DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre B
(Troisième partie)
BLÂME
Cf. Admonestation*, Avertissement*, Dégradation civique*, Peine*, Réprimande*, Sanction morale* .
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-14, p.373 / III-224, p.437
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-135, p.379-380 / n° II-II-107, p.460 / n° II-II-111, p.465
Voir : Fédération Française de Football, Règlement disciplinaire
Sanction morale, le blâme consiste en une admonestation publique adressée, en principe par le juge, à l’auteur d’un délit disciplinaire ou d’une infraction de police.
Durkheim (Introduction à la morale) : Les règles de la morale usuelle s’appliquent aux actes humains, les jugent, les approuvent ou les blâment.
Muyart de Vouglans (Les lois criminelles de France) : Cette peine est une réprimande qui se fait par le juge, en la Chambre du conseil, à celui qui y est condamné lorsqu’il a commis quelque dol. Le juge qui préside lui dit : « La Cour vous blâme et vous rend infâme ; soyez plus circonspect, ou vous serez plus sévèrement puni : retirez-vous ! ».
Brillon (Dictionnaire des arrêts des Parlements de France, 1727) : Blâmer, en matière de peine et de condamnation, est infamant ; mais admonester de ne l’est pas.
Code pénal bulgare de 1951. Art. 31 : Le blâme public consiste à rendre public le jugement devant la collectivité où le condamné travaille.
Fédération française de football (Règlement disciplinaire) : Article - 2 443 : Sanctions … Le blâme.
Cons. d’État 25 avril 1986 (Gaz.Pal. 1986 II somm. 466) : C’est à bon droit que la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins, pour multiplication abusive d’acte médicaux et visites médicales injustifiées au domicile de personnes âgées, a infligé à un praticien un blâme et une interdiction d’exercice de la médecine de quatre mois.
BLANCHIMENT D’ARGENT
Cf. Association de malfaiteurs*, Complicité*, Délits pénaux (délit accessoire)*, Eurojust*, Exemption de peine*, Financement*, Recel*, Tracfin*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-250, p.266 / n° II-125 5°, p.321
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société »,
- sur le blanchiment d'argent en général, n° II-II-234, p.521
- sur les blanchiments d'argent spéciaux, voir la Table alphabétique
Voir : Tableau général des incriminations de structure pénale. (2e colonne, 3e ligne)
- Notion. On appelle blanchiment d’argent le fait de faciliter la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus d'une personne, qui ont été obtenus à la suite d’un crime ou d’un délit.
Jeandidier (Droit pénal des affaires) : Une façon de créer de l'argent propre par transformation de l'argent sale consiste dans l'opération de dite de blanchiment. Ce terme imagé est évocateur : blanchir c'est rendre blanc, c'est rendre propre.
M-Chr. Dupuis (Finance criminelle) : La typologie classique présentant le blanchiment d’argent sale distingue trois phases successives. Au cours du placement, l’argent est introduit dans le système financier ; la phase d’empilage consiste à accumuler de nombreuses transactions pour réduire la traçabilité des fonds ; ce qui rend possible leur intégration finale sous forme d’investissements dans des secteurs variés.
- Science criminelle. Cet acte est accessoire et postérieur au délit principal. Il peut donc être réprimé, soit au titre de la Complicité*, soit en tant que Délit accessoire*.
Voir : Tableau des incriminations protégeant la foi contractuelle (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations en matière de stupéfiants (selon la science criminelle)
Code pénal du Texas. § 34.02 : Commet un
délit celui qui, sciemment :
(1) acquiert, reçoit, cache, détient, transfert, transporte le fruit d’une activité criminelle, ou y prend intérêt ;
(2) mène, dirige, ou facilite une transaction portant sur le fruit d’une activité criminelle ;
(3) investit, emploie, reçoit, ou offre d'investir, d’employer, ou de recevoir, le fruit d’une activité criminelle, ou des fonds qu’il croit être le
produit d’une activité criminelle.
Code pénal d'Andorre. Art. 145 : Quiconque aura commis un acte pour cacher l'origine d'argent ou de valeurs provenant d'un délit de trafic de stupéfiants,de séquestration, de proxénétisme ou de terrorisme, ou aura utilisé cet argent et valeurs licitement, tout en connaissant ou devant en connaître l'origine, sera puni d'un emprisonnement d'un maximum de huit ans et d'une d'amende pouvant atteindre 20.000.000 pesetas.
- Droit positif. En droit français (art. 324-1 et s. C.pén.), le blanchiment d’argent a été conçu par le
législateur comme une de ces infractions de conséquence, dont le modèle est le Recel*. Mais la jurisprudence, par souci
d'efficacité, en a fait un délit distinct pouvant être reproché à l'auteur du délit principal.
Le législateur a posé une présomption quant à l'origine des
biens (art. 324-1-1, loi 6 décembre 2013).
Voir : Tableau des incriminations protégeant la foi contractuelle (en droit positif français)
Voir : Tableau des incriminations en matière de stupéfiants (en droit positif français)
Véron (Droit pénal spécial) : L’infraction n’est pas imputée à l’auteur du crime ou du délit, mais à celui qui va faciliter la justification mensongère de l’origine des biens. C’est une forme d’aide ou assistance - donc de complicité – incriminée en tant que délit distinct.
Cass.crim. 29 mars 2000 (Gaz.Pal. 2000 II jur. 2089) : L’art. 4 la directive du Conseil du 24 juin 1988, sur la libre circulation des capitaux, autorise les États membres à prendre les mesures indispensables notamment pour faire échec au blanchiment d’argent provenant de trafic de stupéfiants.
Cass.crim. 20 février 2008 (Bull.crim. n° 43 p.160) : Le délit de blanchiment est une infraction générale, distincte et autonome.
