DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre C
(Dix-septième partie)
CONSCIENCE
Cf. Abélard*, Beau*, Bien*, Conscience (Cas de)*, Conscience (Clause de)*, Conscience (Objection de)*, Démence*, Devoir*, Dignité de la personne humaine*, Dol général*, Escient*, Ignorance*, Instinct*, Liberté*, Mal*, Responsabilité*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° III-238 et s. p.529 et s. , sur la liberté de conscience
Voir : A. Pierre et A. Martin, Cours de morale à l'usage des écoles primaires supérieures
- Notion. Le mot « conscience » peut désigner, soit une fonction psychologique, soit une notion philosophique.
Baudin (Cours de philosophie morale) : Le mot conscience est amphibologique en français. Il signifie tantôt la connaissance des événements de notre vie intérieure : c'est alors la conscience psychologique dont on traite en psychologie, et tantôt la connaissance des devoirs que nous avons à remplir et de la manière dont nous les remplissons : c'est alors la conscience morale dont on traite en morale.
Luquet (Logique, morale, métaphysique) : À tout moment, les circonstances forcent l'individu à choisir entre plusieurs conduites... l'individu est conduit à porter un jugement sur leur valeur respective. En tant que l'esprit porte ce jugement, il est dit conscience morale, et la conséquence de ce jugement théorique, à savoir que telle action, valant mieux que l'action opposée, doit être accomplie de préférence à elle, s'appelle obligation morale ou devoir.
Sur le plan psychologique, la conscience est la faculté d’une personne d’appréhender le monde et de s’y intégrer. Elle s’oppose à l’inconscience qui peut être naturelle (sommeil), accidentelle (suite d’un coup ou d’une émotion intense) ou liée à des troubles psychologiques (démence au sens juridique du terme).
Vergely (Dictionnaire de la philosophie) : D’abord fonction psychologique, la conscience est la capacité qu’a l’homme d’être éveillé et présent au monde, en fonction d’un mécanisme cérébral d’adaptation à la réalité.
Necker (De la morale naturelle) : Qu'est-ce que la conscience, si ce n'est le sentiment intérieur de ce qui convient ou ne convient pas à la nature de notre être ?
Gousset (Théologie morale) : On définit la conscience : un jugement pratique, qui prononce sur la bonté ou la malice, sur la licéité ou l'illicéité, de l'acte que l'on doit faire ou éviter dans la circonstance particulière où l'on se trouve.
Sur le plan philosophique, la conscience est la connaissance intime, en chaque être humain, tant du bien et du mal, que de ses devoirs envers lui-même, envers sa famille, envers autrui et envers la société dans son ensemble. E. Quinet a sagement conseiller à celui qui recherche le progrès spirituel : « Sois une conscience ».
Lois de Manou : L’âme est son propre témoin, l’âme est son propre asile ; ne méprisez jamais votre âme, ce témoin par excellence des hommes. Les méchants disent : « Personne ne nous voit », mais les Dieux les regardent, de même que l’esprit qui siège en eux ... Cet esprit qui siège dans ton cœur, c’est un juge sévère, un punisseur inflexible.
Le Pape François (Discours devant le Parlement européen du25 novembre 2014) : Parler de la dignité transcendante de l'homme signifie faire appel à sa nature, à sa capacité innée de distinguer le bien du mal, à cette boussole inscrite dans nos cœurs.
Vittrant (Théologie morale) : La conscience morale est la faculté de juger pratiquement de la valeur morale d'un acte humain, à poser ou déjà exécuté.
Thomas (Cours de philosophie morale) : La conscience ne se borne pas à nous montrer quel est le bien ou l'idéal de la vie humaine, elle nous fait une loi ou un devoir de le poursuivre et, dans la mesure de nos moyens, de le réaliser.
Grocholewski (La loi naturelle dans la doctrine de l'Église, in « Loi naturelle et loi civile ») : Il existe dans la conscience intime de tout homme "une loi que l'homme ne peut pas se donner, mais à laquelle il doit obéir ; une voix qui l'appelle toujours à aimer, à faire le bien, à fuir le mal ; une voix, quand elle se fait entendre, qui dit clairement à son cœur : fais ceci, évite cela" (J. Ratzinger).
P. Evdokimov (Une vision orthodoxe de la théologie morale) : La conscience juge non pas tel fait, mais sa motivation, le choix négatif, le penchant du cœur vers le mal. La conscience dévoile le mal, arrache les masques, mais elle ne donne pas de recettes toutes faites du bien. Le choix du bien est une réaction du moi humain... La conscience supprime toute justification hypocrite et suscite la reconnaissance de la faute.
Qiu Xiaolong (Cyber China) : Selon le philosophe confucéen Wang Yangming chacun naît avec la connaissance intuitive, mais non rationnelle, du bien et du mal - et du caractère inséparable de l'apprentissage et de l'action dans le domaine de la morale.
Jolivet (Traité de philosophie - Morale) : Quand la conscience est erronée, elle peut être redressée par la réflexion, par l'étude et les conseils de personnes prudentes. Surtout elle se perfectionne par la pratique du bien, par jouer droitement avec une sorte de spontanéité qui est la marque propre de la vertu de prudence.
Proudhon (De la justice dans la révolution) : Il n'y a que la conscience qui nous serve à connaître, sentir, affirmer et défendre le droit, et dont la justice puisse reconnaître l'identité avec elle-même.
Durkheim
(Introduction à la morale) : Les jugements moraux sont
inscrits dans les consciences adultes normales ; nous les
trouvons tout faits en nous, sans que nous ayons conscience, le
plus souvent, de les avoir élaborés d'une manière réfléchie, ni
surtout méthodique et scientifique.
