe Histoire Toureille (Crime et châtiment au Moyen-âge) : En dehors du cas de flagrant délit (qui rendait le crime notoire), les seules preuves admises étaient, soit l'aveu, soir les témoignages suffisamment concordants de deux témoins idoines. Le système probatoire n'autorisait pas les juges à se fier à leur intime conviction... Le juge médiéval devait s'appuyer sur des preuves légales. L'obligation de découvrir les preuves à charge lui revenait, et celles-ci devaient être certaines « plus claires que le jour à midi » (luce meridiana clariores).

Signe Doctrine Garnot (Histoire de la justice) : La loi n'impose aucun mode de preuve particulier : ce qu'elle demande aux jurés et aux juges, c'est d'examiner, à partir de qu'ils ont entendu lors du débat contradictoire, les éléments à charge et à décharge selon leur raison et leur conscience, et de se former ainsi une intime conviction .

Signe Droit comparé Code de droit canonique (Commentaire Salamanque). Canon 1608 : Pour rendre une sentence, il est requis chez le juge une certitude morale au sujet de l’affaire à trancher par la sentence. Le juge doit tirer cette certitude des actes et des preuves… Le juge doit apprécier les preuves selon sa conscience.
[La certitude absolue ne peut pas être exiger pour prononcer la sentence, car dans la plupart des cas on ne peut l’atteindre ; l’exiger équivaudrait à imposer au juge une tâche impossible et à laisser les parties sans le secours de la justice.
D’autre part, la quasi-certitude ou la probabilité ne suffisent pas non plus. Par probabilité il faut entendre la qualité d’un événement qui a le plus de chances d’être vrai. La probabilité et même la très grande probabilité n’excluent pas le doute raisonnable et n’enlèvent pas la crainte de l’erreur.
Pour que le juge puisse prononcer la sentence, la certitude morale est nécessaire et elle est suffisante. Ce genre de certitude enlève tout doute fondé ou raisonnable sur le fait en question ; elle élimine la probabilité du contraire bien que subsiste la simple possibilité. En d’autres termes, la certitude morale exclut la probabilité de l’erreur, non sa possibilité ; elle considère que l’erreur est improbable, même si elle demeure possible.]

Signe Droit comparé Code de procédure pénale allemand, § 261 : Sur ce qui résulte de la réception des preuves, le tribunal décide selon sa libre conviction, telle que la forme l’ensemble des débats.

Signe Droit comparé Cass. belge (2e Ch.) 5 novembre 1973 (Pas. 1974 I 250) : D’une part, le juge n’est pas tenu de donner la raison pour laquelle il considère certaines présomptions comme plus convaincantes que d’autres. D’autre part, le juge apprécie souverainement en fait la valeur probante qui doit être accordée aux présomptions qu’il retient.

Signe Doctrine Clerc (Initiation à la justice pénale en Suisse) : L'intime conviction n'a pas pour effet d'attribuer au juge un pouvoir discrétionnaire dans le domaine de l'appréciation des preuves. Le Tribunal fédéral l'a clairement laissé entendre : s'il ne peut examiner cette appréciation, il peut néanmoins se saisir par la voie du recours de droit public s'il y a eu arbitraire, erreur de fait ou inadvertance manifestes.

- Droit positif français. L’appréciation des preuves par les jurés et les magistrats relève en principe de leur seule intime conviction, comme le précisent l’art. 353 C.pr.pén. pour la cour d’assises et l’art. 427 du même Code pour le tribunal correctionnel.

Signe Législation Art. 353 C.pr.pén. Cette instruction doit être affichée dans la salle des délibérations: La loi ne demande pas compte aux juges des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve ; elle leur prescrit de s’interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l’accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : "Avez-vous une intime conviction ?".

Signe Jurisprudence Cass.crim. 30 novembre 1977 (Bull.crim. n° 378 p.1006) : La déclaration de l’intime conviction des juges relève de leur seule conscience ; l’appréciation qu’ils font de la valeur des éléments de preuve soumis à la libre discussion des parties et de leur force probante échappe au contrôle de la Cour de cassation.

- Limites. Un tribunal doit toutefois s’appuyer sur des preuves, et il ne peut prendre en considération que des preuves légalement obtenues et soumises à débat contradictoire.

Signe Exemple concret Sous la Révolution, certains ont conclu de l’abandon du système des preuves légales à l’avènement d’un règne d’illumination par la déesse Raison. Un ancien juré du Tribunal révolutionnaire, Fauvety, écrivit à un ami : « Ce collègue ne vaut rien, absolument rien ; il est quelquefois d’avis de sauver des prêtres contre-révolutionnaire ; il lui faut des preuves, comme aux tribunaux ordinaires de l’Ancien régime ». Cette conception n’est évidemment pas fondée.

Signe Philosophie Gousset (Théologie morale) : Un juge est tenu d’absoudre l’accusé qu’il croit coupable, mais dont la culpabilité n’est point juridiquement établie. Un accusé, quelque coupable qu’il soit, a droit de n’être pas condamné arbitrairement.

Signe Droit comparé Cass belge 12 juin 1911 (Pas. 1911 I 331) : Le juge ne peut puiser les éléments de sa conviction que dans les faits qui ont été soumis aux débats.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 15 avril 1926 (Bull.crim. n° 113 p.209) : Le tribunal ne peut baser sa décision ni sur des éléments de preuve et d’appréciation recueillis en dehors de l’audience, ni sur des documents ou renseignements dont le juge aurait une connaissance personnelle et qui n’auraient pas été soumis à un débat contradictoire.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 6 novembre 1991 (Gaz.Pal. 1992 I Chr.crim. 107) : Un procès-verbal n’a de valeur probante que s’il est régulier en la forme ; il suit de là qu’aucun renseignement ne saurait être tiré d’un procès-verbal annulé.

INTIMIDATION

Cf. Amendement*, Clémence*, Contrainte*, Crainte*, Expiation*, Liberté*, Libre arbitre*, Menaces*, Peine*, Prévention*, Rétribution*, Terreur*, Vinculer*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-7, p.358

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° II-106, p.315

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.) n°III-123, p.464 note 1

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-I-227, p.133 / n° II-I-124, p.363/364 / n° II-I-206, p.435

- Notion. Le verbe « intimider » vient du latin « timere », craindre. L’acte d’intimidation consiste donc en un acte de nature à inspirer la crainte à une ou plusieurs personnes, et visant à obtenir ce résultat.

Signe Dictionnaire Littré (Dictionnaire). Intimidation, système politique qui emploie des moyens de rigueur.

Signe Dictionnaire Grand Robert. Intimider : remplir quelqu’un de peur, d’effroi, de crainte, en imposant sa force, son autorité, sa volonté.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 11 juin 1937 (Gaz.Pal. 1937 II 496): Dans sa signification usuelle, l’expression « menaces », comprend tout acte d’intimidation inspirant la crainte d’un mal.

