DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre R
(Treizième partie)
RÉUNION ( Circonstance aggravante de )
Cf. Amendement*, Association de malfaiteurs*, Bande organisée*, Circonstances aggravantes réelles*, Commando*, Foule*, Vol*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-238, p.249
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° I-246, p.146
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 337, p.209
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-144, p.395 / Voir les références de la Table alphabétique
- Notion. Il y a circonstance aggravante de réunion lorsqu'un crime ou un délit a été commis, non par une seule personne, mais par deux individus ou plus. S'observant dans les faits, cette circonstance présente un caractère réel et se communique dès lors à tous les prévenus.
Proal (Le crime et la peine) : La communication des passions se produit avec une rapidité extrême dans les réunions d'hommes, ce qui faisait dire au cardinal de Retz : "Qui rassemble les hommes les agite".
Chauveau Hélie (Théorie du Code pénal) : Le vol, lorsqu'il est commis par plusieurs personnes, puise évidemment dans cette circonstance une plus haute gravité. En effet, dans la plupart des cas, cette réunion suppose non seulement une préméditation, mais un complot; en multipliant les moyens d'action, elle multiplie le péril; elle entraîne la présomption que les auteurs du vol sont disposés à employer la violence; elle facilite l'exécution du délit.
Valmont (L'Amérique face aux gangs) : Le barbier se précipite au devant de son client quotidien : c'est Albert Anastasia, le patron de la "Murder incorporated", et son chauffeur A.Coppola. Coppola attend que son patron soit installé dans le fauteuil qui lui est réservé, puis s'en va. Le barbier commence à appliquer le savon autour du cou de son client. Avec un ensemble parfait apparaissent deux hommes coiffés de chapeaux mous ; ils sortent deux revolver. Cinq détonations retentissent : Anastasia est mort.
- Science criminelle. Trois directions principales. D'une part, tantôt le législateur se satisfait de la constatation matérielle d'une conjonction d'individus agissant ensemble, tantôt il demande aux juges de constater une coopération préméditée. D'autre part, le législateur prend parfois soin d'indiquer combien de personnes doivent être présentes sur les lieux pour qu'il y ait "réunion". Enfin, le législateur sanctionne parfois comme crime commis en réunion l'acte d'une seule personne, dès lors qu'elle résulte d'une concertation préalable.
Code général des États prussiens (éd. Paris an X). XX-66 : Lorsqu'il y a réunion d'individus pour consommer un crime, il doit être puni plus sévèrement que s'il n'eût été accompli que par un seul.
Code pénal belge. Art. 471 : Le vol commis à l'aide de violences ou de menaces sera puni des travaux forcés... s'il a été commis par deux ou plusieurs personnes.
Code pénal du Venezuela. Art. 216 : Celui qui use de violence ou menace contre la personne d'un membre de l'Assemblée Nationale, ou contre un fonctionnaire public, dans le but de le contraindre à faire ou à omettre un acte de ses fonctions, sera puni de quarante-cinq jours à quinze mois de prison... La prison sera de deux à cinq ans si le fait a été commis en réunion de plus de cinq personnes, qui se sont concertées à cette fin...
Code pénal suisse. Art. 139 : Le vol sera puni de la réclusion pour dix ans au plus ou de l’emprisonnement pour six mois au moins, si son auteur l’a commis en qualité d’affilié à une bande formée pour commettre des brigandages ou des vols.
- Droit positif. Le droit français retient la circonstance aggravante de réunion dès le second participant (coauteur ou complice présent sur les lieux), de plus il n'exige pas de concert préalable. Il en fait application notamment en matière de vol (art. 311-4 1° C.pén.), et en matière de rébellion ( art. 433-7 al.2 C.pén.).
Garçon (Code pénal annoté) : Le vol devient plus grave lorsqu'il a été commis par deux ou plusieurs personnes, et la rigueur de la loi se justifie alors facilement: le vol est plus facile par cette association de malfaiteurs.
Cass.crim. 7 décembre 1954 (Bull.crim. n°375 p.651) : Celui qui fait le guet pendant qu'un coauteur commet une soustraction frauduleuse est lui-même un co-auteur et le vol doit être considéré comme commis en réunion.
