DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre E
(Douzième partie)
ÉTABLISSEMENTS CLASSÉS - Voir : Nuisances*.
ÉTABLISSEMENT PÉNITENTIAIRE
Cf. Asile psychiatrique*, Biens publics*, Emprisonnement*, Évasion*, Geôle*, Maison centrale*, Maison d’arrêt*, Pénologie*, Pénitencier*, Prison*.
Voir :
Tableau des incriminations
protégeant le système judiciaire quant aux personnes placées sous main de justice (en droit positif français)
La formule « établissement pénitentiaire » a remplacé le vieux mot Prison*. Elle recouvre les établissements pour peines, destinés à recevoir les condamnés à de longues peines (maisons centrales et centres de détention), et les maisons d’arrêts, qui ont vocation à accueillir les prévenus et accusés, mais aussi les condamnés à de courtes peines. Voir les art. 717 et s., et D.70 et s. C.pr.pén.
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : On envoie
dans les établissements pour peines les condamnés à une peine de réclusion criminelle et les condamnés à un emprisonnement d’une durée supérieure à cinq
ans. Les textes font prédominer dans les maisons centrales le souci du maintien de la sécurité. Les centres de détention, au contraire, comportent un
régime principalement orienté vers la resocialisation des condamnés ; le régime y est donc plus libéral que dans les maisons centrales…
- Le régime disciplinaire des établissements pénitentiaires est placé sous le contrôle de la juridiction administrative.
Cass.crim. 20 décembre 1990 (Bull.crim. n° 444
p.1106) : Le litige auquel peut donner lieu une sanction disciplinaire prise par un chef d’établissement pénitentiaire intéresse le
fonctionnement du service administratif pénitentiaire et relève dès lors de la compétence de la juridiction administrative.
ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES
Cf. Biens publics*, Éducation*, Enseignement*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et
des adolescents » : n° 302 5°, p.120 / Voir la
Table alphabétique, et
Intrusion (dans des locaux publics)*.
Cass.crim.
11 décembre 2012 n° 11-84304 (Gaz.Pal. 24 janvier 2013) : Une
École normale supérieure constitue un établissement
d'enseignement supérieur relevant du Livre VII du Code de
l'éducation, tandis que les établissements scolaires sont régis
par le Livre IV dudit Code.
ÉTAT
Cf. Chef de l’État*, Civilisation*,
Coercition*, Contrainte*, Coup d’État*,
Cour européenne des droits de l'homme*,
Constitution*, Démocratie*,
Dictature*, Droits régaliens*, État étranger*,
Gouvernement*, Humanité*, Institution*, Lèse-majesté*,
Monarchie*, Nation*, Outrage*, Patrie*, Raison
d’État*, Sanction (pénale)*,
Secret d'État*, Séparation des pouvoirs*,
Société*, Symbole*, Théocratie*.
Rapprocher, pour la Prison d'État : Bastille (La)*.
Cf. État étranger*.
Voir,
: Jean-Paul Doucet, « La
protection de la Société », n° 1 et s. p.2 et s. (sur les
rapports entre l'État et la Nation)
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-1 et s., p.279
et s. (sur l'État lui-même)
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n°
II-I-100 et s., p.329 et s. (sur les organes de l'État)
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n°
II-I-200 et s., p.427 et s. (sur le personnel de l'État)
Voir :
E. Baudin, La morale de l’État
Voir :
E. Baudin - La nation, ses caractères
- Notion. Une Société* humaine comporte deux éléments : un élément humain, la Nation*, et un élément juridique, l’État. Au regard du droit naturel, la première apparaît comme l’âme du corps social, le second comme son ossature juridique. Alors que la Nation vibre de chaleur humaine, l’État apparaît comme un monstre froid étranger à tout sentiment. l'État doit être au service de la Nation, et non la Nation au service de l'État ; mais sans État une Nation reste inorganisée et vulnérable.
Larousse (Dictionnaire des synonymes) : Si
« Nation » suppose un organisme concret plein de vitalité et lourd de souvenirs et d’histoire, « État » fait plutôt penser, au
contraire, à quelque chose d’abstrait de mécanique, d’essentiellement administratif et politique.
St
Thomas d'Aquin (Du gouvernement royal) : Si la nature de
l'homme veut qu'il vive en société, il est nécessaire qu'il y
ait parmi les hommes certains qui gouvernent la multitude. En
effet, comme les hommes sont en grand nombre et que chacun
pourvoit à ce qui lui convient, le groupe s'éparpillerait s'il
n'y avait quelqu'un pour avoir soin du bien du groupe... C'est
logique, car il n'y a pas d'identité entre l'intérêt propre et
l'intérêt commun. Les intérêts propres divisent, tandis que
l'intérêt commun unit.
Jolivet (Traité de philosophie, La morale) : La
société politique est nécessaire à l’homme. En effet, celui-ci ne peut réaliser la perfection de sa nature que par le recours à la société civile. Aussi
faut-il considérer cette société, sous son aspect d’État, comme étant de droit naturel. Ce caractère explique qu’on la retrouve, sous des formes diverses
dans tous les temps et dans tous les lieux.
Baudin (Cours de philosophie morale) : L'État
constitue la forme politique de la nation, l'armature qui parfait son unité et son individualité, qui lui permet d'agir avec efficacité au dedans comme
au dehors. Cette armature a pour principe le distinction entre gouvernants et gouvernés, les premiers disposant de l'autorité et de la force publique
pour commander aux seconds et s'en faire obéir.
H.
Hubert (Les Celtes) : Les Celtes n'ont pas pu créer d'État
durable... Cette race a échoué dans ses créations politiques,
faute surtout d'avoir eu la notion de l'État et le sens
suffisant de la discipline.
Leclercq
(Leçons de droit naturel - T.II) : Il en est du mot État comme de
la plupart des termes usuels de la science sociale, droit peuple,
démocratie. Il est pris dans des sens divers et comporte une gamme
de nuances...
Au sens propre et premier, l'État est une collectivité humaine
organisée, la collectivité avec son caractère spécifique
d'organisation.
Dans le but de distinguer l'État et les individus qui le composent,
on fait de l'État une personne juridique distincte de la personne
juridique des citoyens.
Gaxotte : Tous les reculs de la liberté, dans les temps
modernes, ont été liés, quelque fût le régime politique, à une hypertrophie de l’État.
Ardant (Droit constitutionnel) : L’État est à la fois
une idée et un fait, une abstraction et une organisation. Il n’a pas de réalité concrète, mais sa présence est sensible dans la vie de tous les jours.
C’est un artifice qui sert de support au pouvoir.