Signe Jurisprudence Paris 31 mai 2000 (D. 2000 IR 200) : Il se développe depuis quelques années une délinquance utilisant certaines races de chiens particulièrement impressionnants ou dangereux comme moyen d’intimidation ou d’action.

Signe Exemple concret Joly (Le crime, étude sociale) : On a défini la Camorra napolitaine « Une association de gens du peuple corrompus et violents rançonnant par intimidation les vicieux et les lâches »… Tout pays a sa Camorra, sous une forme ou sous une autre.

- L’acte d’intimidation, infraction pénale. Les actes d’intimidation se situent à trois niveaux : les premiers visent de simples particuliers, et tombent alors sous le coup des textes de droit commun incriminant les Menaces*, Violences* et Voies de fait*, les deuxièmes sont dirigés contre tel ou tel agent de l’État*, les troisièmes concernent l’ensemble de la Société*. Les deux derniers donnent lieu à des incriminations spécifiques.

Cf. Fonctionnaire*, Menaces*, Terrorisme*, Voies de fait*, Violences*.

Signe Droit comparé Code criminel du Canada. Art. 76 - Est coupable d’un acte criminel et passible de l’emprisonnement à perpétuité quiconque, illégalement, par violence ou menace de violence ou par tout autre mode d’intimidation, s’empare d’un aéronef ou en exerce le contrôle avec l’intention … de séquestrer contre son gré toute personne se trouvant à bord de l’aéronef.

Les actes d’intimidation commis contre des personnes exerçant une fonction publique sont incriminés par l’art. 433-3 C.pén. (ancien art. 179). Ce texte vise les menaces, violences et voies de fait, et plus généralement tout acte de nature à priver la personne visée de la liberté d’action.

Signe Doctrine Vitu (Juris-classeur pénal, art. 433-3) : On englobera sous la dénomination d’acte d’intimidation toute attitude menaçante ou inquiétante, suffisamment explicite et grave pour enlever au fonctionnaire qui en est victime sa liberté de décision.

Signe Droit comparé Code pénal d’Andorre. Art. 109- : Quiconque, par violence ou intimidation, aura provoqué de la part d’un témoin ou d’un expert une déposition ou un rapport contraire à la vérité dans une cause civile ou pénale, sera puni d’un emprisonnement d’un maximum de cinq ans.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 18 mai 1999 (Gaz.Pal. 1999 II Chr.crim. 124) : Même en l’absence de violences, constitue un acte d’intimidation au sens de l’art. 433-3 C.pén., l’action concertée de plusieurs personnes, de nature à empêcher un officier ministériel d’accomplir sans le concours de la force publique, un acte de sa fonction.

Les actes d’intimidation font également partie de la panoplie du terroriste. C’est pourquoi l’art. 421-1 C.pén. définit l’acte de Terrorisme* comme une infraction de droit commun ayant pour particularité de chercher à troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur.

Signe Doctrine Gonnard (Juris-classeur pénal art. 421-1) : Le législateur a entendu ici frapper un dol spécial : la volonté d’intimider ou de terroriser la population ou une partie de celle-ci en troublant gravement l’ordre public.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 24 septembre 1987 (Tables Gazette du Palais) : L’art. 706-16 C.pr.pén. n’institue pas de nouvelles incriminations mais désigne les infractions qui, lorsqu’il est constaté qu’elles sont en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, seront poursuivies, instruites et jugées selon les dispositions du titre XV dudit Code.

- L’intimidation, l’un des buts de la peine. Les criminalistes admettent que la peine infligée par la société peut, selon les cas, viser plusieurs buts : élimination, intimidation, expiation et reclassement social. Le but d’intimidation est celui qui permet d’assurer la prévention générale et individuelle.

Cf. Peine*, Publicité de la peine*.

Signe Renvoi rubrique Voir : J. J. Haus, Les Théories pénales des origines au milieu du XIXème siècle (extraits de "Principes généraux du droit pénal")

Signe Renvoi rubrique Voir : A. Prins, Développement historique du droit pénal

Signe Renvoi rubrique Voir : W. Jeandidier, Les Théories pénales du code de 1810 à nos jours (extraits de "Droit pénal général")

Signe Renvoi rubrique Voir : G. Levasseur - Politique criminelle : Peines ou mesures de sûreté ?

Signe Philosophie Jolivet (Traité de philosophie - morale) : Avant la faute, la société procède par intimidation. Dans le Code pénal, à chaque délit correspond un châtiment, d'est-à-dire une souffrance. Comme tout homme, fût-il dévoyé, a d'instinct horreur de la souffrance, la crainte d'avoir à la supporter, s'il se laisse entraîner, a quelque chance de l'écarter de la mauvaise voie.

Signe Philosophie De Neufbourg (La loi naturelle) : Les peines moralisantes sont de beaucoup les meilleures, quand leur effet d’intimidation n’en est pas affaibli.

Signe Philosophie Machiavel (Le Prince- XVII) : Tout Prince doit grandement souhaiter d'être estimé pitoyable et non pas cruel ; néanmoins il droit bien prendre garde de mal appliquer cette miséricorde. César Borgia fut estimé cruel : toutefois sa cruauté a réformé toute la Romagne, l'a unie et réduite à la paix et fidélité. Ce que, bien considéré, il se trouvera avoir été beaucoup plus pitoyable que le peuple florentin qui, pour éviter le nom de cruauté, laissa détruire Pistoëe. Le Prince, donc, ne doit pas se soucier d'avoir le mauvais renom de cruauté pour tenir tous ses sujets en union et obéissance ; car faisant bien peu d'exemples, il sera plus pitoyable que ceux qui, par être trop miséricordieux, laissent se poursuivre les désordres, desquels naissent meurtres et rapines ; car ceci nuit à tous les citoyens ensemble, mais les exécutions qui viennent du Prince ne nuisent qu'à un particulier.

Signe Philosophie Ferri (Sociologie criminelle) : La cupidité, la sexualité, l’instinct destructeur veulent être satisfaits: mais l’intelligence montre à l’homme que le résultat de ces satisfactions sera de le frapper dans son patrimoine, dans sa liberté, dans sa vie, c’est-à-dire dans les instincts mêmes qu’il est prêt à assouvir et alors il arrive, pourvu bien entendu que l’intimidation soit suffisante, que les mauvaises tendances poussées dans un sens contraires font équilibre à soi-même et se trouvent comme neutralisées.

Signe Doctrine Charondas le Caron (Code Henri III, Paris 1609) : La sévérité des peines retient souvent les audacieux en crainte, et empêche les méchants d’exécuter leurs iniques desseins ; et le rasement des maisons sert de mémoire de la punition exemplaire : comme le rasement de la maison de Châtel devant le Palais de justice à Paris. [ce débauché avait attenté à la vie de Henri IV)

Signe Doctrine Chauveau Hélie (Théorie du Code pénal) : Bentham, entraîné par cette idée que la pensée dominante des peines est l’utilité générale, enseigne que leur but principal est la prévention des délits ou l’intimidation.

