DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre H
(Deuxième partie)
HARCÈLEMENT
Cf. Agression*, Appels téléphoniques malveillants*, Attaque*, Harcèlement moral*, Harcèlement sexuel*, Menaces*, Persécution*, Voies de fait*.
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La loi pénale » (4e éd.), n° 135, p.113
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la Personne humaine » (4e éd.), n°
I-245 b, p.145 / n° II-118, p.279
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la Famille, des enfants et des
adolescents », n°
224, p.113 / n° 228, p.114
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la Société », n°
I-II-102, p.156 (note 7) / n° II-I-135, p.380 (note 3)
- Notion. Harceler une personne c'est la soumettre à des agressions constantes, chacune envisagée en elle-même étant de peu de gravité, mais leur répétition étant susceptible de causer un trouble physique ou psychique.
Littré (Dictionnaire). Harceler : Tourmenter,
inquiéter par de petites mais de fréquentes attaques.
Exemple (Ouest-France 20 février 2009) : Un
anglais avait la fâcheuse habitude de siffler le thème du film "La famille Adams" devant les fenêtres de ses voisins, plusieurs fois par jour et
parfois même la nuit, depuis quatre ans. Reconnu coupable de harcèlement et de comportement antisocial, il a été condamné à vingt semaines de prison.
- Science criminelle. D'un point de vue législatif la principale question qui se pose est de savoir si le législateur doit incriminer le harcèlement en tant que délit formel : "actes de nature à provoquer une atteinte à la personne visée" ; ou en tant que délit de résultat : "actes ayant causé une atteinte à la personne visée". Dans le second cas seulement le plaignant devra faire la preuve, par certificat médical, de l'existence d'un traumatisme.
Code pénal des Indiens Ute. §13-4-98. Harcèlement
( "harassment" ). Une personne est coupable de harcèlement si, dans le but de gêner ou alarmer autrui, elle... procède anonymement à des appels
téléphoniques répétés à des heures très incommodes ou dans des termes agressivement brutaux... ou manifeste tout autre comportement ne visant aucun but
légitime mais tendant de manière délibérée à sérieusement gêner ou alarmer autrui.
Écosse (Projet de Code criminel) : Une crainte,
une alarme ou une détresse réelle doivent être causées. Il n'est pas suffisant de prouver que la conduite était de nature à causer crainte, alarme ou
détresse à une personne ordinaire.
Cass.crim. 3 mars 1992 (Gaz.Pal. 1992 II Chr.crim.
373) rappelle que Les violences visées par l'art. 309 al. 2 C.pén. comprennent celles qui, sans atteindre matériellement les personnes, ni leur causer
une incapacité, sont cependant de nature à les impressionner vivement, et fait application de ce principe dans un cas de harcèlement
téléphonique.
- Droit positif. Le droit français ne connaît pas de délit général de harcèlement, mais trois délits spéciaux : le Harcèlement conjugal*, le Harcèlement moral* et le Harcèlement sexuel*. Toutefois des actes de harcèlement peuvent être réprimés sous la qualification de Voies de fait* et violences légères, à défaut de qualifications plus élevées tenant à la gravité de l'atteinte.
HARCÈLEMENT CONJUGAL
Cf. Famille*, Mariage*, Menaces*, Voies de fait*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des
adolescents », n° 228, p.114
Une loi du 9 juillet 2010 a ajouté au Code pénal un article 222-33-2-1, qui incrimine le fait de harceler son conjoint par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale. Les sanctions sont fixées, au départ, à 3 ans d'emprisonnement et à 45.000 € d'amende.
HARCÈLEMENT MORAL
Cf. Famille*, Filature*, Mariage*, Menaces*, Travail*, Violences*, Voies de fait*.
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la personne humaine » (4e éd.), n°
I-245 b, p.145
- Notion. Le harcèlement moral consiste dans le fait de tourmenter une personne par des agissements répétés de nature à porter atteinte, soit à sa santé physique ou mentale, soit à des droits fondamentaux.
