Page d'accueil > Table des rubriques > Dictionnaires de droit criminel > Lettre M : table d'accès > Lettre M (Onzième partie)

DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL

- Professeur Jean-Paul DOUCET -

Lettre  M
(Onzième partie)

MORALE

Cf. Actes humains*, Âge d'or*, Bien*, Confucius*, Conscience populaire*, Déontologie*, Devoir*, Droit*, Droit - naturel*, Équité*, Éthique*, Être suprême*, Iniquité*, Jolivet*, Justice*, Loi morale*, Mœurs*, Ordre moral*, Philosophie morale*, Pouvoir temporel et pouvoir spirituel*, Religion*, Séparation des pouvoirs*, Théologie morale*, Vertu*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), voir la Table alphabétique

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° 5, p.4 / n° I-I-I-333, p.96 / n° I-I-II-202, p.138 / n° I-I-II-206, p.142 / n° I-I-II-215, p.150 / n° I-II-1, p.155 / n° I-II-II-100, p.219 / n° III-II-211, p.241 / n° I-II-II-220, p.251 / n° II-122, p.326

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° 22, p.18 / n° 25, p.19

Signe Renvoi livres Voir :Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 9, p.16 / n° 103, p.36 / n° 105, p.41 / n°112, p.55 / n° 208, p.84 / n°209, p.86 / n° 218, p.105 / n° 301, p.115 / n° 318, p.155 / n° 326, p.177, n° 327, p.178 / n° 328, p.185 / n° 334, p.197 /....

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-11, p.65 / n° I-I-1 p., p.67 / notamment

Signe Renvoi rubrique Voir : Kant - L’éducation morale  (Extraits du Traité de pédagogie, 1803)

Signe Renvoi rubrique Voir : Ferraz M., Les rapports de la philosophie morale avec la science du droit et avec la théologie morale

Signe Renvoi rubrique Voir : H. Mazeaud, La règle morale et la règle de droit

- Notion. La morale s'efforce de dégager les règles de vie en société les plus conformes à la justice, à la prudence et à la vérité. Ses conclusions sont proposées par le pouvoir spirituel au pouvoir temporel, afin de servir de modèle aux relations humaines.

Signe Dictionnaire Cuvillier (Vocabulaire philosophique) : Ensemble des mœurs et jugements moraux d’un individu ou d’une société. Elle est conçue sous forme normative de l’action humaine, en tant qu’elle est soumise au devoir et a pour but le bien.

Signe Dictionnaire Vergely (Dictionnaire de la philosophie) : Au sens fort, la morale est le domaine des principes réglant l’action humaine. Tournant le dos à l'individualisme prônant une diversité des mœurs, le propre de la morale est de proclamer son unité indivisible transcendant les individualités.

Signe Philosophie Renard (Le droit, l'ordre et la raison) : En morale, le grand problème est d’assurer les principes directeurs de la vie humaine, de choisir entre les fins à poursuivre.

Signe Philosophie Holbach (La morale universelle) : La morale est faite pour régler le destin de l'univers ; elle embrasse les intérêts de toute la race humaine ; elle a droit à commander à tous les peuples, à tous les rois, à tous les citoyens ; et ses décrets ne sont jamais impunément violés. La politique n'est que la morale appliquée à la conservation des États ; la législation n'est que la morale rendue sacrée par les lois... C'est donc à juste titre que l'on peut appeler cette science « universelle », puisque son vaste empire comprend toutes les actions de l'homme dans toutes les positions de la vie.

Signe Philosophie Leclercq (Leçons de droit naturel - T.I) : Le but de la morale est de déterminer les règles par lesquelles l'homme atteindra son parfait développement. Le but du droit est de diriger les activités des hommes dans la vie sociale de façon à ce que celles-ci les aide à atteindre le fin que leur assigne la morale.

Signe Philosophie Necker (De la morale naturelle) : Quelle sera l'autorité de la morale ? C'est l'instinct même de la nature qui a dit à l'homme : voilà ma règle, tu ne peut être heureux qu'à ce prix.

- Nature juridique. La morale édicte des règles qui découlent de l'opposition entre le Bien et le Mal. Elle a pour objet d'orienter vers le premier et de détourner du second.

Signe Philosophie Thomas (Cours de philosophie morale) : La morale est une science normative... Elle est la science de l'ordre idéal de la vie.

Signe Philosophie Servais et Pinckaers (Sources de la morale chrétienne) : La morale procure une connaissance pratique ; elle a pour but de produire une œuvre, l’action humaine. Elle est directrice et normative.

Signe Philosophie Pufendorf (Le droit de la nature) : Cette science est de faire connaître ce qu'il y a de Régulier ou d'Irrégulier, de Bon ou de Mauvais, de Juste ou d'Injuste, dans les actions humaines.

Signe Philosophie Lottin (Morale fondamentale) : La morale est une science pratique dont l’objet est : l’ordre à réaliser dans les actes humains, l’ordre de coordination des actes entre eux, l’ordre de subordination des actes aux buts fixés par cette même morale.

Signe Philosophie Baudin (Cours de philosophie morale) : Les principaux problèmes de la morale concernent l'essence et les normes du bien moral, ses rapports avec les biens humains, la conscience morale et l'expérience morale, la justice et le droit, le devoir et la vertu, la moralité et la responsabilité... À côté et à la suite de la morale s'inscrivent les sciences juridiques qui ont pour objet la justice et le droit en tant qu'ils sont déterminés et réalisés par les lois et les sanctions de la société... On appelle morale, au sens strict du mot, ce qui a rapport aux valeurs du bien et du mal, aux devoirs et aux vertus. C'est ici que l'on rencontre l'antithèse caractéristique du moral et de l'immoral.

Signe Philosophie John Rawls (Théorie de la justice, n° 71) : Le contenu de la morale de groupe est caractérisé par des vertus propres à la coopération : la justice et l'équité, la fidélité et la confiance, l'intégrité et l'impartialité.