Bourdieu (Sur
l'État - Cours du 17 janvier 1991) propose cette distinction
sociologique : Dans un sens restreint, l'État, c'est
l'administration, un ensemble de directions de ministères, une
forme de gouvernement. Dans un sens plus large, l'État, c'est le
territoire national et l'ensemble des citoyens... Selon que l'on
donne la priorité à l'État ou à la Nation, on dispose
d'instruments de légitimation très différents.
- Nature juridique. L'État est une personne morale, d'un point de vue juridique. Lui et ses principaux organes sont dès lors susceptible d'exercer des actions en justice. Il peut même être cité en justice sur le plan international (mais pas devant les juridictions répressives françaises : art. 121-2 C.pén.).
Alland
et Rials (Dictionnaire de la culture juridique). V° État, par F.
Poirat : L' État occupe dans la science et la culture
juridique une place centrale. Bien qu'il voie sa légitimité
comme sa puissance contestée et parfois affectée, il demeure...
le modèle d'organisation et d'exercice du pouvoir.
Pierre et Martin (Cours de morale
pour l'enseignement primaire) : On appelle État la
nation considérée dans son ensemble comme un corps politique
organisé. Un État commence à se former dès que se constituent
des services publics.
Bluntschli
(Droit public général) : L'État est une personne morale
si élevée que la nécessité de sa conservation, premier devoir du
gouvernement, peut autoriser une violation réelle du droit privé
et de l'ordre établi. Le salut de l'État légitime, commande même
parfois, le sacrifice des droits individuels.
Duguit
(L'État, le droit objectif et la loi positive) : La
personnalité de l’État est une pure fiction. Derrière lui, il
n’y a que des organes, c’est-à-dire des individus qui imposent
aux autres individus leur volonté, et cela sous la sanction de
la contrainte matérielle.
- Les différentes formes de l’État. La charge de structurer et d’administrer la Nation peut être confiée à un homme seul (prince, roi, empereur), c’est la monarchie ; ou à un groupe de personnes qui s’est élevé au-dessus des autres (chefs de guerre, marchands, commerçants) c’est l’aristocratie ou la ploutocratie ; ou encore à l’ensemble de la population (représenté par un personnel politique, qui risque fort d’être imposé par des groupes de pression), c’est la démocratie.
Hobbes (Le citoyen) : On observe trois sortes
d’État : l’une en laquelle la puissance souveraine est donnée à une assemblée, où chaque bourgeois a le droit de suffrage que l’on nomme
« démocratie » ; la deuxième en laquelle cette même puissance est laissée à un conseil, auquel n’entrent pas tous les sujets mais
seulement quelques uns, que l’on nomme « aristocratie » ; la troisième en laquelle toute l’autorité est conférée à une seule personne, à
laquelle on donne le titre de « monarchie ».
Montesquieu (De l’esprit de lois) : Il y a trois
espèces de gouvernements: le républicain, le monarchique et le despotique : le gouvernement républicain est celui où le peuple en corps, ou seulement une
partie du peuple, a la souveraine puissance ; le monarchique, celui où un seul gouverne, mais par des lois fixes et établies ; au lieu que,
dans le despotique, un seul, sans loi et sans règle, entraîne tout par sa volonté et par ses caprices.
De manière caricaturale, on peut dire que, dans un régime monarchique, l'État c'est le monarque et lui seul. Michel de l'Hospital* voyait dans le Souverain la représentation humaine de l'État. Sans preuve, on prête à Louis XIV cette formule : « L'État, c'est moi ».
Biot (Le Tchéou-li), Livre 1er : Seul le souverain
constitue les royaumes ; il détermine les quatre côtés et fixe les positions principales. Il trace le plan de la capitale et des campagnes. Il crée les
ministères et sépare leurs fonctions, de manière à former le centre administratif du peuple. Il institue le ministre du ciel grand administrateur ; il
lui enjoint de se mettre à la tête de ses subordonnés et de prendre en main l'administration générale de l'État, pour aider l'empereur à régir les
royaumes et principautés.
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, chacune des formes de gouvernement peut dégénérer en système totalitaire (despotique). C'est ce qui se produit lorsqu’elle s’affranchit du respect des lois morales et des principes du droit naturel, ou quand elle s'efforce de manipuler l'opinion publique.
Le Bon (Les révolutions) : Quand on parle de
démocratie il convient de rechercher ce que signifie ce mot chez divers peuples, et de s’enquérir également si, chez un même peuple, il n’y aurait pas
une grande différence entre la démocratie des intellectuels et la démocratie populaire.
Baudin (Cours de philosophie morale) : L'étatisme
immoral est le vice par excellence de tous les États-tyrans, qu'ils soient monarchiques, aristocratiques
ou démocratiques.
Paris 6 avril 1994 (JCP 1994 IV 2446) : La
loi du 19 juillet 1977 interdisant la publication de sondages pendant la semaine précédant un scrutin est une mesure nécessaire en démocratie pour
préserver le libre arbitre du citoyen.
- Les missions de l’État. L’État est chargé d’assurer l’harmonie des rapports sociaux, en faisant régner la paix publique, la sécurité de la Nation et des personnes, en assurant une justice rapide et exacte, et en veillant au Bien commun. À cette fin, il détient le monopole de la contrainte.
Leclercq
(Leçons de droit naturel - T.II) : Il est un premier sens de sa
mission général dans lequel aucune discussion n'est possible : La
mission générale de l'État est d'assurer le bien commun.
Baudin (Cours
de philosophie morale - 1936) : L'État a envers la
Nation tous les devoirs d'un représentant fidèle et d'un
serviteur dévoué.
Pruner (Théologie morale) : L’État est la réunion
des familles et de leur membres sous une autorité unique instituée pour protéger dans leurs droits les individus et les groupements... Ainsi le but réel
et prochain de l’État n’est pas de procurer directement le bonheur de l’homme, mais seulement de lui offrir toutes les garanties possibles contre les
obstacles qu’il rencontre… c’est-à-dire maintenir et faire observer l’ordre légal dans la société.
Stelzenberger (Précis de morale chrétienne) : La
fin de l’État : le bien commun. Le but de l’État est purement temporel et terrestre. Le but qui lui incombe est le bien commun de tous, le bien-être
de tous les citoyens. A tous les citoyens il doit fournir les possibilités de réaliser leur bonheur terrestre dans une existence humainement digne.