RÉUNION (Liberté de)
Cf. Association (liberté d’)*, Attroupement*, Foule*, Liberté*, Manifestation*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.), n° III-227, p.512 (sur le principe de la liberté de réunion)
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 454, p.309 (sur la liberté de réunion des mineurs)
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 37, p.36 / n° II-II-242, p.533 (sur la police des réunions)
Voir : Grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme
- Notion. Une réunion consiste en un rassemblement organisé de plusieurs personnes, dans un même lieu et dans un même but. Elle ne présente ni le caractère accidentel d'un attroupement, ni le caractère permanent d'une association, ni le caractère revendicatif d'une manifestation.
Colliard (Libertés publiques) : L’idée première de la réunion est une idée de groupement. Mais pour constituer une réunion un groupement droit présenter trois caractéristiques essentielles : la réunion est un groupement organisé, discontinu, destiné à l’échange en commun d’idées.
- Règle morale. L’être humain a été formé par la nature pour vivre en société. Aussi la loi doit-elle lui reconnaître la faculté de se rassembler avec d'autres personnes ; c'est là l'objet du droit de réunion et du droit d'association.
Ahrens (Cours de droit naturel) : La liberté politique est la sauvegarde de toutes les autres libertés, c'est la liberté dans laquelle la nation, dans sa totalité et dans la conscience publique, protége toutes les parties, tous les membres, c'est l'atmosphère commune dans laquelle respirent et se développent toutes les autres libertés.
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (18
décembre 2000).
Art. 12. Liberté de réunion. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique à tous les niveaux, notamment dans les domaines politique,
syndical et civique.
- Science criminelle. D'une part, le principe de la liberté de réunion est subordonné à la condition de ne pas troubler l'ordre public. D'autre part, l’exercice de la liberté de réunion doit être garanti face à ceux qui prétendraient l’entraver.
Voir : Tableau des incriminations protégeant les libertés intellectuelles (selon la science criminelle)
Cour EDH 26 septembre 1995 (Gaz.Pal. 1996 II 526) : La protection des opinions personnelles visée à l’art. 10 de la Convention constitue l’un des objectifs de la liberté de réunion et d’association consacrée à l’art. 11.
Code pénal d’Argentine. Infractions contre la liberté de réunion. Art. 160 : Sera puni, d’un emprisonnement de quinze jours à trois mois, celui qui empêche matériellement ou trouble une réunion licite, avec des insultes ou des menaces envers l’orateur ou l’organisateur de la réunion.
Code pénal du Pérou. Art. 166 : Celui qui, par violence
ou menace, empêche ou perturbe une réunion publique licite, sera sanctionné d'une peine privative de liberté d'un an au plus...
Article 167 : Le fonctionnaire public qui, abusant de sa charge, n'autorise pas ou ne garantit pas, interdit ou empêche une réunion publique,
licitement convoquée, sera sanctionné d'une peine privative de liberté de deux à quatre ans et d'une déclaration d'interdiction des fonctions de un à
deux ans...
Cons. d’État (Ord. réf.) 9 janvier 2014, n° 374508 (Gaz.Pal. 23 janvier 2014) : L'exercice de la liberté d'expression est une condition de ta démocratie et l'une des garanties du respect des autres droits et libertés. Il appartient aux autorités chargées de la police administrative de prendre les mesures nécessaires à l'exercice de la liberté de réunion. Les atteintes portées, pour des exigences d'ordre public, à l'exercice de ces libertés fondamentales doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées.
Mais l'expérience montre que la liberté de réunion peut dégénérer et entraîner des troubles à l'ordre public. Aussi le législateur doit-il avoir la sagesse d'édicter une police des réunions.
Kenny (Esquisse du droit criminel anglais). Lorsque trois personnes au moins se réunissent pour s'entraider en vue de la réalisation d'un dessein qui doit vraisemblablement impliquer la violence... même si ces personnes finissent de se séparer sans avoir accompli un acte tendant à la réalisation de leur dessein, le seul fait qu'elles se soient rencontrées constitue une infraction.