En face de l'acte moral ou immoral, l'homme réagit spontanément
et même inconsciemment. Il lui semble que cette réaction sort
des profondeurs de sa nature ; nous louons ou nous blâmons par
une sorte d'instinct et sans qu'il nous soit possible de faire
autrement. C'est pourquoi nous nous représentons si souvent la
conscience morale comme une sorte de voix qui se fait entendre
en nous sans que nous sachions le plus souvent quelle est cette
voix et d'où lui vient son autorité.
Pierre et Martin (Cours de morale
pour l'enseignement primaire) : La
connaissance instinctive du devoir, comme la faculté de distinguer le bien du mal, sur laquelle s’appuient les jugements moraux, s’appelle la conscience
morale. C’est elle qui nous dicte d’abord ce que nous devons faire, et nous permet ensuite de juger ce que nous avons fait ; c’est à sa lumière que
nous examinons et que nous apprécions la conduite de nos semblables.
La conscience est perfectible. Il faut donc s'efforcer de la
perfectionner en s'instruisant et surtout en pratiquant
"l'examen de conscience".
Proal (Le crime et la peine) : La conscience est cette lumière de l’intelligence donnée à l’homme pour distinguer le bien et le mal.
- En droit criminel, ce terme revêt deux significations spécifiques. La première, technique, prévaut au stade de la qualification des faits. Le seconde, morale, peut se rencontrer au state de l’imputation de l’infraction.
Lecomte du Noüy (L'homme et sa destinée) : Personne n'a le droit de substituer sa propre conscience à celle d'autrui, car le progrès dépend de l'effort personnel, et supprimer cet effort constitue un crime.
Dans un sens technique, la conscience signifie la connaissance, chez un agent, de certains éléments extérieurs à son action. On dit qu’un individu commet une violation de domicile lorsqu’il a conscience / connaissance de s’introduire sans droit dans un domicile privé. Ce délit résulte de deux constatations judiciaires simples : il faut que le prévenu ait, d’une part conscience / connaissance qu’il franchit sans autorisation la porte d’une maison d’habitation (p.ex. en entrant avec une fausse clef), d’autre part conscience / connaissance que la loi interdit de s’immiscer dans la sphère d’intimité d’autrui (preuve facilitée par la présomption de connaissance de la loi.
Bertaut (Le directeur des confesseurs, Lyon 1674, p.3) : Tout péché doit être volontaire, et il ne peut l’être si la malice n’est connue.
Code pénal suisse. Art. 18 - 2 Celui-là commet intentionnellement un crime ou un délit, qui le commet avec conscience et volonté.
- La Chambre criminelle emploie indifféremment l’un ou l’autre terme, simplement par délicatesse de style, pour éviter les répétitions. De la sorte, pour constater le Dol général* du droit criminel, les juges répressifs ne cherchent pas à pénétrer l’inaccessible for interne du prévenu, ils se bornent à un examen des circonstances matérielles de l’espèce.
Cass.crim. 30 mai 1996 (Gaz.Pal. 1996 II ? Chr.crim. 153) relève un abus de biens sociaux à la charge d’un prévenu qui a connaissance du détournement des OAT garantissant en apparence les remises de fonds, et conscience de l’état virtuel de cessation des paiements de l’emprunteur lors des opérations incriminées.
Cass.crim. 1er octobre 1984 (Gaz.Pal. 1985 I somm. 96) : L’élément intentionnel du délit de complicité exige seulement que son auteur ait eu conscience de l’aide apportée à l’action principale.
Dans un sens moral, la conscience ne comporte pas seulement la connaissance des divers aspects matériels de l’affaire, elle suppose en outre que le sujet s’interroge sur le point de savoir si l’action qu’il entreprend relève du Bien* ou relève du Mal*. Ce jugement de valeur, porté par l’agent lui-même, peut être pris en considération par le juge, soit dans la phase de l’imputation, soit dans la phase de la sanction. Il est en effet certain que si, d’un point de vue social, la violation de la loi positive est en soi punissable, du point de vue de la responsabilité individuelle, l’acte accompli « en toute conscience » montre un sens moral qui mérite une certaine considération. Voir ci-dessous pour le Cas de conscience*.
St Paul (Épître aux romains) : Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à la quelle il est tenu d’obéir. La voix de cette loi le presse sans cesse d’aimer et d’accomplir le bien, et d’éviter le mal. « Fais ceci, évite cela ».
H.Jone (Précis de morale catholique) : La conscience, au sens propre, est un jugement de la raison pratique sur la bonté ou la culpabilité d’une action. La conscience certaine prononce son jugement en toute certitude… elle doit toujours être suivie, soit qu’elle ordonne, soit qu’elle défende.
Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale. V° Sens moral (Baertschi) : Le sens moral et la conscience morale caractérisent la capacité grâce à laquelle des êtres doués de raison perçoivent ou connaissent le bien et le mal, ce qui leur permet, tant d’évaluer et de diriger leurs conduites, que de se juger eux-mêmes.
Servant (Discours sur l’administration de la justice criminelle) : La conscience, asile sacré où chacun doit être en sûreté pour se juger lui-même sur l’accusation de ses remords.