Signe Doctrine Proal (Le crime et la peine) : Il ne faut pas enlever à la peine le caractère d’intimidation, qui est un des éléments qu’elle doit avoir.

Signe Droit comparé Code pénal cambodgien (éd. Leclère) : Art 29 - Tout criminel condamné à mort sera exécuté dans l’endroit où il a commis son crime, et sa tête y sera exposée sur un pieu. Cependant, s’il a commis son crime dans un endroit désert où il n’y a pas d’habitants et où les gens ne passent pas, il sera conduit dans un endroit voisin de sa demeure ou du village qu’il habite pour être exécuté, afin que le public puisse voir et graver dans sa mémoire son supplice.

Mais le but d'intimidation générale ne saurait être placé au premier rang, car il conduirait alors à des conséquences inacceptables.

Signe Philosophie Franck (Philosophie du droit pénal) : Le système de l’intimidation... supprime la différence qui existe entre l’innocent et le coupable : pourvu que la peine prononcée par la loi soit infligée à un homme qui a contre lui les apparences du crime, le vœu de la loi est accompli, l’effet de terreur qu’on s’est proposé sera produit. La question d’innocence ou de culpabilité sera indifférente ; il sera plus utile même de condamner que d’absoudre. N’est-ce pas la société qu’on veut défendre ? Elle sera mieux défendue par ces excès que par les scrupules et les lenteurs ordinaires de la justice. C’est la société tout entière dont la défense vous est confiée ; vous manqueriez à votre tâche si vous attachiez trop d’importance à la défense des individus.

INTIMITÉ

Cf. Domicile*, Droits de l’homme*, Espionnage de la vie privée*, Fichiers informatiques*, For Interne*, Image*, Lieu public*, Vie privée*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° II-2, p.243 / II-202 et s., p.295 et s.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », sur l'intimité des mineurs, n° 427, p.274

Signe renvoi article Voir : Tableau des incriminations protégeant la vie privée  (selon la science criminelle)

Signe Renvoi article Voir : Tableau des incriminations protégeant la vie privée  (en droit positif français)

L’intimité est ce qui se situe au plus profond de l’âme, du cœur et de la conscience humaine. Nul individu, nulle autorité publique, ne doit, ni chercher à en percer le secret, ni tenter de pénétrer le for interne d’autrui.
L’inviolabilité de la « sphère d’intimité » constitue l’un des droits fondamentaux de la personne humaine. On a toujours protégé le domicile contre toute intrusion physique ; depuis quelques années on protège aussi la vie privée contre toute atteinte par captation de l’image ou du son.

Signe Philosophie Code de droit canonique. Can. 220 : Il n’est permis à personne de porter atteinte d’une manière illégitime à la bonne réputation d’autrui, ni de violer le droit de quiconque à préserver son intimité.

Signe Doctrine Malaurie (Droit civil) : Tout individu a droit à une « sphère d’intimité », à un « jardin secret », à une « arrière-boutique » qu’il peut faire protéger : chacun a droit à ce qu’on le laisse tranquille dans sa vie privée.

Signe Droit comparé Code pénal du Pérou. Motifs : La protection du droit à l’intimité a reçu une reconnaissance à caractère universel depuis que la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme affirme que « personne ne fera l’objet d’ingérences arbitraires dans sa vie privée, son domicile ou sa correspondance ».

Signe Droit comparé Code pénal d’Andorre. Art. 219 : Ceux qui auront porté atteinte à l’intimité d’une personne, sans son consentement, au moyen d’appareils d’écoute ou d’enregistrements d’images, graphiques ou acoustiques, ou par interception de communications, seront punis d’un emprisonnement d’une durée maximale de 4 ans.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 15 février 2000 (Bull.crim. n° 68 p.184) : Seul celui qui en est personnellement victime a qualité pour invoquer une violation des règles de procédure portant atteinte à l’intimité de la vie privée.

Signe Jurisprudence TGI Paris (1re Ch.) 29 janvier 1986 (D. 1987 somm. 136) : Si la presse est fondée à relater un événement participant de l’actualité, elle ne saurait s’immiscer dans la sphère d’intimité de la vie privée dont seul l’intéressé est en droit de fixer les limites.

INTOLÉRANCE -  Voir : Tolérance*.

INTRUSION (dans des locaux publics)

Cf. Violation de domicile*.

Le Code pénal incrimine, d'une part l'intrusion dans des établissements scolaires (art. R.645-12), d'autre part l'intrusion dans des lieux historiques ou culturels (art. R.645-13).

INVENTEUR

Cf. Contrefaçon*, Trésor*, Vol*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° IV-107, p.553

Dérivé du verbe latin « invenire » (trouver), le mot inventeur désigne notamment, en droit, celui qui découvre un trésor. L’art. 716 C.civ. lui en accorde la moitié, l’autre moitié revenant au propriétaire du fonds. S’il s’empare de l’ensemble des biens découverts, il commet un vol au détriment de ce dernier.

Signe Doctrine Lambert (Traité de droit pénal spécial) : Ne peut garder la totalité du trésor que celui qui l'a trouvé sur son propre fonds ; s'il l'a découvert sur le fonds d'un tiers et l'a accaparé, alors il a commis un vol portant sur la partie du trésor qui appartenait au propriétaire du terrain.

Signe Droit comparé Code pénal du Luxembourg. Art. 508 : Seront punis d'un emprisonnement de huit jours à deux ans et d'une amende ... Ceux qui, ayant découvert un trésor, se le seront approprié au préjudice des personnes auxquelles la loi en attribue une partie.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 20 novembre 1990 (Bull.crim. n°395 p.995) : L’inventeur d’un trésor s’entend de celui qui, par le seul effet du hasard, met le trésor à découvert, serait-il au service d’une entreprise, dès lors que les travaux ayant conduits à la découverte n’ont pas été effectués à cette fin.

L'inventeur est aussi celui qui crée une œuvre nouvelle. Cette œuvre est protégée par l'incrimination de contrefaçon, surtout si elle était brevetable et à effectivement donné lieu à la prise d'un brevet.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 7 octobre 1998  (Gaz.Pal 1999 I Chr.crim. 22 ) : Les droits des auteurs sur une œuvre de l'esprit ne sont protégés au titre de la propriété littéraire et artistique qu'à la condition de présenter un caractère original.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 21 juin 2000  (D. 2001 somm. 2552) : Une cour d'appel énonce à bon droit que ... l'originalité peut résulter d'une combinaison particulière d'éléments déjà connus, de détails nouveaux.

Signe Jurisprudence TGI Meaux .9 juin 1983  (Ann. propr. ind., 1985, p. 32) : L'emploi en France par l'ayant cause de l'inventeur américain de la dénomination Airless pour désigner des pistolets de peinture constitue une contrefaçon de la marque enregistrée Airless.

INVIOLABILITÉ

Cf. Action publique*, Chef de l'État*, Immunité*, Ministre*, Parlementaires*.