- Droit positif français. L’art. 431-1 C.pén. incrimine le fait d’entraver, d’une manière concertée et à l’aide de menaces, l’exercice de la liberté de réunion.
Voir : Tableau des incriminations assurant la paix intérieure de la Nation (en droit positif français)
Voir : Tableau des incriminations protégeant les libertés intellectuelles (en droit positif français)
Cons. d’État 29 décembre 1995 (Gaz.Pal. 1996 II panor.adm. ) : S’il incombe au maire, en vertu de l’art. L 131-2 C. commun., de prendre les mesures qu’exige le maintien de l’ordre, il lui appartient, dans l’exercice de ses pouvoirs, de concilier son action avec le respect de la liberté de réunion garantie par les lois du 30 juin 1881 et du 28 mars 1907. L’arrêté municipal interdisant la tenue d’une réunion du Front national doit être annulé, dès lors qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que cette réunion fût de nature à menacer l’ordre public dans des conditions telles qu’il ne pût être paré à tout danger par des mesures de police appropriées.
RÊVE - Voir : Pensées*.
REVENTE À PERTE - Voir : Vente (police des)*.
RÉVISION
Cf. Chose jugée*, Décès du condamné*, Erreur judiciaire*, Fait nouveau*, Voies de recours*.
Voir : Un innocent condamné sur des indices et sa mémoire justifiée
Pour un exemple, voir : Cass.crim. 03 avril 2001
- Notion. La requête en révision constitue une voie de recours exceptionnelle. Formée contre un jugement de condamnation passée en force de chose jugée, elle est fondée sur un fait nouveau de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné ; elle tend à faire annuler la décision critiquée. Le décès du condamné ne fait pas obstacle à l'exercice de cette voie de recours.
Séguier (Travaux préparatoires de l’Ordonnance de 1670) : Les lettres de révision sont, en matière criminelle, ce que sont les propositions d’erreur en matière civile.
Décret des 15-18 mai 1793. Art. 1 : Si un accusé a été condamné pour un délit, et qu'un autre accusé ait été aussi condamné comme auteur du même délit, en sorte que les deux condamnations ne puissent se concilier et fassent la preuve de l'innocence de l'une ou de l'autre partie, l'exécution des deux jugements sera suspendue, quand même on aurait attaqué l'un ou l'autre sans succès au tribunal de cassation.
La Convention, après la chute de Robespierre, fut invitée à se saisir en révision des arrêts de condamnation rendus par le Tribunal révolutionnaire. Un décret du 28 thermidor an III annula les jugements rendus par les Tribunaux révolutionnaires contre des personnes encore vivantes. Lanjuinais demanda d’aller plus loin : Il est nécessaire de convenir que tous ces individus, innocents ou coupables, n’ont pas été jugés, mais assassinés. Mais finalement la Convention recula devant une annulation globale et se borna à ordonner l’abrogation des confiscations (D. 14 floréal an III – 3 mai 1795).
- Science criminelle. Supprimée sous la Révolution au motif que la procédure nouvellement instaurée mettait la
justice à l’abri de l’Erreur judiciaire*, cette voie de recours a dû être restaurée sous la pression des faits (art. 443
et s. C.instr.crim.). En effet, aucun type d'instruction criminelle n'est infaillible.
C'est pourquoi tous les codes de procédure doivent prévoir la possibilité d'un procès en révision ; tout en soumettant cette voie de recours à des
conditions qui n'affaiblissent pas trop le principe de l'autorité de la chose jugée.
Braas (Précis de procédure pénale) : Bien que les décisions passées en force de chose jugée aient le caractère d’une vérité légale, il fallait prévoir la possibilité d’erreurs. D’un autre côté, il était indispensable d’éviter la multiplicité des procédures dégénérant en appels déguisés. On a donc autorisé la procédure de révision, mais dans un nombre restreint d’éventualités.
Code pénal suisse. Art. 397 : Les cantons sont tenus de prévoir un recours en révision en faveur du condamné contre les jugements rendus en vertu du présent code ou d’une autre loi fédérale, quand des faits ou des moyens de preuve sérieux et dont le juge n’avait pas eu connaissance lors du premier procès viennent à être invoqués.