Signe Doctrine Accarias (Précis de droit romain - Introduction) : Je résume la morale dans les trois principes suivants :
1°/ se respecter soi-même, et par là j'entends soit le gouvernement des passions par la raison, soit l'exercice régulier de toutes nos facultés, principalement de celles qui nous séparent de l'animal. Là se bornerait la morale, si l'homme vivait isolé ;
2°/ respecter la personne de nos semblables, ou, selon la formule vulgaire, ne pas faire à autrui ce que nous ne voudrions pas que l'on nous fît à nous-mêmes. Ce second précepte est une déduction du premier. Il constitue la justice proprement dite, et il est la condition de l'existence des sociétés ;
3°/ mettre, quand nous le pouvons, notre activité au service de nos semblables , ou, selon la formule reçue, faire pour autrui ce que nous voudrions que l'on fît pour nous-mêmes... Ce précepte engendre la bienveillance et toutes les vertus qui s'y rattachent. Il est la condition du progrès des sociétés
.

- La conception spiritualiste peut se présenter, tantôt sous une forme religieuse (théologie morale avec Thomas d'Aquin), tantôt sous une forme philosophique (philosophie morale avec Confucius). Elle s’attache à établir les meilleures règles à observer, tant pour sa vie intérieure, que dans la vie sociale. C'est elle qui a fait triompher le principe de la responsabilité subjective.

Signe Renvoi rubrique Voir : E. Baudin, La morale de l’État

Signe Renvoi rubrique Voir : L. Proal, Le crime et le libre arbitre  [existence du libre arbitre, dans la conception spiritualiste]

Signe Renvoi rubrique Voir : Steeg, Les caractères de la loi morale

Signe Renvoi rubrique Voir : A. Pierre et A. Martin, Cours de morale à l'usage des écoles primaires supérieures

Signe Renvoi rubrique Voir : Préceptes fondamentaux du bouddhisme

Signe Philosophie Ménant (Zoroastre, éd. 1844) : Un mot résume la morale entière : il y a trois mesures d'action, dit la loi, pureté de pensée, pureté de parole, pureté d'action.

Signe Philosophie St Jacques, dans une lettre montre que la fonction spirituelle peut apporter une aide considérable à la fonction temporelle, dans sa gestion des rapports sociaux : La manière pure et irréprochable de pratiquer la religion… c’est de se garder propre au milieu du monde.

Signe Philosophie Leclercq (Leçons de droit naturel - La famille) : Le seul moyen d'établir une règle rationnelle de morale est de partir des exigences de la nature humaine. On doit se rendre compte des éléments constitutifs de la personne humaine et de ce qu'exige son développement. La règle morale n'est rien d'autre que l'ensemble des principes qui fixent les conditions dans lesquelles il atteindra sa fin.

Signe Philosophie Stelzenberger (Précis de morale chrétienne) : La morale ne se contente pas de décrire des faits et des attitudes, mais elle est aussi une science qui règle et ordonne. Elle définit les normes de la vie, donne des règles de conduite, des commandements, des prescriptions, des lois pour l’agir moral de l’homme. Elle exige, elle commande. Elle montre à l’homme un devoir et expose une règle pour son action.

Signe Philosophie Jules Simon (La liberté civile) : Il n'y a de solide et d'éternel, dans la législation, que la morale.

Signe Philosophie Bautain (Philosophie des lois) : Le droit privé détermine ce qui est juste ou injuste dans les relations privées ; le droit public ne voit qu’une chose, le bien social. Mais ce que l’un et l’autre supposent, la philosophie morale l’explique. Elle considère les lois au point de vue de la conscience et de ses obligations ; c’est le point de vue le plus profond, le plus intime. Elle cherche ce qu’est la loi en elle-même, pourquoi elle oblige, comment et quand elle oblige. Sa sphère est donc parfaitement distincte de celle de la jurisprudence… Elle n’a qu’un seul but : déterminer l’obligation morale que nous imposent les différentes sortes de lois.

Signe Philosophie Jolivet (Philosophie morale) : La morale est la science des lois idéales de l’activité libre de l’homme. La morale est la science qui traite de l’usage que l’homme doit faire de sa liberté pour atteindre sa fin dernière.

Signe Philosophie M.Villey (Philosophie du droit) : L’objet central des traités de législation écrits par des philosophes est la morale.

Signe Philosophie Jean-Paul II : Une démocratie sans morale dégénère en totalitarisme sournois.

Signe Exemple concret Robespierre (Discours du 18 pluvôse an II) : Le fondement unique de la société civile, c’est la morale.

Signe Exemple concret Chateaubriand (Le génie du Christianisme) : La morale est la base de la société... Quelques philosophes ont cru que la religion avait été inventée pour soutenir la morale, ils ne se sont pas aperçus qu'ils prenaient l'effet pour la cause. Ce n'est pas la religion qui découle de la morale, c'est la morale qui naît de la religion, puisqu'il est certain que la morale ne peut avoir son principe dans l'homme physique ou la simple matière ; puisqu'il est certain que quand les hommes perdent l'idée de Dieu, ils se précipitent dans tous les crimes en dépit des lois et des bourreaux .

Signe Exemple concret Brenda (La trahison des clercs) : Les clercs trahissent leur fonction en proclamant qu'il n'existe pas une morale supérieure devant laquelle tous les hommes doivent s'incliner.

Signe Doctrine Oldenberg (Bouddha, vie et religion) : Quelques passages des textes sacrés donnent à croire que la pensée bouddhiste s'était marquée une voie à travers le domaine, aussi vaste que varié, des actions morales...  Trois catégories reviennent si constamment que l'on dirait les titres de trois chapitres de l'éthique : la droiture, la méditation, la sagesse.

Signe Exemple concret Van Gulik (Le mystère du labyrinthe) : Le juge Ti, en disciple orthodoxe de l'école confucianiste, attache une extrême importance aux valeurs morales : la justice, le devoir, la vertu...

Signe Jurisprudence Cass.crim. 13 juin 1995 (Gaz. Pal. 1995 Chr.crim. 459) : Selon l’art. 10 § 2 Conv.EDH l’exercice de la liberté d’expression, comportant des devoirs et des responsabilités, peut être soumis à certaines conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique, pour assurer la protection de la morale et des droits d’autrui.

