DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre M
(Troisième partie)
MAQUEREAU (Maquerelle)
Cf. Bordeau*, Prostitution*, Proxénète*, Ruffian*, Souteneur*.
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-112,
p.169
Voir Tableau :
La protection de la Nation et
de la dignité de la personne humaine contre la prostitution et le proxénétisme (selon la science criminelle)
Terme de l'Ancien droit, tombé dans la langue vulgaire, qui désignait la personne faisant métier de prostituer des femmes, voire des hommes. Aujourd’hui on dit plutôt Proxénète*.
Muyart de Vouglans (Les lois criminelles de France) :
On comprend en général, sous le nom de maquerellage, le crime de ceux qui excitent les autres à la débauche.
Bongert (Cours d’histoire du droit pénal) : Le
maquerellage, encore qualifié de « bordelerie » correspond au proxénétisme du droit pénal moderne.
Lombroso (Palimpseste des prisons) : Q... a, sur le
bras droit, un cœur percé et à côté la tête d’un poisson - maquereau (synonyme du mot souteneur). Ce véritable hiéroglyphe phonétique signifie que sa
maîtresse de cœur l’a abandonné pour un Alphonse.
Warée (Curiosités judiciaires) : Le 11
juillet 1750, la nommée Jeanne Moynon, maquerelle publique, a reçu le fouet et a été marquée de la fleur-de-lis ; elle a été conduite depuis le
Grand-Châtelet jusqu’à la porte Saint-Michel, où s’est faite l’exécution au fer chaud, sur un âne, avec un chapeau de paille, la tête tournée vers la
queue, avec l’écriteau « Maquerelle publique ».
MARAUDAGE (Maraude, maraudeur)
Cf. Chapardage*, Délits pénaux (Délit dérivé)*, Larcin*, Vol*.
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine »
(4e éd), n° 16, p.15 / n° IV-303, p.585 / IV-308, p.592
- Sens large. La maraude consiste à aller de-ci de-là, à l’aventure, dans l’espoir qu’une occasion se présentera
de commettre quelque larcin. Pour des jeunes gens, elle est une pente qui risque de les précipiter dans une carrière criminelle.
- Lorsque la maraude est le fait de soldats, qui usent en outre de violences, elle est ordinairement sanctionnée d’une peine disciplinaire lourde
(voir le Code des armées du 21 brumaire an 5).
Leclère (Législation cambodgienne ancienne) : La
cangue la plus légère était réservée aux maraudeurs, aux petits voleurs.
Joly (Le crime étude sociale) : Dans la bande il
y a des individus qui, appartenant au même quartier, ont commencé de bonne heure la maraude et se connaissent de longue date.
Proal (Le crime et la peine) : Le ressentiment des
braconniers et des maraudeurs contre les agents de la force publique déterminent chaque année un assez grand nombre de crimes.
Code pénal de Biélorussie. Art. 255 : Le vol par
maraudage, sur un champ de bataille, des biens des mort ou des blessés... est punissable de la privation de la liberté de trois à dix ans, voire de
la peine de mort.
- Sens étroit. Le maraudage est une variété atténuée du Vol*, consistant à dérober dans un champ et à emporter quelques produits non encore détachés du sol ou des plantations (céréales, légumes ou fruits). On le distingue du grappillage, qui se résume à cueillir quelques fruits appartenant à autrui afin de les manger sur place.
Voir
: J-P. Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e
éd.), n° IV-308, p.592
Rigaux et Trousse (Les codes de police) : Le maraudage
n’est autre chose qu’une variété du vol, qui a bénéficié de la clémence du législateur à raison notamment de la modicité ordinaire du préjudice qui en
résulte.
De Lestang (Juris-classeur pénal 1973) : Le maraudage est en
réalité un vol, mais qui, en raison de son peu de gravité, n'est punissable que des peines de simple police.
Crahay (Traité des contraventions) : Le maraudage exige
la réunion de trois conditions. Il faut : que les choses dérobées soient des récoltes ou d’autres productions utiles de la terre ; que ces
récoltes ou productions ne soient pas encore détachées du sol ; qu’elles aient été détachées avec l’intention de les emporter.