Exemple (Aujourd'hui
7 mai 2015) : Une infirmière harceleuse de 32 ans a été
condamnée à Limoges à six mois de prison avec sursis. Un suivi
psychologique a également été ordonné. La jeune femme n'avait
pas supporté que l'homme dont elle avait été tombée amoureuse la
quitte après quatre mois de relations intenses. Appels
téléphoniques à répétition, sonneries à l'interphone de son
logement et même filatures en voiture avaient conduit son
ex-fiancé à porter plainte.
- Droit positif français. Un peu légèrement, compte tenu des difficultés de preuve, mais en raison de la multiplication des abus d’autorité émanant de « petits chefs » dans les entreprises privées ou dans les services publics, cette pratique a été élevée au rang de délit pénal par une loi du 17 janvier 2002 qui a ajouté un article 222-33-2 au Code pénal en créant un délit de harcèlement au travail.
Cass.crim. 21 juin 2005 (Bull.crim. n° 187
p.661) : Des agissements répétés, ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible de porter
atteinte aux droits de la victime … et à sa dignité, sont constitutifs du délit de harcèlement moral.
Cass.crim.
26 janvier 2016, n° 14-80.455 (Bull.crim. n° 15 p.42) : L’élément
matériel du délit de harcèlement moral n’implique pas que la
répétition exigée par l’article 222-33-2 C.pén. s’attache à des
agissements de nature différente, ni que ceux-ci aient eu
initialement pour objet ou pour effet une dégradation des
conditions de travail susceptible de porter atteinte à la
dignité et à la santé de la victime.
Cass.crim. 25 janvier 2011 (n° 10-82730, Gaz.Pal. 14
avril 2011) sommaire : Doit être envisagé sous la qualification de harcèlement, et non sous la qualification de violences, le comportement 'un
prévenu, fait d'une agressivité quotidienne pendant plusieurs mois et d'insultes proférées dans des termes extrêmement violents à l'origine d'une
incapacité totale de travail de 164 jours.
Cass.crim. 6 décembre 2011, n° 10-82266 (Gaz.Pal. 19
avril 2012) sommaire : Le fait que la personne poursuivie soit le subordonné de la victime est indifférent à la caractérisation du délit de
harcèlement moral.
Cass.crim. 1er septembre 2010 (pourvoi n° 10-80376)
: Pour confirmer le jugement ayant condamné X... du chef de harcèlement moral envers Chr.Y..., sa salariée, l'arrêt, après avoir retenu le témoignage
de personnes qui n'étaient plus employées du prévenu au moment des faits incriminés, se fonde sur "les éléments concrets issus du vécu personnel"
d'autres employés pour en déduire "des agissements répétés du prévenu ayant eu pour effet une dégradation de leurs conditions de travail qui ont porté
atteinte à leur dignité et altéré leur santé physique et mentale, en particulier en ce qui concerne Chr.Y..." ;
Mais en prononçant ainsi, sans caractériser les agissements répétés du prévenu envers Chr. Y... ayant eu pour effet une dégradation des conditions de
travail de celle-ci, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ; D'où il suit que la cassation est encourue.
Trib.corr. La Roche-sur-Yon 22 avril 2002 (Gaz.Pal.
2002 J 1017) : La notion de harcèlement, « agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de
porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel », ne se confond pas avec
la notion de violence, comportement de nature à impressionner vivement la victime. Le délit est constitué dans des hypothèses où le comportement réprimé
n'a pas eu pour objet ni pour effet d'altérer la santé de la victime. De ce fait, la loi prend en compte des situations qui ne pourraient recevoir la
qualification de violence. Par ailleurs, le mobile est pris en considération indépendamment du résultat. Le délit de harcèlement moral est constitué en
présence d'agissements répétés ayant pour objet de porter un préjudice, quand bien même il n'en est résulté aucun résultat défavorable pour la personne
ainsi prise pour cible.