Taine
(Les origines de la France contemporaine), La Révolution - Le
programme jacobin. Observations de Taine : L'office de l'État :
empêcher la contrainte, partant ne jamais contraindre que pour
empêcher des contraintes pires, faire respecter chacun dans son
domaine physique et moral, n'y entrer que pour cela, s'en
retirer aussitôt, s'abstenir de toute ingérence indiscrète....
ne se réserver qu'un minimum de tâches, laisser à chacun le
maximum d'initiative et d'espace, se démettre de ses fonctions
que les particuliers peuvent remplir aussi bien que
lui-même.
Payot (La
morale à l'École primaire) : Le seul rôle de l'État devrait
être de rendre la justice, c'est-à-dire d'obliger tout citoyen à
respecter les droits des autres. Ce rôle suffit : par exemple,
l'État a le devoir de nous protéger non seulement contre les
assassins et les voleurs, mais contre les gens atteints de
maladies contagieuses (hygiène publique), contre les rapaces qui
logent des malheureux dans des taudis, foyers d'infection...
N'augmentons pas les attributions de l'État.
Von Jhering (L’esprit du droit romain) : L’État a pour
mission de réaliser ces grandes idées : le bien, le vrai, le beau, le bon, l’utile.
Baudin (Cours de philosophie morale) : Qu'il soit de
forme monarchique, aristocratique ou démocratique, l'État est à la fois le représentant de la nation et son serviteur.
Valéry (Cahiers) : Si l’État est fort, il nous
écrase ; si l’État est faible, nous périssons.
Exemple
(Ouest-France 30 septembre 2016) : Un Tribunal administratif
turc a condamné mercredi le ministère de l'Intérieur à verser
300.000 € aux familles de trois chrétiens assassinés à Malatya
en 2007. Cinq hommes avaient torturé et poignardé à mort deux
turcs convertis au protestantisme et un missionnaire allemand,
au siège d'une mission évangélique.
Dans ce rôle, il devrait se montrer sensible à la misère des administrés ; on sait hélas qu'il apparaît plutôt comme un monstre froid complètement insensible aux épreuves que subissent ceux-ci.
P.Minois (La
Révolution Française) : Robespierre fut le prototype
du monstre froid étatique... son visage blême et émacié
en font le précurseur des "bourreaucrates" administratifs si
caractéristiques du XXe siècle.
- La protection de l’État constitue, dès lors, l’un des principaux intérêts dont le législateur a le devoir
d’assurer la protection. Cette protection doit viser d'abord les propres agents de l'État, trop souvent indignes de leur mission ; elle doit viser
ensuite les administrés trop souvent disposés à faire prévaloir leur intérêt personnel sur l'intérêt général. Mais un excès de répression risque de
provoquer l’avènement d’une dictature ; or, il ne faut jamais oublier que c’est l’État qui est au service de la Nation, et non la Nation qui serait au
service de l’État.
- En droit positif, les atteintes à l’autorité de l’État sont incriminées aux art. 431-1 et s. C.pén.
Voir :
Décret
du 10-12 mars 1793 relatif à la formation d'un tribunal criminel extraordinaire
Voir :
Décret
du 29-31 mars 1793, relatif aux écrits tendant au rétablissement de la royauté
Voir :
Décret
du 22 Prairial an 2 - 10 Juin 1794 concernant le Tribunal révolutionnaire
Louis XIV (Réflexions sur le métier de roi) :
L'intérêt de l'État doit marcher le premier.
Höffer (Dictionnaire d’éthique) : Une inflation
de l’État contient le danger d’un État total, puis totalitaire… Un État totalitaire, parce qu’il n’est plus légitimable, n’est plus défendable.
Baudin (Cours de philosophie morale) : L'État trouve
les premiers obstacles à sa mission dans les deux faits qu'il doit nécessairement en confier l'accomplissement à des hommes sensibles aux suggestions de
l'égoïsme et de l'utilitarisme, et qu'il leur procure nécessairement maintes occasions de succomber à ces suggestions.
Code pénal roumain de 1968. Il comporte un Titre (V)
visant Les infractions contre l’autorité.
- La responsabilité de l’État peut être recherchée devant les tribunaux administratifs, voire civils ; mais elle ne peut l’être devant les tribunaux répressifs (art. 121-2 al. 1 C.pén.). Cette vieille conception régalienne semble peu adaptée aux temps présents.
Desportes et Le Gunehec (Le nouveau droit pénal) :
Toutes les personnes morales de droit public sont pénalement responsables, à la seule exception de l’État. Il a en effet été jugé inconcevable que
l’État, qui détient le monopole du droit de punir, se sanctionne lui-même.
TGI Paris (réf.) 30 juin 2000 (Gaz.Pal. 2000 II
Chr.crim. 2509) rappelle l’art 38 de la loi du 3 avril 1955 :
Toute action portée devant les Tribunaux de l’ordre judiciaire et tendant à faire
déclarer l’État créancier ou débiteur pour des causes étrangères à l’impôt et au domaine doit, sauf exception prévue par la loi, être intentée à peine de
nullité par ou contre l’Agent judiciaire du Trésor Public.
ÉTAT CIVIL
Cf. Carte d'identité*, Casier judiciaire*, Faux-nom*, Nom*, Usurpation d’état civil*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n°
II-6, p.278
Voir :
Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n°
I-II-I-202, p.165 / n°I-III-I-309, p283
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e
éd.) : n° II-10, p.254 (sur le délit d'usurpation d'état civil)
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et
des adolescents »
- n°123 et 124, p.72 (sur le rôle des
officiers de l'état civil)
- n° 412-413, p.255 (sur l'indisponibilité de l'état civil)
- n°123, p.72 / n° 311, p.141
(sur la responsabilité des officiers d'état civil)
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société » : n° II-I-102,
p.332-333
Les atteintes portées à l’état civil d’une personne font l’objet, d'abord de l’article 433-19 C.pén. (art.259 al.3 et 261 anciens), qui incrimine le fait de prendre un autre nom que le sien ou de modifier son nom officiel, ensuite des articles R.645-3 et s. du même Code rassemblant les incriminations de police relatives à l'état civil.
Carbonnier (Droit civil) :
Par opposition à l'état politique (constitué par la
nationalité et par les droits, ou l'absence des droits, de
citoyen), l'état civil est, dans un sens large et vague, la
situation de la personne en droit privé, entre la naissance et
la mort ; dans un sens plus précis, c'est la situation de la
famille, telle qu'elle résulte de la filiation et du mariage.
Marty
et Raynaud (Droit civil - Les personnes) : C'est au
statut familial qu'on se réfère essentiellement quand on parle
de l'état des personnes, car c'est lui qui intéresse le droit
civil... Mais l'état des personnes dépend aussi, dans une
certaine mesure, de la nationalité et de la place de la personne
dans l'organisation politique de la cité.
Malaurie (Droit
civil - Les personnes n°101) : État civil.
