DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre I
(Onzième partie)
INTERNEMENT
Cf. Détention*, Emprisonnement*, Réclusion criminelle*.
L’internement consiste à priver une personne de sa Liberté physique* (cas de l’enfermement dans un camp de
concentration).
- L’internement est licite, soit lorsqu’il fait suite à une décision judiciaire, soit lorsqu’il emporte placement d’une personne atteinte de
troubles mentaux dans un établissement spécialisé, dès lors qu’il a été précédé une procédure régulière ayant abouti à une décision motivée.
Paris 13 avril 1999 (Gaz.Pal. 2000 I sommaire 267) : Si, selon l’art. 5 § 1 Conv.EDH, tout homme a droit à la liberté, cette disposition ne fait pas obstacle à ce qu’un aliéné soit privé de sa liberté lorsque l’aliénation est prouvée et que le trouble constaté à une ampleur légitimant l’internement… La décision de placement d’office du préfet doit être motivée et énoncer les circonstances la rendant nécessaire.
Conseil Constitutionnel 9 juin 2011 (Gaz.Pal. 30 juin 2011 p.12) : L'hospitalisation d'office est réservée aux cas dans lesquels elle est adaptée, nécessaire et proportionnée à l'état du malade ainsi qu'à la sûreté des personnes ou la préservation de l'ordre public.
Exemple (Ouest-France 9 juillet 2004) : Mercredi soir, V…, jugé irresponsable mentalement, et donc pénalement, du double meurtre de ses parents le 25 septembre 2000, avait regagné, libre, le centre de soins où il était hébergé. Le préfet vient de prendre une mesure d’internement d’office à l’égard du jeune homme estimant, selon l’avis du psychiatre, qu’il nécessite des soins en milieu spécialisé.
INTERNET - Voir : Blog*, Forum de discussion*, Injure*, Presse*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », sur les dangers d'Internet pour les mineurs, n° 330 et 435
INTERPOL
Cf. Police (judiciaire)*, Police scientifique*.
L’Organisation internationale de police criminelle (Interpol), qui a son siège à Lyon, a pour mission d’intervenir dans toute situation de fait qui justifie, à quelque titre que ce soit, un acte de coopération judiciaire internationale. C’est ainsi par Interpol que peut être diffusé un mandat d’arrêt international. Voir le décret du 26 mai 1975.
Montreuil (Juris-classeur de procédure pénale) observe que la mondialisation de la quasi-totalité des activités humaines, la mobilité croissante des personnes et des biens, l’abaissement des frontières intérieures de l’Europe, génèrent une délinquance présentant un caractère international qui requiert une coopération internationale accrue de tous les responsables de l’ordre public.
Cons. d’État 29 décembre 1997 (Gaz. Pal. 1998II panor.adm. 125) : L’organisation internationale de police criminelle Interpol n’est pas une autorité administrative française ; il n’appartient pas à la juridiction administrative de connaître de ses décisions.
INTERPOSITION DE PERSONNE
Cf. Fraude*, Homme de paille*, Prête-nom*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-I-205, p.168-169
Il y a interposition de personne lorsque celui qui est ostensiblement présenté comme auteur ou bénéficiaire d’un acte juridique n’intervient en réalité
que pour le compte d’une autre personne.
Cette fraude se rencontre par exemple lorsqu’un délinquant, frappé d’une déchéance de droit, tente de tourner cette interdiction en recourant à un tiers
complaisant ; elle ne fait évidemment pas obstacle à des poursuites répressives.
Digeste de Justinien (48, 19, 34, 1). Papinien : D'après le sens du sénatus-consulte, sont soumis à la peine des délateurs ceux-là qui, par une personne interposée, ont fourni des moyens aux délateurs.
Code pénal belge. Art. 246. Est constitutif de corruption passive le fait pour une personne qui exerce une fonction publique de solliciter ou d’accepter, directement ou par interposition de personnes, une offre, une promesse ou un avantage de toute nature, pour elle-même ou pour un tiers, pour adopter un des comportements visés à l’art. 247.
Code pénal de Monaco. Art. 328-3 : Est punie des peines de la banqueroute frauduleuse toute personne qui ... a frauduleusement produit dans une procédure de cessation des paiements, soit en son nom, soit par interposition de personne, des créances supposées.
Trib.corr. Valence 30 juin 1987 (Gaz.Pal. 1987 II 644) : Pour que le délit d’ingérence soit constitué, il faut que soit rapportée la preuve que l’agent public est concerné personnellement, soit ouvertement, soit par des actes simulés, soit par interposition de personne, par l’acte d’adjudication.
Cass.crim. 9 février 2005 (Bull.crim. n° 48 p.154) : Le président du conseil général, qui a fait signer par un chef de service de cet organisme un marché attribué à une entreprise gérée par ses enfants, doit être considéré comme ayant conservé la surveillance de l’opération, nonobstant la délégation de signature qu’il a donnée.
