DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre C
(Première partie)
CABRIOLET
Cf. Menottes*, Geôle*, Poucettes*, Prison*.
Le cabriolet était jadis un mode d’entrave des malfaiteurs, comme les poucettes, et de nos jours les Menottes*. Le mot figure notamment dans la littérature du XIXe siècle.
Littré (Dictionnaire) : Le cabriolet est une
corde à nœuds terminée par deux morceaux de bois que les agents de police emploient pour lier les mains des détenus.
CACHOT
Cf. Ergastule*, Geôle*, Prison*.
Au sens large, un cachot est une cellule d’une prison.
Au sens étroit il s’agit d’un local sombre, situé en un lieu isolé, où sont enfermés les prisonniers ayant commis une faute disciplinaire. L’art. D.251 C.pr.pén. distingue le confinement en cellule individuelle ordinaire et le confinement en cellule disciplinaire.
Ordonnance criminelle de 1670. Art. 17 - Ne sera permis
aucune communication aux prisonniers enfermés dans les cachots, ni souffert qu'il leur soit donné aucunes lettres ou billets.
De Ferrière (Dictionnaire de droit 1779) : Le cachot
est un lieu souterrain, noir et obscur, qui est au-dessous du rez-de-chaussée d’une prison, où l’on ne met que les criminels condamnés ou accusés de
grands crimes, ou qui font rébellion dans la prison.
Warée (Curiosités
judiciaires) : Il existe dans le château de Bicêtre des
cachots souterrains, creusés autrefois pour y enfermer quelques
fameux criminels, qui, après avoir été condamnés au dernier
supplice, n'avaient obtenu leur grâce qu'en dénonçant leurs
complices, et il semble qu'on s'étudiât à ne leur laisser qu'un
genre de vie qui leur fit regretter la mort.
Morin (Répertoire
de droit criminel) : Cachot - Partie obscure et isolée
d'une prison, dans laquelle sont momentanément enfermés les
détenus dont on craint l'évasion, ou dont l'on veut réprimer la
brutalité.
Vidocq (Mémoires) : S’évader n’était rien
moins que facile ; on en jugera par la description de nos cachots : sept pieds carrés, des murs épais d’une toise, revêtus de madriers croisés
et boulonnés en fer ; une croisée de deux pieds sur trois, fermée de trois grilles placées l’une à la suite de l’autre ; la porte doublée en
fer battu.
Encyclopédie Microsoft Encarta : La chute
d’Alésia marqua la fin de la guerre des Gaules et l’achèvement de la conquête romaine. Emmené en captivité, Vercingétorix vécut encore six ans, jusqu’au
triomphe de César à Rome, où il fut exhibé comme captif, avant d’être étranglé dans un cachot de la prison Mamertine.
CADAVRE
Cf. Autopsie*, Corps de l’homme*, Cruentation*, Décès du prévenu*, Diffamation envers la mémoire d'un mort*, Dignité de la personne humaine*, Exhumation*, Levée du corps*, Mort*, Mort suspecte*, Nécrophilie*, Recel de cadavre*, Respect*, Sépulture*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n°131, p.108
/ n° I-7, p136 / n° I-109 2°, p.158 / n° I-250, p.266 / n°
II-106, p.294
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.),
n°43, p.38 / n° I-339, p.193
- Notion. Le cadavre est ce qui reste du corps d’un être humain après que se soit éteint le souffle de la vie. Il conserve sa nature d'être humain.
Littré (Dictionnaire) : Cadavre - Corps mort,
surtout en parlant de l'homme.
Guy Breton (Petites histoires) rapporte une
violation du principe voulant que le corps des êtres humains soient hors commerce, même après leur mort : Le cerveau de Voltaire, bouilli dans de
l’alcool, et conservé dans un bocal à confitures… fut vendu en 1875 à la salle des ventes. On n’a jamais su le nom de la personne qui l’avait acheté.