Cass.crim. 20 mai 2015, pourvoi n° 14-81964 : Il suffit, pour caractériser l'infraction de blanchiment d'argent, d'établir que son auteur avait conscience de l'origine frauduleuse des fonds, même s'il n'a pas déterminé la nature exacte des infractions d'origine.
Cass.crim. 31 mai 2012, n°12.80715 (Gaz.Pal. 4 août 2012) sommaire : Le blanchiment constituant un délit distinct, la prescription qui le concerne est indépendante de celle qui s'applique au délit de banqueroute, infraction originaire.
Cass.crim. 25 février 2008 (Gaz.Pal. 5 mars 2009) : L'art. 324-1 C.pén. qui punit le blanchiment du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit n'impose pas que des poursuites aient été préalablement engagées ni qu'une condamnation ait été prononcée du chef de crime ayant permis d'obtenir les sommes d'argent blanchies.
Cass.crim. 7 décembre 1995 (Gaz.Pal. 1996 I Chr. crim. 56) : L'arrêt attaqué, pour déclarer à bon droit M., notaire, coupable de blanchiment de fonds provenant d'un trafic de stupéfiants, après avoir énoncé qu'il a reçu la visite, sous un nom d'emprunt, d'un trafiquant international de stupéfiants souhaitant acquérir un appartement, relève qu'ayant été informé de l'arrestation de cet individu, des motifs de celle-ci, et de sa véritable identité, il a néanmoins régularisé l'acte de vente, au profit de la concubine de ce trafiquant en lui conseillant de payer le prix de l'appartement par des virements bancaires internationaux, et non par des transferts de devises, afin de présenter l'opération comme plus transparente.
Cass.crim. 24 février 2010 (Gaz.Pal. 10 juillet 2010) : Se rend coupable du délit de blanchiment le ministre d'un pays étranger qui, ayant perçu des commissions en contrepartie de l'octroi de concessions ou de licences d'exploitation dans son pays, transfère les fonds ainsi obtenus sur le territoire national pour les déposer dans des banques et les utiliser pour l'acquisition de biens mobiliers ou immobiliers, dès lors que de tels faits sont réprimés en France sous la qualification de corruption et que les textes qui définissent le blanchiment, infraction générale, distincte et autonome, n'imposent ni que l'infraction ayant permis d'obtenir les sommes blanchies aient été commises sur le territoire national, ni que les juridictions françaises soient compétentes pour la juger.
Cass.crim. 17 novembre 2010 (arrêt n° 09-88751) :
Suite à une plainte avec constitution de partie civile de l'établissement bancaire Dubai Islamic Bank (DIB) qui exposait que le sous-directeur de cet
établissement avait détourné une somme d'environ 243 millions de dollars américains, au moyen de faux ordres de virement, à destination de comptes
bancaires de personnes physiques à l'étranger, à l'instigation de M. X..., ressortissant malien, donneur d'ordres et bénéficiaire des fonds, une
information judiciaire a été ouverte des chefs de blanchiment en bande organisée, recel et complicité d'abus de confiance ; que les investigations ont
mis en évidence notamment, que sur la recommandation de M. Y..., directeur général puis président de l'Union togolaise de banque (UTB), M. X... avait
ouvert un compte " Yungo " dans les livres d'un établissement bancaire sis à Genève qui avait été crédité à hauteur de 95 % par des fonds issus de l'abus
de confiance commis au préjudice de la DIB ; que, parallèlement à l'ouverture de ce compte, M. Y... avait ouvert un second compte dit " Goldstar ", dans
la même banque, dont il était l'ayant droit économique et qui avait été crédité de plusieurs virements d'un montant total de 10 583 757 dollars émis sur
le compte " Yungo ", sur ordre de M. X... ; que, par la suite, une somme de 22 159 439 francs était transférée, sur instructions de M. Y..., sur deux
comptes ouverts dans deux succursales bancaires parisiennes au nom de la société Batison Ltd, dont l'ayant droit économique est les frères K..., avant
d'être reversée, en francs CFA, à M. X..., par compensation, sur un compte ouvert dans les livres de l'UTB alimenté indirectement par des remises
d'espèces, provenant de la vente de produits de la société Samex, appartenant aux frères K... ;
pour ces faits, M. X... et M. Y... ont été renvoyés du chef de blanchiment commis en bande organisée ;
pour déclarer les prévenus coupables de ce chef, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
en l'état de ces énonciations, et dès lors que caractérise un fait constitutif de l'infraction de blanchiment aggravé reprochée à M. Y..., au sens de
l'art. 113-2, al. 2, C.pén., le fait, pour le prévenu, d'avoir procédé aux virements de Suisse en France de partie du produit de l'infraction d'abus de
confiance, la cour d'appel qui a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et
caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de blanchiment commis en bande organisée, dont elle a déclaré les prévenus
coupables, a justifié sa décision.
En outre, l’art. 324-1 al.2 incrimine spécialement le fait d’apporter son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit d’un crime ou d’un délit.
Cass.crim. 14 janvier 2004 (Bull.crim. n° 12 p.39) : L’art. 324-1 al.2 C.pén. est applicable à l’auteur du blanchiment du produit d’une infraction qu’il a lui-même commise.
Afin de renforcer la lutte contre le blanchiment d'argent, le législateur accorde une exemption de peine au dénonciateur (art. 324-6-1, loi de 2013).
BLANC-SEING – Voir : Abus de blanc-seing*.
BLASPHÈME
Cf. Apostasie*, Déicide*, Hérésie*, Liberté religieuse*, Religion*, Sacrilège*, Symboles*, Théocratie*, Trahison*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-231, p.238 (note 5)
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-336, p.189 / n° II-323, p.383 / n° III-221, p.504 / n° III-235, p.525
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-307, p.232 (note 7)
- Notion. Constitue un blasphème tout affront, tout geste, tout écrit et toute parole outrageante adressée à la Divinité.