Constant (Manuel de droit pénal, II) cite un jugement du
Trib.pol. Rochefort : Constitue un acte de maraudage le fait de s’approprier, après les avoir enlevées par fouille du sol, des pommes de terre
dans un champ non encore dépouillé de sa récolte.
Code rural belge. Son art. 87 2° punit (grappillage)
ceux qui auront cueilli ou mangé, sur le lieu même, des fruits appartenant à autrui.
Code pénal du Maroc. Art. 608 : Sont punis de la
détention d'un à quinze jours et d'une amende... 6° Ceux qui se rendent coupables de maraudage, en dérobant sans aucune des circonstances prévues aux
articles 518 et 519, des récoltes ou autres productions utiles de la terre qui, avant d'être soustraites, n'étaient pas encore détachées du sol.
Code pénal d'Éthiopie. Art. 653 :
Quiconque, en quelque saison de l'année, sans autorisation,
prend ou cueille pour les manger sur place, des fruits, des
baies, des légumes ou autres produits agricoles appartenant à
autrui... est puni de quinze jours d'emprisonnement au plus.
MARCHANDAGE
Cf. Dignité de la personne humaine*, Esclavage*, Travail*.
La dignité de la personne humaine interdit qu’un être humain soit traité comme une marchandise. C’est pourquoi le trafic de main-d’œuvre est prohibé, incriminé et sanctionné, sous le nom de « marchandage », par l’art L.125-1 du Code du travail.
Décret du 2 mars 1848. Sur le rapport de la Commission de
gouvernement pour les travailleurs ; considérant… que l’exploitation des ouvriers par les sous-entrepreneurs ouvriers, dits marchandeurs, est
essentiellement injuste, vexatoire et contraire au principe de la Fraternité… Le Gouvernement provisoire de la République décrète : L’exploitation
des ouvriers par les sous-entrepreneurs, ou marchandage, est aboli. Signé : Dupont de l’Eure, Arago, Lamartine…
Brémond (Marchandage et prêt illicite de
main-d'œuvre,
Gaz.Pal. 9 juin 2007) : La fourniture de main-d'œuvre à but lucratif n'est interdite que lorsque, bien que n'étant pas l'objet exclusif de
l'opération à but lucratif, elle a pour effet de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder l'application d'une règle ayant, en droit du
travail, un caractère obligatoire. Ainsi, l'interdiction de l'opération est la conséquence de son effet : le préjudice causé au salarié.
Cass.crim. 21 août 1995 (Gaz.Pal. 1995 II Chr.crim.
577/578) : Pour être constitué, le délit de marchandage nécessite une opération à but lucratif de fourniture de main-d'oeuvre ayant pour effet de
causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder l'application des dispositions de la loi, de règlement ou de convention ou accord collectif
de travail.
Cass.crim. 25 avril 1989 (Gaz.Pal. 1989 II
832) : Ayant relevé que la société en cause s’était comportée comme une entreprise de travail temporaire, et que les contrats de sous-traitance
invoqués constituaient en fait des opérations de fournitures de main-d’œuvre à but lucratif ayant eu pour effet de priver les salariés concernés des
garanties légales en matière d’embauchage et de licenciement, du bénéfice des conventions collectives et des avantages sociaux conférés aux salariés
permanents des employeurs, les juges du fond ont pu estimer que le délit prévu par l’art. L 125-1 C. trav. était constitué à la charge du prévenu.
Cass.crim.
28 mars 2017, pourvoi n° 15-84.795 : Il résulte de l'arrêt
attaqué, que la société Léon X... Aquitaine, entreprise de
travaux publics, et M. Joël Y..., directeur salarié, ont été
poursuivis devant le tribunal correctionnel des chefs de
marchandage, prêt illicite de main-d'œuvre
et infractions à la législation sur le travail temporaire, pour
avoir employé des travailleurs détachés, mis à disposition par
une société d'intérim de droit polonais, en méconnaissance des
règles régissant le travail temporaire, notamment en renouvelant
certains contrats de travail plus d'une fois ou sans respecter
les délais de carence entre deux missions, pourvoyant ainsi des
postes permanents pour une durée de trois ans et plus.