Signe Exemple concret Kardec (Le livre des esprits) : La morale est la règle pour bien se conduire, c'est-à-dire la distinction entre le bien et le mal... L'homme se conduit bien quand il fait tout en vue et pour le bien de tous.

- La conception matérialiste, qui ne reconnaît aucune dignité essentielle aux êtres humains, et qui accorde par suite tous pouvoirs aux dirigeants de l’État, rejette la distinction entre le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel. Elle peut dès lors, de manière purement formelle, nier l’existence d’une loi morale ou d’une loi naturelle, et ne reconnaître que la doctrine officielle.

Signe Renvoi rubrique Voir : De Lanessan, La morale naturelle  [absence de libre arbitre, dans la conception matérialiste]

Signe Philosophie Marx (Manifeste du Parti communiste) : Les lois, la morale, la religion sont (pour le prolétaire) autant de préjugés bourgeois derrière lesquels se cachent autant d’intérêts bourgeois.

Signe Exemple concret Lecomte du Noüy (La dignité humaine) : La confusion de l'intérêt individuel et de l'intérêt général ne peut se réaliser que dans le plan spirituel. Elle a depuis longtemps préoccupé les sociologues et a toujours échoué parce qu'ils ne recherchaient que la communauté d'intérêts matériels. Les morales socialistes ont toujours fait preuve d'une pauvreté d'imagination déplorable. Non seulement elles négligeaient complètement la psychologie humaine et son infinie richesse, mais elles ne préconisaient jamais que des adaptations, des modifications de systèmes existants, en respectant toujours la notion dangereuse de groupe politique, qui finit inévitablement par aboutir à des conflits économiques et à des guerres. C'est le sort de toute morale teintée de matérialisme. Le monde a été témoin de bien des expériences de ce genre, non seulement récemment, mais à toutes les époques.

- L'enseignement de la morale. Dans les années qui ont suivi le mois de mai 1968, l'enseignement de la morale a été complètement délaissé ; il était devenu difficile de trouver des ouvrages traitant de cette matière. La parenthèse paraît fermée ; en effet de nombreux livres consacrés à la morale ont été édités ces dernières années, et l'enseignement de la morale revient (théoriquement) au programme de l'école publique.

Signe Législation Doquet (L'enseignement de la morale au cours élémentaire - Le livre du maître) rapporte les Instructions officielles applicables en 1953 : L'enseignement moral est destiné à compter et à relier, à relever et à ennoblir tous les enseignements de l'école. Tandis que les autres études développent chacune un ordre spécial d'aptitudes et de connaissances utiles, celle-ci tend à développer dans l'homme l'homme lui-même, c'est-à-dire un cœur, une intelligence, une conscience. Par là même, l'enseignement moral se meut dans une toute autre sphère que le reste de l'enseignement. [on pourrait aller plus loin et observer que l'enseignement de la morale relève plus de l'éducation que de l'instruction, que les règles morales constituent plus qu'un lien entre les diverses disciplines puisqu'elles forment le socle sur lequel repose la vie sociale].

Signe Philosophie Carrel (L'homme cet inconnu) : L'État peut imposer par la force la légalité, mais non les lois de la morale. Chacun doit comprendre la nécessité de faire le bien et d'éviter de faire le mal, et se soumettre à cette nécessité par un effort de sa propre volonté. L'Église catholique, dans sa profonde connaissance de la psychologie humaine, a placé les activités morales bien au-dessus des intellectuelles... Le sens moral est plus important que l'intelligence. Quand il disparaît d'une nation, toute la structure sociale commence à s'ébranler... Il est, beaucoup plus que la science, l'art et la religion, la base de la civilisation.

Certains auteurs vont jusqu’à parler de « morale criminelle », là où il n'y a que le minimum de loyauté sans laquelle des hommes ne sauraient agir ensemble. Cette observation n'en demeure pas moins révélatrice.

Signe Doctrine Sutherland et Cressey (Principes de criminologie) : L’organisation de la criminalité a donné naissance à une morale criminelle. Il y a deux grands principes généraux : l’un est de ne pas dénoncer un autre criminel, l’autre est de partager équitablement le butin entre partenaires.

MORGUE

La morgue est le lieu où l’on transporte les cadavres dont l’identité est inconnue, ou qui doivent faire l’objet d’une expertise médico-légale. Ce vieux terme s’efface actuellement devant l’appellation « Institut médico-légal ».

Signe Histoire Denisart (Collection de jurisprudence, 1768) : On appelle morgue une geôle basse qui est dans la cour du Grand-Châtelet à Paris, où l’on expose les cadavres des noyés, ou ceux trouvés dans les rues et qui n’ont pas été reconnus et réclamés sur le champ.

Signe Droit comparé Code de procédure pénale du Costa Rica. Art. 191 al.2 : Si l'on n'obtient pas l'identification du cadavre par les moyens ordinaires,et son état le permet, le cadavre sera exposé en public pour un temps limité, dans la morgue du Département de Médecine Légale, afin que celui qui possède des indications pouvant contribuer à la reconnaissance, puisse les communiquer au juge.

Signe Doctrine Legrand du Saulle (Traité de médecine légale, 1874) : Qu'on me laisse exprimer un regret à propos du service de la Morgue à paris. Au lieu d'une humide maisonnette baignée par la Seine, qu'est-ce qui empêcherait l'administration de bâtir un grand amphithéâtre ? Le professeur Tardieu établirait là le chef-lieu de son enseignement, et sa voix si autorisée s'appuierait sur des faits pratiques, visibles et tangibles. Les jeunes docteurs ne quitteraient la Faculté sans jamais avoir vu un seul cas du médecine légale, eux qui, dès le lendemain de leur arrivée en province, sont exposés à prendre une part active dans le dénouement de quelque drame de la cour d'assises.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 29 septembre 1998 (Gaz.Pal. 1999 I Chr.crim. 4) : Pour déclarer à bon droit le prévenu coupable de corruption active, les juges énoncent que celui-ci entretenait avec les employés de la morgue de l’hôpital de P... des relations privilégiées, et que l’enquête avait établi que ceux-ci avaient reçu des sommes d’argent pour orienter les familles vers l’entreprise de pompes funèbres en cause.