Code de procédure pénale espagnol, Art. 954 : Le
recours en révision est ouvert contre les jugements définitifs dans les cas suivants:
1.° Lorsque deux ou plusieurs personnes ont été condamnées en vertu de jugements contradictoires pour un même délit qui n’a pu être commis que par
une seule.
2.° Lorsqu’une personne a été condamnée comme auteur, complice ou receleur de l’homicide d’une personne dont l’existence est établie après la
condamnation.
3.° Lorsqu’une personne a été condamnée en vertu d’un jugement, qui s’est fondé sur un document ou un témoignage reconnus comme faux par un jugement
définitif dans un procès pénal, sur l’aveu de l’accusé arraché par violence ou exaction, ou sur un autre fait punissable exécuté par un tiers, dès lors
que de tels éléments ont été reconnus aussi par un jugement définitif dans un procès intenté à cet effet. A ces fins pourront être administrées autant de
preuves qu’on le considérera comme nécessaire pour élucider les faits controversés de l’affaire, en anticipant celles qui, en raison de circonstances
spéciales pourront ensuite être difficiles à administrer et pouvant même rendre impossible le jugement définitif, base de la révision.
4.° Si, après le jugement on a connaissance de faits nouveaux ou de nouveaux éléments de preuve, de telle nature qu’ils rendent évidente l’innocence
du condamné.
- Droit positif français. Le pourvoi en révision est actuellement régi par les art. 622 et s. C.pr.pén. La principale difficulté de la matière consiste à définir la notion de Fait nouveau* légitimant l’ouverture d’une procédure de révision. Voir : Dénonciation de délit imaginaire*.
Cass.crim. 28 décembre 1923 (Gaz.Pal. 1924 I 363, affaire Danval) : Une découverte scientifique, propre à faire tomber les charges qui ont entraîné une condamnation, constitue un fait nouveau de nature à établir l’innocence d’un condamné. Pourvoi en révision déclaré recevable (il s’agissait en l’espèce du dosage de l’arsenic dans le corps d’un défunt).
Cass.crim. 14 mars 1963 (Gaz.Pal. 1963 II 119) sommaire : Constitue un fait nouveau, de nature à établir l’innocence d’un condamné, la production d’un contrat d’assurance régulier, alors qu’il avait été jugé au vu d’une attestation périmée d’assurance.
Cass.crim. 17 janvier 2007 (Bull.crim. n°11 p.35) : Constitue, au sens de l'art. 622-4° C.pr.pén., un fait nouveau de nature à exclure la culpabilité d'une personne condamnée pour complicité de favoritisme par un arrêt devenu définitif, le relaxe de l'auteur principal intervenue devant la cour d'appel de renvoi, après cassation, au motif que l'infraction n'était pas caractérisée en tous ses éléments matériels.
Son domaine, limité aux crimes et délits, ne s’étend pas aux condamnations prononcées pour contraventions.
Cass.crim. 7 février 2005 (Bull.crim. Commission de révision n°1 p.1) : La demande de révision d’une condamnation pour contravention n’entre pas dans les prévisions de l’art. 622 C.pr.pén.
RÉVOLTE (RÉVOLTÉ)
Cf. Concert frauduleux*, Délit militaire*, Émeute*, Insurrection*, Mépris*, Mutinerie*, Rébellion*, Sédition*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 7, p.11 / n° I-I-117, p.92 / n° II-112, p.317 / n° II-I-144, p.395
- Notion. Au sens large, la révolte consiste dans le refus déterminé et affiché d'obéir aux prescriptions de la
loi et aux ordres donnés par l'autorité légitime.
Au sens étroit, il s'agit du refus d'obéissance opposé de manière violente par un groupe d'hommes soumis à une discipline ferme : prisonniers,
militaires, marins embarqués (cas des Révoltés de la Bounty).
Cicéron (Traité des lois) : Platon traite de descendants des Titans ceux qui se révoltent contre les magistrats, comme les Titans se révoltèrent contre les dieux.
Corre (Les criminels) : Un ordre peut être interprété comme une sorte de mesquine persécution : la vengeance arme le bras des plus mauvaises têtes et transforme des insubordonnés en assassins. C'est ainsi que prit naissance, à bord du Tcederis-Arca, une révolte qui aboutit au meurtre du capitaine, du second et d'un pauvre petit mousse, et entraîna, en 1866, à. Brest, quatre condamnations capitales.