Le harcèlement moral n'est pas sanctionné uniquement sur le plan pénal, il l'est aussi sur le plan disciplinaire privé ou public.
Cass.soc. 24 septembre 2008 (Gaz.Pal. 18 octobre
2008) : Peuvent constituer un harcèlement moral des agissements ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles
de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, ou d'altérer sa santé physique ou mentale.
Grenoble 3 mai 1999 (JCP 2001 IV 1468) : Le
harcèlement moral auquel se livre le responsable de recrutement d’une agence de travail temporaire à l’encontre de ses collaborateurs en n’hésitant pas à
les critiquer devant les clients alors même qu’ils n’étaient pas en cause, en créant un climat de tension et une ambiance désastreuse à l’origine d’un
stress permanent ayant des répercussions sur la vie familiale des collaborateurs dont une partie a préféré démissionner, constitue une cause réelle et
sérieuse de licenciement.
Cons d'État 30 décembre 2011 (Gaz.Pal. 9 février
2012) : Pour être qualifiés de harcèlement moral, des faits répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors
qu'elle n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate
ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral.
Cons. d'État 11 juillet 2011 (Gaz.Pal. 28 juillet
2011 p.29) : Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des
éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une
argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du
juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut
compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de
l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la
nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de
l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour
l'agent victime doit alors être intégralement réparé.
Cons d'État
19 juin 2014, n° 381061 retient le harcèlement moral au vu des
faits suivants : À partir de l'année 2004 les conditions de
travail du requérant se sont dégradées ; notamment, il a été mis
à l'écart de son équipe, et s'est vu privé de ses
responsabilités d'encadrement et de l'utilisation des moyens
affectés aux services techniques, sans que son aptitude
professionnelle ait été mise en cause ou qu'une procédure
disciplinaire ait été engagée à son encontre ; la situation
d'isolement et de désœuvrement
dans laquelle il a été placé a engendré chez lui un état
dépressif et des perturbations dans sa vie personnelle.
HARCÈLEMENT SEXUEL
Cf. Attentat à la pudeur*, Chantage sexuel*, Chose jugée (Cass.crim. 19 janvier 2005 - Gaz.Pal. 26/30 août 2005 p.16)*, Menaces*, Pudeur*, Viol*, Voies de fait*.
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la Personne humaine » (4e éd.), n°
II-118, p.279
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la Famille, des enfant et des
adolescents », n°
228, p.114
- Notion. Le harcèlement sexuel consiste dans le fait, pour un supérieur hiérarchique, par abus d’autorité dans l'exercice de ses fonctions, de tourmenter autrui afin d’obtenir des faveurs de nature sexuelle.
Code pénal du Texas. § 39-04 : Dans cette section,
l'expression « harcèlement sexuel » vise des avances sexuelles malvenues, des demandes de faveurs sexuelles, ou toute autre conduite verbale ou physique
à caractère sexuel, quand leur acceptation est posée en condition implicite ou explicite à l'exercice par une personne de ses droits, privilèges ou
prérogatives.
Affaire Bill Clinton (Encyclopédie Microsoft
Encarta) : Les révélations de P. J..., qui accusa le président de harcèlement sexuel, déstabilisèrent fortement le président.
- Science criminelle. De tels agissements constituent au départ une faute professionnelle, et relèvent dès lors rationnellement de la police disciplinaire. On constate cependant en droit comparé une tendance à faire de ce délit disciplinaire un délit pénal, en dépit de l’imprécision de son élément matériel et des difficultés de preuve voire des risques de fraude rencontrées dans la pratique. Il se semble pas sans intérêt d'observer que, en pratique, ce délit peut être commis aussi bien par un homme que par une femme, quoique si celle-ci use de procédés souvent trop subtils pour être saisis par la justice pénal.