Autre
exemple (Ouest-France 2 juin 2016) : Deux assaillants
palestiniens avaient ouvert le feu sur des clients attablés dans
un restaurant près de Tel-Aviv... Le ministre israélien de la
défense a aussitôt ordonné que les corps des Palestiniens tués
lors d'attentats anti-israéliens soient confisqués. [alors
qu'ils ne sauraient être assimilés à une chose]
- Règle morale. Depuis des millénaires on considère généralement que le cadavre d'un homme conserve une partie de son caractère sacré. Il en résulte notamment qu'il est hors commerce du point de vue de la loi civile.
Platon (La République) : N'y a-t-il pas bassesse et
cupidité à dépouiller un cadavre ?
Thomas d'Aquin (Somme théologique) : On fait un gain
injuste en détroussant les cadavres.
Leclercq (Leçons
de droit naturel - T. IV-1) : Le christianisme a réagi
contre l'horreur du cadavre. Loin d'attacher une souillure au
contact d'un mort, il traite le mort avec respect et fait de son
ensevelissement un acte de piété. Enveloppe mortelle de l'âme,
le corps participe à la dignité de l'homme .
Naz (Dictionnaire de droit canonique) : Le respect dû
aux cadavres inspire encore toutes les cérémonies des funérailles.
Catéchisme de l'Église catholique. § 2300 : Les corps
des défunts doivent être traités avec respect et charité.
Schopenhauer (Le fondement de la morale) :
L'allemand, pour un cadavre, quand il s'agit des bêtes, a un terme spécial, tant il craindrait d'employer le même mot que pour les hommes.
Carbonnier (Droit civil) : De ce qu’il est la personne
elle-même, le corps tire une place tout à fait particulière dans le droit. Il a en quelque sorte un caractère sacré.
- Science criminelle. Le législateur pénal protège généralement les cadavres contre les outrages matériels, les atteignant directement, puis lors de la cérémonie funèbre, enfin lorsqu'ils ont été déposés dans une Sépulture*.
Carrara
(Cours de droit criminel § 47) : Le cadavre n'a pas de
sentiment, et pourtant, dans les outrages faits aux cadavres on
peut reconnaître un délit, puisqu'il y a une offense à la loi
qui les protège en considération des familles, ou de la
religion, ou de la morale, ou de la santé publique.
Code de déontologie médicale. Art. 2 : Le respect dû
à la personne ne cesse pas de s'imposer après la mort.
Digeste (47, XII, 7) : Ulpien - Les gouverneurs ont coutume
de déployer la plus grande sévérité contre ceux qui dépouillent les cadavres, surtout s'ils arrivent à main armée ; en sorte que, s'ils sont en armes
comme des voleurs, ils sont punis de mort.
Loi Salique. T. XVII, art. 1 : Quiconque aura dévalisé un
homme mort, avant que son corps ait été confié à la terre, sera condamné à payer 4.000 deniers, ou 100 sous d’or.
Code pénal norvégien de 1902. Art.143 : Est
passible d'une peine d'emprisonnement pouvant atteindre deux ans, celui qui maltraite un cadavre.
Code pénal du Pérou. Art. 318 : Sera puni de deux
ans d'emprisonnement au plus ... celui qui trouble un cortège funèbre .
Code criminel du Canada. Art. 182 - Est coupable
d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans quiconque … commet tout outrage, indécence ou indignité envers un cadavre humain
ou des restes humains, inhumés ou non.
Code pénal du Japon. Art. 190 - (Destruction des
cadavres) : Une personne qui endommage, abandonne ou détient illégalement un cadavre, les cendres ou des cheveux d'une personne morte, ou un objet
placé dans un cercueil, sera punie d'un emprisonnement de 3 ans au plus.
Cour
EDH 13 janvier 2015 arrêt n°61243/08 (Gaz.Pal. 25 avril 2015
p.19), sommaire : Le prélèvement de tissus pratiqué sur le
corps d'un défunt, sans le consentement et à l'insu de son
épouse, constitue un traitement dégradant au sens de l'art. 3 de
la Conv. EDH.