INTERPRÉTATION DE LA LOI
Cf. Analogie*, Application de la loi dans le temps*, Arrêt de règlement*, Avis de la Cour de cassation*, Casuistique*, Déni de justice*, Expressis verbis*, Justice déléguée et justice retenue*, Légalité*, Question prioritaire de constitutionnalité*, Ratio legis*, Travaux préparatoires*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-108, p.33 / n° I-II-I-102, p.162 / n°I-III-I-108, p.264
Voir : R. Garraud, L'interprétation des lois pénales
Voir : J.A. Roux, L'interprétation des lois pénales
- Notion. Même un législateur méticuleux ne saurait rédiger des lois (nécessairement générales, abstraites et
impersonnelles) applicables de manière évidente à tous les agissements asociaux (cas d’espèce, concrets et individuels). Il survient toujours des
situations imprévues où on peut légitimement se demander si la loi évoquée s’applique ou non au cas d’espèce.
« Interpréter » un texte c’est le formuler dans des termes tels qu’il peut être mis en regard du présent cas d’espèce, afin de voir s’il y
correspond ou non.
Larousse. Interpréter : chercher à rendre intelligible, expliquer, commenter, donner une signification.
Montaigne (Essais III-XIII) a souligné le danger des interprétations doctrinales et jurisprudentielles. Il se sent par expérience que d’innombrables interprétations dissipent la vérité et la rompent. Il y a plus de peine à interpréter les interprétations qu’à interpréter les choses, et plus de livres sur les livres que sur autre sujet.
Bacon (Dignité et accroissement des sciences) : Le juge qui s'écarte de la lettre devient législateur... La pire tyrannie est celle qui met la loi sur le chevalet [de torture par allongement].
Pufendorf (Le droit de la nature) : Voici un exemple. Il y a une loi qui défend aux Étrangers, sous peine de la vie, de monter sur les murailles de la ville. Les Ennemis ayant voulu escalader la muraille, un Étranger y est monté, et en a jeté quelques un en bas. Faut-il le punir comme ayant violé la loi ? Si l'on suit la lettre, ou les termes seuls de la Loi, l'Étranger est perdu ; mais si on entre dans l'esprit de la Loi et dans l'intention du Législateur, sur quoi il faut sans contredit se régler, l'Étranger doit être absous. Car le but de la Loi est certainement qu'aucun Étranger ne monte sur les murailles de la Ville pour en épier les points forts et les points faibles ; ce qui n'a point lieu dans le cas dont il s'agit.
- L’inévitable interprétation peut relever, soit du législateur, soit de l’administration, soit des tribunaux, soit encore de la doctrine. En droit criminel, tous doivent s'efforcer de prendre comme point de départ le sens usuel des mots et des phrases figurant dans le texte, afin de ne pas trop s'écarter de ce qu'ont pu comprendre les justiciables.
Gousset (Théologie morale) : L'interprétation doctrinale est celle qui est fondée sur l'explication que les docteurs nous donnent de la loi. L'interprétation usuelle est celle qui est consacrée par l'usage [judiciaire]. L'interprétation authentique appartient au législateur.
Code pénal de Porto Rico. Art. 13 : Les mots et les phrases seront interprétés selon le contexte et la signification sanctionnée par l'utilisation commune et courante.
- Interprétation législative (authentique). L’interprétation authentique est celle donnée par le législateur lui-même. L’histoire nous révèle que certains souverains se sont réservés l’interprétation des règles qu’ils ont édictées, de peur qu’elles ne soient dénaturées par les praticiens.
Constantin, dans l'une de ses Constitutions, visant l'interprétation dans un cas d'espèce litigieux, a écrit : Il ne convient et il n'appartient qu'à nous de donner une interprétation moyenne entre l'équité et le droit.
Justinien (Préface du Digeste) : Comme il n’y a que les choses divines qui soient parfaites, et que le sort de la jurisprudence humaine est de s’étendre à l’infini… il pourra s’élever des causes qui ne se trouveront pas décidées par les lois que nous avons recueillies. Dans ce cas il faudra avoir recours au Prince, car c’est Dieu même qui l’a mis au-dessus des hommes, à l’effet de corriger ou de décider, par de nouvelles lois, les cas qui se présentent.
Code de droit canon. Can. 16 : Le législateur interprète authentiquement les lois... L’interprétation authentique donnée sous forme de loi a la même force que la loi elle-même et doit être promulguée ; si elle ne fait que déclarer le sens des termes de la loi en eux-mêmes certains, elle a effet rétroactif ; si elle restreint ou étend la portée de la loi, ou si elle explicite une loi douteuse, elle n’a pas d’effet rétroactif.
Ordonnance civile d’avril 1667 : S’il survient quelque doute ou difficulté sur l’exécution de quelques articles de nos ordonnances, nous défendons à nos cours de les interpréter, mais voulons qu’en ce cas elles aient à se retirer par devers nous, pour apprendre ce qui sera notre intention.