CONSCIENCE (Cas de)
Cf. Casuistique*, Conscience*, Loi morale*, Nécessité (état de)*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 112, p.73
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-II-220 et s. p.250 et s.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 6, p.12
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-108, p.344
Voir : P. Janet, Les conflits de devoirs ( Les cas de conscience )
Voir : P.Moriaud, De la justification du délit par l'état de nécessité
Voir : Jean Pontas, Cas de conscience de l’avocat scrupuleux
- Notion. Au regard du droit criminel, une personne se trouve confrontée à un cas de conscience lorsque la loi pénale applicable lui prescrit d’accomplir un acte que sa loi morale condamne. Telle était autrefois la situation de l’objecteur de conscience, qui refusait d’être incorporé dans une unité militaire où il risquait de recevoir l’ordre de tuer un ennemi. Telle est actuellement la position du médecin catholique qui, par respect de la Vie*, refuse de procéder à un avortement qui n’est pas médicalement justifié.
Foulquié (Dictionnaire philosophique) : Cas de conscience - Situation concrète dans laquelle il s'agit de savoir où se trouvent le devoir ou le bien.
- Règle morale. Celui qui se trouve confronté à un cas de conscience doit faire prévaloir la règle morale sur une loi injuste, et plus encore sur un ordre scandaleux, dans la mesure du moins où l'intérêt sauvegardé est manifestement supérieur à l'intérêt personnel sacrifié.
Guillemain (Cours de philosophie) : Les cas de conscience ne sont pas la marque d’une personnalité morale débile. Hésiter sur mon devoir, ne pas savoir si, officier de l’armée française, mais catholique pratiquant, j’ai à obéir à la loi qui m’envoie présider à l’inventaire des biens de l’Église ou la refuser, ce n’est pas d’un cynique qui se moque du devoir, ni d’un lâche qui fuit le conflit, mais d’une personne à la fois volontaire et délicate, et qui s’interroge… Les conflits de devoirs sont le signe même de la moralité dans la situation ambiguë et contradictoire des personnes humaines.
Pufendorf (Le droit de la nature) : On pèche quelquefois en obéissant aux ordres du Souverain ; ainsi les Sujets peuvent et doivent les examiner selon les lumières d'une conscience bien éclairée ... Si on recevait ordre d'un tyran de tuer son propre père ou sa mère, en ce cas un homme qui a un peu de coeur aimera mieux mourir que de se résoudre à prêter son bras à une action si horrible.
Pontas (Dictionnaire des cas de conscience) : Cas VIII. Aurélia, ayant poursuivi criminellement Othon qui a tué son mari, a obtenu contre lui une sentence qui ne le condamne qu'à un, bannissement de neuf ans. Othon, qui craint d'être condamné à mort par la justice supérieure, offre à Aurélia toute la satisfaction qui lui est due pour ses dépens, dommages et intérêts; mais elle dit que, puisque selon les lois il doit être puni de mort, elle veut l'y faire condamner. Le peut-elle sans pécher contre le précepte, de la charité ? R. Elle ne le peut pas, parce qu'outre qu'elle a seulement droit de demander ses intérêts civils, le reste appartenant au procureur du roi, il n'y a qu'un esprit de vengeance qui la porte à vouloir la mort du coupable. Que deviendra-t-elle, si Dieu la traite comme elle veut traiter son ennemi ?
Warée (Curiosités judiciaires) : Le 8 juin 1763, le Parlement de Paris a rendu un arrêt provisoire relatif à l’inoculation de la petite vérole, qui ordonne que la Faculté de Médecine donnera son avis sur l’avantage et les inconvénients de l’inoculation, aussi bien que la Faculté de Théologie sur le cas de conscience, pour savoir s’il est permis de se procurer une maladie qu’on ne pourrait pas avoir.
- En droit positif. Dans un système juridique marqué par la laïcité, les tribunaux ne sauraient en principe faire prévaloir la loi spirituelle sur la loi temporelle. Dans des situations extrêmes, cependant, le tribunal peut prendre en considération le conflit moral que le prévenu a eu à résoudre : soit dans le cadre des Causes de non-imputabilité*, pour l’acquitter, soit dans le cadre des Circonstances atténuantes*, pour modérer sa peine. Comme il consiste en un conflit de nature morale, invitant le sujet à choisir entre deux devoirs, le cas de conscience appelle a priori le respect.
Cour EDH 3 avril 2012 n° 28790/08 (Gaz.Pal. 26 juin 2012 note Villacèque) : N'est pas contraire à la liberté de conscience, le refus d'une juridiction de reporter une affaire à la demande d'un avocat au motif de sa pratique religieuse.
Cour supérieure de justice du Luxembourg 4 janvier 1957 (Pas.lux. 1957-1959 56) : Les conceptions religieuses ne sauraient libérer les citoyens des obligations que leur impose la loi, alors que le respect de celle-ci doit avoir le pas sur les impératifs de la religion.
CONSCIENCE (Clause de)
Cf. Conscience*, Légitimité*, Liberté*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), III-106, p.434
Le législateur doit tenir compte des légitimes scrupules de
certains citoyens, notamment de ceux qui estiment non sans
raison que la loi positive qu'il leur est demandé d'appliquer
heurte par trop une loi naturelle consacrée universellement
depuis les origines de la civilisation. Dans
ce cas il les autorisera à opposer un refus, éventuellement sous
certaines conditions (voir ci-dessous l'objection de
conscience).
Ainsi un médecin, auquel il est
demandé de procéder à un avortement pour convenance personnelle de la mère, peut légalement refuser de mettre fin à la vie de cet enfant en observant que
le serment d’Hippocrate le lui interdit. On parle dans ce cas de « clause de conscience » (c’est une telle disposition qui permet à un
journaliste de quitter avec indemnité une entreprise de presse dont l’orientation a changé
: art. L.7112-5 C.travail).