- Règle morale. En principe, les citoyens doivent observer les lois et se plier aux commandements de l'autorité légale. Ils ne peuvent s'y opposer que dans le cas d'une loi ou d'un commandement indubitablement et manifestement illégitime.
Ahrens (Cours de droit naturel) : La loi doit être restaurée dans sa domination, pour apparaître de nouveau dans sa puissance et dans sa majesté, quand le crime se présente comme un combat ou une révolte contre la loi.
Bluntschli (Droit public général) : La voie qui va de l'entière obéissance à la révolte armée est longue et périlleuse. Elle côtoie souvent l'abîme; elle est semée de désastres et de morts. Mais la résistance a parfois sauvé un peuple d'une situation intolérable... Les droits de l'État ne sont point absolus ; l'obéissance des citoyens ne l'est pas davantage. Au terme du droit humain est une sphère invisible où se meut la liberté native, où l'obéissance cesse d'être due. Personne n'est tenu de croire, de penser, de sentir ce qu'il plaît à la puissance publique de prescrire... L'État ne peut commander que dans son domaine ; le devoir d'obéissance cesse quand il empiète sans raison dans la sphère des droits privés.
- Science criminelle. Les pouvoirs publics ne sauraient souffrir une révolte, non plus qu'une rébellion ou une sédition, sans mettre en péril l'autorité de l'État. Le législateur se trouve donc dans l'obligation d'incriminer la révolte, qui sera rangée dans la catégorie des délits contre la puissance publique et sanctionnée en tant que délit formel. C'est aux juges qu'il appartient, à titre exceptionnel, de dire que tel acte de désobéissance était en l'espèce légitime.
Le Bon (La Révolution française) : En temps normal, les révoltés que chaque société renferme sont contenus par les lois, le milieu, en un mot par toutes les contraintes sociales et restent sans influence. Dès que se manifestent des périodes de troubles, ces contraintes faiblissent et les révoltés peuvent donner libre cours à leurs instincts..
Caroline, art. 127. Commentaire officiel : Tous Soldats qui exciteront quelque sédition, révolte ou mutinerie ou qui feront aucune assemblée illicite, pour quelque cause, et sous quelque prétexte que ce puisse être, seront condamnés à être pendus et étranglés.
Code annamite de Gia Long. Art. 354 : Si des coupables détenus se révoltent dans la prison et prennent la fuite... ils seront tous punis de la décapitation.
Code pénal de Tunisie. Art. 263 : Est puni de 10 ans de prison : Le vol commis au cours... d'une révolte, une émeute ou tout autre trouble.
- Droit positif français. Le mot révolte ne figure pas dans le Code pénal ; sans doute en raison de son imprécision, qui se heurte à l'exigence de précision des incriminations. Mais rien n'interdit que cet acte soit, en lui-même et indépendamment de ses effets, réprimé sur la plan disciplinaire ; il l'est notamment par le Code de la défense (art. 323-1 et suivants).
Code de
la défense, art. L.323-1 : Sont en état
de révolte :
1° Les militaires sous les armes, les personnes embarquées qui,
réunis au nombre de quatre au moins, agissant de concert,
refusent à la première sommation d'obéir aux ordres de leurs
chefs ;
2° Les militaires, les personnes embarquées qui, au nombre de
quatre au moins et dans les mêmes conditions, prennent les armes
sans autorisation et agissent contre les ordres de leurs chefs ;
3° Les militaires, les personnes embarquées qui, réunis au
nombre de huit au moins et dans les mêmes conditions, se livrent
à des violences en faisant usage d'armes, et refusent, à la voix
de l'autorité qualifiée, de se disperser et de rentrer dans
l'ordre.
Cass. 1re civ. 9 juillet 1996 (Gaz.Pal. 1997 panor.cass. 100) : La Cour énonce à bon droit « que si tout avocat peut manifester auprès du Bâtonnier ses contestations, voire ses révoltes, il doit le faire avec tact et délicatesse ».