Loi du 4 nivôse an V (24 décembre 1794) : Le Conseil... considérant qu'il est instant de faire cesser les doutes qui se sont élevés sur le sens de l'article 17 de la loi du 9-15 décembre, relatif à la restitution des biens des religionnaires fugitifs ; prend la résolution suivante : - La prescription pourra être opposée par les héritiers et successeurs à titre universels des parents religionnaires fugitifs, s'ils ont possédé lesdits biens pendant l'espace de trente ans.
Gousset (Théologie morale) : L’interprétation authentique appartient au législateur. C’est à celui qui a droit de porter une loi, de l’interpréter, de la modifier, de l’étendre ou de la restreindre. Cette interprétation est obligatoire comme la loi ; mais elle n’oblige qu’autant qu’elle est promulguée, à moins qu’il ne s’agisse d’une simple explication du sens clairement expliqué par le texte.
À l'expérience, cette technique s'attire, outre le reproche de contrarier l'adaptation de la règle légale, abstraite, générale et impersonnelle, aux
particularités du cas d'espèce (et de prolonger les procédures), celui de renforcer considérablement le pouvoir politique et de nier le principe
rationnel de la séparation des fonctions législative et judiciaire.
La question se pose de manière nouvelle depuis l'institution de la Question Prioritaire de Constitutionnalité*. Les
décisions du Conseil constitutionnel, organe politique, tendent en effet à supplanter les anciens Arrêts de principe de la Cour de cassation, organe
judiciaire.
Screvens (Novelles de droit pénal belge, T.III p.210) : En défendant au juge de suspendre le jugement d’une contestation pour demander au législateur une interprétation, la loi garantit l’indépendance de l’autorité judiciaire. Le déni de justice est donc l'infraction qui constitue le contrepoint de l'interdiction de prononcer par voie de disposition générale.
Guillaume (Le rôle de la doctrine en droit criminel) : Une théorie pure du droit criminel n’accepterait qu’une interprétation authentique des textes, mais elle dénierait aux véritables spécialistes du droit le rôle qui leur sied le mieux, d’autant plus que le législateur s’est rarement donné la peine d’atteindre un tel niveau de précision dans la définition des termes récurrents du droit criminel. Le juge est l’interprète privilégié de ce droit, il a un rôle premier.
Par exception le Coran, dicté par Allah lui-même à Mahomet, ne saurait, selon les puristes, donner lieu, ni à une interprétation, ni à une traduction, ayant une valeur sacrée.
Coran (Sourate XII, v.2) : Nous (Allah) l'avons fait descendre du ciel en langue arabe, afin que vous le compreniez.
Coran (Sourate VI, v.67) : Lorsque tu vois les incrédules entamer la conversation sur nos enseignements, éloigne-toi d'eux jusqu'à ce qu'ils entament une autre matière.
Gondal (Christianisme et Islamisme) : Le Coran, livre incréé et éternel, promulgation authentique des desseins d'Allah, fait de l'Islam une religion antérieure et supérieure à toutes les autres, la religion première, définitive, éternelle... Défense absolue de traduire l'original en une langue étrangère quelconque ; et donc obligation pour tout croyant, soucieux de culture religieuse, de comprendre et de parler le dialecte qoraïchite, élevé de ce fait à la dignité de langue universelle, sacrée et littéraire, de la communauté musulmane.
- Interprétation administrative. Lorsqu’elle est amenée à interpréter un texte de loi, l’administration a tendance à retenir le sens qui lui facilite la tâche et qui la dégage de toute responsabilité. C’est pourquoi les tribunaux répressifs ne s’estiment pas liés par une interprétation administrative. Le nouveau Code pénal permet toutefois à un prévenu, induit en erreur par une administration, de se dégager en invoquant une erreur de droit.
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : Les travaux préparatoires du nouveau Code laissent entendre qu’il y a erreur invincible dans le cas d’indications erronées émanant de l’administration.
Cass.crim. 24 novembre 1998 (Gaz.Pal. 1999 I Chr.crim. 52) : Pour faire bénéficier à bon droit le prévenu de l’art. 122-3 C.pén., le tribunal a pu admettre que l’erreur invoquée résultait, en l’espèce, d’une information erronée fournie par l’Administration.
- Interprétation judiciaire. L’interprétation judiciaire d'une loi pénale est celle donnée par les tribunaux
répressifs, notamment par la Cour de cassation ; elle peut être littérale (dans les droits primitifs), extensive (dans les droits répressifs) ou
restrictive (dans les droits libéraux).
On admet généralement de nos jours que les juges doivent d’abord rechercher le but poursuivi par le législateur (ratio legis), afin de prolonger
sa pensée (on parle en ce sens d’interprétation téléologique).
St Paul, à propos de l'interprétation de la loi divine, a
justement observé que la lettre tue alors que l'esprit
vivifie (littera occidit, spiritus autem vivificat).
Voir : G. Levasseur, Les problèmes fondamentaux du droit pénal spécial
Commission de réforme du droit du Canada (Document n° 12, 1979) : Le but de la Commission a été de concilier le lettre et l'esprit de la loi.
Cass. crim. 12 mars 1984 (Bull.crim. n°102 p.261) : Le juge ne peut accorder au prévenu le bénéfice du doute, au motif que la loi visée par la prévention est obscure ou que son interprétation est incertaine, sans méconnaître ses obligations et violer l’art. 4 C.civ...