En l'état de ces énonciations, procédant de l'appréciation
souveraine des juges sur les faits et circonstances de la cause,
d'où il résulte que l'opération de prêt de main d'oeuvre
litigieuse, qui a permis de pourvoir durablement des emplois
liés à l'activité normale et permanente de l'entreprise
utilisatrice, a relevé d'une fraude à la loi sur le travail
temporaire ayant eu pour effet d'éluder l'application des
dispositions protectrices relatives au contrat de travail, ce
dont se déduisent, d'une part, le caractère lucratif de
l'opération, d'autre part, le préjudice causé aux salariés
concernés, l'arrêt de condamnation critiqué a été prononcé à
bon droit.
Seules les entreprises de travail temporaire peuvent pratiquer le prêt de main-d'œuvre à but lucratif, dans le cadre des dispositions qui leur sont propres.
Cass.crim. 14 février 2006 (Bull.crim. n° 43
p.168) : Le prêt de main-d'œuvre à but lucratif ne peut être légalement pratiqué que par les entreprises de travail temporaire.
MARCHÉS ET FOIRES - Voir : Commerce*.
MARCHÉS PUBLICS
Cf. Corruption de fonctionnaire*, Favoritisme*, Prise d'intérêt*, Probité*, Trafic d'influence*.
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n°
II-I-151 p.410 et 411 / n° II-II-213, p.504
Les marchés publics sont des contrats onéreux conclus pour le compte d'une personne publique, qui devra verser un certain prix en contrepartie d'une prestation pouvant consister en la fourniture de biens ou de services. Ils sont soumis à des règles strictes, édictées dans le Code des marchés publics, pour prévenir la commission de délits tels que le favoritisme, la prise d'intérêt...
Alland
et Rials (Dictionnaire de la culture juridique). V° Marchés publics, par
L. Pfister : Les marchés publics sont des contrats par lesquels
les collectivités publiques acquièrent des fournitures ou des
services, ou confient à des entrepreneurs l'exécution de travaux
moyennant le paiement d'un prix.
Gaudemet
(Droit administratif) : Les marchés publics sont
définis par le code des marchés publics comme les contrats
conclus à titre onéreux par l'État, les établissements publics
administratifs et les collectivités locales et les
établissements publics locaux pour répondre à leurs besoins en
matière de travaux, des fournitures et de services.
Jeandidier
(Droit pénal des affaires) : L'art.432-14 du Code pénal
lutte non seulement contre tout écrasement des concurrents mais
aussi contre toute déloyauté dans le mécanisme d'attribution des
marchés de l'État et autres collectivités publiques.
Code
pénal du Togo. Art. 211 : Sera puni d’un mois à deux ans
d’emprisonnement et d’une amende ... ou d’une de ces peines
seulement quiconque par voie de fait, menaces, concertation ou
autres manœuvres frauduleuses aura entravé ou troublé le dépôt
des soumissions ou la liberté des enchères dans les
adjudications de marchés publics ou les ventre publiques. Le
Tribunal pourra en outre annuler l’adjudication obtenue
frauduleusement et ordonner la publication de la condamnation
aux frais du condamné .
Cass.crim.
17 décembre 2008, n° 08-82319 : La
personne ayant accompli un acte contraire aux dispositions
législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la
liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés
publics et les délégations de service public, si elle ne saurait
se prévaloir d'une ignorance de ces dispositions pour justifier
son comportement, n'est pas déclarée responsable du délit à la
condition qu' elle démontre, conformément aux prévisions de
l'article 122-3 C.pén., avoir cru, par une erreur de droit
qu'elle n'était pas en mesure d'éviter, avoir pu légitimement
accomplir l'acte, ce qui laisse subsister l'élément moral exigé
par l'article 121-3 du même code.
Cass.crim.
7 novembre 2012, n° 11-82961 (Bull.crim. n° 243 p.509) :
Lorsqu’une association est créée à l’initiative d’une personne
publique qui en contrôle l’organisation et le fonctionnement et
lui procure l’essentiel de ses ressources, le juge pénal est
compétent pour qualifier cette personne privée d’association «
transparente » et en déduire que les contrats qu’elle conclut
pour l’exécution de la mission qui lui est confiée sont des
contrats administratifs soumis au code des marchés publics.