- Notion. En première approche on peut dire que l'inviolabilité d'un justiciable se situe un niveau au dessous de l'immunité. Alors que cette dernière agit sur le fond du droit en interdisant d'imputer telle infraction à la personne qui en bénéficie, l'inviolabilité ne produit effet que sur le plan procédural : elle interdit provisoirement au ministère public de citer devant un tribunal répressif celui qui est concerné (voir l'article 26 al.2 de la Constitution relatif aux parlementaires).

Signe Doctrine Joseph-Barthélemy (Précis de droit constitutionnel) : L'objet de l'inviolabilité est de protéger le parlementaire contre des poursuites répressives du Gouvernement ou de particuliers motivées par des infractions étrangères à la fonction et qui seraient inspirées par la passion politique.

Signe Doctrine Pradel (Procédure pénale) : Les membres des Assemblées (Assemblée nationale et Sénat) bénéficient d'un privilège dénommé "inviolabilité parlementaire" ... En vertu de cette inviolabilité, aucun d'entre eux ne peut, pendant la durée des sessions de l'assemblée à laquelle il appartient, être poursuivi ou détenu pour crime ou délit qu'avec l'autorisation de cette assemblée.

Signe Doctrine Desportes et Le Gunehec (Le nouveau droit pénal) : L'inviolabilité parlementaire est une rège de procédure qui ne limite en rien la responsabilité pénale des députés et sénateurs... elle interdit d'arrêter ou de placer en détention provisoire ou sous contrôle judiciaire les parlementaires (sauf crime flagrant) sans l'autorisation du bureau de l'Assemblée nationale ou du Sénat.

- Droit international. Le droit des gens admet traditionnellement que les locaux d'une ambassade bénéficient d'un privilège d'inviolabilité qui interdit aux autorités locales de justice et de police de pénétrer dans ces lieux. Ce privilège s'étend notamment aux véhicules du Corps Diplomatique, et plus particulièrement à tout bien meuble couvert par l'appellation "valise diplomatique".

Signe Doctrine Lombois (Droit pénal international) : Immunités diplomatiques. Les immunités personnelles couvrent les agents diplomatiques proprement dits... La plus importante est l'immunité juridictionnelle qui soustrait ses bénéficiaires à toute poursuite pénale devant les tribunaux de l'État d'accueil.
L'inviolabilité de certains biens les met à l'abri de toute saisie, perquisition, confiscation... Sont ainsi protégés les locaux de la mission et les biens qui s'y trouvent, ses moyens de transport, ses archives et documents, la valise diplomatique
.

IRRECEVABILITÉ

Cf. Action civile*, Fin de non-recevoir*, Irrelevant*, Turpitude*.

Une action (une exception, une requête, une preuve…) est dite irrecevable lorsque l’une de ses conditions d’exercice fait défaut.
- Un prévenu peut ainsi soulever l’irrecevabilité d’une constitution de partie civile en établissant que l’infraction qui lui est reprochée concerne uniquement le fonctionnement de l’État, et ne saurait donc avoir porté atteinte à une personne privée.
- Lorsqu’une telle fin de non-recevoir est établie, le tribunal doit refuser d’en entendre plus ; il doit rejeter la requête d’emblée, sans avoir à aborder le fond. Voir : Action civile*.

Signe Doctrine Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : La recevabilité d’une action en justice englobe l’ensemble des conditions préalables qui doivent être réunies pour que le tribunal devant lequel est portée cette action, accepte de prêter l’oreille aux exigences du demandeur et examine sa prétention. Elle est le passeport nécessaire au plaideur pour voir s’ouvrir les portes du prétoire, mais ne préjuge nullement de la valeur de cette prétention au fond.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 27 mars 1968 (Gaz.Pal. 1968 II 52) : Les infractions à la loi pénale imputées à l’émetteur et au bénéficiaire d’un chèque sans provision résultant d’un concert frauduleux formé par eux, le bénéficiaire du chèque était irrecevable à se constituer partie civile en vue de poursuivre la réparation du préjudice qu’il pourrait avoir subi du fait de leurs agissements communs.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 24 mars 1999 (Gaz.Pal. 1999 I Chr.crim. 98) : L’irrecevabilité d’une constitution de partie civile peut être soulevée, même d’office, en tout état de la procédure, notamment devant la Cour d’appel.

IRRELEVANT

Cf. Irrecevabilité*.

Terme de l'Ancien droit tombé en désuétude, "irrelevant" signifie : qui n'entre pas dans telle notion, telle catégorie, telle institution. Par exemple, un simple mobile est irrelevant lors de la qualification des faits.

Signe Dictionnaire Godefroy (Lexique de l'ancien français) : Irrelevant, terme juridique : insuffisant pour provoquer un appel.

Signe Doctrine Brillon (Dictionnaire des arrêts des Parlements) :  Lorsqu'une partie forme un incident, et que le juge ordonne à l'autre d'y défendre, il ne peut plus décider le principal sans faire droit sur l'incident, quelque irrelevant qu'il paraisse.

Signe Doctrine Moriaud (L'état de nécessité) : Nous sortons ici des limites du droit : la plupart de ces actes seront juridiquement irrelevants.

Signe Droit comparé Code pénal du Luxembourg. Note sous l'art. 3 : Il est irrelevant que les actes composant les éléments constitutifs de l'escroquerie aient été perpétrés par un seul agent ou plusieurs.

Signe Jurisprudence Cour justice Communautés européennes 13 février 1979 (Gaz.Pal. 1980 I somm. 108) : L'octroi ou non d'un rabais est, en fin de compte, irrelevant, puisque aucun des contrats ne contient des engagements portant sur des quantités déterminées.

Ce terme a été conservé en droit anglo-saxon et dans les droits hispaniques, avec le sens de : hors de propos, non pertinent.

Signe Droit comparé Australie (Modèle de Code pénal) : Le présent Code pourra servir de modèle pour remplacer les lois réprimant les délits et les crimes... Ceci ne signifie pas que toutes les lois précédentes seront irrelevantes pour l'interprétation du présent Code.

Signe Droit comparé Code pénal de l'Equateur (projet de réforme) : Quant aux délits de traite des êtres humains, le consentement de l'intéressé sera irrelevant.

ITÉRATIF DÉFAUT

Cf. Défaut*, Opposition*.

On suppose qu'une personne ne comparaît pas devant la juridiction de jugement, alors qu'elle a été régulièrement citée à comparaître ; le tribunal la condamne alors par défaut. Cette personne peut faire opposition ; ce qui a pour conséquence de suspendre les effets de la condamnation. Lorsque, suite à cette opposition, une nouvelle date d'audience lui ayant été régulièrement notifiée, l'intéressé se présente devant ses juges, ceux-ci reprenne l'ensemble de l'affaire et peuvent statuer en toute liberté. Mais si le condamné fait à nouveau défaut, le tribunal déclare l'opposition non avenue.
L'article 494 C.pr.pén. fixe le détail de la procédure, qui a été aménagée par deux lois de 1972 et 1985 dans l'intérêt de la personne poursuivie. Un article 494-1 a, dans le même esprit, étendu les pouvoirs du tribunal saisi après opposition.