Sur l'interprétation littérale
La Ferrière (Histoire du droit français) : L'école des Accuse et des Barthole, au 13e, au 14e et au 15e siècle, travaillait sur le texte des lois romaines, s'attachait à répandre, à imposer la lettre de la loi, et renfermait les études et les esprits dans cette limite rigoureuse du texte et de l'interprétation littérale.
Trib.pol. Paris 8 juin 2000 (Gaz.Pal. 2000 Chr.crim.
2497). Le prévenu avait été verbalisé du fait de circulation en patins à roulettes sur la voie publique.
L'accusation s'appuyait sur l'art. 113 de l'ordonnance de Police du 25 juillet 1862 qui disposait : "Les jeux de palets, de tonneaux, de siam,
de quilles, de volants, de toupies, sabots, bâtonnets, cerfs-volants et tous autres susceptibles de gêner la circulation et d'occasionner des accidents
sont interdits sur la voie publique".
Le Tribunal observe : Il se déduit de l'économie de ce texte que sont interdits les jeux nécessitant des accessoires encombrant la voie publique et
pratiqués ordinairement en groupe ; ainsi le jeu de tonneaux consistait à lancer un palet dans une sorte de coffre percé de trous, le jeu de siam était
un jeu de quilles dans lequel la boule était remplacée par un disque au bord taillé en biseau et le jeu de sabot était une variante du jeu de toupie
qu'on faisait tourner sur la pointe en la fouettant et qui était fabriquée initialement à partir d'un morceau de vieux sabot.
Le tribunal conclut : Il apparaît que l'agent verbalisateur a voulu, dans le silence de la loi, adapter un texte manifestement obsolète à une
situation de près de 140 ans sa cadette, sans pouvoir faire entrer celle-ci dans le corset étroit du texte avec lequel on a voulu l'habiller ; il y aura
lieu en conséquence de renvoyer le prévenu des fins de la poursuite.
Sur l'interprétation extensive
Code pénal soviétique de 1926. Art. 16 : Si tel ou tel acte socialement dangereux n'est pas nettement prévu par le présent Code, le fondement et les limites de la responsabilité encourue à son sujet sont déterminés conformément aux articles du Code qui prévoient les délits dont la nature s'en rapprochent le plus.
Seiitiro Ono (Les sources du droit pénal, in Mélanges Gény) : On ne peut se refuser à l’interprétation extensive ou à l’analogie, à condition que ce soit indispensable au point de vue de l’intérêt général, et que la conscience sociale soit assez mûre pour cela. Cela doit être certainement assez rare. Mais on pourrait en prendre comme exemple le cas de vol d’électricité, constaté par la jurisprudence de la Cour de cassation de la France et par la Cour suprême du Japon.
Cass.crim. 3 août 1912 (S. 1913. 1. 337, note critique J. A. Roux) : L’électricité est livrée par celui qui la produit à l’abonné qui la reçoit pour l’utiliser ; elle passe, par l’effet d’une transmission qui peut être matériellement constatée, de la possession du premier dans la possession du second ; elle doit, dès lors, être considérée comme une chose, au sens de l’art. 379 C. pén.
Sur l'interprétation par recherche de la volonté du législateur
Benoît XVI, (Discours, Collège des Bernardins, 12 septembre 2008) : La parole de Dieu n'est jamais simplement présente dans la seule littéralité du texte. Pour l'atteindre, il faut un dépassement et un processus de compréhension qui se laisse guider par le mouvement intérieur de l'ensemble des textes.
Digeste de Justinien, 48, 10, 22, 8. Paul : Celui qui de sa main a écrit à son profit l'assignation d'un affranchi est punissable, non dans les termes, mais dans le sens du sénatus-consulte.
Bertaut (Le directeur des confesseurs) Lyon 1674 p. 21 : Il n’y a pas de loi qui oblige en conscience de manière si générale, qu’il ne soit permis en certains cas et pour certaines circonstances, d’agir contre elle. Car le législateur, en faisant une loi universelle, ne peut pas prévoir ni y comprendre tous les cas particuliers qui peuvent arriver, accompagnés de certaines circonstances, tellement équitables, qu’il serait hors de la raison de les comprendre dans la généralité de la loi, et, partant, ils doivent être exceptés, selon l’interprétation de l’intention du législateur, lequel en faisant sa loi, s’il eût été interrogé sur un tel cas, il eût assurément répondu n’entendre qu’ils y fussent compris.
Domat (Traité des lois, 1689) : Pour bien entendre le sens d'une loi, il faut en peser tous les termes et le préambule, lorsqu'il y en a, afin de juger de ses dispositions par ses motifs et par toute la suite de ce qu'elle ordonne, et ne pas borner son sens à ce qui pourrait paraître dans une partie tronquée... Lorsque les expressions des lois sont défectueuses, il faut en remplir le sens selon leur esprit.