Loi du 17 janvier 1975 autorisant l’avortement : Un médecin n’est jamais tenu de donner suite à une demande d’interruption de grossesse, ni de pratiquer celle-ci, mais il doit informer, dès la première visite, l’intéressés de son refus.
Actualité (Ouest-France 23 octobre 2009) : L'Église luthérienne de Suède a approuvé le mariage des homosexuels à l'église, autorisé par la loi le 1er mai. Chaque pasteur pourra, à titre individuel, refuser de célébrer l'union.
Mais de nos jours les pouvoirs publics, qui n'ont que trop tendance à étendre leur autorité jusqu'aux limites de leur idéologie (ce qui caractérise un régime totalitaire), s'estiment compétent pour fixer de nouvelles règles morales et pour imposer leur application à ceux qui se trouvent sous leur coupe.
D'Onorio (La clause de conscience, critère de la démocratie - Le Figaro 9/12/2013) : Une disposition législative ne peut être juste, ni morale, ni même légitime du seul fait de son adoption par une majorité parlementaire ou populaire. Car les majorités politiques peuvent toujours outrepasser leurs compétences juridiques et contrevenir à la dignité humaine ou aux lois objectives de la nature. La neutralité affichée par la loi civile est un postulat fallacieux parce que les autorités politiques ne sont elles-mêmes pas neutres, comme ne le sont pas non plus les instances européennes, et encore moins, chez nous, le Conseil constitutionnel qui nous l'a amplement prouvé.
Ainsi, le Conseil constitutionnel a refusé aux officiers de l'état civil la possibilité d'invoquer un cas de conscience pour refuser de célébrer un mariage homosexuel. Il a rejeté l'argument selon lequel la loi positive l'autorisant méconnaît la loi naturelle, qui ne conçoit de mariage qu'entre deux personnes de sexe différent, s'unissant dans le but de concevoir des enfants et de fonder une famille (cas général des espèces bisexuées). Cette décision repose sur un simple argument d'autorité qui nous semble fort discutable.
Conseil constitutionnel 18 octobre 2013, n°2013-353 : En ne permettant pas aux officiers de l'état civil de se prévaloir de leur désaccord avec les dispositions de la loi du 17 mai 2013 pour se soustraire à l'accomplissement des attributions qui leur sont confiées par la loi pour la célébration du mariage, le législateur a entendu assurer l'application de la loi relative au mariage et garantir ainsi le bon fonctionnement et la neutralité du service public de l'état civil ; eu égard aux fonctions de l'officier de l'état civil dans la célébration du mariage, il n'a pas porté atteinte à la liberté de conscience.
Versailles, 23 novembre 1994 (Gaz.Pal. 1995 I 28) : La clause de conscience reconnue à l’avocat ne peut lui permettre de se faire juge de la loi et de s’opposer en conséquence à son application.
Le même rejet du cas de conscience s'observe aux États-Unis, pourtant rangés parmi les démocraties libérales.
Actualité (Ouest-France 6 septembre 2015) : Une fonctionnaire américaine de l'état civil du comté de Rowan, dans le Kentucky, qui refusait d'enregistrer des mariages homosexuels au nom de ses convictions religieuses, a été condamnée, jeudi, à la prison. Kim Davis, âgée de 49 ans, a été écrouée sur jugement d'une Cour fédérale du Kentucky. Cette chrétienne évangélique convertie restera en prison jusqu'à ce qu'elle accepte de se conformer à la loi. [ cette peine à durée indéterminée ne saurait être infligée en France, d'autant qu'elle est prononcée comme moyen de contrainte plus que comme sanction ]
CONSCIENCE (Objection de)
Cf. Cause de non-imputabilité*, Insoumission*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-II-220, p.252
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-I-104, p.73
On parle d’objection de conscience à propos des jeunes gens qui, par conviction religieuse ou philosophique, se rallient à la doctrine pacifiste et
refusent de porter les armes. Après bien des hésitations, le législateur a fini par prévoir en leur faveur un régime spécifique se traduisant par une
affectation à des postes autres que de combat, mais pour une durée double de la période de droit commun (lois des 21 décembre 1963 et 8 juillet 1983).
Avec la fin du service militaire, ce régime est devenu caduc. Il ne doit toutefois pas être oublié, car il peut retrouver son intérêt si un jour la
Patrie est déclarée en danger et si est décrétée la mobilisation générale.
De surcroît il constitue un précédent pour d'autres cas de
conscience, résultant du divorce croissant entre la règle morale
et la règle de droit positif.
Vitu (Juris-classeur pénal annexe -v° Armée fasc. 1 n°57) : L'expression "objecteurs de conscience" désigne des jeunes gens qui refusent de satisfaire aux obligations du service militaire en invoquant leurs convictions ou philosophiques qui leur interdirait, en toute circonstance, l'usage des armes.
John Rawls (Théorie de la justice, n° 56) : L'objection de conscience n'est pas nécessairement basée sur des principes politiques ; elle peut être fondée sur des principes religieux... Un exemple typique est celui des premiers chrétiens qui refusaient d'accomplir certains actes de piété prescrits par l'État païen.
Jolivet (Traité de philosophie - morale) : L'objection de conscience consiste à refuser, soit d'accomplir son service militaire, soit surtout de prendre les armes en cas de guerre. Ce refus est généralement motivé par des raisons de nature religieuse. La plus commune invoque le précepte "Tu ne tueras point", - ce qui peut évidemment valoir... puisque le meurtre qui est interdit est celui de l'innocent, alors que la guerre est (par hypothèse) un état de légitime défense contre un injuste agresseur.