MORT (Notion, moment et effets)

Cf.  Cadavre*, Décès du prévenu*, Levée du corps*, Mort suspecte*, Respect*, Sépulture*, Vie*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n°40, p.35

Le droit pénal considère que la vie d’un être humain ne prend fin que par la cessation totale et irréversible de l’ensemble de ses fonctions vitales (respiratoire, circulatoire et cérébrale). De cet instant, le défunt n'est plus un sujet de droit, mais son cadavre conserve sa dignité d'être humain.

Signe Doctrine Malaurie (Droit civil) : La mort c’est la fin de la vie, c’est-à-dire l’arrêt complet et irréversible des fonctions vitales.

Signe Doctrine Marty et Raynaud (Droit civil) : La date de la mort est normalement constatée dans l'acte de décès, mais elle peut soulever des difficultés techniques dans certaines hypothèses de coma prolongé ou de tentative de réanimation, il s'agit alors d'une délicate question de preuve.

Signe Dictionnaire Alland et Rials (Dictionnaire de la culture juridique). V° Mort, par X. Labbée : On peut définir la mort comme un fait juridique, de terme incertain, qui a pour effet de retirer la qualité de sujet de droits à l'être désormais sorti de la scène juridique... Le corps du défunt n'abritant plus un sujet se transforme en un Cadavre* que le droit ne considérera plus comme une personne, mais comme une « chose inviolable et sacrée, objet d'un droit de copropriété familiale ».

Signe Philosophie Leclercq (Leçons de droit naturel) : Quand on dit que les morts vivent dans notre souvenir ou dans les institutions qu'ils laissent, cela me paraît une simple façon de parler ; l'œuvre qu'ils laissent, le monument, le livre, s'est détachée de son auteur et existe par elle-même. [en tant qu'objet de copropriété familiale, elle peut même faire bénéficier de droits d'auteur les héritiers du défunt]

MORT (Peine de mort physique)

Cf. Claie*, Crime capital*, Crucifiement*, Décapitation*, Décimation*, Défenestration*, Échafaud*, Écorcher*, Enfouissement*, Fusillade*, Guillotin*, Guillotine*, Jus gladii*, Lapidation*, Mort civile*, Mort ou vif*, Peine capitale*, Pendaison*, Prison*, Régicide*, Roche tarpéienne*, Strangulation*, Supplices*, Supplicié*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-206 et s., p.417 et s.

Signe Renvoi rubrique Voir : Robespierre, Discours sur la peine de mort

Signe Renvoi rubrique Voir : E. Séligman, La conception du droit criminel aux premiers temps de la Révolution

Signe Renvoi rubrique Voir : Décret du 22 Prairial an 2 - 10 Juin 1794 concernant le Tribunal révolutionnaire

Signe Renvoi rubrique Sur les derniers moments d’un condamné à mort, voir : Chénier « La jeune captive »

- Notion. La peine de mort, qui emporte privation de la vie physique, est la sanction ordinairement attachée aux crimes les plus graves : trahison, espionnage ou sabotage, assassinat, parricide ou empoisonnement. Lors des grands procès politiques, les juges vont jusqu’à ordonner l'anéantissement du corps du supplicié pour éviter que ses partisans ne lui fassent de solennelles funérailles.

Signe Doctrine Donnedieu de Vabres (Traité de droit criminel) : La peine de mort figure en tête de l'échelle générale des peines. Elle consiste, depuis la Révolution française dans la simple privation de la vie.

- Règle morale. La légitimité de la peine de mort a fait l'objet de nombreux débats. Sa moralité oppose des gens d'une égale bonne foi : les uns estiment que la société doit donner l'exemple du respect de la vie ; les autres considèrent que la mort de criminels sans foi ni loi est justifiée, si elle a pour but de préserver dans l'avenir la vie d'innocents.

Signe Philosophie St Thomas d'Aquin (Somme théologique II-II q.64 a.3) : La mise à mort d’un malfaiteur est permise en tant qu’elle est ordonnée à la sauvegarde de la société. C’est pourquoi elle appartient à celui-là seul qui pourvoit au bien commun de la société, de même que l’ablation d’un membre corrompu revient au médecin auquel on a confié la santé du corps tout entier. Or le soin du bien commun est confié aux princes qui détiennent l’autorité publique. C’est donc à eux seuls et non aux particuliers qu’il revient de mettre à mort les malfaiteurs.

Signe Philosophie Neufbourg (Cours de droit naturel) : En définitive, c'est la mort que tout le monde redoute, et, ici, la mort la mort violente, par le glaive, à heure fixe et sans remise. La preuve que, même tempérée, elle agit toujours très puissamment sur le grand nombre, c'est que souvent ceux qui projettent le crime, consultent le Code pénal avant de le commettre, pour savoir si la mort n'en serait pas le prix, et qu'ils s'abstiennent au moins des circonstances aggravantes qui pourraient les y conduire.

Signe Philosophie Jacques Leclercq (Leçons de droit naturel, T.IV-1) :  La peine de mort n'est légitime que si elle correspond à la légitime défense de la collectivité. Elle ne se justifie pas par un droit de l'État à disposer de la vie des citoyens, mais seulement par la nécessité sociale... Le droit de l'État à appliquer la peine de mort est donc très limité. Il n'a le droit de l'appliquer, ni à tout crime, ni selon les caprices d'une opinion estimant que tel forfait ne peut être lavé que dans le sang.

Signe Philosophie Jolivet (Philosophie morale) : L’État, dont le devoir est d’assurer la paix et l’ordre, et de défendre la sécurité et la vie des citoyens, a le droit de prononcer la peine de mort lorsque cette peine est le seul moyen efficace qu’il possède de remplir sa mission. Sans doute, en incarcérant le coupable, elle le mettrait hors d’état de nuire. Mais elle ne se défendrait pas efficacement contre les criminels futurs.