Voir :
Tableau des
incriminations protégeant la pudeur (selon la science criminelle)
Code pénal de Tunisie. Art. 226 ter. - Est puni d
un an d'emprisonnement et d'une amende de trois mille dinars, celui qui commet le harcèlement sexuel. Est considéré comme harcèlement sexuel toute
persistance dans la gêne d'autrui par la répétition d'actes ou de paroles ou de gestes susceptibles de porter atteinte à sa dignité ou d'affecter sa
pudeur, et ce, dans le but de l'amener à se soumettre à ses propres désirs sexuels ou aux désirs sexuels d'autrui, ou en exerçant sur lui des pressions
de nature à affaiblir sa volonté de résister à ses désirs. La peine est portée au double lorsque l'infraction est commise à l'encontre d'un enfant ou
d'autres personnes particulièrement exposées du fait d'une carence mentale ou physique qui les empêche de résister à l'auteur du harcèlement.
Code pénal du Mexique. Art. 259 bis.- Celui qui, à
des fins lascives harcèle à plusieurs reprises une personne de l'un ou l'autre sexe, en se prévalant de sa position hiérarchique résultant de leurs
relations de travail, d'enseignement, domestiques, ou de quelque autre impliquant un lien de subordination, encourt une sanction pouvant aller
jusqu'à quarante jours-amendes... Le harcèlement sexuel ne sera punissable que s'il a causé un préjudice ou un dommage. On ne procèdera à des poursuites
du chef de harcèlement sexuel contre l'impudent qu'à la demande de la partie offensée.
- Droit positif français. Ce nouveau délit est incriminé par l'article 222-33 du Code pénal, qui a été modifié par une loi du 12 mars 2010. Le Conseil constitutionnel a censuré cette loi, du point de vue de sa rédaction, le 5 mai 2012. Une nouvelle formulation a été édictée par la loi n° 2012-954 du 6 août 2012, qui a porté la sanction de droit commun à deux ans d'emprisonnement ; elle a en outre prévu cinq circonstances aggravantes élevant la peine de prison à trois ans.
Voir :
Tableau des incriminations
protégeant la pudeur (en droit positif français)
Pradel et Danti-Juan (Droit pénal spécial) : Il
convient de définir l’infraction comme la réitération infructueuse mais persistante de gestes ou de propos matérialisant une démarche amoureuse.
Cons.const. 4 mai 2012 n°2012-240, (Gaz.Pal. 17 mai
2012 note Kerebel) sommaire : L'art. 222-33 C.pén. permet que le délit de harcèlement sexuel soit punissable, sans que les éléments constitutifs de
l'infraction soient suffisamment définis. Ainsi, ces dispositions méconnaissent le principe de la légalité des délits et des peines et doivent être
déclarés contraires à la Constitution.
Versailles 29 novembre 1996 (Gaz.Pal. 1997 I somm.
288) : Par l'art. 222-33 C.pén., dont la nature pénale commande une interprétation stricte, le législateur a entendu incriminer un comportement
qui, dans le dessein de faveurs de nature sexuelle et par le recours à des moyens dont l'énumération évoque les manifestations objectives d'une relation
d'autorité caractérisée, l'exploitation d'une situation de subordination ou de dépendance de la victime ; en effet, il a expressément écarté le terme de
pressions et a choisi de ne pas incriminer la seule attitude de séduction même émanant d'un supérieur hiérarchique.
Cass.crim. 15 juin 2000 (Bull.crim. n° 227
p.673) : Le fait, pour un professeur d’art dramatique, exerçant dans le cadre d’un enseignement à visée professionnelle, de proférer des menaces
à l’encontre de ses élèves dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle, en abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions, constitue le
délit de harcèlement sexuel.
Cass.crim. 21 septembre 2010 (n°09-87579, Gaz.Pal. 6
janvier 2011) sommaire : Les délits de violences commises au sein d'une établissement d'enseignement et de harcèlement sexuel sont distincts, tant
dans leurs éléments matériels que légaux.