Cass.crim.
17 décembre 2008, n° 08-82319 (Bull.crim. n° 261 p.1208) : Le
délai de prescription de l’action publique du délit d’atteinte à
la liberté d’accès et à l’égalité des candidats dans les marchés
publics, infraction instantanée, commence à courir à partir du
jour où les actes irréguliers sont apparus et ont pu être
constatés dans des conditions permettant l’exercice des
poursuites.
MARÉCHAUSSÉE - Voir : Gendarmerie*.
MARIAGE
Cf. Adultère*, Bigamie*, Célibat*, Conscience (Clause de)*. Escroquerie*, Famille*, Harcèlement conjugal*, Livret de famille*, Polygamie*, Violences (violences conjugales)*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents » ; établissement de l'acte de mariage,
document authentique : n° 124, p.74
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents » ; sur le principe de l'indissolubilité du
mariage : n° 116, p.60 / et Table alphabétique
Voir :
E. Baudin, La morale du mariage
Voir :
E. Baudin, La morale de la famille
Voir :
Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
- Notion. Au sens large le mariage consiste en l’union
légitime librement consentie d’un homme et d’une femme, cette union
étant contractée dans le but de procréer et de fonder ainsi une famille.
Au sens étroit le mot mariage vise la cérémonie au cours
de laquelle l'homme et la femme se prennent pour époux et pour
épouse.
Leclercq (Leçons
de droit naturel - T.III, La famille) : Le mariage est l'union
légitime de l'homme et de la femme... Mais souvent le mot
mariage est employé pour désigner l'acte par lequel l'homme et
la femme contractent cette union... Quand on parle de mariage,
il faut toujours vérifier d'après le contexte si l'auteur vise
l'acte constitutif du mariage ou l'état de mariage.
Höffe (Dictionnaire d’éthique) : Le mariage est
une relation entre deux êtres humains de sexe opposé, qui procède en partie de leur appétit sexuel (racine biologique), en partie de leur inclination
(racine psychologique), et qui reçoit sa forme d’une décision personnelle et d’une consécration sociale.
Sériaux (Droit canonique) : Non seulement la
famille constitue le seul chemin naturel pour la venue au monde et l’éducation première des enfants, mais, encore et surtout, c’est à travers le mariage
que l’homme et la femme conquièrent la plénitude de leur humanité.
Planiol (Traité de droit civil). Il cite d’abord
Portalis : « Le mariage est la société de l’homme et de la femme qui s’unissent pour perpétuer leur espèce, pour s’aider par des secours
mutuels à porter le poids de la vie, et pour partager leur commune destinée ». Puis ajoute : Au fond, le mariage n’est autre chose que
l’union sexuelle de l’homme et de la femme, élevée à la dignité de contrat par la loi et de sacrement par la religion.
Cass. (1e civ.) 13 mars 2007 (Gaz.Pal. 22 mars 2007,
rapport Pluyette, avis Domingo) pouvait dire en son temps : Selon la loi française, le mariage est l'union d'un homme et d'une femme.
- Règle morale. Puisqu’il tend à la persistance de l’espèce humaine, qu'il constitue le fondement de la société, et qu'il favorise l’harmonieux développement des enfants qui en sont issus, le mariage relève du Droit naturel* ; il est même tenu pour essentiel par les moralistes.
Épictète (Manuel d'Épictète, XL) : Autant que faire se
peut, garde-toi pur avant le mariage.
Accarias
(Précis de droit romain) : De justæ
nuptiæ - Les justæ
nuptiæ consistent dans l'union de deux
personnes de sexe différent. Cette union elle-même implique une
association entière et en quelque sorte fusion des deux
existences... Les époux sont associés et égaux entre eux.
Jean XXIII (Encyclique
Pacem in terris § 15) : Tout
homme a droit à la liberté dans le choix de son état de vie. Il a par conséquent le droit de fonder un foyer, où l'époux et l'épouse interviennent à
égalité de droits et de devoirs.