Dictionnaire Larousse de synonymes : Blasphème se dit des paroles impies qui outragent intentionnellement Dieu, la religion, les saints et les grands hommes, tout ce qui inspire l'estime ou l'admiration.
Jousse (Traité de la justice criminelle, 1771) : On peut définir le blasphème, toute injure prononcée contre Dieu, ou contre la Sainte-Vierge, ou contre les Saints.
Vittrant (Théologie morale) : Le blasphème peut être une affirmation ou une négation expresse ou encore une interrogation insolente, ou une simple épithète outrageante associée en quelque manière au nom de Dieu. Il peut exister sous forme de raillerie ou de reproches, de souhaits ou de regrets constituant pour Dieu une véritable injure.
Toureille (Crime et châtiment au Moyen-âge) : Le blasphème doit être compris comme une imprécation verbale faite non seulement contre l'honneur de Dieu, mais encore de la Sainte Vierge et de tous les saints et saintes du Paradis.
- Règle morale. De manière générale le blasphème est condamnable, puisqu'il apparaît comme une manifestation de mépris à l'égard d'une entité généralement considérée comme digne de respect. Dans une société libérale, admettant la liberté religieuse, la condamnation du blasphème est cantonnée au domaine spirituel et ne relève du domaine temporel que de manière limitée. Dans une société théocratique, en revanche, le blasphème constitue un crime inexpiable.
Gousset (Théologie morale) : La conscience sera droite et vraie si, par exemple, elle nous dicte qu'il faut éviter le blasphème, le mensonge, le parjure, la fraude.
Joly (Le crime, étude sociale) : Dans les sociétés théocratiques, quels étaient les crimes réputés les plus horribles ? Le mépris des divinités particulières à la cité, puis les blasphèmes, le sacrilège, l'hérésie, que les pouvoirs publics d'aujourd'hui ne connaissent plus ou ne punissent plus.
Garofalo (La criminologie) : Au Moyen-âge, le blasphème, l'hérésie, le sacrilège, la sorcellerie et même la science contredisant les dogmes, étaient les crimes les plus graves. Mais, aujourd'hui, on distingue les préceptes religieux des préceptes de la conduite sociale ; ce qui n'empêche pas que notre morale contemporaine ne soit en partie dérivée de l'Évangile, qui a favorisé le développement de l'altruisme.
- Science criminelle. Le blasphème était pénalement sanctionné dans l'Ancien droit, en tant que crime de lèse-majesté divine. Il l'est encore dans les systèmes juridiques de type théocratique, intolérants par nature.
Garraud (Précis de droit criminel) : Dans l'ancien droit pénal de la France en matière d'incrimination, on distinguait, trois sortes d'infractions : 1° les crimes de lèse-majesté divine, c'est-à-dire les infractions à la loi religieuse, telles que le blasphème, le sacrilège, la magie, l'hérésie, l'apostasie, l'athéisme...
Ordonnance de Moulins de février 1566. Art. 86 : Défendons très étroitement à tous nos sujets, tant blasphèmes et jurements du nom de Dieu. Et voulons que lesdits jureurs et blasphémateurs soient punis, non seulement de sanctions pécuniaires, mais de punition corporelle, s'il y échet, dont nous chargeons l'honneur et conscience de nos juges.
De Ferrière (Dictionnaire de droit) : Le blasphème se commet par écrit, quand on fait des livres et des libelles qui enseignent l'athéisme ou qui tendent à détruire la foi catholique... Ces sortes de livres doivent être brûlés avec leur auteur.
Desmaze (Les pénalités anciennes) : En 1765, le chevalier de la Barre, jeune officier de 20 ans, fut accusé d'avoir chanté une chanson injurieuse pour sainte Marie-Madeleine, et d'avoir de plus mutilé avec son épée un crucifix de bois sur le pont d'Abbeville. On le condamna au dernier supplice. La décision rendue par les juges d'Abbeville fut confirmée par un arrêt du Parlement de Paris, contre lequel Voltaire, avec sa verve satirique, déchaîna l'opinion publique.
Domat (Traité des lois) : Ceux qui tombent dans quelque dérèglement qui offense le public ... connue font ceux qui blasphèment ou qui jurent, et tous ceux enfin qui violent les bonnes moeurs, la pudeur on l'honnêteté, d'une manière qui blesse l'extérieur, sont justement punis par les lois civiles.
Marat (Plan de législation criminelle) : Blasphème : espèce d'égarement qu'il faut punir ; mais ce crime n'est le plus souvent qu'un écart momentané, dont le soleil avant son coucher éclaire le repentir ; le châtiment ne doit pas être trop prolongé : trois jours de détention suffisent pour punir un esprit égaré, et le faire rentrer en lui-même.
Exemple (Ouest-France 30 novembre 2007) : Une institutrice britannique, accusée par le Soudan d'avoir insulté l'islam parce que ses élèves avaient appelé "Mahomet" un ours en peluche, a été condamnée à 15 jours de prison. Elle sera ensuite expulsée du pays.
Exemple (Ouest-France 12 novembre 2010) : Un tribunal pakistanais de Nankana a condamné à mort une femme chrétienne, mère de cinq enfants, pour blasphème ... L'accusée a été arrêtée et poursuivie en justice aux termes de l'art. 295 C du Code pénal pakistanais, qui prévoir la peine de mort dans un tel cas.
Même dans un État laïc on conçoit que le législateur incrimine le blasphème, dans le cas où il est proféré publiquement dans le but de heurter ceux qui l'entendent et de causer ainsi un scandale.