Cass.crim.
18 novembre 2015, n°14-85591 : Pour confirmer le jugement
critiqué, l'arrêt retient que M. X... a, de manière insistante
et répétée, en dépit du refus des salariées de céder à ses
avances, formulé, verbalement ou par messages électroniques (SMS),
des propositions explicites ou implicites de nature sexuelle, et
adopté un comportement dénué d'ambiguïté consistant notamment à
tenter de provoquer un contact physique ; les juges ajoutent que
les salariées ont souffert de cette situation au point d'alerter
l'inspection du travail ;
En l'état de ces énonciations, desquelles il résulte que le
prévenu a, en connaissance de cause, même s'il a mésestimé la
portée de ses agissements, imposé aux parties civiles, de façon
répétée, des propos ou comportement à connotation sexuelle les
ayant placées dans une situation intimidante, hostile ou
offensante objectivement constatée, la cour d'appel a fait
l'exacte application de l'article 222-33 du Code pénal.
Exemple (Ouest-France 19 novembre 2004) :
Un ancien président d’association a été condamné à un an de prison avec sursis pour harcèlement sexuel, hier à Rennes. La première plaignante
invoquait « Une main sur la poitrine, un jour à la photocopieuse » ; pour une autre : « des mains dans les cheveux, sur la
joue ; et quand j’était habillée court, des remarques déplacées » ; un troisième témoigne : « Il était collant, malsain,
libidineux. Aux déjeuners de travail, il collait sa chaise et sa jambe contre les miennes » ; et la psychologue de l’établissement ;
« Un comportement insupportable de la part de quelqu’un qui est votre employeur ».
Ce fait peut aussi constituer une faute disciplinaire. À ce titre il est également sanctionné par le Code du travail (art. L.1153-1 et s.).
Cons.
d'État 15 janvier 2014, n° 362495 (Gaz.Pal. 30 janvier 2014) :
Il résulte de l'art. 6 ter de la loi du 13 juillet 1983 que
des propos, ou des comportements à connotation sexuelle, répétés
ou même, lorsqu'ils atteignent un certain degré de gravité, non
répétés, tenus dans le cadre ou à l'occasion du service, non
désirés par celui ou celle qui en est le destinataire et ayant
pour objet ou pour effet soit de porter atteinte à sa dignité,
soit, notamment lorsqu'ils sont le fait d'un supérieur
hiérarchique ou d'une personne qu'elle pense susceptible d'avoir
une influence sur ses conditions de travail ou le déroulement de
sa carrière, de créer à l'encontre de la victime, une situation
intimidante, hostile ou offensante sont constitutifs de
harcèlement sexuel et, comme tels, passibles d'une sanction
disciplinaire.
Cass.soc. 24 septembre 2008 (Gaz.Pal. 25 avril 2009,
somm.) : Dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie
défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement.
HARMISCARÉE - Voir : Hachée*.
HARO
Cf. Chasse à l'homme, Clameur publique*, Cri*, Enquête de police - Enquête de flagrance*, Flagrant délit*.
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la personne humaine » (4e éd.), n°
I-409, p.204 (note 5)
En droit normand, la clameur de haro était à l'origine un appel à l'aide lancé par une personne menacée d'un acte criminel, tels un homicide, un incendie, un larcin. Lors de la seconde rédaction de la coutume on l'a étendue à la matière des possessions, où elle a pris la forme d'une requête judiciaire de type accusatoire.
Le Foyer (Le droit pénal normand au XIIIe siècle) : La
clameur de haro est un appel à l'aide, lancé par celui dont la personne ou les biens sont en péril imminent.
Du Boys (Histoire du droit criminel) : En Normandie, le cri
usité était la clameur de haro. Une vieille coutume de Bretagne portait : " Tous et toutes doivent aller au cri communément, quand oyent cri de feu ou de
meurtre, et aider au besoin ".