Signe Philosophie Baudin (Cours de philosophie morale) : Tout bien considéré, il ne reste qu'une question en suspens, savoir : si la répression des crimes peut être assurée, aussi efficacement que par la peine de mort, par des peines moins cruelles telles que la réclusion perpétuelle (est-elle vraiment moins cruelle ?). En ce qui cas, qui reste douteux, l'État peut renoncer à l'usage de son droit, qu'il n'exerce évidemment qu'à regret et par devoir. Mais il ne perdra pas pour autant ce droit, et devra, par devoir encore, l'exercer dès que nécessité sera.

Signe Droit comparé Bluntschli (Droit public général) : Le respect de la vie individuelle n'entraîne pas nécessairement l'abolition de la peine de mort, mais son application très rare et pour des raisons déterminantes de conservation sociale ou de justice seulement.

Signe Droit comparé Rossi (Traité de droit pénal) : Nous avons toujours dit, et nous répétons ici, que ceux qui désirent ardemment, et nous sommes de ce nombre, voir le jour où la peine de mort pourra être complètement abolie, doivent travailler avant tout à ce qu'il s'organise un système d'emprisonnement qui rende les évasions impossibles. Lorsque dix ou vingt ans se seront écoulés sans qu'un seul condamné ait pu s'échapper, lorsque ce fait pourra être solennellement constaté, le moment sera venu, peut-être, de réclamer l'abolition complète de la peine de mort. La protection de l'ordre a besoin de force : si on veut lui en ôter d'une main, il faut en ajouter de l'autre ; il faut que les délinquants redoutent la prison. Sans cela les hommes d'État ne peuvent pas se rendre à nos vœux. Ils ne peuvent pas en bonne conscience compromettre la vie des innocents pour épargner celle d'un assassin.

À l'expérience, il apparaît que la légitimité de la peine de mort dépend des circonstances. Si elle doit être prohibée dans une civilisation parvenue à son point d'équilibre, en revanche elle doit être prudemment tolérée lorsque aucune autre peine ne parvient à assurer la paix sociale. Ce qui redevient hélas le cas de nos jours avec la prison où, loin de s'amender, les détenus tendent à se radicaliser, donc à devenir de plus en plus dangereux pour la Société (notamment pour les gardiens de prison).

Signe Philosophie Leclercq (Leçons de droit naturel, T. IV) : L'État a pour mission de protéger la vie et d'aider l'homme à tirer de sa vie le meilleur parti possible. Si un homme est coupable, l'État doit l'aider à s'amender ; le tuer est aller à l'encontre de la raison même de la société, à moins que la vie de cet homme ne soit, par la faute de celui-ci, un grave danger pour celle des autres... La peine de mort supposant qu'il n'y a pas d'autre moyen efficace de défendre l'ordre social, il semble qu'en pratique il faille la limiter  aux cas où les pouvoirs publics ne disposent pas de moyens sûrs d'incarcérer les malfaiteurs.

Signe Exemple concret Exemple ("Le Monde" du 26 janvier 2018 - En première page) : Prisons : le gouvernement est confronté à une situation explosive. Jeudi matin 116 prisons (sur 188) étaient affectées. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, n'a pas vu venir de la grève. Pas plus que le premier syndicat de surveillants, qui l'a lancée . Dans certains établissements, les rondes de nuit ne sont plus assurées, l'accès des prisonniers aux douches et aux parloirs non plus... (Page.14) Le syndicat national des directeurs pénitentiaires... dans un communiqué, affirme qu'il est temps que le gouvernement prenne des décisions fortes et les tienne pour rétablir le service public pénitentiaire... Les établissements sont en péril, notre institution républicaine est en péril.

- Science criminelle. Si, d'un point de vue moral la peine de mort prête à discussion, en sorte que chacun peut former son opinion en fonction de sa sensibilité personnelle, son efficacité est indéniable au témoignage unanime de ceux qui travaillaient sur le terrain à l'époque où elle était effectivement appliquée.
D'un point de vue technique, son irréversibilité permet d'y être opposé, en considération d'une éventuelle l'erreur judiciaire. Aussi le législateur qui entend assortir telle infraction gravissime de la peine de mort doit-il multiplier les précautions afin que cette dernière ne soit appliquée que dans les cas où nul doute n'existe sur la culpabilité du condamné ; il doit en outre prévoir l'exercice de l'ensemble des voies de recours. Heureusement, de nos jours, les progrès de la police scientifique limitent fortement la portée de cette objection.
Deux effets négatifs de l'abolition de la peine de mort doivent être signalés. D'abord, en supprimant la seule peine définitive, on fragilise l'échelle des peines et leur caractère dissuasif. D'autre part, en écartant la peine de mort légale, on ouvre la voie à des éliminations extrajudiciaires.

Signe Renvoi rubrique Voir : M. Rauter, Déduction philosophique du principe du droit criminel

Signe Droit comparé Code annamite des Lé, Introduction : À la suite de l'abolition de la peine de mort dans ce royaume, en 1125, les individus pervers et violents purent donner libre cours à leurs instincts de violence. Les gens de peu violaient les lois, les gens honnêtes en étaient réduits à supporter toutes les injustices dont ils étaient victimes.

Signe Philosophie J.-J. Rousseau (Du contrat social, Livre I, Chapitre V) à relire pour mieux comprendre les excès de la Révolution de 1791 : Tout malfaiteur, attaquant le droit social, devient par ses forfaits rebelle et traître à la patrie ; il cesse d'en être membre en violant ses lois ; et même il lui fait la guerre. Alors la conservation de l'État est incompatible avec la sienne ; il faut qu'un des deux périsse ; et quand on fait mourir le coupable, c'est moins comme un citoyen que comme un ennemi. Les procédures, le jugement, sont les preuves et la déclaration qu'il a rompu le traité social, et par conséquent qu'il n'est plus membre de l'État. Or comme il s'est reconnu tel... il doit en être retranché par l'exil comme infracteur du pacte, ou par la mort comme ennemi public.

Signe Philosophie Jolivet (Philosophie morale) : L’État, dont le devoir est d’assurer la paix et l’ordre, et de défendre la sécurité et la vie des citoyens, a le droit de prononcer la peine de mort lorsque cette peine est le seul moyen efficace qu’il possède de remplir sa mission. Sans doute, en incarcérant le coupable, elle le mettrait hors d’état de nuire. Mais elle ne se défendrait pas efficacement contre les criminels futurs.