Gousset (Théologie morale) : Premièrement, pour saisir le sens d'une loi, il faut commencer par la lire en entier, et en rapprochant toutes les parties les unes des autres. Secondement, les termes de la loi doivent se prendre dans leur sens naturel, ou dans le sens qui est le plus consacré par l'usage... Quatrièmement, si une loi qui offre quelque difficulté a quelque rapport à d'autres lois, il faut préférer à toute autre interprétation celle qui résulte de ces lois...
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : Tout en reconnaissant que la lettre de la loi constitue une frontière que l’interprète ne doit pas franchir sans raison grave, la méthode téléologique attribue cependant une importance première au but de la loi. Elle se fonde sur la ratio legis, c’est-à-dire sur la volonté déclarée ou présumée du législateur, qui doit pouvoir l’emporter quand la lettre a trahi l’esprit de la loi.
Ordonnance de Blois de 1579. Son art. 30 disposait que "En tout monastère régulier... les religieux et religieuses vivront en commun". Mais le contexte permettait de voir que le législateur distinguait les monastères d'hommes et les monastères de femmes ; en sorte que cette disposition ne décrétait pas la mixité dans les monastères, contrairement à ce que soutenaient certains commentateurs facétieux.
Avant d'acquitter un prévenu, au bénéfice du doute sur le sens de la loi, le juge doit s'assurer que celle-ci ne peut être adaptée à son temps dans le respect de la pensée du législateur : interprétation téléologique.
Cass.crim. 14 février 1812 (S.1812 I 331) : Les mots hôtellerie et auberge sont des expressions générales qui, dans leur acception ordinaire et reconnue, comprennent tous les hôtels et maisons où le public est reçu, moyennant prix ou rétribution, à prendre le logement ou la nourriture ; en conséquence on doit, sous la dénomination d'hôtelleries et auberge, comprendre les cabarets qui sont des lieux où le public et les voyageurs sont reçus moyennant un prix.
Cass.crim.
1er avril 1965 (Bull.crim. n° 106 p. 235) : Le demandeur a
fait circuler sur la Seine un bateau à moteur diesel dépourvu de
permis de navigation ; la Cour d’appel l’a condamné de ce chef
en lui faisant application de l’art. 138 C.voies navigables, qui
punit d’une amende de 24.000 F à 400.000 F tout propriétaire ou
chef d’entreprise qui a fait naviguer un bateau à vapeur sans un
permis de navigation délivré par l’autorité administrative dans
les conditions fixées par règlement d’administration publique.
Cette décision est justifiée ; en effet, l’art. 138 précité
n’est que la reproduction de l’art. 8 de la loi du 21 juillet
1856, introduit dans le Code des voies navigables par le décret
du 13 octobre 1956 qui n’avait pas le pouvoir d’en modifier la
rédaction ; l’art. 8 promulgué à une époque où il n’existait pas
d’autre procédé de propulsion mécanique des bateaux que les
machines à vapeur, a soumis à l’obligation du permis de
navigation tous les bateaux à propulsion mécanique par
opposition aux bateaux à voile ou à rame ; la découverte
ultérieure de nouveaux procédés de propulsion mécanique ne
saurait avoir pour effet de dispenser les bateaux qui en sont
pourvus, d’une obligation aussi essentielle ; ainsi, sans porter
atteinte au principe d’interprétation restrictive de la loi
pénale, l’extension de l’article 138 à tous les modes de
propulsion mécanique correspond à la seule interprétation
raisonnable dudit article.
Cass. belge 2e Ch. 18 novembre 1992 (arrêt de Bonvoisin c. Raes et Smets) : S’il est permis au juge répressif d’appliquer une disposition pénale de la loi à des faits que le législateur était dans l’impossibilité absolue de pressentir à l’époque de la promulgation de cette disposition, c’est à la double condition que la volonté du législateur d’ériger des faits de cette nature en infraction soit certaine et que ces faits puissent être compris dans la définition légale de l’infraction.
En cas de doute, les juges doivent retenir le sens le moins rigoureux, le plus favorable à la défense. On parle alors d'interprétation stricte (voir : v° Tabac, Cass.crim. 26 novembre 2014).
Gousset (Théologie morale) : Les lois qui établissent des peines doivent s'interpréter avec tout le tempérament dont elles sont susceptibles, à la différence des lois favorables qui s'interprètent largement.
Vouin (Manuel de droit criminel) : Le principe est toujours le principe de l'interprétation stricte, mais il faut l'entendre avec intelligence.
Digeste de Justinien (47, VII, 2, 9). Ulpien : Ce sera circonscrire avec raison la portée de l'édit en disant que, si quelqu'un a commis le dommage seul et sans violence, son cas n'est pas contenu dans l'édit.
Digeste de Justinien (48, 19, 42). Hermogénien : Pour l'interprétation des lois, les peines à infliger doivent être plutôt diminuées qu'augmentées.
Code pénal du Niger. Art. 4 (loi du 13 juin 2003) : La loi pénale est d’interprétation stricte.
Cass.crim. 15 décembre 1981 (Bull.crim. n° 333 p.876) : Les lois pénales sont d’interprétation stricte.