Baudin (Cours de philosophie morale) : Le mariage est
la société conjugale que créent librement un homme et une femme, quand ils engagent leur foi en vue de fonder une famille... Il est une société, et non
pas une simple association. En effet, les fins et les conditions essentielles du mariage s'imposent aux époux ... Il est une société naturelle et
morale, et non pas une société contractuelle. En effet, ses fins et conditions sont prédéterminées par la nature et la morale... La société conjugale est
une, d'une unité que peut seul lui assurer le mariage monogamique... Elle doit semblablement être stable, d'une stabilité que peut seul lui assurer le
mariage indissoluble.
Fordyce (Éléments
de philosophie morale) : Les lois naturelles de l'alliance
conjugale sont ... une union de conseils et d'efforts pour
travailler avec succès à l'éducation des enfants et, en général,
aux intérêts communs de la famille.
Fergusson (Institutions
de philosophie morale) : Plusieurs des devoirs des maris et
des femmes sont conventionnels, et appartiennent comme tels à la
jurisprudence ; mais c'est le cœur qui doit conduire dans leur
observation.
Qiu
Xiaolong (Les courants fourbes du lac Tai) : Selon la
médecine traditionnelle chinoise, on n'atteint l'équilibre entre
le yin et le yang que dans le mariage.
- Science juridique. Les mêmes raisons conduisent à inviter le législateur à protéger le mariage et la famille. Lorsque l’union d’un homme et d’une femme est consacrée par la cérémonie de mariage, on parle de « famille légitime » donc conforme au droit naturel (voir : Légitimité*).
Voir :
Tableau des incriminations protégeant
l'institution du mariage (selon la science criminelle)
Voir :
La prohibition de la bigamie en droit occidental
(Travaux préparatoires du Code criminel canadien)
Marty et Raynaud (Droit civil) : Le mariage fonde la
famille légitime, et il confère la légitimité aux enfants issus de cette union.
Conseil Constitutionnel 28 janvier 2011 (n° 2010-92
QPC) : Considérant que la liberté du mariage ne restreint pas la compétence que le législateur tient de l'art. 34 de la Constitution pour fixer les
conditions du mariage dès lors que, dans l'exercice de cette compétence, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel.
Considérant, d'une part, que le droit de mener une vie familiale normale résulte du dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 qui dispose :
« La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » ; que le dernier alinéa de l'art.75 et l'art. 144 du
Code civil ne font pas obstacle à la liberté des couples de même sexe de vivre en concubinage dans les conditions définies par l'article 515-8 de ce Code
ou de bénéficier du cadre juridique du Pacte civil de solidarité régi par ses art. 515-1 et suivants ; que le droit de mener une vie familiale normale
n'implique pas le droit de se marier pour les couples de même sexe ; que, par suite, les dispositions critiquées ne portent pas atteinte au droit de
mener une vie familiale normale.
- L’institution du mariage s’impose aux membres du pouvoir législatif, qui doivent le considérer comme un Intérêt protégé* majeur. L’histoire nous enseigne qu’il n’y a pas de Société* sans famille vigoureuse, et pas de famille vigoureuse sans mariage stable.
Platon (Des lois) : Pour qu’une République soit
bien ordonnée, les principales lois doivent être celles qui règlent le mariage.
Charron (De la sagesse, 1601) : L’état de mariage
est comme le fondement et la fontaine de la société humaine, d’où sourdent les familles et d’elles les républiques.
Pierre
et Martin (Cours de morale pour l'enseignement primaire) : L’intervention
de l'État dans la célébration du mariage constate et proclame la
fonction sociale de la famille.
Leclercq (Leçons
de droit naturel - T.III, La Famille) : Le mariage
est d'une telle importance sociale, puisqu'il détermine les
liens de famille, que la collectivité peut exiger, dans l'acte
constitutif du mariage, des conditions de publicité ou de
solennité qui l'authentiquent. Comme la famille est une
institution qui tend au bien général des hommes, ceux qui
veulent se marier n'ont pas le droit de se dérober à cette
exigence motivée par le bien général, et leur union ne peut être
un mariage, s'ils refusent de se soumettre.
On a longtemps considéré que le mariage d’un jeune homme et d’une jeune fille relevait du droit familial et non des droits individuels. C’est pourquoi pendant des siècles les unions ont été, sinon organisées, du moins contrôlées, par la famille de chacun des futurs conjoints (le plus souvent dans l'intérêt des futurs époux).