Signe Doctrine Larguier (Procédure pénale) : L'opposition entraîne notification ou citation. Si l'opposant ne comparaît pas à la date fixée par notification verbale, ou s'il y a nouvelle citation à personne (itératif défaut), l'opposition est anéantie ("opposition sur opposition ne vaut") ; il y a débouté d'opposition qui rend sa valeur à la première décision : le condamné peut seulement utiliser appel et pourvoi en cassation...

Signe Jurisprudence Cass.crim. 23 décembre 1986 (Bull.crim. n° 390 p.1025) : Selon l'art. 494 C. pr. pén. dans sa rédaction résultant de la loi du 30 décembre 1985, l'opposition est non avenue si l'opposant ne comparaît pas à la date qui lui est fixée soit par la notification à lui faite verbalement et constatée par procès-verbal au moment où l'opposition a été formée, soit par une nouvelle citation délivrée à la personne de l'intéressé conformément aux art. 550 et s. du même Code. Aucune date de comparution n'ayant été fixée à l'intéressé lorsque son opposition a été recueillie par procès-verbal et la citation, délivrée en mairie, n'ayant pas été remise à sa personne, encourt la cassation l'arrêt qui a statué par itératif défaut.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 26 mars 2008 (n° 07-81.960, Bull.crim. n° 75 p.358) : Selon l’art. 494 C.pr.pén., pour qu’une juridiction correctionnelle puisse statuer par itératif défaut à l’égard d’un opposant, il est nécessaire que celui-ci ait été informé de la date d’audience, soit par la notification à lui faite verbalement et constatée par procès-verbal au moment où l’opposition a été formée, soit par une nouvelle citation délivrée à sa personne. Encourt dès lors la cassation l’arrêt d’une cour d’appel qui statue par itératif défaut à l’égard d’une prévenue ayant fait opposition à un arrêt de condamnation rendu par défaut, et qui ne comparaît pas, alors que la date d’audience ne lui a pas été notifiée par procès-verbal et qu’elle a été citée à parquet général.

ITER CRIMINIS

Cf. Cheminement criminel*, Conscience (Voix de la)*, Crime parfait*, Délibération*, Passage à l’acte*, Processus criminel*, Velléité*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-133, p.189 / n° I-242, p.253

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-332, p.96 / n° I-I-I-337, p.101

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-330, p.182

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 5, p.8 (note 7)

Signe Renvoi rubrique Voir p.ex. : Le coup d'Etat du 18 Brumaire an VIII

Signe Renvoi rubrique Pour un exemple : L'assassinat de Raspoutine

- Notion. L’iter criminis, ou Cheminement criminel*, ou encore Processus criminel*, est constitué des différentes étapes que franchit un délinquant dans la commission d’une infraction de nature subjective. Ces phases successives sont : la Pensée* fugace de commettre un délit, la Délibération* intérieure qui s’ensuit, la Résolution* de mettre ce projet en œuvre, l’extériorisation de la décision, l’accomplissement des Actes préparatoires* à sa réalisation, le passage au Commencement d’exécution*, et enfin la perpétration de l’acte dommageable lui-même. Si cet acte atteint son but on parle de Délit consommé (ou de Crime parfait).

Signe Doctrine Vitu (Traité de droit pénal spécial) : Le droit français distingue d'ordinaire, dans l'iter criminis, quatre phases auxquelles il attache des conséquences pénales variables : la résolution criminelle et les actes préparatoires, qui sont impunissables, la tentative et l'infraction consommée qu'on assimile l'une à l'autre pour la répression.

Signe Droit comparé Constant (Traité élémentaire de droit pénal) : Le mécanisme de la pensée criminelle, "iter criminis" se décompose en plusieurs phases : conception, préparation, exécution (Cogitare, agere, perficere).
Au premier stade, il n'y a pas d'infraction puisqu'il n'existe pas d'élément matériel... Au second stade, l'auteur rassemble les moyens nécessaires pour la réalisation de son intention criminelle, et il s'efforce de les mettre en oeuvre. Les actes commis au cours de cette phase de préparation ne sont pas punissables, à moins qu'ils ne constituent par eux-mêmes une infraction distincte... Le troisième stade est constitué par l'exécution du dessein criminel. Mais cette exécution, une fois commencée, peut ne pas aboutir à la consommation de l'acte envisagé par suite de circonstances indépendantes de la volonté de l'auteur. On se trouve alors en présence d'une tentative. Celle-ci se caractérise donc par un "commencement d'exécution"
.

Signe Droit comparé Carrara (Cours de droit criminel) : Pour bien calculer le degré d'imputation que mérite la complicité, il est nécessaire de distinguer dans l'élément matériel de l'action criminelle trois moments divers : la préparation, l'exécution et la consommation...

- Morale. Les moralistes, St Thomas d'Aquin notamment, ont soigneusement analysé les diverses phases par lesquelles passe l'auteur d'une faute intentionnelle.

Signe Philosophie Ferraz (Philosophie du devoir) : L'acte une fois conçu involontairement, j'en saisis aussi involontairement les différentes faces et, suivant qu'il m'apparaît sous un jour plus ou moins favorable, j'incline à le faire ou à ne pas le faire. C'est la délibération... Enfin, les avantages et les inconvénients de l'acte une fois bien connus, je juge qu'il faut l'exécuter ou m'en abstenir. La délibération une fois terminée, qu'est-ce que je fais ? Je me décide, je me détermine, je me résous, et c'est dans ce phénomène que ma liberté se montre avec une pleine clarté, avec une irrésistible évidence.

Signe Philosophie Jolivet (Traité de philosophie - morale) : La prudence implique à la fois la connaissance des principes généraux de la moralité et celle des contingences particulières de l'action. Ses actes propres, au sein du processus de l'acte volontaire, sont la délibération ou conseil, le jugement pratique et (à titre principal) la décision. [cette définition est plus large que celle retenue par le droit criminel, car elle vise aussi bien les actes volontaires que les actes intentionnels]

Signe Philosophie Buddhist monastic code, par Thanissaro Bhikkhu (2009) : Les agissements matériels servent de base à chaque incrimination ; il sont aussi retenus pour déterminer le niveau de criminalité dans le cas où un moine a prévu de violer une règle mais n'accomplit pas l'action. Par exemple, dans le cas du vol, on dit que l'action commence quand, agissant avec l'intention de voler, un moine... commence à marcher vers l'objet. À chacun des actes préliminaires - littéralement, à chaque étape - il encourt une nouvelle sanction. Au premier regard, ceci peut sembler rigoureux, mais quand on regarde le but auquel tend l'action, ce système d'assigner des pénalités échelonnées est approprié. Chaque acte délibérément accompli vers le résultat renforce l'intention criminelle ; la connaissance par le moine que chacune de ces étapes appelle une sanction plus grave peut aider à le décourager d'exécuter ses plans originaux.

- Science criminelle. Il faut distinguer ici entre le point de vue législatif et le point de vue judiciaire.