L'identification d'une personne est un élément de son état
civil, c'est-à-dire de la place qu'elle occupe pendant sa vie
dans la société et dans la famille auxquelles elles appartient.
Cass.crim. 11 janvier 1990 (Gaz.Pal. 1991 I 298 note
Doucet) : La connaissance que le nom patronymique,
utilisé dans l'un des actes énumérés à l'art. 261 C. pén., n'est
pas le sien, suffit à caractériser l'élément intentionnel du
délit prévu par ledit article.
ÉTAT DANGEREUX
Cf. Alcoolisme*, Mesures de sûreté*, Témibilité*, Toxicomanes*.
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e
éd.) : n° I-441 et s., p.229 et s. (personnes dangereuses,
activités dangereuses, animaux dangereux, choses dangereuses)
La notion d'état dangereux relève de la criminologie ; elle est caractérisée par une prédisposition manifeste d'un individu à commettre des crimes ou délits. Ceux qui donnent la priorité à la défense de la société sur la protection des libertés individuelles invitent le législateur à soumettre cet individu à des mesures de défense sociale.
Gassin
(Criminologie) : Qu'est-ce au juste que l'état dangereux d'un
individu ? Dans une première vue des choses on peut dire que
c'est la très grande probabilité qu'un individu commette un
délit.
Prins (La
défense sociale) : Nous avons désormais à faire figurer
au premier plan une notion qui avait été laissée dans l'ombre :
celle de l'état dangereux du délinquant substituée à la
conception trop exclusive de l'acte poursuivi. En d'autres
termes, un fait accompli peut être moins menaçant pris
isolément, que l'agent qui l'a commis ; et punir cet agent pour
un fait spécial en négligeant la nature permanente de son
auteur, peut être un procédé complètement illusoire. Pour
choisir les mesures à prendre, c'est l'état permanent de
l'individu qu'il faut considérer plus que son acte passager.
Code pénal
de l'URSS de 1926. Art. 7 : Aux personnes ayant commis des
actes socialement dangereux, ou présentant du danger par leurs
attaches avec un milieu dangereux ou par leur passé, il est fait
application de mesures de défense sociale de caractère
judico-correctionnel, ou médical, ou médico-pédagogique.
Cass.crim.
26 février 2008 (Bull.crim. p.152 n°50) : Encourt la
censure l'arrêt de la chambre de l'instruction qui, pour rejeter
les demandes de mise en liberté présentées par une personne
condamnée par la cour d'assises, retient que le maintien en
détention est l'unique moyen d'éviter une réitération des faits
de la part du requérant qui présente un état dangereux, sans
préciser expressément que les objectifs recherchés ne pouvaient
être atteints par un placement sous contrôle judiciaire.
ÉTAT D'ÉBRIÉTÉ
Cf. Alcoolisme*, Chambre de dégrisement*, Délit civil*, État d'ivresse*, Faute civile*, Intempérance*, Ivresse*.
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n°
I-II-306, p.231 / n° I-II-308, p.233
Une personne est en état d'ébriété lorsqu'elle a bu une petite quantité de boisson alcoolique ; pas assez pour atteindre l'état d'ivresse, mais suffisamment pour être dans état euphorique lui faisant perdre la mesure des actes qui peuvent être accomplis là où il se trouve, là où il habite, là où il travaille. Ce manque de discernement constitue une faute civile pouvant conduire à des sanctions civiles.
Cass.soc. 17 octobre 1979 (Bull.civ. V n° 733 p.540)
: Dès lors que les juges du fond relèvent qu'un salarié en état d'ébriété proférait dans le magasin des hurlements et des injures et s'était montré
grossier même avec un fournisseur, il importe peu que l'employeur n'ait pas invoqué, au moment du licenciement, le grief d'intempérance en lui-même mais
seulement ses conséquences sur la bonne marche du commerce qui constituaient un motif réel et sérieux de rupture.
ÉTAT DE DROIT
Cf. États d'exception*, Légalité*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n°III-2, p.350
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n°
II-2, p.281-282
- Notion. On nomme « état de droit » l’organisation sociale démocratique dans laquelle les trois fonctions rationnelles législative, judiciaire et exécutive sont confiées à des personnels différents, pleinement compétents dans leur domaine et pourvus de l’autorité nécessaire pour accomplir leur mission.
Encyclique
Centesimus annus : Une démocratie authentique
n'est possible que dans un État de droit et sur la base d'une
conception correcte de la personne humaine.
Alland
et Rials (Dictionnaire de la culture juridique). V° État de
droit, par Jouanjan : La «
prééminence du droit », dans
le préambule de la Convention européenne des droits de l'homme
constitue une expression du principe de l'État de droit qu'elle
fait entrer de la sorte dans le patrimoine commun des États
parties à la Convention.
Guinchard
et Buisson (Procédure pénale) :
L’honneur d’une société civilisée,
d’un État véritable état de droit, c’est de ne pas condamner une
personne accusée (au sens large) d’une infraction, sans
organiser un procès permettant à cet accusé de se défendre
selon les principes démocratiques universel.
Garnot (Histoire
de la justice) : Le développement d'instances
internationales (Cour EDH), dont les normes s'imposent
aux États, ont amoindri la souveraineté des pouvoirs législatif
et exécutif, donnant naissance à ce qu'on appelle l'
« État de droit », dans lequel le
rôle du juge est renforcé.
John
Rawls (Théorie de la justice, n°38) : L'application régulière
et impartiale des règles publiques constituent l'état de droit
quand elles sont appliquées au système légal... Il est évident
que l'état de droit est étroitement lié à la liberté... L'état
de droit implique le précepte que des cas semblables soient
traités de manière semblables.
- Régime. Dans l’exercice de leurs fonctions, les agents publics doivent obéir à l'ordre constitutionnel et aux lois qui en sont issues.
J.Rawls (Justice et démocratie) : L’État de droit
implique le rôle déterminant de certaines institutions ainsi que des pratiques judiciaires et légales qui leur sont associées. Il implique, entre autres
choses, que tous les employés du gouvernement, y compris le pouvoir exécutif, soient soumis à la loi et que leurs actes soient sujets à enquête
judiciaire, que le pouvoir judiciaire soit suffisamment indépendant et que l’autorité civile l’emporte sur l’autorité militaire. En outre il peut vouloir
dire que les décisions des juges reposent sur l’interprétation des lois existantes…
J-B d'Onorio (Loi naturelle et loi civile) : La mise en
valeur de la notion d'"État de droit" implique notamment des limites infranchissables à la puissance
publique.