Code annamite de Gia Long, reprenant le Code des
Ts’ing : Lorsqu’un jeune homme et une jeune fille contractent mariage, il faut absolument que les deux familles soient d’accord et
consentent.
De nos jours, le mariage est tenu pour un droit individuel. Aussi la liberté du consentement au mariage des futurs époux est-elle exigée par les récentes Déclarations de droits de l’homme, sans que les parents aient à être consultés.
Déclaration universelle des droits de l’homme de
1948 : Article 16. À partir de l’âge nubile, l’homme et la femme, sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion, ont le
droit de se marier et de fonder une famille. Ils ont des droits égaux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution.
Code pénal soviétique de 1962 : Le fait
d’obliger une femme à contracter mariage ou le fait de l’obliger à poursuivre la cohabitation conjugale, de même que le fait de s’opposer à son mariage,
sont punis de la privation de liberté pour une durée de deux ans au plus.
- Conditions rationnelles du mariage. Il est très largement admis que les pouvoirs publics peuvent poser certaines conditions à la conclusion du mariage, notamment des conditions de santé concernant les enfants à venir (p.ex. interdiction des mariages entre trop proches parents, ou encore prohibition de la Polygamie*).
Leclercq (Leçons
de droit naturel - T.III, La Famille) : On a
toujours admis que l'État établisse des empêchements de mariage
motivés par des conditions d'ordre social... L'Église n'a jamais
émis d'opposition de principe contre des empêchements de mariage
résultant de causes d'ordre social
Le consentement des parents n'est pas exigé d'une façon absolue
par le droit naturel.
Marty
et Raynaud (Droit civil - Les personnes) : La loi tient
compte de l'aspect physiologique du mariage en imposant des
conditions minimum d'aptitude physique qui sont
relatives au sexe et à l'âge... à la puberté et à la santé... Un âge minimum est
exigé, il faut que les futurs époux aient atteint l'âge de la
puberté... Un certificat prénuptial est exigé [mais il est
de portée très limitée].
Carbonnier (Droit civil -
T.I) : L'élément biologique est le premier dans l'ordre
naturel... Il est sous-entendu que les deux époux doivent être
de sexe différents, faute de quoi il y aurait inexistence du
mariage.
- Célébration du mariage. Pendant des siècles, le mariage a relevé du pouvoir spirituel ; depuis la Révolution il dépend du pouvoir temporel. C’est pourquoi l’art. 433-21 C.pén. interdit aux ministres du culte de célébrer un mariage religieux avant le mariage civil (anciens art. 199 et 200). Il est au demeurant interdit à un agent public d'officialiser un mariage fictif.
Trib.pol. Dunkerque 9 mars 1972 (Gaz.Pal. 1972 II
436 note Doucet) : Est co-auteur de cette infraction le vicaire général de l’évêché qui a donné un avis favorable.
Cass.crim. 26 septembre 1995 (Gaz.Pal. 1996 I
Chr.crim. 4) : Mme Y... a été citée directement devant
le tribunal correctionnel, à la requête du procureur de la
République, du chef de faux dans un document administratif, "en
l’espèce un acte de mariage", par une personne chargée d’une
mission de service public, agissant dans l’exercice de ses
fonctions ; pour la déclarer coupable de cette infraction, les
juges du second degré énoncent que la prévenue, en sa qualité
d’officier de l’état civil, a signé un acte constatant un
mariage fictif ; ces faits, à les supposer établis, constituent
le crime de faux commis dans une écriture publique, par un
officier de l’état civil, prévu et réprimé par l’art. 441-4,
alinéa 3, C.pén.
- Protection du mariage. L’individualisme, aggravant l’hédonisme ambiants, a conduit le législateur contemporain à sacrifier le mariage sur l’autel de la démagogie. Ne subsistent plus guère de nos jours que l’interdiction de la Bigamie*. Certains codes contemporains ajoutent à cela l’interdiction de faire contracter un mariage nul.