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (18 décembre 2000). Art. 10. Liberté de pensée, de conscience et de religion. Alinéa 2 - Le droit à l’objection de conscience est reconnu selon les lois nationales qui en régissent l’exercice.
Cass crim. 12 octobre 1994 (Gaz.Pal. 1995 I Chr.crim. 24) : L’art. 4.3 de la Conv. EDH abandonne à la législation interne la réglementation de l’objection de conscience.
CONSCIENCE (Voix de la)
Cf. Âme*, Cheminement criminel*, Iter criminis*, Péché*, Vertu*, Vice*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-II-110, p.229
La voix de la conscience est une disposition d'esprit qui nous permet de distinguer les actes bons des actes mauvais ; elle nous incite à accomplir les premiers et à renoncer aux seconds.
Jean-Paul II (Splendeur de la vérité) : La voix de la conscience a toujours rappelé sans ambiguïté qu'il y a des vérités et des valeurs morales pour lesquelles on doit être disposé à donner jusqu'à sa vie.
Bautain (Manuel de philosophie morale) : Il y a dans la voix de la conscience quelque chose d'impératif et de catégorique qui indique une autorité naturelle, s'imposant avec droit â la volonté humaine.
Baudin (Cours de philosophie morale) : La "voix de la
conscience" joue de multiples rôles pratiques :
1° Avant l'action, ceux de guide et de législateur. Elle renseigne sur la bonté ou la malice des actes en perspective ; elle commande les devoirs et
les vertus à observer hic et nunc.
2° Pendant l'action, ceux d'excitant et de frein. Elle pousse au bien et au devoir ; elle détourne du mal et contredit les instincts et les passions
qui y entraînent.
3° Après l'action, ceux de témoin, de juge et de justicier. À son propre tribunal, "le tribunal de la conscience", elle "dépose" sur les actes, leurs
intentions, leur responsabilité. Elle prononce sur leur mérite et leur démérite ; elle félicite ou blâme ; elle absout ou condamne, décrète les
sanctions. Elle se charge enfin d'exercer les premières sanctions : celle de la "bonne conscience" récompensant par la joie du devoir accompli, et celle
de la "mauvaise conscience" punissant par le remords.
Ahrens (Cours de droit naturel) : La voix de la conscience morale, il est vrai, est souvent étouffée ; mais chacun peut l'entendre, quand il veut s'interroger, et son approbation ne nous est acquise que lorsque nous faisons le bien pour lui-même, avec moralité.
Doquet (L'enseignement de la morale au cours préparatoire) : La conscience est comme une voix intérieure qui nous dit ce qui est bien et ce qui est mal. Elle nous adresse des compliments lorsque nous avons bien fait, des reproches lorsque nous avons mal fait.
Chauveau - Hélie (Théorie du Code pénal - T. I) : Donnons à cette fougue de l'âge, à cette impatience, à ces passions, qui trop souvent voilent l'intelligence et étouffent la voix de la conscience, non l'impunité, mais une peine moins rigoureuse.
CONSCIENCE POPULAIRE
Cf. Droit naturel*, Morale*, Opinion publique*, Techniques législatives*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° V-1, p.623
On parle de conscience populaire pour désigner les convictions morales de la grande majorité de la population, qui la conduisent à approuver ou à
condamner telles actions ou telles omissions. Elle se situe sur le plan des idées abstraites, générales et impersonnelles.
Puisqu'il œuvre sur le même plan, le législateur ne saurait passer outre à ces sentiments profonds sans risquer de voir son autorité s'affaiblir.
Caro (Problèmes de morale) : La conception très ancienne du Tartare ouvrait des horizons illimités à l'idée du châtiment, C'était comme un supplément imaginé par la conscience populaire pour réparer les effroyables désordres et les défaillances de la justice élémentaire de l'époque ... Dès l'origine de la société hellénique il a existé un sentiment de justice supérieure ... Il y a eu en Grèce une morale bien avant les philosophes.
Bluntschli (Droit public général) : Le caractère des délits et des crimes est facilement intelligible pour la conscience populaire, et l'organisation de la justice pénale doit naturellement y répondre.
Garçon (Le droit pénal, origine et évolution) : Correspondant mal à la conscience populaire, parce qu'ils n'avaient pas été élaborés par elle, les capitulaires mérovingiens et carolingiens furent mal obéis.
Garofalo (La criminologie) : Les lois de Dracon furent abrogées aussitôt après son archontat par son successeur, par respect pour la conscience publique, que ces lois blessaient encore plus que les méfaits.
Ferri (Sociologie criminelle) : Le jury, n'a pas les qualités qu'on lui attribue ; il a au contraire un défaut capital ... On ne comprend pas bien comment douze jurés, choisis au hasard, peuvent représenter réellement la conscience populaire ; qui au contraire proteste bien souvent contre leurs décisions.
CONSEIL (mode de complicité)
Cf. Complicité*, Fourniture de moyens*, Instigation*, Matérialité*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° II-117, p.310
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-I-309, p.191
- Notion. Une conseil est un avis donné, une suggestion faite, à une personne qui hésite sur la manière de se conduire dans une situation donnée.
Petit Larousse (Dictionnaire) : Conseil - avis donné, ou demandé, sur ce qu'il convient de faire.
Littré (Dictionnaire) : Conseil - opinion exprimée pour engager quelqu'un à faire ou à ne pas faire quelque chose.
- Règle morale. Les moralistes s'accordent à distinguer deux types de conseils : ceux qui présentent un caractère imprécis, voire dubitatif ; et ceux qui revêtent un caractère réfléchi, voir élaboré, pouvant être raisonnablement considéré comme une incitation à commettre un acte fautif.