Coutume de Normandie (seconde rédaction). Art. LIV et
LIX : Le Haro peut être interjeté non seulement pour maléfice de corps, et pour choses où il y aurait éminent péril; mais pour toute
introduction de procès possessoire... Le juge ne peut vider la clameur de haro sans amende (l'amende du Haro est arbitraire et néanmoins nécessaire,
parce qu'il y a une faute de l'une ou de l'autre partie).
HART
Cf. Effigie (pendre en)*, Gibet*, Haute justice*, Mort (Peine de)*, Pendaison*.
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la Personne humaine » (4e éd.), n°
IV-321, p.609-610
À une époque où chaque corde était précisément désignée en raison de l’usage auquel elle était destinée, celle qui servait à pendre ou à étrangler un condamné à mort était nommée « hart » (au sens premier, la hart était le lien d’osier servant à faire un fagot).
Ferrière (Dictionnaire de droit) : Hart, est la corde par
laquelle on donne la mort au criminel condamné. Ainsi quand on défend quelque chose sous peine de la hart, cela veut dire sous peine d'être pendu et
étranglé.
Franck (Philosophie du droit pénal) : Imaginez une
législation pénale qui ne se propose... que le triomphe ou la domination d’une secte, d’un parti, d’une forme de gouvernement : vous entendrez proclamer
des édits comme ceux qui défendaient autrefois, sous peine de la hart, d'enseigner toute autre logique que celle d'Aristote.
Gayot de Pitaval (Cause célèbres) rapporte l'arrêt rendu dans
l'affaire Martin Guerre : La Cour condamne Arnaud du Tilh à faire amende honorable... à genoux, en chemise, tête et pieds nus, ayant la hart au
col.
Clément Marot (Épître au Roi François 1er
« Pour avoir été dérobé ») : J’avais un valet de Gascogne sentant la hart de cent pas à la ronde.
La Fontaine « Le Charlatan » :
Il devait, au bout de dix ans, Mettre son âne sur les bancs : Sinon, il consentait d’être, en place publique, Guindé la hart au col, étranglé
court et net.
V.Hugo (Notre-Dame de Paris) vise une ordonnance
de police générale de 1465 : Ordre aux habitants, la nuit venue, d’illuminer de chandelles leurs croisées, et d’enfermer leurs chiens, sous peine
de la hart.
HAUTE COUR DE JUSTICE
Cf. Chef de l’État*, Cour de justice de la République*, Haute trahison*.
Voir :
Renvoi devant la chambre d'instruction de la Haute cour
de justice
La Haute cour de justice était autrefois la juridiction compétente pour juger le Président de la République, les ministres et secrétaires d’État, quant
aux crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions. Elle a été partiellement remplacée par la Cour de justice de la
République* (art. 68-1 nouveau de la Constitution et loi organique du 23 novembre 1993).
- Depuis ces textes la Haute cour, constituée par le Parlement, n’a plus compétence qu’à l’égard du Président de la République, et seulement en ce qui
concerne un éventuel manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat (Constitution, art. 67 et 68).
Conseil Constitutionnel 22 janvier 1999. Il a souligné
que la responsabilité pénale du Président de la République ne peut être mise en cause que devant la Haute cour de justice, et que pour les actes
accomplis dans l’exercice de ses fonctions, dans le cas de haute trahison.
Larguier (Procédure pénale) : La Haute Cour de Justice
est une juridiction politique, compétente en cas de haute trahison du Président de la République.
HAUTE, MOYENNE ET BASSE JUSTICE
Cf. Croix de justice*, Exécuteur des hautes œuvres*, Gibet*, Hart*, Justice déléguée et justice retenue*, Piliers de justice*.