Rapport
annuel de la Cour de cassation, 2009 : Les forces de
sécurité exercent leur mission avec l'efficacité et le
discernement qui sont leurs marques de distinction dans un État
de droit.
Trib. pol. Tarbes 17 février 1993 (Gaz.Pal. 1993 I
somm. 174) : Le principe de l’individualisation de la peine constitue un principe fondamental d’un État de droit grâce auquel l’autorité
judiciaire, gardienne des libertés individuelles, peut traiter de situations inégales en évitant les inégalités répressives.
De leur côté, les divers membres de la société ont le double devoir de respecter et de veiller au respect de la législation en vigueur.
Fordyce (Éléments
de philosophie morale) : L'acquiescement et l'obéissance
aux lois de la société dont nous sommes membres sont des devoirs
politiques, sans l'observation desquels tout gouvernement
dégénèrerait en état de licence ou d'anarchie.
Ahrens (Cours de droit naturel) : Tous les
membres d’une communauté sont appelés, chacun dans sa sphère propre, à maintenir l’état de droit, en agissant librement, d’une manière conforme à leurs
droits et à leurs obligations, et en réparant de bon gré les torts qu’ils ont faits, les lésions de droit qu’ils ont commises, soit par erreur, soit par
inadvertance ou par dol.
ÉTAT DE GUERRE - Voir : États d'exception*.
ÉTAT DE NÉCESSITÉ - Voir : Nécessité*.
ÉTAT DE SIÈGE - Voir : États d'exception*.
ÉTAT D'IVRESSE
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n°
I-II-302, p.234 / n° I-II-304, p.227-228 / n° I-II-314, p.238
Cf : Alcoolisme*, État d'ébriété*, Intempérance*, Ivresse*, Ivresse publique*, Mise en danger d'autrui*, Symboles*.
Une personne est en état d'ivresse lorsqu'elle a perdu l'usage de sa raison, quelle ne parvient plus à distinguer le Bien du Mal. Cette situation dans laquelle l'intéressé se trouve ne constitue pas un Acte humain* mais un état dangereux. C'est pourquoi il donne lieu à un certain nombre de dispositions pénales.
Ainsi, le simple fait de se présenter dans un lieu public étant en état d'ivresse constitue une infraction pénale (art. R.3353-1 Code de la santé publique).
Goyet (Droit pénal spécial): Pour que la contravention
d'ivresse publique soit caractérisée il faut, d'une part, que l'état d'ivresse soit manifeste, et, d'autre part, qu'il soit constaté dans un lieu
public.
Bien plus grave, accomplir un acte délicat pouvant causer à autrui des dommages corporels est susceptible de rendre applicable le délit de mise en danger d'autrui.
Vitu (Traité de droit pénal spécial, T.II n° 1820) :
L'infraction de mise en danger est exclusive de toute lésion effective d'un bien juridique [intérêt juridique] ; elle se caractérise par le péril que,
par son comportement, un individu fait courir à tel bien, péril dont il a ou devrait avoir conscience au moment où s'extériorise son comportement.
L'un de ces actes a été spécialement incriminé par le législateur, c'est le délit de conduite en état d'ivresse.
Cass.crim. 8 juin 1999 (Gaz.Pal. 1999 II Chr.crim.
154) : Pour requalifier à bon droit les faits de « conduite sous l'empire d'un état alcoolique » en « conduite sous l'empire d'un état d'ivresse
manifeste », les juges retiennent que, si le taux d'alcoolémie n'est pas régulièrement établi et ne peut servir de base à la prévention, il résulte
toutefois des éléments du dossier que R... titubait, que son haleine sentait l'alcool, qu'il était agité et confus, tenait des propos incohérents et
qu'il reconnaissait, après dégrisement, avoir bu, peu de temps avant l'accident.
ÉTAT D'URGENCE - Voir : États d'exception*, Flagrant délit*, Urgence*.
ÉTAT ÉTRANGER
Cf. Chef d’État étranger*, Immunité diplomatique*, Symboles*.
Selon la coutume internationale, un État ne peut assigner au pénal devant ses tribunaux un autre État souverain. Cette règle de courtoisie dans les rapports internationaux s’applique avec une rigueur particulière devant les tribunaux répressifs.
Holleaux, Foyer et de La Pradelle (Droit international
privé) : Il n’est guère possible de discerner ce que cette règle doit respectivement à la « courtoisie », au souci de ne pas troubler
les relations diplomatiques, ou à une conception particulière de l’égalité formelle entre les États.
Cass.crim.
19 janvier 2010, n° 09-84818 (Bull.crim. n° 9 p.41 ) :
La coutume internationale qui s’oppose à la poursuite des
États devant les juridictions pénales d’un État étranger s’étend
aux organes et entités qui constituent l’émanation de l’État
ainsi qu’à leurs agents en raison d’actes qui relèvent de la
souveraineté de l’État concerné.
En revanche, un législateur attentif aux bonnes relations internationales doit veiller à ce qu'un État étranger ne soit pas victime d'injures ou d'outrages de la part de ses propres justiciables.
Code pénal d'Andorre. Art. 79 : Quiconque aura
outragé publiquement par un moyen quelconque un état étranger sera puni d'un emprisonnement d'une durée maximale de deux ans et un mois.
Code pénal du Danemark. § 110 e : Une amende ou
une peine d'emprisonnement de 2 ans au plus est infligée à toute personne qui insulte le public d'une nation étrangère ou d'un État étranger, son drapeau
ou tout autre symbole national.
Devant les tribunaux civils les États étrangers bénéficient d'une immunité de juridiction, qui paralyse les juges tant qu'elle apparaît justifiée (ce qui n'est pas le cas lorsque cet État est assigné en raison d'un acte qui ne concerne en aucune manière sa souveraineté, tel un acte de commerce).
Cass.1e civ.. 9 mars 2011 (n°10- 10044 Gaz.Pal. 18
octobre 2011 note Loiseau) : L'immunité de juridiction d un état privant de tout pouvoir le juge du for saisi, le juge de la mise en état est tenu du
surseoir à statuer sur toutes les exceptions de procédure dont il est saisi, jusqu'à la décision sur le fin de non-recevoir d'une telle immunité.
Paris 9 septembre 2002 (Gaz.Pal. 2002 II ) :
Les États étrangers bénéficient de l’immunité de juridiction lorsque l’acte qui donne lieu au litige constitue un acte de puissance publique ou a été
accompli dans l’intérêt d’un service public.
ÉTATS D'EXCEPTION
Cf. Couvre-feu*, État de guerre*, État de siège*, État d’urgence*, Procédure - procédure inquisitoire*, Sécurité publique*.