Code pénal allemand de 1870. Art 166 : Sera puni d'un emprisonnement de trois ans au plus tout individu qui aura provoqué un scandale en proférant publiquement des blasphèmes contre Dieu.
- Droit positif. Le blasphème, entendu d'un point de vue religieux, n'est pas punissable en droit pénal
français.
Il convient toutefois d'observer qu'il subsiste sur le plan social avec le délit d'outrage aux Symboles* de la Nation ou
de l'État.
Par ailleurs, on peut observer qu'un blasphème proféré dans le but de choquer le sentiment religieux d'autrui peut constituer une faute civile tombant
sous l'article 1382 du Code civil.
Garnier (Morale sociale) : Lorsque le nouveau code pénal fut promulgué en 1810, on supprima du texte légal une multitude de condamnations capitales, qui, la plupart, avaient déjà disparu dans l'usage ... le blasphème, le sacrilège.
BLESSURE
Cf. Corps de l’homme*, Coups et blessures*, Fuite (délit de)*, Mehaing*, Navrer*, Tort*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 25, p.46 / n° I-225 3°, p.233 / n° 131, p.107 / n° I-129, p.185 / n° I-217, p.222 / n° I-218 1°, p.223 / n° I-219 bis, p.225-226 / n° I-250, p.267 / n° III-323, p.490
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-110, p.36 / n° I-I-I-218, p.56 / n° I-I-I-313, p.76 / n° I-I-I-318, p.82 / n° I-I-I-326, p.91 / n° I-I-I-331, p.94 / n° I-I-I-335, p.98-99 / n° I-I-I-346, p.113 / n° I-I-I-348, p.115 / I-I-II-105, p.131 et p.132 / n° I-I-II-207, p.143 / n° I-II-I-322, p.203 / n° I-II-I-323, p.204 / n° II-211, p.349 / n° II-213, p.351
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-117, p.75 / n° I-213 et s., p.107 et s. / n° I-225 et s., p.123 et s.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 222, p.109 / n° 422, p.266
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-109, p312 / n° II-I-127, p.369 / n° II-I-135, p.381 / n° II-I-143, p.394 / n° II-I-204, p.431
En droit positif, la notion de blessure recouvre toute atteinte portée à l’intégrité physique ou à l’équilibre psychique d’autrui. En vieux français « blesser » se disait « navrer ».
Vitu (Traité de droit pénal spécial) : Les blessures ne sont autres que les coups portés : elles englobent toutes les variétés d’effets : contusions, hématomes, fractures, piqûres, plaies, brûlures, excoriations, luxations, traumatismes…
Loi Salique. T. XIX, art. 2 : Quiconque aura blessé quelqu’un à tête, de telle sorte que le sang ait coulé jusqu’à terre, sera condamné à payer 600 deniers, ou 15 sous d’or.
Code des Ta-ts’ing (Trad. Boulais) : Quand la partie frappée deviendra rouge, livide et enflera on lui donnera le nom de blessure.
Cass.crim. 6 février 1932 (Gaz.Pal. 1932 I 552) : Le mot blessure … comprend, avec les lésions internes et externes, les maladies elles-mêmes.
BLOCAGE DES COMPTES – Voir : Saisie*.
BLOGUE (blogueur)
Cf. Injure*, Diffamation*.
Recommandé par l'Office québécois de la langue française, le mot blogue dérive du mot anglo-saxon "blog". Il désigne un journal personnel, hébergé par un portail spécialisé, qui permet à un internaute de rendre publiques certaines informations, opinions, propositions, idées ou images. Son contenu, qui peut comporter des éléments instructifs contient aussi parfois des propos portant atteinte à l'honneur ou à la considération d'une personne. Puisque ce document est sciemment mis à la disposition d'un large public, les poursuites doivent alors être diligentées des chefs d'injure publique ou de diffamation publique. Le délai de prescription est dès lors celui prévu par la loi du 29 juillet 1881 sur la presse.
Exemple (Ouest-France 10 mars 2006) : Une étudiante scolarisée au lycée Renan de Saint-Brieuc, a été condamnée à verser 400 € de dommages-intérêts à un professeur. Elle l'avait photographiée à son insu, mis ses clichés sur un blog, et rédigé des propos diffamatoires à son encontre.
Cass.crim. 27 novembre 2001 (Gaz.Pal. 2002 Jur. 654) : Lorsque des poursuites pour l'une des infractions prévues par la loi du 29 juillet 1881 sont engagées à raison de la diffusion, sur le réseau internet, d'un message figurant sur un site, le point de départ du délai de prescription de l'action publique prévu par l'art. 65 de la loi précitée doit être fixé à la date du premier acte de publication ; cette date est celle à laquelle le message a été mis pour la première fois à la disposition des utilisateurs.
BOISSONS – Voir : Alcool*, Falsification* .
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-II-260 p.564 (sur les boissons dangereuses pour la santé)
BON – Voir : Bien* .
BON PÈRE DE FAMILLE – Voir : Homme*.
BONNE FOI
Cf. Éléments constitutifs de l’infraction (élément moral)*, Diffamation*, Erreur de droit*, Erreur de fait*, Faits justificatifs*, Foi contractuelle*, Loi morale*, Presse*, Tiers de bonne foi*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 12, p.23 / n° 27, p.50 / n° III-223, p.437
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° II-334, p.408
Voir : Jean-Paul. Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 204, p.82 / n°326, p.177 / n° 515, p.341
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 7, p.11 / n° II-I-212, p.444 / n° II-II-139, p.487
- Notion. Une personne est de bonne foi lorsque qu'elle parle avec sincérité, ou agit en croyant à la légitimité de sa conduite.