Signe Renvoi rubrique Voir : Code Annamite de Gia Long, La préméditation collective ou individuelle en matière de meurtre

Signe Renvoi rubrique Voir : R. Merle et A. Vitu, Le passage à l'acte.

Signe Doctrine Faustin Hélie (Traité de l'instruction criminelle) : Un crime n’est pas un acte matériel dont il suffit de mesurer les traces et le résultat, c’est un fait moral dont il faut rechercher la cause et suivre la marche dans l’âme où il est né.

Point de vue législatif. Afin d’assurer la sécurité publique, un législateur autoritaire sanctionne jusqu’à la simple pensée criminelle. Par respect du principe de la responsabilité subjective, un droit libéral s’en tient aux seuls agissements révélant une résolution criminelle clairement et définitivement arrêtée. Cependant, tous les codes incriminent, sous le nom de Complot*, la simple résolution manifeste d’agir contre la sûreté de la Nation ou de l’État.

Signe Philosophie Bacon (Aphorismes) : Lorsqu’il s’agit de grands crimes, de grands attentats, il faut punir les actes commencés et les actes moyens, quoique 1’effet consommé ne s’ensuive pas.

Signe Histoire Loi du 4 décembre 1792 : La Convention nationale décrète que quiconque proposerait ou tenterait d’établir en France la royauté, ou tout autre pouvoir attentatoire à la souveraineté du peuple, sous quelque dénomination que ce soit, sera puni de mort.

Signe Droit comparé Code pénal suisse (état en 2003). Son art. 276 incrimine, en matière militaire, jusqu’à l’instigation au complot : Encourt la réclusion ou l’emprisonnement le délinquant qui a provoqué ou incité à la mutinerie ou au complot.

Point de vue judiciaire. Afin d’éviter une répression conjecturale et hasardeuse, les tribunaux répressifs ne sont ordinairement autorisés à réprimer une activité criminelle qui n’a pas abouti, au titre de la tentative, que dans le cas où l’agent est « passé à l’acte », c’est-à-dire a accompli un commencement d’exécution.

Signe Doctrine Garçon (Code pénal annoté) : La loi exige, pour que la tentative soit punissable… un commencement d’exécution. Il résulte de là que la pensée ou même la résolution de commettre un crime ne constituent pas une tentative punissable. Il est certain encore que les actes préparatoires ne suffisent pas non plus.

I. V. G. (Interruption Volontaire de Grossesse) -  Voir : Avortement*.

IVRESSE

Cf. Alcoolisme*, Chambre de dégrisement*, Conduite automobile*, Dignité de la personne humaine*, État d'ébriété*, État d'ivresse*, Intempérance*, Ivresse publique*, Pari*, Stupéfiants*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal », n° I-I-I-350, p.117 / n° I-II-II-214, p.245-246 / n° II-309, p.371

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-302 et s., p.221 et s.

Signe Renvoi rubrique Voir : Préceptes fondamentaux du bouddhisme

Signe Renvoi rubrique Voir : Dr J. Maxwell, Le criminel d'occasion

Signe Renvoi rubrique Voir : Ortolan, La démence et la responsabilité pénale, suivant la science rationnelle

- Notion. L’ivresse résulte d'un état d’amoindrissement de la conscience morale et des capacités physiques, dû à l’ingestion d’alcool ou de stupéfiants. A côté de l’ivresse due à l’intempérance, il existe toutefois une ivresse accidentelle et une ivresse maladive.

Signe Philosophie Pontas (Dictionnaire de cas de conscience) : On appelle ivre une personne qui, ayant bu par excès du vin ou une autre semblable liqueur, a perdu l’usage de la raison ; et l’on donne le nom d’ivrogne à celui qui est sujet à boire par excès.

Signe Doctrine Carrara (Cours de droit criminel - éd. française) distinguait quatre sortes d'ivresses :
1°/ L'ivresse accidentelle, quand la personne s'est trouvée prise, sans avoir bu avec excès, soit part suite d'une disposition maladive, soit parce que l'on avait méchamment contrefait la liqueur [cas de la sangria] ;
2°/ L'ivresse fautive, quand on a bu avec excès jusqu'à s'enivrer, mais sans prévoir que l'on s'enivrerait ;
3°/ L'ivresse volontaire, quand on s'est mis à boire avec l'intention arrêtée de se mettre en état d'ivresse, mais sans prévoir que l'on commettrait un délit ;
4° / L'ivresse recherchée ; c'est celle où le coupable se met, après avoir prémédité un délit, afin de se donner plus de courage pour le commettre, ou d'étouffer les hésitations de sa conscience, ou de se ménager une excuse.

Signe Droit comparé Cass. 2e belge 18 janvier 1954 (Pas. 1954 I 429) : Une personne ivre est celle qui se trouve sous l'influence de la boisson au point de n'avoir plus le contrôle permanent de ses actes, sans avoir nécessairement perdu conscience de ceux-ci.

- Règle morale. L'ivresse est condamnée par la morale, du fait qu’elle fait perdre toute dignité humaine à celui qui y succombe. À Sparte, on faisait boire des esclaves (ilotes) jusqu'à ivresse complète afin de montrer aux adolescents les méfaits de l’alcool.

Signe Philosophie Confucius (Lun Yu - Entretiens) : Les liqueurs fermentées servent à exciter la joie dans les réunions. À cet égard Confucius ne se prescrivait pas de règle fixe, seulement il évitait l’ivresse et n’allait pas jusqu’à avoir la raison troublée.

Signe Philosophie St Thomas d'Aquin (Somme théologique) : Les boissons enivrantes ont un l'effet spécial d'empêcher l'usage de la raison, en tant qu'elles troublent le cerveau par leurs fumées... La sobriété est particulièrement exigible chez certaines personnes, parce qu'elle leur est spécialement nécessaire en raison des occupations qui leur sont propres. 

Signe Philosophie Aubert (Abrégé de morale catholique) : L’ivresse, qui provoque une perte complète de l’usage de la raison devient un piège mortel contre la dignité humaine.

Signe Philosophie Pierre et Martin (Cours de morale) : L’ivresse nous met dans un état honteux et dégradant ; elles nous avilit à nos yeux et aux yeux des autres … L’alcoolisme est pire encore ; il amène, non plus seulement le ridicule et le scandale, mais la ruine, la maladie et la mort.

Signe Philosophie Bouillier (Questions de morale) : Celui qui, la raison égarée par le vin ou l'alcool, frappe, incendie, tue, pendant un accès d'ivresse, ne sait plus ce qu'il fait ; cependant est-il innocent ? Je veux bien qu'il ne soit pas coupable au même degré que le voleur et l'assassin qui ont agi avec préméditation et raison, mais il est responsable de l'état où il s'est mis en connaissance de cause et aussi des suites qu'il a pu prévoir. Il s'est ravalé volontairement au niveau de la brute ; est-ce un titre à faire valoir en sa faveur ?.