Des circonstances ou événements graves peuvent contraindre, dans un État de droit, les pouvoirs publics à écarter provisoirement l'application des règles de droit commun et à étendre les pouvoirs soit de l'armée soit de la police afin d'assurer le Bien commun*. Ces dérogations ne doivent toutefois pas aller jusqu'à comporter des mesures portant atteinte à la dignité de la personne humaine.
Kervégan (Dictionnaire de philosophie politique) : Par
situation extrême, on doit comprendre celle d'un État dont l'ordre intérieur est gravement troublé, voire l'existence menacée par un facteur (invasion
étrangère, subversion ou insurrection intérieure, ou même catastrophe naturelle) dont l'élimination suppose le recours à des moyens extraordinaires qui
outrepassent, surtout s'il s'agit d'un État de droit, le cadre normal de son action. L'état d'exception désigne, notamment dans la langue
juridique, l'ensemble des moyens prévus pour faire face à une telle situation d'extrême danger.
Code pénal du Cameroun. Art. 132 bis (in fine) :
Aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu'elle soit, qu'il s'agisse de l'état de guerre ou de menace de guerre, d'instabilité politique intérieure
ou de tout autre état d'exception ne peut être invoqué pour justifier la torture.
- En droit français on distingue trois situations qui sont, par ordre de gravité décroissante :
État de guerre - Selon la définition de Locke, l'état de guerre, est un état d’inimitié et de destruction. Les lois civiles devenant insuffisantes pour assurer la survie de la Nation, celle-ci se trouve, de fait, dans la nécessité de se doter d’une législation d’exception. Il est sage d’anticiper son élaboration (voir notamment l'art. L.2112-1 du Code de la défense).
Cf. Armée*, Circonstances aggravantes (réelle)*, Crime de guerre*, Délit militaire*, Temps de guerre*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n°116, p.82
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n°
I-I-102, p.70
Voir :
Tableau des incriminations visant à
assurer l'existence de la Nation (en droit positif français)
Laferrière (Histoire du droit français) : La société
romaine s’est développée dans un état de guerre continuelle, à l’intérieur, depuis la retraite sur l’Aventin jusqu’à l’admission des peuples de l’Italie
au droit de cité.
Montesquieu (De l’esprit des lois) : L’idée d’état
de guerre fait établir les lois parmi les hommes…C’est le droit des gens.
Saint-Just (Fragments sur les institutions
républicaines) : Il est clair que les peuples, à cause de l'accroissement de la population, sont dans l’état de guerre ; ce qui nécessite
une loi politique entre eux.
Chauveau Hélie (Théorie du Code pénal) : La discipline
militaire appelle des règles distinctes pour l’état de paix et pour l’état de guerre.
Bluntschli (Droit public général) : Quand l’État est
menacé, comme en temps de guerre, la presse politique est soumise à un régime exceptionnel nécessaire. Si la constitution ou la loi n’ont pas eu la
sagesse de les déterminer d’avance, ou le péril de l’État grandit, ou la liberté de la presse est étouffée en fait illégalement par le pouvoir. La loi
écrite devient lettre morte.
- Dans cette situation des dispositions particulières peuvent entrer en vigueur. Autrefois, des mesures extrêmes furent même appliquées.
Exemple
(Hérodote, « Histoires
») : Lorsque Darius
vint assiéger Babylone, les habitants de cette ville se
préparèrent à résister par les moyens les plus atroces. Pour
ménager les provisions en vue de soutenir le plus longtemps
possible le siège que l'on prévoyait, chaque homme garda sa mère
et sa femme favorite ; toutes les autres femmes furent réunies
sur la grande place de la ville et égorgées.
Le droit contemporain n'admettrait pas de tels excès. Cependant, le 6e protocole additionnel à la Conv. EDH admet la peine de mort en temps de guerre. De même, en droit français, la compétence des tribunaux militaires se trouve alors étendue.
Décret
du 23 août 1793. Art. I : Dès ce moment, jusqu'à celui
où les ennemis auront été chassés du territoire de la
République, tous les français sont en réquisition permanente
pour le service des armées.
Les jeunes gens iront au combat ; les hommes mariés forgeront
des armes et transporteront des subsistances ; les femmes feront
des tentes, des habits et serviront dans les hôpitaux...
Code pénal suédois. Chapitre 21 Section 1 :
Les dispositions de ce chapitre sont applicables quand le royaume est en état de guerre.
- L’état (ou le temps) de guerre peut constituer une circonstance aggravante réelle de certaines infractions, telle la trahison.
Code pénal du 25 septembre 1791. Article 5 : Les
trahisons … commises en temps de guerre envers les alliés de la France, agissant contre l’ennemi commun, seront punies de la peine de mort.
Code
de la défense (à jour en 2012). Art. L.333-1
: Lorsqu'ils sont commis en temps de guerre, les faits de
trahison ou d'espionnage incriminés aux articles 411-2 à 411-11
C.pén. sont punis de la réclusion criminelle à perpétuité et de
750.000 € d'amende .
Code criminel du Canada. Art. 47 (2) :
Quiconque commet une trahison est coupable d’un acte criminel et encourt … l’emprisonnement à perpétuité s’il existe un état de guerre entre le Canada
et un autre pays.
- Mais les infractions commises pendant l'état de guerre ne peuvent le plus souvent être sanctionnées qu'avec le retour à la paix.
Plutarque (Vie de César) : Lorsque César
voulut s'emparer du Trésor public pour financer sa guerre contre Pompé, au Tribun Metellus qui voulait s'y opposer, il répliqua :
« Le temps des armes
n'est pas celui des lois ; si tu n'approuve pas ce que je veux faire, retire-toi. Quand la concorde sera rétablie et que j'aurai déposé les armes, alors
tu pourras haranguer à ta fantaisie
».
État de siège - L’état de siège constitue une mesure de sûreté publique, officiellement proclamée afin de protéger la population contre un péril imminent résultant d’une guerre étrangère ou civile (art. 36 de la Constitution, et loi du 9 août 1849). Les pouvoirs de l’État sont alors renforcés, notamment ceux des autorités militaires (art. L.2121-1 et s. du Code de la défense), et certaines incriminations aggravées (art. 414-1 C.pén.).
Cf. État de guerre*, État d’urgence*, Sécurité publique*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 116, p.782
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 37,
p.37 / n°
I-I-203, p.101-102
Voir :
Tableau des incriminations visant à
assurer l'existence de la Nation (en droit positif français)
Morin (Répertoire de droit criminel) : On appelle
« état de siège » la situation exceptionnelle, dûment proclamée, qui fait suspendre, pour cause de péril imminent, certaines dispositions de la
Constitution ou quelques uns des droits garantis par elle aux citoyens… Il relève du droit absolu de conservation.