Dictionnaires généraux. Pour approcher la notion de bonne foi, les différents dictionnaires consultés emploient les termes suivants : sincérité, franchise, loyauté, honnêteté.
Neufbourg (La loi naturelle) : Les actes moraux ou vertueux font régner sur la terre ce qu'on appelle le bien moral, c'est-à-dire, la justice, la bienfaisance, la piété, la bonne foi. Ils sont conformes à notre nature et à notre destination morales, et ont pour objet intentionnel le bien, la pratique du devoir.
Ahrens (Cours de droit naturel) : Le fondement de la justice est la fidélité (fides), la bonne foi dans les paroles et dans les conventions.
Balzac (Le curé de Tours) : Le pauvre homme manquait de cette bonne foi avec laquelle des grandes âmes savent réagir sur eux-mêmes et se juger.
- Droit naturel. Pour les moralistes, celui qui agit en toute bonne foi œuvre dans l'intérêt de la société. Dès lors qu'une personne ne pense pas à mal, elle ne saurait être tenu pour coupable d’une infraction pénale. Ils estiment même qu’il ne saurait y avoir d’échappatoire, lorsque le législateur prescrit de respecter la foi jurée.
Morale de Zoroastre (trad. Anquetil du Perron) : Il faut qu'un lien général entretienne l'harmonie qui doit régner dans la société : c'est ce que fait la bonne foi, c'est ce que fait la confiance mutuelle fondée sur la vérité, sur la justice et nourrie par l'esprit de modération .
Burlamaqui (Principes de droit naturel) : Ôtez les lois naturelles et ce lien moral qui entretient la justice et la bonne foi parmi tout un peuple … les hommes ne seront plus que des bêtes féroces les uns pour les autres.
Bouillier (Questions de morale) : Jamais il ne fut plus opportun qu'en un temps si fort enclin à tous les mensonges, de prêcher le respect de la vérité, de travailler à fortifier la bonne foi et à discréditer la mauvaise sous toutes ses formes.
Schopenhauer (Le fondement de la morale) : La sincérité et la bonne foi sont les principes de tout libre commerce entre les hommes.
- Science criminelle. La bonne foi de l'agent peut être prise en considération sur deux plans ; soit au niveau de l'élément moral de l'infraction, lorsque l'agent a toujours ignoré qu'il commettait une infraction pénale (erreur de droit ou de fait) ; soit au stade de la mesure de la peine, lorsqu'il était de bonne foi au début des agissements reprochés et n'a pas eu la volonté de suivre le droit chemin quand il eu connaissance des faits (excuse atténuante personnelle).
Domat (Traité des lois) : Les lois qui ordonnent la bonne foi, la fidélité, la sincérité, et qui défendent le dol, la fraude et toute surprise, sont des lois dont il ne peut y avoir, ni de dispense, ni d’exception.
Vitu (Traité de droit pénal spécial) : La bonne foi se présume, selon les principes généraux.
Code pénal suisse. Art 173 – (2) : L’inculpé n’encourra aucune peine s’il prouve que les allégations qu’il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité ou qu’il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies.
Code pénal du Chili. Art. 170 : Celui qui, ayant reçu de bonne foi une monnaie fausse, la remet en circulation après avoir constaté sa fausseté ... subira la peine de réclusion dans son degré minimal.
Code pénal d'Andorre. Art. 144 : Quiconque ayant reçu de bonne foi de la fausse monnaie et, conscient de sa fausseté, l'aura remise en circulation, sera puni d'un emprisonnement d'un maximum de trois ans ...
- Droit positif. Du fait de son imprécision, la notion de « bonne foi » n’occupe qu’une place limitée dans le droit criminel français. Elle n’est guère prise en considération qu’en matière douanière ou lors de poursuites du chef de Diffamation*.
Voir : Tableau des incriminations protégeant l'honneur (en droit positif français)
Cass.crim. 20 février 1997 (Gaz.Pal. 1997 I Chr.crim. 120) : Toute personne, à l’encontre de laquelle une infraction douanière est relevée, est admise à rapporter la preuve de sa bonne foi.
Cass.crim. 11 septembre 2007 (Bull.crim. n° 198 p. 834) : S'il est vrai que l'intention de nuire doit être appréciée en la personne de l'auteur de l'article diffamatoire, l'existence de faits justificatifs suffisants pour faire admettre la bonne foi dudit auteur a pour effet d'exclure, tant sa responsabilité pénale, que celle du directeur de publication de l'organe de presse dans lequel l'article incriminé a été inséré.
Cass.crim. 30 mars 2005 (Bull.crim. n° 109 p.376) : Les juges du fond qui ont constaté que le prévenu poursuivi du chef de diffamation avait fait preuve d’animosité personnelle, ne sauraient, sans se contredire, le faire bénéficier de la bonne foi au motif que cette animosité n’était pas de son seul fait.
Cass.crim. 19 janvier 2010 (Gaz.Pal. 17 juin 2010) : La bonne foi doit être appréciée en tenant compte notamment du caractère d'intérêt général du sujet sur lequel portent les propos litigieux, et du contexte politique dans lequel ils s'inscrivent.
Cass.(1e civ.) 3 février 2011, n° 09-10301 (Gaz.Pal. 16 juin 1881 note Piot) sommaire : La notion de prudence et de mesure dans l'expression, élément constitutif de la bonne foi au sens de la loi du 1991, doit être soupesée au regard de l'intérêt général du sujet traité et du sérieux de l'enquête journalistique. Un débat général d'importance laisse davantage de latitude dans l'expression d'imputations diffamatoires.
En ce qui concerne la diffamation la charge de sa bonne foi incombe au prévenu,, et à lui seul, puisque la loi du 29 juillet 1881 a institué en matière de presse une procédure strictement accusatoire.