Cass.crim.
15 décembre 1981 (7 mai 1969 (Gaz.Pal. 1969. II. 68) ) :
Les textes répressifs sont d’interprétation stricte et que les
juges ne peuvent procéder en la matière par voie d’extension ou
d’analogie.
Par acte notarié en date du 31 janvier 1966, la nommée C... a
vendu à la femme D..., un appartement sis à Grenoble ; pour
retenir à la charge de la venderesse d’avoir mis en connaissance
de cause ledit appartement à la disposition de la femme D...,
personne se livrant à la prostitution, en vue de l’exercice
habituel de la débauche, délit prévu et réprimé par l’art. 335-6
C.pén., la Cour d’appel relève que les termes de l’article
précité n’ont nullement exclu la vente et qu’au contraire,
l’expression de l’alinéa 1er « disposant à quelque titre que ce
soit », permet de retenir la vente, qui est, par le transfert de
propriété, la façon la plus complète de réaliser une mise à la
disposition.
Mais « mettre à la disposition », c’est conférer à quelqu’un
l’usage et l’utilisation d’une chose tout en conservant sur
cette dernière le droit de la reprendre à plus ou moins brève
échéance ; tel n’est pas le cas de la vente, par laquelle le
vendeur, en délivrant la chose vendue, la transporte en la
puissance et possession de l’acheteur, aux termes de l’art. 1604
C.civ. ; par ce contrat, le vendeur cède définitivement tous les
droits qu’il aura sur la chose, à l’acheteur, et, ce faisant,
épuise les siens ; il ne saurait dès lors, « mettre à la
disposition » au sens de l’article 335-6 du Code pénal. D’où il
suit que la Cour d’appel a violé les textes de loi visés au
moyen. Par ces motifs,
Casse... ; Dit n’y avoir lieu à renvoi.
Colmar 14 février 1978 (Gaz.Pal. 1978 II 590) : Il n’appartient pas au juge de suppléer ou de compléter la loi, en particulier lorsqu’il s’agit d’une loi pénale, qui ne peut être que d’interprétation stricte, sous peine de violer le principe nullum crimen, nulla poena sine lege.
Cass. 1e civ. 18 décembre 1984 (Gaz.Pal. 1985 II Panor.144) : La sanction de l’indignité successorale, peine civile de nature personnelle et d’interprétation stricte, ne peut être étendue au-delà des textes qui l’instituent.
Le principe de l'interprétation favorable à la défense s'applique non seulement aux lois de fond, mais aussi aux lois de procédure.
Cass.crim. 9 juillet 1975 (Bull.crim. n°185 p.506). L’art. 198 C.pr.pén. énonçait : Les parties et leur conseil sont admis jusqu’au jour de l’audience à produire des mémoires. Pour déclarer néanmoins irrecevable le mémoire déposé par une partie civile le jour de l’audience, la Cour énonce : Cette disposition doit être interprétée en ce sens que, pour être recevable, les mémoires produits par les parties doivent être déposés au greffe de la Chambre d’accusation au plus tard la veille de l’audience.
L'interprétation de la loi donnée par un tribunal, dans l'affaire qui lui est soumise, n'a pas de portée générale et ne peut servir que d'indication pour les cas à venir.
Code de droit canonique. Canon 16 § 3 : L'interprétation par voie de sentence judiciaire dans une affaire particulière n'a pas force de loi ; elle ne lie que les personnes et ne concerne que les questions pour lesquelles l'interprétation est donnée.
INTERPRÈTE
Cf. Droits de la défense*, Serment*, Subornation*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la
Société »
- n° II-I-222 p.362 (sur les délits pouvant être commis par un interprète)
- n° II-I-124 p.363 (sur la protection dont bénéficie
l'interprète)
Voir : Tableau des incriminations assurant le bon fonctionnement de la justice (en droit positif français)
Voir : Tableau des incriminations assurant le bon fonctionnement de la justice quant à la réunion des preuves (en droit positif français)
- Notion. L’interprète est un auxiliaire de justice chargé d’assister les participants au procès pénal, lorsqu’ils ne maîtrisent pas la langue locale. Il traduit leurs propos et leur fait suivre en tant que de besoin le déroulement du procès.
Code de Gia Long, art 373 : Si des étrangers sont poursuivis et si les interprètes ne traduisent pas leurs propos exactement (par un motif de partialité), et qu’il en résulte que la peine prononcée ne correspond pas exactement à la faute, les interprètes seront punis de la même peine que les coupables.
Wallon (Histoire du Tribunal révolutionnaire) : Le 6 messidor an II, comparaissent trois bretons (condamnés à la déportation par le Tribunal du Finistère, mais décision annulée). Il a été impossible d’avoir les noms exacts de Perron, André et Toupin, parce qu’ils sont bas-bretons et qu’on n’avait point d’interprète. Condamnés à mort.