Signe Droit comparé Carrara (Cours de droit criminel - éd. française) : Quand la peine de mort est admise, trois règles dominent son application :  -1°/ elle doit être réservée pour les crimes qui sont au plus haut point de l'échelle criminelle : - 2°/ elle doit être infligée de manière à faire souffrir le moins possible le patient ; - 3°/ elle ne doit pas être infligée en présence du peuple, parce que la vue du sang rend les hommes féroces ; au principe de la publicité on peut suppléer par la notoriété, sans convier le peuple à voir égorger un homme [ à cet égard une prompte pendaison paraît favorable à la guillotine ].

Signe Doctrine Villey (Cours de droit criminel) : La peine de mort est inefficace et sans exemplarité ; elle n'arrête pas les assassins ; - voilà une objection que nous n'avons jamais comprise : en fait, il est certain que c'est le mal que les hommes, pris en masse, redoutent le plus, parce qu'il ferme toute porte à l'espérance ; mais de ce que cette menace suprême n'arrête pas tous les criminels, on en conclut qu'il faut la supprimer ! Supprimez alors toute pénalité ; car malgré la menace des peines, il y a toujours des coupables.

Signe Doctrine Vouin (Manuel de droit criminel) : Au point de vue philosophique, on conteste à la société le droit de détruire une vie qu'elle n'a pas créée. Mais il est difficile de lui refuser le droit de se défendre. Et finalement le monde moderne ne sait plus quelle valeur reconnaître à une vie humaine.

Signe Doctrine Lambert (Droit pénal spécial) : Si, comme le croit M. le professeur Vouin « la loi du 23 novembre 1950 édictant la peine de mort contre les voleurs porteurs d'armes a été suivie pratiquement d'une diminution des attaques à main armée », ce premier effet n'a joué qu'au début : maintenant, cette loi n'intimide plus les bandits, parce qu'ils ont constaté que la peine de mort n'a jamais été prononcée une seule fois, même envers ceux qui avaient fait usage de leurs armes. Les bandits d'aujourd'hui sont si sûrs d'échapper, de toute façon, à la guillotine qu'ils s'attaquent même à des trains de voyageurs et qu'ils ouvrent le feu, d'entrée de jeu, sur les convoyeurs ou porteurs de fonds.

Signe Histoire Hérodote (Histoire, I, 137) signale la coutume Perse selon laquelle pour une seule faute, le roi lui-même ne met personne à mort.

Signe Exemple concret Lettres édifiantes et curieuses de Chine par des missionnaires jésuites (éd. Garnier-Flammarion) : À la réserve de quelques cas extraordinaires, qui sont marqués dans le corps des lois chinoises, nul mandarin, nul tribunal supérieur ne peut prononcer définitivement un arrêt de mort. Tous les jugements de crimes dignes de mort doivent être examinés, décidés et souscrits par l'Empereur. Les mandarins envoient en Cour l'instruction de procès, et leur décision marquant l'article de la loi qui les a déterminés à prononcer de la sorte. Ces informations étant arrivées à la Cour, le tribunal supérieur des affaires criminelles examine le fait, les circonstances et la décision... Lorsque le tribunal supérieur a reçu les informations complémentaires qu'il demandait, il présente sa délibération à l'Empereur. Alors l'Empereur souscrit à la délibération du tribunal, ou bien il diminue la rigueur du châtiment.
L'Empereur dit : « Deux choses doivent me rendre très attentif, quand il s'agit de condamner quelqu'un à le mort : premièrement, l'estime que nous devons porter à la vie de l'homme ; secondement, la tendresse et la compassion que je dois avoir pour mon peuple. Ainsi que, dans la suite, on ne punisse personne du supplice de mort, que son procès ne m'ait été présenté trois fois ».

Signe Exemple concret Exemple (Ouest-France 27 juin 2008) : Le candidat démocrate à la présidentielle américaine - mais aussi son challenger McCain - affichent leur désaccord avec la décision de la Cour suprême interdisant d'infliger la peine de mort pour des viols d'enfants. Pour la Cour, il faut qu'il y ait meurtre pour que l'on puisse appliquer la peine capitale. « La peine de mort devrait aussi être appliquée pour les crimes les plus odieux, estime Barak Obama, et je crois que le viol d'enfant est un crime odieux ».

Signe Exemple concret Exemple (Ouest-France 13 novembre 2015) : Les statistiques effrayantes de la police américaine - 984 personnes ont été tuées par la police américaine aux États-Unis depuis le 1er janvier. Le journal anglais "The Guardian" tient un décompte sur son site Internet. Il détaille le nombre de morts par États. Il vaut mieux vivre près de la frontière canadienne que de la mexicaine ! Il précise le taux de chaque communauté : les Noirs paient le plus lourd tribut.

On discute aussi la question de savoir si, lorsqu'elle est prononcée légalement, la peine de mort doit être infligée en public ou dans l'enceinte de la prison. L'Ancien droit, puis la Révolution se prononçaient en ce sens.

Signe Histoire Toureille (Crime et châtiment au Moyen-âge) : La peine de mort est d'abord une peine exemplaire. En ce sens elle doit être rendue publiquement. La pendaison, qui constitue l'exécution la plus répandue au Moyen-âge, est accomplie à la vue de tous et la dépouille du supplicié est laissée pour l'exemple sous le regard des hommes. Le supplice est d'ailleurs précédé d'un parcours ritualisé. Le condamné est conduit à la potence à l'issue d'un cheminement dans la ville marqué par des haltes, soit pénitentes, soit punitives.

Traditionnellement, lorsqu'une femme enceinte est condamnée à la peine de mort, la sanction est reportée après qu'elle ait mis son enfant au monde.

Signe Histoire Digeste de Justinien (48, 19, 3). Ulpien : La peine de mort prononcée contre une femme enceinte doit être différée jusqu'à ce qu'elle accouche. En outre, je sais que l'on veille à ne point lui faire subir la question tant qu'elle est enceinte.