Pufendorf (Le droit de la nature) : S'il s'agit d'un conseil donné, et qu'on l'ait donné simplement, sans prêter aucun secours [auquel cas on serait un coauteur], il faut distinguer entre un Conseil général et un Conseil particulier. Lorsque, par exemple, une personne se plaignant de son extrême pauvreté, on lui conseille en général de voler, pour avoir de quoi vivre ; on ne peut, du moins devant les Tribunaux humains, passer pour Voleur à cause d'un Conseil vague comme celui-là. Mais si on fournissait quelque Conseil particulier, et qu'on indiquât, par exemple, la manière et le temps favorable pour se glisser dans une certaine maison, l'endroit où est telle ou telle chose propre à être emportée, les moyens de se cacher et de s'évader, etc. un tel donneur de conseils sentirait fort le Voleur.
Pontas (Dictionnaire de cas de conscience) : On dit, généralement parlant, que celui qui a conseillé de faire une injustice au prochain est obligé à restitution. Celui-là est censé avoir conseillé de faire une injustice au prochain qui, par des raisons qu’il allègue à quelqu’un, le persuade de commettre une injustice ; ou qui, par les conseils qu’il lui donne, le pousse à la faire ; ou qui lui enseigne les moyens qu’il peut prendre pour exécuter le pernicieux dessein qu’il a de nuire à son prochain.
- Science criminelle. De manière générale, il semble que la doctrine pénale fasse sienne cette conception. Seul le conseil circonstancié, qualifié dirait-on pour user d'un terme technique, peut justifier l'imputation, au conseilleur, de infraction qui a été commise par celui qui a suivi sa suggestion. La complicité dans un crime ou délit doit en effet résulter d’un acte positif d’aide et assistance.
Trébutien (Cours élémentaire de droit pénal) : Où commence la complicité ? Le principe posé dans l'article 60, c'est que le simple conseil de commettre une infraction ne suffit pas pour constituer la complicité.
Garçon (Code pénal annoté) : La provocation doit être accompagnée de dons, promesses … il suit de là qu’un simple conseil donné de commettre un délit ne constitue pas un acte de complicité punissable.
Digeste de Justinien 47,II 36 : Ulpien - Celui qui a engagé un esclave à prendre la fuite, n'est pas un voleur : car celui qui donne à quelqu'un un mauvais conseil ne commet pas un vol.
Digeste de Justinien 48,5, 12. Ulpien : Ces termes de la loi : « Que personne désormais sciemment et par dol ne commette la débauche ou un adultère », s'appliquent et à celui qui a conseillé et à celui qui a commis l'acte de débauche ou d'adultère.
Carrara (Cours
de droit criminel - éd. française) : Le conseil ne peut être
considéré comme une tentative du délit... en effet il ne
constitue pas un commencement d'exécution du délit. Si l'on ne
peut pas le poursuivre comme coupable d'un délit sui generis, il
ne peut faire l'objet d'une imputation pour cause de complicité
tant que l'auteur physique n'a pas , de son côté, exécuté au
moins une tentative du délit voulu. On peut être complice d'une
tentative, mais la tentative de complicité ne se conçoit
pas...
Le conseil est toujours imputable (à
supposer le dol chez celui qui le donne), quand il a été
accompagné d'instructions qui ont ensuite effectivement servi
à l'exécution du délit. Dans ce cas, le conseil a exercé une
influence non seulement sur la détermination, mais encore à
certains égards sur l'action elle-même.
Code général des États prussiens. Art. 76 : Celui qui donne des conseils et des instructions précises pour l'exécution d'un délit, est puni à l'instar de celui qui a prêté une assistance active.
Cette distinction n'a cependant pas toujours été suivie pour les crimes les plus graves. Dans ce cas, en effet, le simple conseil, comme la simple omission de dénoncer tel crime majeur, a parfois été considéré comme punissable.
Du Boys (Histoire du droit criminel) : En matière de Haute-trahison, le simple conseil de trahir ou le consentement donné à un projet de complot était assimilé à la Haute-trahison.
Si l'on ne saurait incriminer le seul fait de donner l'idée de
commettre telle ou telle infraction, les autorités peuvent
suggérer d'éviter de la nommer et plus encore d'en décrire les
modalités. Ainsi, le confesseur doit demander à celui qui vient
se confier à lui s'il n'a pas commis un péché de chair ; mais il
ne doit pas aller jusqu'à évoquer le crime de bestialité.
De semblables crimes, qui figuraient dans les vieux
pénitentiels, ne sont plus cités qu'en latin dans les ouvrages
classiques de théologie morale.
- Droit positif. Doctrine et jurisprudence françaises se situent dans cette voie de politique criminelle.
Chauveau Hélie (Théorie du Code pénal) : Le Code pénal n’a point rangé les conseils parmi les actes de complicité. Soit que le législateur ait craint que cet acte ne laissât des traces trop fugitives, ou qu'il ne fût facile de le confondre avec des paroles irréfléchies, il n’en a pas fait mention : dès lors nulle interprétation ne peut suppléer au silence ; et cet acte, quelque immoral qu’il puisse paraître, demeure à l’abri des poursuites. Ce point a été consacré par la jurisprudence.
Larguier (Droit pénal général) : Le simple conseil n'est pas la provocation cas de complicité.
Rouen 12 février 1887 (Gaz.Pal. 1887 I 137) : Ne peut être considéré comme complice d’un délit de coups et blessures, celui qui s’est borné à le conseiller.