Une atteinte à l'intégrité d'un cadavre peut parfois être couverte par un fait justificatif, notamment pour des raisons médicales ou judiciaires. Encore faut-il que ces raisons soient conformes à l'intérêt général.
Exemple discuté. Cass.crim. 6 juillet 1993
(Gaz.Pal. 1993 II Chr.crim. 455 : Le journal quotidien régional Ouest-France, en date du 14 octobre 1988, a révélé qu'un juge d'instruction de Nantes,
pour rechercher l'origine d'une blessure occipitale, avait ordonné une expertise médico-légale, consistant notamment à effectuer des tirs de gros calibre
sur cinq têtes de cadavres..
Le procès fait au cadavre. Il était jadis admis que l’on intentât un procès à une personne morte et même enterrée, ce qui permettait notamment de confisquer ses biens. L’histoire en présente de nombreux exemples. Il en était encore ainsi dans notre Ancien droit avec le crime de Lèse-majesté*. John Bradshaw, qui présida le tribunal ayant condamné à mort Charles 1er d'Angleterre, fut, après la fin des troubles, exhumé puis pendu. Mais il est aujourd’hui admis que le Décès du prévenu* éteint toute action publique à son égard.
Voir :
Procès fait jadis à un cadavre (Le Concile cadavérique)
Ordonnance criminelle de 1670 (T.XXII, art.1) : Le
procès ne pourra être fait au cadavre ou à la mémoire du défunt si ce n’est pour crime de lèse-majesté divine ou humaine.
Jousse (Traité de la justice criminelle) : Il y a
plusieurs exemples de procès criminels faits aux cadavres. Voyez le procès fait au cadavre de Nicolas Lhôte, commis de M. de Villeroy, Secrétaire d’État,
pour crime de Lèse-Majesté, lequel en voulant se sauver, s’était noyé dans la rivière de Marne, proche la ville de Meaux ; son corps fut tiré à
quatre chevaux, et les quatre quartiers mis sur quatre roues, aux principales avenues de Paris (13 mai 1604).
Arrêt rendu contre Jacques Clément, après l'assassinat d'Henri
III. Ce 2 août 1589, le Roi étant en son Conseil, après avoir ouï le rapport fait par le sieur François de Richelieu, grand prévôt de France, du
procès fait au corps de feu Jacques Clément, jacobin, pour cause de l'assassinat commis sur la personne de feu de bonne mémoire Henry de Valois, naguère
Roi de France, Sa majesté, de l'avis de son Conseil, a ordonné et ordonne que ledit corps dudit feu Clément soit tiré à quatre chevaux ; ce fait, le
corps brûlé et mis en cendres, jeté en la rivière. Fait à Saint-Cloud, Sa Majesté y étant, deuxième jour d'août 1589. Signé Henry.
- Droit positif. Le droit français protège le cadavre, non seulement quant au respect qui lui est dû, mais encore du point de vue de l'instruction judiciaire après un homicide.
La protection du cadavre en lui-même. La profanation d’un cadavre ou de sa Sépulture* constitue un délit (art. 225-17 C.pén., ancien art. 360).
Voir :
Loi du
3 vendémiaire an VII (24 septembre 1798), concernant les salles de dissection
Pradel et Danti-Juan (Droit pénal spécial) : La notion
d'atteinte à l'intégrité du cadavre englobe tous les actes perpétrés sur le corps même du défunt.
Cass.crim. 8 février 1977 (Bull.crim. n° 52
p.120) : L’incrimination de la violation de sépulture n’a pas seulement pour but de sanctionner les atteintes portées aux tombes, mais aussi tout
acte qui tend directement à violer le respect dû aux morts.
Cass.(1e civ.) 16 septembre 2010 (Gaz.Pal. 3 mars
2011), sommaire : L'exposition de cadavres à des fins commerciales méconnaît les exigences de respect, de dignité et de décence attachées aux restes
d'une personne décédée [art. 16-1-1 C.civ.)