Voir :
Aperçu de l'histoire de l'ancien droit criminel français
Sous l’Ancien régime on distinguait selon qu’un seigneur, appartenant à la noblesse ou à l'Église, possédait le droit de haute, de moyenne ou de basse
justice. Celui qui était investi du droit de haute justice pouvait prononcer des peines afflictives telles qu'une sentence de mort ; alors que celui
qui détenait seulement le droit de basse justice ne pouvait aller que jusqu’à l’exposition au pilori. La moyenne justice, constituée tardivement, permit
de limiter le domaine de la haute justice et d'élever le niveau des peines attachées à certains faits graves de la vie quotidienne.
Au fil des siècles, afin de faire prévaloir une procédure plus exacte, le pouvoir central s’efforça de réduire le nombre des Hauts justiciers.
Dupin (Règles de droit et de morale), à propos du procès de
Jésus, et de la compétence du seul Pilate pour prononcer la peine de mort : La haute justice est le principal attribut de la
souveraineté.
Olivier Martin (Histoire du droit français) : La haute
justice (justice du sang) entraîne plénitude de juridiction, au criminel comme au civil ; ses enseignes ou marques sont un orme et la possession de
fourches patibulaires, où les criminels sont justiciés et restent exposés.
A. Esmein (Cours d'histoire du droit français) : Justice
seigneuriale... De bonne heure on distingua deux degrés, la haute et la basse justice. La haute justice seule pouvait connaître de toute accusation
criminelle entraînant une peine afflictive, la peine de mort ou une mutilation... à la basse justice appartenait les autres causes. Au XIVe siècle
apparaît un degré intermédiaire, la moyenne justice, qui n'est pas autre chose que la basse justice enrichie de quelques uns des droits réservés
auparavant à la haute justice.
Toureille (Crime
et châtiment au Moyen-âge) : À l'origine, la haute justice
recouvrait la plénitude de compétence criminelle ; son détenteur
pouvait connaître souverainement de toutes les infractions, dans
les limites marquées par la coutumes. En revanche, la moyenne
justice n'autorisait que les condamnations par amendes, ce qui
ne l'empêchait pas, selon les provinces, de pouvoir connaître
des délits graves... La basse justice avait pour vocation de
traiter des délits mineurs... Le nombre des hautes justice était
limité.
Veyrat (La Haute justice des Archevêques de Rouen
comtes de Louviers) : L’institution de la Haute justice des Archevêques de Rouen à Louviers se situe entre la fin du XIIe siècle et le
commencement du XIIIe ; elle naquit du conflit qui mit aux prises Richard Cœur-de-Lion et Gauthier de Coutances et fut confirmée par la
« Charte d’Andelys» de 1197.
HAUTE TRAHISON
Cf. Chef de l’État*, Haute Cour de Justice*, Lèse-Majesté (crime de)*, Sûreté de l’État*, Trahison*.
Voir :
Jean-Paul Doucet,
« La protection pénale de la Société », n° II-104 et 105, p.307
et s.
- Notion. Le crime de haute trahison se caractérise par un acte, soit visant directement la tête de l'État, notamment la personne du Prince (crime de lèse-Majesté), soit tendant à la fin de la Nation (crime dit d'atteinte à la sûreté de l’État).
Bluntschli (Droit public général) : Le crime est en
quelque sorte un délit de trahison qualifié, en ce qu'il trouble l'État entier : la haute trahison est un crime, la simple rébellion peut n'être qu'un
délit.
Code criminel du Canada. Art. 46 : Commet une
haute trahison quiconque, au Canada, selon le cas : a) tue ou tente de tuer Sa Majesté, ou lui cause quelque lésion corporelle tendant à la mort ou
destruction, ou l'estropie ou la blesse, ou l'emprisonne ou la détient; b) fait la guerre contre le Canada ou accomplit un acte préparatoire à une telle
guerre; c) aide un ennemi en guerre contre le Canada, ou des forces armées contre lesquelles les Forces canadiennes sont engagées dans des hostilités,
qu'un état de guerre existe ou non entre le Canada et le pays auquel ces autres forces appartiennent.
- Science criminelle. Lorsque l’État est représenté par le Prince et que la Nation s'incarne dans ce même
Prince, le crime de haute trahison se confond avec le crime de Lèse Majesté humaine au premier degré*.