Vitu (Commentaire du Juris-classeur) : L’art. 433-21
est une disposition de police et de sûreté, au sens de l’art. 3 C.civ. ; la règle qu’il contient oblige par conséquent tous ceux qui « habitent
le territoire », quelle que soit leur nationalité et sans avoir égard à leur statut personnel.
Code pénal grec de 1950 : Celui qui, par des
moyens frauduleux, entraîne quelqu’un à contracter un mariage nul ou annulable, est puni d’une peine d’emprisonnement.
- L’escroquerie au mariage. Cette variété de l’Escroquerie* consiste, de la part d’un homme ou d’une femme, à feindre de vouloir contracter mariage avec sa victime ; puis, sous prétexte de dépenses à effectuer dans ce but, à se faire remettre des sommes d’agent avant de disparaître. Comme il est de règle en matière d’escroquerie, un simple mensonge ne suffit pas à caractériser le délit ; des Manœuvres frauduleuses* caractérisées, rendant la promesse d’union crédible, doivent s’y ajouter.
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », n° 114, p.57
Trib.corr. Paris 23 février 1970 (Gaz.Pal. 1971 II
543) : Tous les éléments du délit d’escroquerie se trouvent réunis lorsqu’il y a eu remise de sommes d’argent déterminée par une promesse de
mariage mensongère, elle-même accompagnée d’actes extérieurs la rendant vraisemblable.
Affaire Landru (Les grands procès) : En
1919, après plusieurs plaintes déposées par des familles à la suite de la disparition de parentes, on arrête un homme qui, sous différentes identités, se
livre à « l’escroquerie au mariage » : Landru… Landru ne se départit à aucun moment de son système de défense : il est un escroc,
mais pas un assassin.
- Droit positif. Depuis
une loi du 17 mai 2013, votée pour des motifs bassement
électoraux, le législateur a admis qu'un
« mariage
» pouvait unir toute personne (tout
sujet de droit à l'exclusion des personnes morales).
Il demeure toutefois
interdit à un agent public d'officialiser un mariage fictif.
Le
Conseil Constitutionnel a lâchement estimé, le 17 mai 2013, qu'il
ne lui appartient pas de substituer son appréciation à celle du
législateur.
MARIAGE CIVIL ET MARIAGE RELIGIEUX - Sur l'obligation de célébrer le mariage civil avant le mariage religieux.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », n° 117, p.61
MARINE MARCHANDE
Cf. Mutinerie*, Obéissance hiérarchique*, Sédition*.
La vie d’un petit groupe d’hommes, pendant un temps relativement long, dans un espace limité et dans un milieu hostile, soulève des problèmes spécifiques. Ils ont reçu leur solution dans le Code disciplinaire et pénal de la marine marchande, où percent notamment les notions de Responsabilité* et d’Obéissance hiérarchique*.
Fiore (Traité de droit pénal international) : Il y a
sédition parmi l’équipage dans le cas où les individus faisant partie de l’équipage d’un navire ou bâtiment de mer se seraient emparés dudit bâtiment par
force ou violence envers le capitaine ou commandant.
Cass.crim. 19 juin 1991 (Gaz.Pal. 1992 I somm.
28) : La perte du navire constitue un élément constitutif de l'infraction prévue par l’art. 81, alinéa 2 du Code disciplinaire et pénal de la
marine marchande.
Exemple (Marseille-plus 11 octobre 2005) :
L’association française des capitaines de navires a dénoncé hier des « pratiques inacceptables » visant plusieurs officiers de la SNCM
depuis le début du conflit. « Plusieurs commandants ont été insultés, menacés physiquement et même expulsés de leur navire … La banalisation de tels
agissements serait dangereuse ».
Lorsqu'une infraction pénale est commise à bord d'un navire, il appartient au commandant de faire toutes les constatations nécessaires pour permettre l'ouverture d'une enquête de police. Il doit notamment préserver les preuves, et éventuellement s'assurer de la personne du suspect.
Code disciplinaire
et pénal de la marine marchande. Art. 43 : Est puni ...
de l'amende prévue pour les contraventions de la 5e classe, tout
capitaine qui refuse ou néglige, sans motif légitime : 1° De
faire les constatations requises en cas de crime ou de délit
commis à bord.