Signe Histoire Code pénal de 1810. Art. 27 : Si une femme condamnée à mort se déclare et s'il est vérifié qu'elle est enceinte, elle ne subira la peine qu'après sa délivrance.

Signe Droit comparé Code criminel de la Sierra Leone, 1965. Art. 215 : Si une femme condamnée pour un crime punissable avec la mort allègue être enceinte, la cour informera sur le fait ; s'il y a une cause raisonnable pour la croire, la sentence à prononcer contre elle sera une peine d'emprisonnement à la vie au lieu de la peine de mort.

Un point ne saurait faire le moindre doute : dans l'hypothèse où la peine de mort doit être appliquée, elle ne saurait consister que dans la privation de la vie, hors de toute torture physique ou morale.

Signe Histoire Code pénal du 25 septembre 1791 : La peine de mort consistera dans la simple privation de la vie, sans qu’il puisse jamais être exercé aucune torture envers les condamnés. Tout condamné aura la tête tranchée.

Il est d'usage de remettre le cadavre du condamné aux parents qui en font la demande. À moins que des considérations politiques n'incitent à rejeter cette requête : ainsi les cendres du corps de Jeanne d'Arc furent dispersées par les Anglais afin qu'elles ne reçoivent pas une sépulture risquant de devenir un lieu de pèlerinage.

Signe Histoire Digeste de Justinien (48, 24, 1) Ulpien : Les corps des condamnés pour crime capital ne doivent pas être refusés à leurs parents. Aujourd'hui les corps de ceux qui sont punis ne reçoivent la sépulture, qu'autant que cela est demandé et accordé ; quelquefois on le refuse, surtout pour le crime de lèse-majesté.

Signe Histoire Code pénal de 1810. Art. 14 : Les corps de suppliciés seront délivrés à leurs familles, si elles les réclament, à la charge pour elle de les faire inhumer sans aucun appareil.

Signe Droit comparé Code criminel de l'Empire du Brésil de 1830. Art. 42 : Les corps des pendus seront remis à leurs parents ou amis, lorsqu'ils le demanderont aux juges qui présideront à l'exécution ; mais ils ne pourront les enterrer avec pompe sous peine de la prison d'un mois à un an.

- Droit positif. La peine de mort est actuellement interdite par les conventions internationales. Elle a disparu du Code pénal français, même en période de guerre ; elle a de plus été prohibée par la Constitution. Mais que l'on ne s'y trompe pas : la suppression de la peine de mort légale n'a pas pour conséquence de faire disparaître l'élimination de fait des auteurs de faits particulièrement odieux.

Signe Exemple concret Décret de la Convention nationale des 15/20 janvier 1793. Article II : La Convention nationale décrète que Louis Capet, dernier roi des Français, subira la peine de mort.

Signe Législation Conv.EDH, Protocole n°6 : La peine de mort est abolie. Nul ne peut être condamné à une telle peine ni exécuté.

Signe Législation Constitution française. Art. 66-1 : Nul ne peut être condamné à la peine de mort.

Signe Exemple concret Exemple (Ouest-France 5 juin 2009) : Meurtre de Valentin : émeute à Lagnieu. "Pendez-le ! Peine de mort !" ces invectives ont été proférées, hier, par plusieurs centaines de personnes, à Lagnieu. C'est dans ce village, sous haute protection judiciaire, que s'est déroulée la reconstitution du meurtre de Valentin. L'enfant avait été poignardé alors qu'il faisait du vélo. Le suspect a été hué.

MORT CIVILE

Cf. Dégradation civique*, Interdiction des droits*, Mort (peine de mort physique)*, Peines*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-238, p.451

La mort civile est une très ancienne sanction, qui figurait encore dans le Code pénal de 1810. Elle emportait privation générale des droits civils et familiaux, à l’encontre de celui qui était condamné à une peine majeure. Cette peine n’est plus pratiquée de nos jours, car on considère qu’elle porte atteinte à la dignité de la personne humaine.

Signe Histoire Pothier (Œuvres complètes). Les personnes qui sont l’objet de nos lois sont celles qui jouissent de la vie civile. La vie civile n’est autre chose que la participation d’une personnes aux droits de la société civile. La mort civile est le retranchement de cette société, et la privation de ces droits.

Signe Histoire Décret du 28 mars-avril 1793. Art. 1 - Les émigrés sont bannis à perpétuité du territoire français ; ils sont morts civilement ; leurs biens sont acquis à la république. Art. 2 - L'infraction du bannissement prononcé par l'art. 1er, sera punie de mort.

Signe Doctrine Merlin (Répertoire de jurisprudence) : La mort civile produit, à l'égard de la société, le même effet que la mort naturelle : elle rompt absolument tous les liens qui existaient entre elle et celui qui l'a encourue ; il n'est plus censé exister que par une sorte de commisération absolument indépendante des lois. Il perd tous ses droits, tous ses biens corporels et incorporels, soit qu'il les aient reçus de la nature, acquis par son industrie ou par toute autre voie... Ceci reçoit cependant une exception : nous avons adopté la jurisprudence romaine, qui permettait de léguer de simples aliments à celui qui avait subi une condamnation capitale.

Signe Exemple concret La fin des Stuart (Encyclopédie Microsoft Encarta). Jacques Édouard Stuart (1688-1766), fut emmené en exil à la cour française de Saint-Germain-en-Laye lorsque son père fut chassé du pouvoir par la Seconde Révolution d’Angleterre. En 1701, à la mort de son père, Louis XIV le proclama successeur officiel du trône d’Angleterre. Mais l’opinion anglaise restait opposée à Jacques Édouard à cause de sa foi catholique. Le Parlement anglais vota donc l’Acte de succession, puis un décret de confiscation des biens et de mort civile contre lui.

MORT OU VIF

Cf.  Exécution des peins*, Hors la loi*, Mort (peine de mort physique)*.

Lorsque des pouvoirs publics se trouvent dans l'incapacité de procéder à l'Arrestation* d'un criminel endurci, il leur arrive de se tourner vers de simples particuliers pour les charger de s'emparer de lui, si possible vivant, mais éventuellement mort. Un tel aveu d'impuissance apparaît éminemment regrettable. Le cinéma américain a popularisé ce procédé dans de nombreux westerns.