Cass.crim. 28 février 2012, n° 08-83926 (Gaz.Pal. 22 mars 2012 p.16) : En matière de diffamation, si le prévenu peut démontrer sa bonne foi par l'existence de circonstances particulières, c'est à lui seul qu'incombe cette preuve, sans que les juges aient le pouvoir de provoquer, compléter ou parfaire l'établissement de celle-ci. Méconnaît ce principe et l'art. 29 de la loi du 29 juillet 1881 la cour d'appel qui ordonne, avant dire droit au fond, la communication, par la société France 2, des " rushes " du film qui a été le sujet de la publication litigieuse sur Internet.
Cass.crim. 19 juin 2012, n° 11-86611 (Gaz.Pal. 4 octobre 2012 p.11) sommaire : Si le prévenu peut démontrer la preuve de sa bonne foi par l'exigence de circonstances particulières, c'est à lui seul qu'incombe cette preuve sans que les juges aient le pouvoir de se substituer à lui dans la recherche des faits justificatifs.
BONNES MŒURS
Cf. Attentat à la pudeur*, Bestialité*, Débauche*, Indécence*, Libertinage*, Mœurs*, Outrage public aux mœurs*, Pornographie*, Prostitution*, Proxénétisme*, Publicité*, Pudeur*, Racolage*, Sodomie*, Satyre*, Turpitude*, Vices*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale », n° II-209, p.333 / n° III-13, p.371-372
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine », n° I-114, p.71 / n° II-102, p.258 / n° II-103, p.260 / n° II-112,p.271
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 102, p.33 / n° 107, p.46 / n° 223, p.111-112 / n° 332, p.195 / n° 337, p.207 / n° 439, p.293
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-127, p.181
Voir : Tableau sur la protection de la pudeur (selon la science criminelle)
- Notion. Les mœurs sont les habitudes de vie d’une personne, ou d’un ensemble des personnes. Elles sont considérées comme bonnes ou mauvaises selon qu’elles sont conformes ou contraires aux règles de la morale, et plus particulièrement de la morale sexuelle.
Constant (Manuel de droit pénal spécial) : L'expression outrage aux mœurs vise des faits qui sont de nature à scandaliser ceux qui en sont témoins, à porter atteinte, d'une façon générale à la pudeur publique.
Montesquieu (Esprit des lois) : Il y a cette différence entre les lois et les mœurs, que les lois règlent plus les actions du citoyen, et que les mœurs règlent plus les actions de l’homme.
- Règle morale. Les moralistes, on ne saurait en être surpris puisque c'est la raison d'être de leur discipline, insistent sur la nécessaire pureté des mœurs au regard de l'intérêt général. Leurs écrits peuvent être rapprochés des Codes de déontologie.
Pierrot (Dictionnaire de théologie morale) : Les bonnes mœurs seules donnent à une nation de la grandeur, de la puissance et de la prospérité ... Les richesses du commerce et de l'agriculture, la magnificence des beaux-arts, les jouissances de la vie ne peuvent sans les mœurs former un État florissant. Les nations sans mœurs, amollies par le luxe, énervées par les plaisirs, dégradées par les vices, guidées par l'intérêt personnel, peuvent avoir, par la prospérité matérielle, les apparences d'États puissants; mais qu'on pénètre jusqu'à la source de la véritable force, on ne trouve qu'une extrême débilité. Ici nous en appelons aux enseignements de l'histoire.
Bergier (Principes de philosophie et de morale) : Pour peu que l'on ait lu l'Histoire, on voit les Nations déchoir, languir, se consumer à mesure que la corruption des mœurs y a fait des progrès ; et les États les plus florissants s'abîmer enfin sous le poids de la dépravation.
Tocqueville (La démocratie en Amérique) : Les bonnes mœurs sont utiles à la tranquillité publique.
Aix-en-Provence
24 novembre 1989 (Gaz.Pal. 1990 I somm. 240) : En se
rangeant aux côtés de manifestants dont le comportement a été
décrit comme haineux et en les encourageant par ses propos,
l'avocat en cause avait, ce faisant, manifestement renoncé à
agir de manière à conserver l'estime d'autrui et à préserver
l'image que doit offrir un auxiliaire de justice, et au
contraire préféré participer à une scène de désordre directement
tournée contre les magistrats et des jurés. Il a par là manqué à
l'honneur d'un membre de la profession d'avocat.
L'art. 14 de la loi du 20 juillet 1988 excluant du champ
d'application de l'amnistie les manquements aux bonnes moeurs, à
la probité et à l'honneur, le Conseil de l'Ordre des avocats de
son barreau ne pouvait, sans méconnaître la portée de ce texte,
estimer que les faits reprochés à cet avocat étaient amnistiés.
Sa décision sera donc réformée.
- Science criminelle. Elle n’est pas parvenue à définir cette délicate notion, qui évolue dans le temps. Elle en abandonne l’appréciation, d’abord au législateur, mais surtout aux juges du fond (qui doivent se tourner vers le sentiment général, plutôt que vers les opinions extrêmes). Ainsi, certaines œuvres littéraires ou artistiques peuvent choquer à certaines périodes de l’histoire et plaire à d’autres : poursuivi pour atteinte aux bonnes mœurs après la publication de « Madame Borary », Flaubert fut acquitté de justesse le 7 février 1857 ; il en fut de même pour D.H. Lawrence, en 1960, avec « L’amant de Lady Chatterley ».
Voir : R. Garraud, L'outrage public à la pudeur
Voir : Affaire des Fleurs du mal de Baudelaire
Montesquieu (De l'esprit des lois) V-XIX : Dans quel Gouvernement faut-il des censeurs ? Il en faut dans une République, où le principe du Gouvernement est la vertu.