Art. 64 : Tout capitaine requis par l'autorité compétente,
comme il est dit aux articles 30 et 31, qui, sans motif
légitime, refuse de se charger du dossier de l'enquête ou des
pièces à conviction ou d'assurer le transport d'un prévenu dans
les conditions prévues à l'article 31, ou qui ne livre pas le
prévenu ou le dossier confié à ses soins à l'autorité maritime
désignée pour les recevoir, est puni de 3 750 euros d'amende.
MARQUE
Cf. Mutilation*, Peines corporelles*, Travaux forcés*.
Voir : Jean-Paul Doucet,
« La loi pénale » (4e éd.), n° III-213, p.427
Flétrissure au fer rouge, marquant autrefois à vie les auteurs de certains crimes. Ainsi, les criminels condamnés aux galères étaient flétris des trois lettres « GAL ». Cette sanction, attentatoire à la dignité de la personne humaine, et susceptible de faire obstacle plus tard à la réinsertion dans la société, est de nos jours proscrite.
Jousse (Traité de la justice criminelle) : La marque
avec un fer chaud est presque toujours jointe à celle des galères. Elle a été introduite, afin qu’on puisse reconnaître à cette marque ceux qui ont subi
ce supplice, et qu’on les puisse punir plus sévèrement en cas de récidive.
Du Boys (Histoire du droit criminel) : Floyd fut dégradé de
noblesse et voué à l'infamie... Il fut condamné à être promené à cheval, de la prison de la flotte jusqu'à Cheapside, la figure tournée vers la queue du
cheval, et en tenant la queue dans sa main ; puis de rester là deux là deux heures au pilori, et à être marqué sur le front de la lettre K.
Toureille
(Crime et châtiment au Moyen-âge) : La marque présente un
avantage sur la mutilation ; elle permet de reconnaître la
juridiction qui l'a ordonnée. Le plus souvent appliquée à
l'épaule, elle avait un autre intérêt : celui d'éviter les
effets d'une stigmatisation propre à engendrer la récidive.
Décret des 26 septembre et 30 décembre 1791. Art. 2 : La
marque est abolie de ce jour.
MARQUES DE L’AUTORITÉ
Cf. Contrefaçon*, Sceau de l'État*, Timbres*, Usage irrégulier d'un document officiel*.
Voir : Jean-Paul Doucet,
« La protection de la Société », n° II-I-116, p.354 /
II/I-107, p.340 / n°II-II-116, p.471 (note 4)
Les art. 444-1 et s. C.pén. (art. 139 et s. ancien) répriment la contrefaçon ou la falsification des marques de l’autorité publique, notamment du Sceau de l’État*, des timbres nationaux et des poinçons.
Rassat (Juris-classeur pénal art. 444-1) : D’une façon
générale on peut dire que sont interdites les imitations d’actes qui rentrent normalement dans la compétence d’une personne investie de pouvoirs
officiels.
Cass.crim. 18 juillet 1963 (Gaz.Pal. 1964 I 70,
affaire des Faux-vrais Napoléons) : L’art. 142, qui punit la contrefaçon des marques d’une autorité quelconque, a une portée générale et vise
toutes les contrefaçons de marques apposées au nom du Gouvernement, quelles que soient la nature et la destination de la marque contrefaite dans une
intention dolosive.
Cass.crim. 9 mars 2004 (Bull.crim. n° 62
p.234) : Caractérise le délit prévu et puni par l’art. 444-3 1° C.pén. la reproduction de la figure de la Liberté, telle qu’elle est prévue pour
le sceau de l’État, avec l’inscription, sur le pourtour, « ministère de la justice », qui donne à cet ensemble l’apparence d’une marque de
l’autorité publique.
Cass.crim. 9 mars 2004 (Bull.crim. n°63
p.238) : Caractérise le délit prévu et puni par l’art. 444-5 C.pén. la fabrication et la distribution, sur le pare-brise de véhicules, de tracs
publicitaires dont le recto, qui prend la forme de faux avis de contravention au stationnement, présente, avec l’imprimé officiel utilisé pour verbaliser
les conducteurs, une ressemblance étroite de nature à causer une méprise dans l’esprit du public.
MARSEILLAISE - Voir : Symboles*.