Signe Doctrine Ortolan (Cours de législation comparée) : Lorsque la tête du condamné est mis à prix... permission de le tuer es donnée à tous ; défense à chacun de l'aider, de le secourir en aucune manière, sous peine de complicité... tel est le cas des banditi dans les États du roi de Sardaigne.

Signe Droit comparé Carrara (Cours de droit criminel - éd. française) : La peine de mort est une conséquence logique déduite de la nécessité de la conservation de la société.
C'était au même titre, une conséquence logique, que d'accorder le "jus neci" dans ces fameux "bandi capitali", qui donnaient à tout particulier libre faculté de tuer l'ennemi commun..
Dans le royaume de Grèce, l'édit royal de janvier 1865 mit à prix, à deux ou trois milles drachmes le tête de quelques brigands. Ce système a été attaqué comme barbare ; il est barbare en effet, mais rigoureusement logique. L'impuissance du gouvernement à défendre les citoyens contre une horde d'assassins étant une fois avouée, il faut bien confier au poignard des particuliers cette sécurité de tous que les armes des agents publics ne parviennent pas à garantir. Mais alors nous sommes sous l'empire du "jus beli", et non pas du droit pénal
.

Signe Droit comparé Code annamite des Lés. Traduction Deloustal, introduction : En Chine, la tête des criminels en fuite et des brigands qui désolent les campagnes est mise à prix.

MORT SUSPECTE

Cf.  Autopsie*, Cadavre*, Levée de corps*, Transport sur les lieux*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° I-107, p.65

- Notion. On parle de mort suspecte lorsque le Cadavre* d’une personne vient d'être découvert, et que la cause de son décès demeure inconnue mais surprenante.

Signe Doctrine Merle et Vitu (Traité de droit criminel, T.II) : La découverte d'un cadavre, qu'il s'agisse ou non d'une mort violente, mais dont la cause est inconnue ou suspecte, donne à l'officier de police ci des prérogatives qui rappellent celles de l'enquête de flagrance.

- Science criminelle. Dès lors que la Vie humaine* se situe au plus haut niveau des intérêts protégés par le droit criminel, les pouvoirs publics doivent impérativement ouvrir une enquête après s'être transporté sur les lieux.

Signe Histoire Le Brun de la Rochette (Le procès criminel, 1629) : Incontinent que le juge est averti du meurtre commis, il doit se transporter sur le lieu où est le corps, avec son greffier, un sergent et des témoins, pour faire la levée, dont il dresse procès-verbal… Il fera dépouiller le corps qui sera visité par un chirurgien.

Signe Droit comparé Code de procédure pénale allemand, § 159 (Mort suspecte ; découverte de cadavre) : Lorsqu’il existe des indices permettant de supposer qu une personne a succombé à une mort non naturelle ou lorsque le cadavre d’un inconnu est découvert, les autorités communales et policières sont tenues d’en aviser immédiatement le ministère public ou le tribunal cantonal.

Signe Droit comparé Code de procédure pénale du Canton de Vaud. Art. 231 : En cas de mort violente ou lorsque la mort ne paraît pas due à une cause naturelle, l'officier de l'état civil est tenu d'attendre l'autorisation du juge pour délivrer le certificat d'inscription du décès dans ses registres. Le juge doit donner son autorisation aussitôt que l'état de l'enquête le permet.

- Droit positif français. L’officier de police qui se trouve sur les lieux avise immédiatement le procureur de la République de cette circonstance. Celui-ci se transporte sur les lieux et procède aux premières constatations, dans le cadre d’une enquête de police (art. 74 C.pr.pén.).

Signe Doctrine Malibert (Juris-classeur de Procédure pénale) : L’enquête dite de découverte de cadavre ne saurait se confondre avec l’enquête de crime ou délit flagrant. Il reste qu’on ne saurait en méconnaître la portée humaine et sociale : la découverte d’un cadavre est d’autant plus grave si n’apparaît pas, dès l’abord, le caractère naturel de la mort.

Signe Jurisprudence C. admin. app. Nantes 3 septembre 1992 (Gaz.Pal. 1993 II Panor. adm. 189) : En vertu des dispositions de l’art. 74 C.pr.pén., il incombe à un officier de police judiciaire de procéder aux premières constatations relatives à la découverte d’un cadavre, lorsque la cause de la mort est inconnue ou suspecte.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 28 octobre 1987 (Arrêt Brand, n° 87-81.138) : Si en cas de découverte d’un cadavre le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire par lui délégué peut, par application de l’art. 74 C.pr.pén., se faire assister de personnes capables d’apprécier la nature des circonstances du décès, c’est à la condition de les requérir nommément, par un acte daté et signé.

Signe Jurisprudence Cour EDH 27 juillet 2004 (Gaz.Pal. Tables 2005 v° Droits de l’homme n° 3) : Dans tous les cas où un détenu décède dans des conditions suspectes, l’art. 2 Conv.EDH met à la charge des autorités l’obligation de conduire d’office, dès que l’affaire est portée à leur attention, une « enquête officielle et effective » de nature à permettre d’établir les causes de la mort, d’identifier les éventuels responsables et d’aboutir à leur punition.
Les autorités ne sauraient laisser aux proches du défunt l’initiative de déposer une plainte formelle ou d’assumer la responsabilité d’une procédure d’enquête. Une telle enquête ne saurait être qualifiée d’« effective » que si, notamment, les proches de la victime sont impliqués dans la procédure de manière propre à permettre la sauvegarde de leurs intérêts légitimes.
Il y a donc eu violation de l’art. 2 dès lors que la famille d’un détenu décédé au cours de sa détention a été exclue de l’information ouverte pour rechercher les causes de la mort (art. 74 C.pr.pén.), qu’elle n’a pu avoir accès aux documents ni même être entendue par le juge d’instruction, qu’aucun renseignement ne lui a été transmis et qu’elle n’a même pas été informée de la décision de classement sans suite.

Suite de la lettre M