CONSEIL (en procédure pénale)
Cf. Avocat*, Défense*.
Pour un exemple de bon conseil, voir le Cas pratique n° 34.
Le mot « conseil » désigne ordinairement l’avocat de l’une des parties. Toutefois, dans un sens plus large, il désigne tout juriste susceptible d’apporter son concours à une partie lors d’un procès pénal.
Code de procédure pénale de Mauritanie. Art. 353 : Le jugement est contradictoire si le conseil du prévenu a comparu à l’audience...
Cass crim. 9 février 1982 (Bull.crim. n° 47 p.126) : L’obligation faite au juge d’instruction par l’art. 118, alinéa 3 C.pr.pén. de mettre le dossier de la procédure à la disposition du conseil de l’inculpé 24 heures au plus tard avant chaque interrogatoire impose la communication de toutes les pièces figurant au dossier à cette date.
Cass crim. 7 mai 1979 (Bull.crim. n°163 p.463) a jugé qu'il y a lieu à cassation quand la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer que le prévenu ou son conseil ont eu la parole les derniers.
CONSEIL CONSTITUTIONNEL - Voir : Question prioritaire de constitutionnalité*.
CONSEIL D'ÉTAT
Cf. Administration pénitentiaire*, Arrêtés de police*, Cour de cassation*, Légalité*.
Le Conseil d'État apparaît comme la juridiction supérieure dans l'ordre de la
justice administrative. Mais il a également pour fonction de
conseiller le Gouvernement lors de l'élaboration des textes de
loi [du fait de la montée
en puissance du Conseil constitutionnel et de la Cour européenne
des droits de l'homme, ses fonctions s'amenuisent au point que
l'on peut se demander s'il s'impose toujours de conserver un
ordre juridique administratif autonome fort onéreux, qui a pour
premier défaut de créer des conflits de compétence avec l'ordre
judiciaire ; on peut estimer qu'une chambre spécialisée de la
Cour de cassation le remplacerait avantageusement].
Le Conseil d'État intervient également, en ce qui nous concerne, dans le
fonctionnement de l'administration pénitentiaire.
Dictionnaire de la justice (v° Conseil d'État, Beauchard) : Institution bicentenaire,siégeant à Paris au Palais-Royal, le Conseil d'État cumule les fonctions de conseiller du gouvernement et de juge de l'Administration. Il est la juridiction administrative suprême. « Père » du droit administratif, il garde un rôle éminent, quoique concurrencé dans l'évolution de la matière. À titre consultatif, il s'exprime également sur l'ensemble du droit français. .
Gaudemet (Droit administratif) : Le Conseil d'État constitue la plus importante de nos juridictions administratives ; il est en même temps le conseil du gouvernement. Il est dans une certaine mesure l'héritier du Conseil du Roi et de l'Ancien régime .
Cons. d'État 14 novembre 2008 (Gaz.Pal. 2008 J 4005) : S'il n'appartient qu'au juge judiciaire de connaître des actes relatifs à la conduite d'une procédure judiciaire ou qui en sont inséparables, les décisions par lesquelles les autorités pénitentiaires, afin d'assurer la sécurité générale des établissements, dans le but de prévenir toute atteinte à l'ordre public, relèvent de l'exécution du service public administratif pénitentiaire et de la compétence de la juridiction administrative.
« Paris
incendié pendant la Commune en 1871 » (Éd. du Mécène). Les
Communards, refoulés par les troupes s'efforçaient de placer
entre eux et les soldats de violents incendies... Il était
d'ailleurs dans leur plan de brûler tous les quartiers qu'ils ne
pourraient conserver.
Aussi, le palais du Conseil d'État et la Chancellerie de la Légion
d'honneur étaient fatalement condamnés aux flammes. Que de
documents précieux, à tous les points de vue, sont à jamais
perdus ! On sait en effet que c'est le Conseil d'État qui était
chargé de la préparation et de l'examen des lois. C'est dans son
palais aussi que la Cour des comptes s'occupait de la
vérification des comptes des ministères et de la
préparation du budget.
CONSEILLER - En matière pénale, un conseiller est un magistrat du siège attaché, soit à une cour d’appel, soit à la Cour de cassation.
CONSENTEMENT (de la victime)
Cf. Dignité de la personne humaine*, Faits justificatifs*, Image (droit à l')*, Liberté*, Tolérance*, Qualification des faits*, Servage*,Victime*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n°3, p.5 / n° I-245 p.259 / n° I-250, p.266
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-315, p.79
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd), n° I-110 p.68 / n° II-205 p.302 / n° III-105 p.431 / n° IV-103 p.547
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants, et des adolescents », n° 307, p.135 / n° 410, p.253
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-14, p.297
Voir : Tableau des incriminations protégeant la vie (selon la science criminelle)
Voir : A. Badr, les effets du consentement de la victime
Voir : Le procès du duel
Voir : R. Garraud, Le viol au sens strict
Voir : Viol d'une jeune fille par un dentiste
- Notion. Consentir, en droit criminel, c'est le fait pour une personne d'accepter qu'un tiers mette en œuvre un projet la concernant. Pour que ce consentement puisse éventuellement être pris en considération par les juges, il convient qu'il ait été donné en pleine connaissance de cause, librement et volontairement.
Cuvillier (Vocabulaire philosophique) : Accord donné à un projet émanant d'autrui.
Petit Robert (Dictionnaire) : Acquiescement donné à un projet ; décision de ne pas s'y opposer.