Marat (Plan de législation criminelle, 1780) : L’État a-t-il droit sur la chasteté de ses membres ? Question ridicule, qui ne peut être agitée que chez une nation qui a cessé d’être libre, et qui a perdu ses mœurs. Ainsi admettons-nous sans balancer ce droit incontestable, puisqu’il ne peut que contribuer au repos des familles, et favoriser la propagation, qui fait toujours la force des empires.
Catherine II (Projet de Code pour la Russie) : La seconde sorte de délits renferme ceux qui font contre les bonnes moeurs. Telles sont toutes les actions contraires à la pureté des moeurs, soit qu'elles regardent tous les hommes en général, ou chacun en particulier ; par quoi j'entends toute action qui répugne à l'ordre établi par la nature.
Digeste de Justinien, 47, X, 15, 6. Ulpien : Labéon dit : « contre les bonnes mœurs », non de celui qui a fait le délit, mais en général contre les bonnes mœurs de la cité.
Décrétale de Boniface VIII : On ne doit pas tenir les promesses qui vont contre les bonnes mœurs.
Dictionnaire civil et canonique (Paris 1687) : Un pacte contre les bonnes mœurs, contre le droit public ou le droit naturel, ou contre le droit commun, est nul.
Cass. belge 28 septembre 1977 (Rev.dr.pén. 1978 89) : Le contenu de la notion de bonnes mœurs ne saurait être déterminé en fonction du sentiment de pudeur de quelques personnes seulement.
Code criminel du Canada. Corruption des mœurs - Art. 163 (2) : Commet une infraction quiconque, sciemment et sans justification ni excuse légitime ... : a) vend, expose à la vue du public, ou a en sa possession à une telle fin, quelque écrit, image, modèle, disque de phonographe ou autre chose obscène ; b) publiquement expose un objet révoltant ou montre un spectacle indécent ...
Code pénal tchécoslovaque de 1950, art. 205 : Toute personne qui aura mis en circulation ou exposé au regard du public un imprimé, un film, une image ou un autre objet qui menacent les bonnes mœurs, sera puni de la privation de liberté pour six mois au plus.
- Droit positif. L’ancien Code pénal, dans ses art. 283 et s., incriminait de manière générale l’outrage aux
bonnes mœurs. L’art. 227-24 actuel n’incrimine plus les atteintes aux bonnes mœurs, blessant la dignité de la personne humaine, que si le message est
susceptible d’être vu ou perçu par un mineur.
- L’art. R.624-2 C.pén. incrimine la diffusion sur la voie publique ou dans les lieux publics d’un message contraire à la décence.
Cass.crim. 6 mai 1986 (Gaz.Pal. 1987 I somm. 100) : La définition de la notion de bonnes mœurs est laissée à l'appréciation des magistrats.
Trib.corr. Paris 4 juillet 1988 (Gaz.Pal. 1988 II 618), relatif à des messages minitels : Des «pseudos» tels que «aime très jeune garçon» ou «cherche esclave» ou encore «tortionnaire hard cuir», choisis par des utilisateurs des terminaux qui publient eux-mêmes leurs annonces, sont sans équivoques et constituent bien des annonces attirant l’attention sur des occasions de débauche. Ils tombent dès lors sous le coup de l’art. 284 C.pén., de même que les annonces ultérieures qui révèlent les fantasmes de l’utilisateur.
- Par ailleurs, la loi sur la presse reconnaît un droit de réponse à la personne visée dans un écrit, c’est à la condition que cette réponse ne soit pas contraire aux bonnes mœurs.
Cass.crim. 19 décembre 1989 (Bull.crim. n° 493 p.1211) : Le droit de réponse institué par l’art. 13 de la loi du 29 juillet 1881 est général et absolu. Celui qui l’exerce est juge de l’utilité, de la forme et de la teneur de sa réponse. L’insertion ne peut être refusée qu’autant que la réponse est contraire aux lois, aux bonnes mœurs, à l’intérêt légitime des tiers ou à l’honneur du journaliste.
- Les lois d’amnistie étendent généralement leurs effets aux fautes disciplinaires, sauf lorsqu’elles constituent un manquement à la probité, aux bonnes mœurs ou à l’honneur.
Gonnard (V° Amnistie, Juris-classeur) : A été jugé contraire aux bonnes mœurs : le fait pour un professeur d’avoir eu avec une élève des relations compromettant la dignité et l’autorité de la fonction.
- Quoique la question ait été un temps débattue, le Conseil d’État a fini par admettre que, parmi les buts de la police administrative, figure la défense des bonnes mœurs.
Conseil d’État 3 octobre 1997 (Gaz.Pal. 1998 I panor.adm. 85) : Pour interdire de façon permanente au requérant de participer à l’organisation, la direction et l’encadrement d’institutions ou d’organismes régis par le décret du 29 janvier 1960, et des groupements de jeunesse régis par l’ordonnance du 2 octobre 1943, le ministre délégué à la jeunesse et aux sports a pu se fonder sur le fait, qu’alors qu’il avait la responsabilité d’organiser le séjour de jeunes adolescents dans un centre de vacances, il se serait livré à des actes contraires aux bonnes mœurs sur les personnes de trois d’entre eux.
BONNETEAU
Cf. Escroquerie*, Compère*, Jeu*, Tricherie*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-416, p.270
Voir : Tableau assurant la protection de la Nation et de la dignité de la personne humaine contre le jeu (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations luttant contre le jeu (en droit positif français)
Voir : Le joueur de gobelet
Jeu de carte et d’argent, de la nature de l’escroquerie, le bonneteau consiste à duper une personne par une rapide manipulation de trois cartes (au moment du jeu où il veut tromper sa victime, le manipulateur, qui tient deux cartes dans l’une de ses mains, fait tomber d’abord celle du dessus au lieu de laisser tomber en premier celle du dessous). Il existe des variétés, telle celle illustrée ci-dessous. Aux États-Unis, on parle de "three card monte".