Ce crime consiste, comme toute Trahison* mais à un niveau de gravité supérieur, en une méconnaissance, par un sujet de la
foi due à son seigneur (acte de déloyauté), ou par un homme politique du respect dû à la liberté politique de l'ensemble des citoyens (instauration d'une
dictature).
Du Boys (Histoire du droit criminel) : La plupart des
jurisconsultes anglais anciens professent la doctrine que, dans les crimes de haute trahison, c'est le crime de lèse-majesté humaine que la loi est
appelée à réprimer.
Blackstone (Commentaire
sur les lois anglaises, T.V) : On se rend coupable du
crime de haute trahison si on viole ou si on séduit la femme du
Roi ; dans le cas de séduction, la femme est, comme son
séducteur, punis comme coupables de haute trahison.
Ce fut le sort de plusieurs des femmes de Henry VIII. Le but de
cette loi est de conserver par cette rigueur la pureté du sang
royal et d'empêcher qu'il ne puisse naître aucun soupçon sur la
naissance des héritiers du Trône...
Le coupable doit être traîné jusqu'au gibet sur une claie. Il
doit être pendu par le cou avant d'être étranglé. On doit le
descendre de la potence, lui arracher le cœur
et les entrailles et les jeter au feu. Sa tête doit être coupée.
Son corps mis en quatre quartiers, lesquels, ainsi que sa tête,
sont exposés aux endroits indiqués par le Roi.
Kenny (Esquisse du droit criminel anglais) : La
citation pour haute trahison était, au Moyen-âge, l’arme la plus terrible que la Couronne pût employer contre ses deux grands rivaux : l’Église et
les seigneurs… Aussi, dans l’intérêt de leur souverain, les juges du roi étendirent-ils la définition de la haute trahison jusqu’à en faire une
infraction des plus larges comportant toutes les atteintes aux droits du roi…
Code général des États prussiens. Art. 92 : Une entreprise
tendant à changer à force ouverte la constitution de l'État, ou dirigée soit contre la vie, soit contre la liberté de son chef, est une haute
trahison.
Constitution de la République démocratique du Congo.
Exposé des motifs 1 : Le peuple s'exprime dans le pluralisme politique garanti par la Constitution qui érige, en infraction de haute trahison,
l'institution d'un parti unique.
Code pénal suisse. Haute trahison - Art. 266 1.
Celui qui aura commis un acte tendant à porter atteinte à l’indépendance de la Confédération ou à mettre en danger cette indépendance, ou à provoquer de
la part d’une puissance étrangère, dans les affaires de la Confédération, une immixtion de nature à mettre en danger l’indépendance de la Confédération,
sera puni de la réclusion ou de l’emprisonnement pour un à cinq ans. Celui qui aura noué des intelligences avec le gouvernement d’un État étranger ou
avec un de ses agents dans le dessein de provoquer une guerre contre la Confédération sera puni de la réclusion pour trois ans au moins. Dans les cas
graves, le juge pourra prononcer la réclusion à vie.
- Droit positif français. Le crime de haute trahison consistait jadis, de la part du Président de la République,
soit à tenter de mettre fin au régime républicain de l’État, soit à entretenir avec un pays étranger des relations hostiles envers la Nation ; ce crime,
visé par l'art. 68 de la Constitution, relevait de la Haute cour de justice*.
La loi constitutionnelle n°2007-238 du 23 février 2007 a donné une nouvelle définition, si l'on peut dire, de ce crime majeur.
Constitution. Art. 68 : Le Président de la
République ne peut être destitué qu'en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat. La destitution est
prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour.
Cass. (Ass. plén.) 10 octobre 2001 (Gaz.Pal. 2001 J
1841) : La Haute Cour de justice est compétente pour connaître des actes de haute trahison du Président de la République commis dans l'exercice
de ses fonctions.