Exemple (Ouest-France 7 décembre 2007) : Six hommes, originaires de Lituanie avaient été arrêtés mercredi, près de Dinan, avec des cosmétiques et 1.200 lames de rasoir volés... Mais les enquêteurs sont tombés sur un os : ils n'ont pas trouvé un interprète sachant parler le lituanien dans les Côtes d'Armor... Le délai de garde à vue n'étant pas extensibles, ils ont dû relâcher les six hommes.
- Droit à être assisté par un interprète. Le droit de s’appuyer sur un interprète, pour ceux qui ne comprennent
pas le français, notre langue judiciaire, constitue l’un des premiers Droits de la défense* (art. 407 C.pr.pén.).
Voir : Langue française*.
Une loi du 5 août 2013 a complété l'article préliminaire du Code de procédure pénale en ces termes :
« Si la personne suspectée ou poursuivie ne comprend
pas la langue française, elle a droit, dans une langue qu'elle comprend et jusqu'au terme de la procédure, à l'assistance d'un interprète, y compris pour
les entretiens avec son avocat ayant un lien direct avec tout interrogatoire ou toute audience, et, sauf renonciation expresse et éclairée de sa part, à
la traduction des pièces essentielles à l'exercice de sa défense et à la garantie du caractère équitable du procès qui doivent, à ce titre, lui être
remises ou notifiées en application du présent code
».
En application de ce texte, l'article 803-5 précise :
« S'il existe un doute sur la capacité de la personne suspectée ou poursuivie à comprendre la langue
française, l'autorité qui procède à son audition ou devant laquelle cette personne comparaît vérifie que la personne parle et comprend cette langue. À
titre exceptionnel, il peut être effectué une traduction orale ou un résumé oral des pièces essentielles qui doivent lui être remises ou notifiées en
application du présent code ».
Il est à prévoir que ce texte soulèvera parfois en France des difficultés insurmontables, débouchant sur la renonciation à poursuivre un individu plus
que suspect d'un crime tel que le trafic de stupéfiants.
Cour EDH 14 octobre 1014, n° 45440/04 : La Cour a déjà eu l'occasion de souligner l'importance du stade de l'enquête pour la préparation du procès, dans la meure où les preuves obtenues durant cette phase peuvent être déterminantes pour la suite de la procédure. Il y a lieu de rappeler que la personne gardée à vue dispose d'un certain nombre de droits comme celui de garder le silence ou de bénéficier de l'assistance d'un avocat. Or la décision de faire usage ou de renoncer à ces droits ne peut être prise que si leur titulaire comprend de manière claire les faits qui lui sont reprochés pour mesurer les enjeux de la procédure et apprécier l'opportunité d'une telle renonciation... D'où la nécessité de la présence d'un interprète durant la garde à vue.
Cass.crim. 18 juillet 1991 (Bull.crim. n°302 p.761) : Dans le cas où le prévenu ou le témoin ne parle pas suffisamment la langue française, le président désigne d’office un interprète.
Cass.crim. 24 février 1988 (Bull.crim. n°94 p.242) : Le prévenu ou accusé ne comprenant pas ou ne parlant pas la langue française doit bénéficier de l’assistance gratuite d’un interprète.
Cass. 1e civ. 12 mai 2010 (Gaz.Pal. 27 mai 2010) : Il résulte de l'art. 706-71 C.pr.pén., applicable à la notification des droits attachés à la garde à vue, que c'est seulement lorsque l'impossibilité d'un interprète à se déplacer est constatée au procès-verbal qu'il peut être recouru à des moyens de télécommunication.
- Loyauté exigée de l’interprète. L’interprète doit, à peine de nullité, prêter le
Serment* d’accomplir loyalement sa mission.
La loi incrimine, non seulement le fait par un interprète de dénaturer les paroles ou écrits qui lui sont soumis (art. 434-18 C.pén.), mais également la
Subornation d’interprète*.
Cass.crim. 12 janvier 2000 (Gaz.Pal. 2000 II Chr.crim. 1494) : Selon l’article 407 C.pr.pén. l’interprète désigné par le président de la juridiction correctionnelle doit prêter serment d’apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience.
INTERROGATOIRE
Cf. Audition*, Instruction*, Oralité des débats*, Sellette*, Visioconférence*.
Voir : Faustin Hélie, L’audition des témoins (sur la différence entre l’interrogatoire et l’audition)
Voir : Procès de Charlotte Corday (n°I-18)
Voir : L'attentat de la rue Saint-Nicaise : Jugement du Tribunal criminel de la Seine
Voir : Viol d'une jeune fille par un dentiste
- Notion. L’interrogatoire est l’audition de l’inculpé, du prévenu ou de l’accusé.
Denisart (Collection de jurisprudence, 1768) : On nomme interrogatoire les questions faites par un juge à une partie sur la vérité de certains faits qui doivent déterminer le jugement d’une affaire, et les réponses qui sont faites à ces questions par la partie.
Merle et Vitu (Trait de droit criminel, T.II) : L'interrogatoire est à la fois un moyen d'instruction et un moyen de défense ; moyen d'instruction, parce qu'il tend à la manifestation de la vérité à travers les déclarations satisfaisantes ou contradictoires de l'intéressé ; moyen de défense, en ce qu'il permet au prévenu de fournir ses justifications.