Bluntschli (Droit public général) : La guerre ou
l’émeute peuvent autoriser la proclamation de l’état de siège (Standrecht), l’attribution de certains crimes aux tribunaux militaires, et même
l’installation d’autres juges d’exception. La procédure elle-même peut être simplifiée, les débats immédiatement ouverts, le jugement aussitôt rendu.
Mais cette exception que la nécessité seule justifie, ne peut jamais aller jusqu’à l’abrogation des formes substantielles de toute justice. Ainsi, nul ne
pourra être condamné sans avoir eu la possibilité de se défendre ; le jugement sera l’œuvre de la conscience et non de la volonté; on punira les
coupables, non les suspects.
Colliard (Libertés publiques) : On désigne sous le nom
d’état de siège un régime de légalité spécial à des circonstances de crise et destiné à permettre, par la diminution des libertés publiques et
l’extension des pouvoirs de l’autorité de police, de surmonter les difficultés du moment.
Code pénal belge. Art. 121 : Quiconque aura
recélé ou fait receler des agents ou des soldats ennemis, valides ou blessés, ou qui leur sera venu en aide pour leur permettre de se soustraire aux
autorités sera puni de la réclusion de quinze ans à vingt ans. En état de siège, l’infraction sera punie de réclusion à perpétuité.
Exemple (Ouest-France 16 décembre 2011) :
Jacquerie villageoise en Chine du sud. À Wukann les autorités locales ont imposé l'état de siège, alors que 20.000 habitants sont vent debout contre
les expropriations. Dans ce petit village de pêcheurs, des officiels auraient exproprié des paysans, revendant leurs terres à des promoteurs immobiliers
pour quelque 120.000.000 €... empochant au passage 70% de la coquette somme.
Le Code de procédure pénale consacre ses articles 699 et s. aux particularités de l'instruction visant des faits commis alors que l'état de siège a été proclamé.
Cass.crim. 12 octobre 1848 (S. 1848 I 641) : En
cas de déclaration d'état de siège, la juridiction militaire, substituée à la juridiction ordinaire, est compétente pour connaître même des faits
antérieurs à la déclaration de l'état de siège, mais se rattachant aux circonstances qui ont motivé cette mesure.
État d’urgence - L’état d’urgence constitue une mesure de sûreté publique, officiellement proclamée
pour faire face à un péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public, ou à une calamité publique.
Il a été réglementé par une loi du 3 avril 1955 (comme le
rappellent l'art. L.213-1 du Code de la sécurité intérieure et
l'art. L.2131-1 du Code de la défense).
Cf. Couvre-feu*, État de siège*, Sécurité publique*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 4,
p.6 / n° 116, p.82 / n° I-238 , p.249
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n°
I-I-203, p.101
Voir :
Tableau des incriminations visant à
assurer l'existence de la Nation (en droit positif français)
Vitu (Droit pénal spécial) : On appelle état d’urgence
un régime d’exception investissant les autorités civiles de prérogatives exorbitantes qui leur permettent d’apporter des restrictions plus ou moins
graves à l’exercice des libertés publiques … il est proclamé en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public.
Foillard (Droit administratif, 13e éd. p.177) : L'état de
siège et l'état d'urgence. - Il résulte de ces régimes d'exception que, lorsque les circonstances l'exigent, le gouvernement est habilité à "ouvrir une
parenthèse dans la légalité".
Colliard (Libertés publiques) : La déclaration
d’urgence donne automatiquement aux préfets des départements compris dans la zone territoriale pour laquelle l’état d’urgence a été déclaré, le triple
pouvoir d’interdire la circulation des personnes ou des véhicules, d’instituer des zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est
réglementé, d’interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l’action des
pouvoirs publics.
Lyon (1re Ch.) 29 juin 1989 (D. 1989 IR 220) :
L’état d'urgence consiste à prévenir un trouble potentiel susceptible de se produire à tout moment durant le temps de l’interdiction.
Cons.const. 25 janvier 1985 (D. 1985 361 note
Luchaire) : Si la Constitution, dans son art. 36, vise expressément l’état de siège, elle n’a pas pour autant exclu la possibilité pour le
législateur de prévoir un régime d’état d’urgence pour concilier les exigences de la liberté et la sauvegarde de l’ordre public.
Exemple (Ouest-France
14 novembre 2015) après les attentats du 13 novembre, le
Gouvernement a décrété l'état d'urgence dès 14 novembre ; une
loi du 20 novembre 2015, n° 2015-1501; l'a prorogé pour une
durée de trois mois...
L'état d'urgence autorise notamment les interdictions individuelles de manifester. Mais cette mesure ne semble pas avoir fait ses preuves (non plus d'ailleurs que les diverses mesures individuelles d'interdiction de droit).
Exemple (Le
Figaro 20 mai 2016) : Trois personnes en garde à vue dans
l'enquête sur l'incendie d'un véhicule de police. Ils avaient
pourtant fait l'objet d'interdictions de manifester. Le
gouvernement s'interroge sur la pertinence de cet outil.
ÉTHIQUE
Cf. Déontologie*, Morale*.
Le terme « éthique » provient du mot grec « éthikos : mœurs » ; tandis que le terme « morale » vient du mot latin « mos : mœurs ». Si les deux notions coïncidaient au départ, elles ont quelque peu divergé ensuite du fait que les catholiques ont retenu le mot morale, alors que les protestants ont préféré le mot éthique ; chacune de ces deux religions les ont marquées de leur empreinte. Sous l’influence dominante des intellectuels américains et des penseurs athées, le terme éthique (tourné vers les problèmes pratiques) tend à supplanter le terme morale (tourné vers les questions de principe).
Bailly (Dictionnaire grec-français). Èthikos :
Qui concerne les mœurs – l’éthique, c’est-à-dire la morale, partie de la philosophie.
Gaffiot (Dictionnaire latin-français).
Mos-mores : Volonté de quelqu’un – usage – genre de vie – mœurs – principes – règles –lois.
Vergely (Dico de la philosophie) : L’éthique est
la discipline qui réfléchit sur les comportements afin de trouver le plus adapté d’entre eux face à une situation … L’éthique poursuit le bonheur, à la
différence de la morale qui s’intéresse à la vertu.
Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale. V° Éthique
appliquée (M-H. Parizeau) : Les rapports entre la philosophie morale et l’éthique appliquée constituent une question tout à fait contemporaine,
puisque l’expression même « éthique appliquée » apparaît aux États Unis au cours des années 1960 avec l’explosion de nouveaux champs
d’interrogation éthique au sein de la société. : bioéthique, éthique environnementale, éthique des affaires, éthique professionnelle.