Signe Philosophie Pierrot (Dictionnaire de théologie morale) : La loi de la tempérance n'oblige pas seulement à ne pas boire avec excès, elle oblige encore à ne pas donner de vin à ceux qui se livrent à l'ivresse.

Signe Philosophie Oldenberg (Bouddha, Vie et religion) : Un homme droit est celui qui se tient à l'écart de toute impureté. Parmi les diverses défenses dans lesquelles les textes sacrés décomposent cette prescription... figure celle de ne pas boire de liqueur enivrante.

- Science criminelle. Un point ne saurait faire de doute : une personne en état d'ivresse est une personne vulnérable que le législateur doit spécialement protéger (ainsi, le fait d’avoir des rapports sexuels avec une femme en état d’ivresse manifeste constitue a priori un viol).

Signe renvoi article Voir : Tableau des incriminations luttant contre l'alcoolisme  (selon la science criminelle)

Signe Jurisprudence Cass.crim. 18 décembre 1991 (Gaz.Pal. 1991 II Chr.crim. 178) : Pour renvoyer les défendeurs devant la Cour d'assises sous l'accusation de viol, avec cette circonstance aggravante que la victime se trouvait en état de particulière vulnérabilité en raison de son ivresse, la Chambre d'accusation énonce suffisamment que les intéressés ont reconnu avoir imposé à celle-ci, inconsciente, un rapport sexuel.

Répression du fait de s'enivrer. Dans les pays chauds, le législateur agit sagement en interdisant de manière générale la consommation d'alcool. Dans les pays tempérés, il doit raisonnablement s'en tenir à des mesures ponctuelles, notamment sanctionner l'ivresse publique devenue cause de désordre. Dans les pays froids, il semble que sa marge de manœuvre soit encore plus réduite.

Signe Doctrine Code musulman de Khalil (Traduction Seignette) : Tout musulman majeur, responsable de ses actes, qui volontairement, sans excuse, ni nécessité, ni erreur sur la nature de la substance, boit une liqueur enivrante, même en quantité insuffisante pour s'enivrer, se rend coupable du crime de boisson.

Signe Droit comparé Code pénal d'Andorre (en 1995). Art. 350 : Constituent des contraventions pénales : 1- L'ivresse publique causant scandale...

Délits accessoires. Le législateur peut s'efforcer de lutter contre l'ivresse en incriminant notamment les actes par lesquels un tiers incite une personne à boire jusqu'à l'ivresse, ou du moins y contribue.

Signe Droit comparé Code pénal italien de 1930. Art. 350 : Quiconque fournit des boissons alcooliques à une personne en état d'ivresse manifeste est puni d'un emprisonnement de trois mois à un an.

Signe Droit comparé Code pénal de Monaco. Art. 216 : Sera puni d'un emprisonnement de six jours à un mois et d'une  amende ... ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque aura fait boire jusqu'à l'ivresse un mineur de 18 ans ; en cas de récidive, le peine sera de un mois à six mois d'emprisonnement.

Responsabilité pénale d'une personne ivre. L’entendue de la responsabilité pénale d’une personne ayant agi en état d’ivresse est depuis toujours discutée sur le plan doctrinal. Sauf dans le cas de l'ivresse intentionnelle, elle dépend semble-t-il du cas d’espèce et relève par suite de l’appréciation souveraine des juges du fond.

Signe Histoire Pittacus, roi de Mytilène à Lesbos, avait édicté une loi selon laquelle celui qui commettrait un crime étant en état d'ivresse recevrait une double punition : l'une pour le crime, l'autre pour l'ivresse qui l'a occasionnée.

Signe Histoire Code brahmanique des Gentoux. Si une personne, dans un état d'ivresse, parle injurieusement de quelqu'un, le magistrat ne le traduira pas devant lui.

Signe Histoire Denisart (Collection de jurisprudence, 1768) : Un homme ne peut pas excuser une mauvaise action, sous prétexte qu'il l'a commise étant ivre. Son seul état est déjà un crime ; il a consenti, ou du moins s'est exposé à perdre la raison ; c'est est assez pour le condamner.

Signe Doctrine Puech (Droit pénal général) : À supposer qu’un résultat pénal ait été provoqué par un intoxiqué, celui-ci est-il punissable ? Tout est affaire de circonstances et les juges du fond sont les mieux placés pour les apprécier. Les anciens faisaient des distinctions (ivresse imprévue, provoquée, recherchée …) ; il n’est pas sûr qu’elles soient dépourvues d’intérêt aujourd’hui.

Signe Droit comparé Code pénal soviétique de 1960. Art. 12 : La personne qui a commis une infraction en état d'ivresse n'est pas exempte de responsabilité pénale.

Signe Droit comparé Code pénal de Porto Rico. Art. 33 : L'ivresse volontaire ou l'intoxication volontaire par des drogues, substances narcotiques, stimulantes ou déprimantes, ou substances semblables, n'exempte pas de la responsabilité criminelle.

Signe Droit comparé Code pénal du Brésil (2002). Art. 28 II §1 : Est exempt de peine l'agent qui, dans un état d’ivresse complète résultant d’un cas fortuit ou de force majeure, était, au temps de l'action ou de l'omission, totalement incapable de comprendre le caractère illicite de son acte ou d’agir conformément à ce qu’il concevait.

Signe Exemple concret Exemple (Ouest-France 11 août 2006) : Deux jeunes gens de 20 et 22 ans ont été condamnés hier à quatre ans de prison, dont deux avec sursis, par le Tribunal correctionnel de Moulins (Allier). Dans la nuit de lundi à mardi, ivres, ils avaient incendié un hangar agricole à l'aide de canettes de bière remplies de whisky. Le bâtiment, entièrement détruit, abritait 450 ballots de paille ainsi que trois tracteurs.

- Droit positif français. La doctrine considère généralement qu'une personne est en faute quand elle accomplit des actes de nature à nuire à autrui, alors qu'elle se trouve de son fait en état d'ivresse.

Signe renvoi article Voir : Tableau des incriminations luttant contre l'alcoolisme  (en droit positif français)

Signe Doctrine Jeandidier (Droit pénal général) : L'absorption d'alcool ou de stupéfiants altère considérablement le discernement. Toutefois, comme l'intéressé a la plupart du temps volontairement et librement absorbé de telles substances, il est difficile de souscrire à son irresponsabilité pénale s'il vient à commettre des infractions sous l'empire de l'ivresse... En s'enivrant le futur délinquant devait prévoir qu'il s'exposait à la commission de faits délictueux en relation immédiate avec un comportement voulu.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 29 janvier 1921 (S. 1922 1 186, note Roux) arrêt Trémintin : La force majeure ne peut résulter que d’un événement indépendant de la volonté humaine et que celle-ci n’a pu ni prévoir ni conjurer.
T… a été mis en état d’arrestation, pour ivresse, dans la ville du Havre, quelques heures avant le départ du paquebot Savoie, sur lequel il était embarqué ; il a été conduit au poste de police et il y était encore détenu au moment du départ du navire.        
Les éléments légaux de la force majeure, exclusive du délit (de désertion), ne se rencontraient pas dans l’espèce ; en effet, en admettant que la détention de T… au poste de police l’ait mis dans l’impossibilité absolue de se rendre à son bord, cette détention, occasionnée par la faute qu’il avait commise en se mettant en état d’ivresse, n’a pas constitué un événement qu’il n’ait pu éviter.