RÉVOLUTION
Cf. Agitateur*, Despotisme*, Dictature*, Guerre*, Idéologie*, Insurrection*, Meneur*, Mutinerie*, Rébellion*, Religion*, Résistance à l'oppression*, Révolte*, Sédition*, Terreur*, Tyrannie*.
- Notion. D'un point de vue politique, une révolution consiste le plus souvent en un changement de forme de gouvernement imposé par la force.
Dictionnaire Larousse des synonymes : Révolution se dit d'une révolte, d'une insurrection, entraînant le renversement brusque d'un régime politique et suppose alors la participation d'un nombre assez considérable de personnes.
Le Bon (La Révolution française et la psychologie des révolutions) : On applique généralement le terme de révolution aux brusques changements politiques, mais cette expression doit être attribuée à toutes les transformations subites, ou paraissant telles, de croyances, d'idées et de doctrine.
- Variété des révolutions. C'est à Le Bon, auteur par trop méconnu, que l'on doit la distinction entre révolutions scientifiques, révolutions politiques et révolutions religieuses. Les premières, œuvres de spécialistes apolitiques du droit constitutionnel, sont susceptibles d'améliorer la vie de la Société. Les deuxièmes résultent de causes diverses, mais engendrent trop souvent des conséquences néfastes comme l'a montré la Révolution française ; nous l'avons constaté à de nombreuses reprises dans ce dictionnaire. Il reste à dire quelques mots des troisièmes.
Le
Bon (La Révolution française et la psychologie des révolutions,
I, 1, 2)
: Si l'on considère que la Révolution française,
constituant une religion nouvelle, devait obéir aux lois de la
propagation de toutes les croyances. Ses fureurs et ses
hécatombes deviennent très intelligibles.
En étudiant l'histoire d'une grande révolution religieuse, celle
de la Réforme, nombre d'éléments psychologiques qui y figurèrent
agirent également pendant la Révolution française. Dans l'une et
dans l'autre, on constate le peu d'influence rationnelle d'une
croyance sur sa propagation, l'inefficacité des persécutions,
l'impossibilité de la tolérance entre croyances contraires, les
violences et les luttes désespérées résultant de fois diverses.
On y voit enfin qu'il est impossible de modifier de modifier des
hommes sans modifier aussi leur existence.
Ces phénomènes constatés, il apparaît clairement pourquoi
l'évangile de la Révolution se propagea par les mêmes méthodes
que tous les évangiles religieux...
Mais s'il existe des analogies étroites entre la genèse d'une
génération religieuse, telle que la Réforme et celle d'une
grande révolution politique comme la nôtre, leurs suites
lointaines sont bien différentes, et ainsi s'explique
l'inégalité de leur durée. Dans les révolutions religieuses,
aucune expérience ne peut révéler aux fidèles qu'ils se sont
trompés, puisqu'il leur faudrait aller au ciel pour le savoir.
Dans les révolutions politiques l'expérience montre vite
l'erreur des doctrines et oblige à les abandonner.
- Conflits internes. Une Révolution est le plus souvent menée par l'union temporaire de coteries qui s'apparentement sur certains points mais s'opposent sur d'autres. Ainsi, la Révolution française a été initiée par le rapprochement des Francs-maçons et des Protestants ; mais cette alliance n'a duré qu'un temps, et ces derniers furent vite écartés. Ensuite s'appliqua le vieil adage : « un pur trouve toujours un plus pur qui l'épure »... jusqu'à ce qu'il ne reste plus qu'un chef : celui qui est dénué de tout scrupule et de tout état d'âme (l'exemple type en est bien évidemment Staline).
Wallon (Histoire du Tribunal révolutionnaire) : Jean-Antoine Meyrand, curé constitutionnel de Meilleraie (Sarthe), dans son zèle pour le nouveau régime, avait joint à ses fonctions de prêtre celles de maire, d'officier municipal, d'électeur, voire de juge de paix. On l'accusa d'avoir voulu ainsi attirer toute l'autorité et d'aspirer à être chef de Parti. Le Tribunal révolutionnaire mit fin à son esprit d'entreprise le 17 prairial an II (5 juin 1794).