- Déroulement. L’interrogatoire doit être mené dans le but premier de découvrir la vérité, mais dans le respect des droits de la défense. Afin de ne pas influencer inconsciemment la personne interrogée, le juge doit veiller à poser des questions non spécifiques mais génériques.
Digeste de Justinien, 48, 1810, 5. Arcadius-Charisius : Souvent, dans la recherche de la vérité, même le son de la voix et le soin d'un discernement délicat, peuvent servir. Car de la manière de s'exprimer, de la fermeté ou du tremblement de celui qui parle, de la réputation dont chacun jouit dans sa ville, on tire des traits de lumière pour éclairer la vérité.
Digeste de Justinien (48, 18, 18, pr.). Paul : Si plusieurs accusés d'un même crime doivent être entendus, que l'on commence par celui qui est le plus timide ou qui parait de l'âge le plus tendre.
Procès en canonisation. Instructions au Promoteur de la Foi : Le Promoteur de la Foi doit prendre garde à ce que ses interrogatoires ne soient pas suggestifs. Un interrogatoire suggestif est celui qui propose un fait qualifié.. Il ne faut pas demander si « le serviteur de Dieu s’est rendu tel jour à tel endroit », mais « Quel lieu fréquentait à telle époque le serviteur de Dieu ? ». L’interrogatoire doit être générique.
Code de droit canonique, canon 1775 : Les interrogations doivent être brèves, ne pas être complexes, captieuses, trompeuses ou suggestives, être exemptes de toute offense à qui que ce soit et uniquement relatives à la cause elle-même.
Villey (Cours de droit criminel) : Le juge peut procéder à un interrogatoire immédiat et à des confrontations, si l’urgence résulte soit de l’état d’un témoin en danger de mort, soit de l’existence d’indices sur le point de disparaître.
Cass.crim. 4 janvier 1994 (Bull.crim. n°2 p.2) : Les inculpés ne peuvent être entendus ou confrontés, à moins qu’ils n’y renoncent expressément, qu’en présence de leurs conseils ou eux dûment appelés.
INTERROGATOIRE D’IDENTITÉ - Voir : Vérification de l’identité du prévenu*.
INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE - Voir : Avortement*.
INTERVENTION
Cf. Action civile*.
L’intervention est la faculté accordée à certaines personnes, physiques ou morales, intéressées à l’issue d’un procès pénal en cours, d’y devenir Partie* afin de pouvoir faire connaître et défendre leur position au Tribunal.
- Ainsi, celui qui se présente comme victime des faits reprochés peut procéder à une Constitution de partie civile incidente* (art. 87 et 419 C.pr.pén.).
- De même certains organismes appelés à indemniser la victime ont été autorisés à intervenir devant la juridiction répressive (art.388-1 al.2 C.pr.pén. en matière d’Assurances privées*). Cette extension doit toutefois demeurer exceptionnelle, car elle risque de distraire le juge pénal de son but principal, qui est de veiller à l’intérêt général de la société.
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : L’intervention est rarement possible devant les tribunaux répressifs, même en ce qui concerne l’action civile, car la compétence de ces juridictions est à cet égard exceptionnelle.
Cass.crim. 2 avril 1992 (Bull.crim. n° 138 p.360) : Il résulte de l’art. 388-1 C.pr.pén. que, devant la juridiction répressive saisie de poursuites pour homicide ou blessures par involontaires, seul l’assureur du prévenu ou de la personne civilement responsable peut intervenir ou être mis en cause en tant qu’assureur de responsabilité.
Cass.crim. 11 octobre 1995 (Gaz.Pal. 1996 I Chr.crim. 24) : Les caisses de sécurité sociale peuvent, aux termes de l’article L. 376-1 C. sécur. soc., dans la mesure où la victime a saisi elle-même de son action la juridiction répressive, intervenir devant cette juridiction pour obtenir le remboursement des prestations fournies à un assuré victime d’une infraction pénale.
INTERVERSION (de possession)
Cf. Abus de confiance*, Appropriation*, Détournement*, Possession*, Propriété*, Soustraction*, Vol*.
Il y a interversion de possession lorsqu’une personne, qui détenait un bien pour le compte d’autrui, se conduit tout à coup comme si elle en était personnellement propriétaire. Il en est ainsi lorsque le gérant d’une galerie d’art refuse de restituer des tableaux qui lui ont été confiés pour une exposition (arrêt ci-dessous).
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° IV-312 p.598.
Garçon (Code pénal annoté) : Lorsque le possesseur précaire s’insurge contre son titre et se comporte comme propriétaire de la chose, il intervertit sa possession… Cette violation d’un contrat fiduciaire ne peut constituer qu’un abus de confiance.
Cass.crim. 23 mars 1987 (Bull.crim. n° 131 p.368) : En dépit d’une sommation, le prévenu n’a pas restitué les œuvres exposées et invendues ; cette rétention volontaire constitue l’interversion de possession caractérisant un détournement.