Sgreccia (Manuel de bioéthique) : L’éthique est la
science qui étudie le comportement humain en relation avec les valeurs, les principes et les normes morales.
Cass.crim. 19 février 1997 (Gaz.Pal. 1997 I
Chr.crim. 115) : La décision prise par l’anesthésiste d’extuber et d’arrêter la réanimation de la patiente, en désaccord avec toute logique et
toute éthique médicale … a constitué une faute.
ÉTRANGERS
Cf. Apatride*, Caution judicatum solvi*, Contrôle d'identité*, Droit d'asile*, Empreintes digitales*, Exécution des peines*, Expulsion des délinquants étrangers*, Immigration*, Interdictions de droits - interdiction du territoire national*, Réfugié*, Régnicole*.
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n°
105, p.64
Voir
: Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-I-122
et s., p.96 et s. (sur l'immigration)
- Notion. L’étranger se définit, d’un point de vue formel, comme celui relève juridiquement d’un autre État que celui où il se trouve.
Dictionnaire
Petit Larousse) : Étranger - Se dit d'une personne qui
appartient à une autre Nation.
- Règle morale. Il est admis que les nationaux doivent respecter l'étranger séjournant sur leur territoire ; comme l'étranger doit respecter le mode de vie matériel et spirituel des nationaux.
Pufendorf
(Le droit de la nature) : Il y aurait de l'inhumanité à
refuser de donner retraite à un petit nombre de gens, qui ne
sont pas bannis de leur Patrie pour quelque crime ; surtout
s'ils ont de l'industrie et qu'ils ne viennent point troubler la
Religion ni les Lois du Pays.
Catéchisme de l’Église catholique. § 2241 : Les
nations mieux pourvues sont tenues d’accueillir, autant que faire se peut, l’étranger en quête de la sécurité et des ressources vitales qu’il ne peut
trouver dans son pays d’origine… L’immigré est tenu de respecter avec reconnaissance le patrimoine matériel et spirituel de son pays d’accueil, d’obéir à
ses lois et de contribuer à ses charges.
- Science criminelle. Il
appartient aux différents législateurs de fixer le statut
des étrangers, mais dans le respect des Conventions
internationales et notamment de celles consacrant la Dignité de
la personne humaine.
L'étranger qui méconnaît le mode de vie du pays où il se trouve relève des
lois et des tribunaux de ce pays.
De Ferrière (Dictionnaire de droit, 1762), v° Aubain :
Les étrangers, tant qu’ils demeurent en France, sont sujets aux lois du Royaume. S’ils y commettent des crimes, ils sont punis des mêmes peines que les
sujets du Roi.
Code annamite des Lé (Trad. Deloustal) :
Quand un étranger est venu se joindre à la population du pays, il est par cela même, devenu sujet du souverain. S’il commet des fautes, il est jugé
selon les lois du pays ; et par là on montre que personne n’est en dehors de l’action de ces lois.
C’est en temps de guerre que le statut des étrangers pose le plus de problèmes : lorsque les État Unis sont entrés en guerre contre le Japon, ils ont placé dans des camps les japonais qui résidaient sur leur sol.
Loi du 6 septembre 1793. La Convention nationale,
considérant que les puissances ennemies de la République, violant les droits de la guerre, se servent des hommes mêmes en faveur de qui la Nation
française exerce journellement des actes de bienfaisance et d’hospitalité, pour les diriger contre elle, et que le salut public lui commande des mesures
de sûreté que ses principes d’union et de fraternité avaient jusqu’ici rejetées ; décrète :
Art. 1er Les étrangers, nés sur le territoire des puissances avec lesquelles la République est en guerre, seront mis en état d’arrestation dans des
maisons de sûreté, jusqu’à ce que l’Assemblée nationale en ordonne autrement.
- Droit positif. La
matière relève de nos jours plus de la politique que du droit ;
elle est actuellement régie par le « Code de l'entrée et du séjour des
étrangers et du droit d'asile » (voir : Immigration*).
L'étranger en situation irrégulière peut être expulsé du
territoire national, surtout lorsqu'il y a commis une
infraction grave. Mais la procédure à suivre est actuellement délicate
du fait que la question est en général placée, non sur le
terrain de la protection de la société, mais sur celui des
situations individuelles. La vérification du droit de séjour
obéit aux règles posées par une loi du 31 décembre 2012.
Cass.crim.
5 juin 2012 (Gaz.Pal. 21 juin 2012 p.24) sommaire : Il
résulte de l'art. 62-2 C.pr.pén. issu de la loi n° 2011-392 du
14 avril 2011 qu'une mesure de garde à vue ne peut être décidée
par un officier de police judiciaire que s'il existe des raisons
plausibles de soupçonner que la personne concernée a commis ou
tenté de commettre un crime ou un délit puni d'emprisonnement ;
en outre, la mesure doit obéir à l'un des objectifs nécessaires
à la conduite de la procédure pénale engagée. À la suite de
l'entrée en application de la directive du 16 décembre 2008
relative aux normes et procédures communes applicables dans les
États membres au retour des ressortissants d'États tiers en
séjour irrégulier, telle qu'interprétée par la Cour de justice
de l'Union européenne, le ressortissant d'un État tiers mis en
cause, pour le seul délit prévu par l'article L. 621-1 du Code
de l'entrée et du séjour des étrangers, n'encourt pas
l'emprisonnement lorsqu'il n'a pas été soumis préalablement aux
mesures coercitives visées à l'art. 8 de ladite directive. Il ne
peut donc être placé en garde à vue à l'occasion d'une procédure
diligentée de ce seul chef.
Lorsqu'une personne citée à comparaître devant un tribunal français est domiciliée à l'étranger, l'art. 562 C.pr.pén. dispose que l'huissier de justice doit procéder à une signification au Parquet. Le procureur de la République vise l'original et adresse une copie au ministère des affaires étrangères qui procède par la voie diplomatique.
Cass.crim. 4 octobre 2011 (n° 10-85739, Gaz.Pal. 3
novembre 2011 p.23) : Selon l'art. 562 C.pr.pén., toute personne habitant à l'étranger doit être citée par acte d'huissier au parquet de la
juridiction saisie, qui envoie copie dudit acte au ministère des affaires étrangères ou à toute autorité déterminée par les conventions
internationales.
ÉTRANGLER (Étrangleur) ) - Voir : Garrot*, Strangulation*, Tueur*.
ÊTRE HUMAIN - Voir : Homme*, Personne humaine*.
ÊTRE SUPRÊME - Voir : Être suprême* [noms propres]. )