La preuve de l'état d'ivresse est libre. Même si elle est parfois facilitée par un texte, tel celui incriminant la conduite d'une automobile sous l'empire d'un état alcoolique.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 12 avril 1995 (Gaz.Pal. 1995 II Chr.crim. 354) : L'art. L. 1er II C. route n'interdit nullement aux juges, en cas d'inobservation de ses dispositions, de recourir à tous autres moyens de preuve pour se prononcer d'après leur intime conviction sur la culpabilité du prévenu.

Lorsqu'une personne est en état d'ivresse au point de troubler l'ordre public, la police est autorisée à la placer en cellule de dégrisement. Le policier attendra qu'elle ait repris ses esprits pour lui faire la lecture de ses droits.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 3 avril 1995 (Gaz.Pal. 1995 II Chr.crim. 361) : Pour rejeter l'exception de nullité tirée de ce que la notification des droits ouverts à la personne placée en garde à vue est intervenue huit heures après le début de cette mesure, en violation de l'art. 63-1 C.pr.pén., l'arrêt attaqué énonce que, lors de son interpellation, l’intéressé se trouvait dans un état d'ébriété l'empêchant de comprendre la portée des droits qui auraient pu lui être notifiés et de les exercer utilement. En cet état, la Cour d'appel a justifié sa décision dès lors qu'elle a constaté l'existence d'une circonstance insurmontable qui a retardé la notification des droits, laquelle ne doit intervenir qu'à partir du moment où la personne gardée à vue est en mesure d'en comprendre la portée.

Sur le plan disciplinaire, il importe de souligner qu'une personne en état d’ivresse n’est pas autorisée à exercer certaines activités dangereuses, notamment à conduire un véhicule automobile (délit de conduite en état d’ivresse).

Cf. Conduite automobile*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° I-434 et s., p.223 et s.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 9 octobre 1984 (Gaz.Pal. 1985 I somm. 158) : Si l’art. L 1-II C. route édicte que les épreuves de dépistage ainsi que les vérifications médicales, chimiques et biologiques ou ces dernières seulement seront utilisées à l’égard de l’auteur présumé de l’infraction de conduite en état d’ivresse, ces dispositions n’interdisent nullement aux juges de recourir à tous autres moyens de preuve pour déterminer, d’après leur intime conviction, si le prévenu s’est rendu coupable de ce délit.

Encore sur le plan disciplinaire, la personne qui tient un débit de boissons commet une faute si elle sert de l'alcool à une personne déjà en état d'ivresse.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 10 janvier 2012, n° 11-84685 : Pour déclarer M. X... coupable de la contravention de vente de boissons par un débitant à une personne manifestement ivre, le jugement attaqué relève que celui-ci a reconnu que M. Y..., interpellé sur la voie publique pour ivresse manifeste, avait fréquenté son établissement, où il était arrivé déjà alcoolisé sans être, pour autant, en état d'ivresse manifeste et qu'il avait été servi jusqu'à ce qu'il le soit ;
en se déterminant par des motifs d'où il résulte que M. Y... aurait cessé d'être servi à partir du moment où il aurait été en état d'ivresse manifeste, la juridiction de proximité n'a pas justifié sa décision ; D'où il suit que la cassation est encourue
.

IVRESSE PUBLIQUE

Cf. Chambre de dégrisement*, État d'ébriété*, état d'ivresse*, Indécence*, Ivresse*, Lieu public*, Ordre public*, Voie publique*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-2, p.124

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-315, p.239

- Notion. On parle d'ivresse publique lorsqu'une personne se trouvant sous l'empire de l'alcool trouble l'ordre public, et devient ainsi cause de scandale.

Signe Doctrine Le Poittevin (Dictionnaire des parquets) : L'ivresse manifeste est celle qui produit un scandale public par sa seule vue et non par tel ou tel acte répréhensible et puni par la loi pénale.

- Science criminelle. Tenu d'assurer l'ordre public, le législateur doit sanctionner l'ivresse publique et particulièrement la récidive. L'incrimination se situe sur le terrain de la police générale. L'infraction peut être établie par tout mode de preuve, mais doit être manifeste.

Signe Doctrine Goyet (Droit pénal spécial) : Pour que la contravention  soit caractérisée, il faut, d'une part, que l'état d'ivresse soit manifeste, et, d'autre part, qu'il soit constaté dans un lieu public. La constatation de l'infraction par procès-verbal n'est pas indispensable : la poursuite est possible selon les modes ordinaires et la  preuve peut se faire par tous moyens.

Signe Droit comparé Code pénal d'Andorre. Art. 350 : Constitue une contravention pénale... L'ivresse publique causant scandale.

Signe Droit comparé Code pénal de Tunisie.  Art. 317 : Sont punis de quinze jours de prison... ceux qui se trouvent sur la voie publique ou dans tous autres lieux publics dans un état d'ivresse évidente.
Art. 52 : En matière d'ivresse publique, la première récidive entraîne la condamnation au maximum des peines prévues par l'article 317 du présent code. Les récidives ultérieures sont punies de six mois d'emprisonnement.

- Droit positif français. L'ivresse publique est sanctionnée par l’art. R.3353-1 du Code de la santé publique d'une amende prévue pour les contraventions de la première classe.
L'art. L.3341-1 du même Code (modifié par une loi du 14 avril 2011) dispose que la personne trouvée en état d'ivresse dans un lieu public doit être, par mesure de police, conduite à ses frais au poste de police le plus proche, ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu'à ce qu'elle ait retrouvé la raison.

Signe Doctrine Vitu (Traité de droit pénal spécial) : L’ivresse ne constitue une infraction punissable qu’à la double condition qu’elle soit manifeste et se produise en des lieux publics. L’ivresse manifeste est celle qui éclate aux yeux de tous... L’infraction est publique si elle se produit en des lieux publics, qu’il s’agisse de lieux publics par nature ou par destination, au sens qu’ont ces termes en matière d’outrage public à la pudeur.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 24 avril 1990 (Gaz.Pal. 1990 II Chr.crim. 633) : L’ivresse manifeste est un fait matériel qui peut être constaté à l’aide du témoignage des sens, sans qu’il soit nécessaire que le rapport qui l’atteste relate à l’appui des signes particuliers.
Le Tribunal de police a dès lors pu condamner le prévenu de ce chef en s’appuyant sur un rapport de police duquel il résulte que, s’étant rendus place Gutenberg à Strasbourg, où la présence d’une personne prise de boissons troublant l’ordre public leur avait été signalée, les agents de police judiciaire ont interpellé ce prévenu, lequel était en état d’ivresse manifeste et publique, tenait des propos incohérents et exhalait de fortes odeurs d’alcool.

Signe de fin