Puech (Droit pénal général) visant les rares cas où le consentement de l'intéressé fait obstacle à la qualification pénale des faits : Le consentement doit émaner d'une personne capable et avoir été librement exprimé, soit antérieurement, soit concomitamment à l'acte... La personne doit avoir été capable de comprendre la portée de son acceptation... Le consentement ne doit pas avoir été provoqué par des manœuvres ou extorqué sous la contrainte.
- Principe. La loi pénale revêtant un caractère d’ordre public, une personne ne peut en principe valablement consentir à être victime d’une infraction ; tuer une personne, même avec son accord, constitue un meurtre. Ce principe s'applique de manière rigoureuse en ce qui concerne les incriminations visant à protéger un intérêt de droit public, tel le délit de corruption.
Trousse (Novelles de droit pénal) : Principe – Le consentement de la victime ne peut être exclusif d’infraction que lorsque celle-ci porte atteinte à un droit ou à un bien dont la victime peut disposer librement.
Code pénal d’Andorre. Art. 198 : En ce qui concerne les délits contre l’intégrité des personnes, le consentement de la victime n’exonère pas de responsabilité pénale.
Cass.crim. 23 juin 1818 (S. 1818 1 625 concl. Dupin): La protection assurée aux personnes par la loi constitue une garantie publique ; dès lors le consentement de la victime d’une voie de fait homicide ne saurait légitimer cet acte.
Cass.crim.
1er juillet 1937 (Gaz.Pal. 1937 II 358, S. 1938 1 193, note Tortat) : B...
a pratiqué des incisions aux parties génitales et sectionné les
canaux déférents de plusieurs individus… Pour le déclarer à bon
droit coupable de coups et blessures commis volontairement et avec
préméditation, la Cour a décidé que le prévenu ne pouvait invoquer
le consentement des opérés comme exclusif de toute responsabilité
pénale, ceux-ci n’ayant pu donner le droit de violer, sur leurs
personnes, les règles régissant l’ordre public.
En effet, aux termes des articles 327, 328 et 329 du Code pénal, les
blessures faites volontairement ne constituent ni crime ni délit,
lorsqu’elles ont été commandées, soit par la nécessité actuelle de
la légitime défense de soi-même ou d’autrui ; hors ces cas et ceux
où la loi les autorise à raison d’une utilité par elle reconnue, les
crimes et délits de cette nature doivent, suivant les circonstances
déterminées par les articles 309 et s. du Code pénal, donner lieu à
condamnation contre les auteurs et complices ; notamment, le fait
que les victimes auraient consenti aux violences n’est pas exclusif
de la préméditation.
- Exceptions. Ce principe connaît toutefois des exceptions, pour certains intérêts disponibles tel le
patrimoine : il n’y a pas vol quand le possesseur d’un bien accepte de s’en dessaisir librement et en
connaissance de cause.
Il importe d'observer, du point de vue de la
nature juridique, que dans ce
cas l'infraction n'est pas caractérisée, en raison de l'absence
de l'un des éléments constitutifs de l'infraction ; il ne s'agit
donc pas d'un fait justificatif au sens propre.
Jolivet (Philosophie morale) : Nul homme ne peut céder son droit d’être traité en personne raisonnable et libre, ; mais chacun peut céder tout ou partie des biens matériels qu’il possède.
Buddhist monastic code, par Thanissaro Bhikkhu (2009) : Si employant des menaces un moine oblige le propriétaire d'un objet à le lui donner... la remise de l'objet par le propriétaire n'est pas prise en compte, puisqu'il ne l'a pas donné volontairement.
Digeste de Justinien 47, II, 49, 2. Ulpien - Qui, prenant possession d'une chose avec l'accord de son propriétaire peut être dit voleur ?
Pothier (Pandectes) : Les actes qui doivent être l'ouvrage du consentement ne sont parfaits qu'autant qu'ils se font en vraie et entière connaissance de cause.
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : Le consentement de la victime fait disparaître l'infraction dans les cas exceptionnels où la victime a la libre disposition de l'intérêt protégé par la loi pénale. Il en est ainsi, en premier lieu, lorsque la loi pénale n'intervient précisément que pour sanctionner l'atteinte frauduleuse ou violente à la libre disposition d'un droit : par exemple en matière de vol. L'infraction consiste alors à se passer du consentement du titulaire du droit.
Code pénal de Saint-Marin de 1975 (trad. Constant). Art. 39 : N'est pas punissable celui qui lèse ou met en péril un bien avec le consentement valablement manifesté de la personne qui a le droit d'en disposer. Le consentement n'est pas valable s'il est extorqué par violence ou s'il est donné par suite d'une erreur facilement décelable, obtenu par tromperie ou manifesté par une personne mineure de dix-huit ans ou incapable de comprendre ou de vouloir.
- Remarque. Le consentement de l'intéressé est exigé pour l'accomplissement de certains actes de chirurgie, qui comportent des risques dont la patient doit être informé.
Code de déontologie médicale. Art. 41 : Aucune intervention mutilante ne peut être pratiquée sans motif médical sérieux et, sauf urgence ou impossibilité, sans information de l'intéressé et sans son consentement.
Cass. 1e civ. 27 mai 1998 (JCP 1998 IV 2626) : Il appartient au médecin de prouver qu’il a donné à son patient une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves des investigations ou des soins qu’il lui propose, ou que le patient demande, de façon à lui permettre d’y donner un consentement ou un refus éclairé.
Conseil d'État 15 mars 1996 (DS 1996 IR 115) : En matière de chirurgie esthétique, le praticien est tenu d'une obligation d'information particulièrement étendue à l'égard de son client.