En droit positif français, ce fait tombe en principe sous le coup de l’art. 1er de la loi du 12 juillet 1983 réprimant la tenue d’un jeu de hasard sur la voie publique.
Lambert (Droit pénal spécial) : Le jeu de bonneteau se fait avec deux cartes noires et une carte rouge. Le joueur, qui est un professionnel souvent assisté de complices rabatteurs, est équipé d’un parapluie-table-de-jeu-escamotable. Le jeu consiste en une manipulation par le joueur des trois cartes sous le regard attentif du particulier. Au terme de chacune de ces manipulations successives, les trois cartes sont posées sur la table et le particulier a gagné s’il met bien le doigt sur le dos de la carte rouge. Sinon il perd sa mise. La Cour de cassation a vu dans ces manœuvres une escroquerie (Cass.crim. 26 août 1871 Bull.crim. n°102).
Le Code criminel canadien incrimine spécialement le fait de décider une personne à risquer ou hasarder de l'argent ou quelque autre bien ou chose de valeur sur le résultat d'un jeu de bonneteau.
Amiens 29 octobre 1972 (Gaz.Pal. 1973 I 332) : En l’absence d’une manipulation frauduleuse pour faire naître chez le parieur l’espoir chimérique d’un gain, le fait de se livrer au jeu dit de bonneteau dans une rue ne constitue pas le délit d’escroquerie, mais l’infraction de tenue d’un jeu de hasard dans un lieu public.
Mais le bonneteau devient une escroquerie lorsque le manipulateur est assisté de compères qui, par leur intervention, déterminent des passants à parier.
Cass.crim. 25
mars 2015, pourvoir n° 14-83766 (Gaz.Pal. 16 avril 2015 p.25) :
Lors d'une mission de surveillance sur la voie publique, des
fonctionnaires de police observent un jeu de bonneteau où un
homme manipulait les palets tandis que trois personnes étaient
des faux joueurs se présentant comme des touristes afin
d'inciter les passants à participer au jeu. Ils constatent
qu'une personne, ainsi déterminée à parier une somme de 50 €,
perd l'intégralité de sa mise.
L'intervention préalable et concertée de tiers, dans le cadre
d'une mise en scène destinée à tromper sur leur espérance de
gain les victimes potentielles, ainsi déterminées à verser leur
mise, caractérise les manœuvres
frauduleuses constitutives de l'escroquerie.
Cass.crim.
8 juillet 2015, pourvoi n° 14-83635 : Il résulte de l'arrêt
attaqué et du jugement que des policiers ont observé, sur la
voie publique, un attroupement autour d'une table de bonneteau
où le prévenu manipulait les palets tandis que deux faux joueurs
se présentant comme des touristes gagnaient le double de leurs
mises afin d'inviter les passants à participer au jeu...
En prononçant une relaxe partielle du chef d'escroquerie, alors
que l'intervention préalable et concertée de tiers, dans le
cadre d'une mise en scène destinée à tromper sur leur espérance
de gain les victimes potentielles, ainsi déterminées à verser
leur mise, caractérise les manœuvres
frauduleuses constitutives de l'escroquerie, la Cour d'appel,
qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres
constatations, n'a pas justifié sa décision ; d'où il suit que
la cassation est encourue.
BOOKMAKER
Cf. Jeu*, Loterie*, Pari*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-419, p.273
Voir : Tableau assurant la protection de la Nation et de la dignité de la personne humaine contre le jeu (selon la science criminelle)
Voir : Tableau des incriminations luttant contre le jeu (en droit positif français)
Un bookmaker est un individu qui reçoit des paris, notamment sur un champ de course ; son activité est dangereuse, puisque, à tout le moins, elle
encourage et facilite le jeu. Aussi les pouvoirs publics doivent-ils réglementer, voire interdire, ses interventions.
La loi française du 2 juin 1891 (modifiée le 24 mai 1951) punit de prison quiconque aura, en quelque lieu et sous quelque forme que ce soit, offert de
recevoir ou reçu des paris sur les chevaux de course, soit directement, soit par intermédiaire.
De manière plus générale, la loi du 21 mai 1836, plusieurs fois remaniée, interdit en tant que loterie toute opération offerte au public pour faire
naître l’espérance d’un gain qui serait acquis par la voie du sort.
Code criminel du Canada. Art. 202. (1) Commet une infraction quiconque … se livre au bookmaking, ou à l’entreprise ou à la profession de parieur, ou fait quelque convention pour l’achat ou la vente de renseignements destinés à aider au bookmaking.
Cass.crim. 4 octobre 1974 (Bull.crim. n° 278 p.713) : Le délit prévu et puni par l’art. 4 de la loi du 2 juin 1891, modifiée par la loi du 24 mai 1951, se trouve caractérisé à la charge du prévenu qui a été surpris au moment où il venait de recevoir clandestinement de plusieurs personnes diverses sommes d’argent notées sur un bordereau et représentant les enjeux de paris faits sur les courses de chevaux.
Cass.crim. 22 mai 1997 (Gaz.Pal. 1997 II Chr. crim. 186) : Pour déclarer le prévenu coupable des faits visés à la prévention, la Cour d'appel énonce que le bookmaker anglais a fait une offre de paris sur un événement aléatoire et suscité une espérance de gain chez des joueurs français et que cette offre a été faite par la diffusion de bulletins de concours sur tout le territoire national, de sorte que tous les éléments de l'infraction prévue et réprimée par les art. 3 de la loi du 21 mai 1836 et 410 C.pén. sont réunis.