Exemple (Le Figaro 20 novembre 2004) : Un
scandale embarrassant pour Tsahal : les photographies de soldats israéliens posant avec des cadavres palestiniens… L’une des photographies montre le
corps nu d’un militant palestinien étendu dans une serre où poussent des tomates. Un soldat israélien en uniforme pose fièrement avec le pied posé sur le
torse de la victime, à la façon du chasseur qui vient d’abattre un lion au cours d’un safari.
La protection de la fonction judiciaire. Le Recel de cadavre* a été incriminé afin d'éviter que des Meurtres* ne puissent demeurés impunis.
Nypels et Servais (Code pénal belge interprété) : Par
le délit de recel de cadavre, le législateur a voulu empêcher qu’on ne soustraie à la justice la connaissance ou la preuve d’un crime ou d’un délit.
CAGOULE - Voir : Masque*.
CAÏD
Cf. Malfaiteur*.
Ce mot, d'origine arabe, désigne, dans la langue courante, le chef ou l'un des principaux membres d'une bande de malfaiteurs.
Traiter un homme honnête de "caïd" constitue par là même un propos injurieux.
TGI Paris 8 novembre 1989 (Gaz.Pal. 1990 I somm.
177) : La trace d'un gracieux cadeau d'une société à un homme politique, alors grand caïd du parti Gaulliste à Marseille, est suffisamment précise
pour être sans difficulté l'objet d'une preuve ou d'un débat contradictoire.
Exemple (Le Figaro, 28 avril 2006, Pierrat et
Nessi) : Quel est le vrai parcours d'un vrai caïd de cité ? - Quand il est mineur, il est multirécidiviste, condamné pour incivilités ou outrages.
Ensuite, plus âgé, il passe au vol à main armée et fait un petit séjour en prison. A sa sortie de cellule, il tombe dans le business de la drogue,
première étape avant une montée en gamme rapide vers le grand banditisme.
CALAMITÉS - Voir : Catastrophe*.
CALOMNIE
Cf. Caricature*, Dénonciation calomnieuse*, Diffamation*, Honneur*, Injure*, Jalousie*, Libelle diffamatoire*, Offense*, Outrage*, Pamphlet*, Satire*, Vérité*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.),
n° II-330, p.396
Voir :
Garçon, Le chantage
Voir :
Beaumarchais, "Éloge de la calomnie"
- Notion. La calomnie consiste à imputer mensongèrement à autrui un fait infamant précis, susceptible de preuve, mais qui ne saurait en réalité lui être reproché.
Pierre et Martin (Cours de morale
pour l'enseignement primaire) : La calomnie est le
mensonge par lequel nous attribuons à nos semblables des défauts
qu'ils n'ont pas, ou des torts dont ils sont innocents.
Thomas (Cours de philosophie morale) : Calomnier,
c'est, avec l'intention de nuire, accuser une personne de torts dont elle est innocente ... ses conséquences sont : la perte de la réputation, le mépris
public, les soupçons offensants, parfois même la ruine de toute une famille ... La calomnie, travaillant à tromper les esprits et à exciter leur
défiance, tend à éloigner du pouvoir les honnêtes gens, pour favoriser, le plus souvent, ceux qui n'en sont pas dignes, au détriment de la Nation toute
entière.
De Ferrière (Dictionnaire de droit 1779) : La calomnie
a pour principe la mauvaise foi et l’injustice ; elle est intentée dans le dessein formel de perdre un homme innocent, en mettant en œuvre, pour y
réussir, la fausseté et la subornation.
La calomnie apparaît comme une agression lâche et sournoise visant la réputation d'une personne, et contre laquelle il n'y a pas moyen de se défendre efficacement.
Linguet (Annales politiques) : Il n’y a pas de remède
aux blessures que fait la calomnie.
Shakespeare (Hamlet). Hamlet à Ophélie :
Serais-tu aussi chaste que la glace et aussi pure que la neige, tu ne pourrais échapper à la calomnie.
- Règle morale. La calomnie est fermement et universellement condamnée tant par la loi morale que par la loi naturelle.
Voir :
Le Décalogue - Les Dix commandements.
Livre des morts dans l’Égypte pharaonique : Je n'ai
pas été calomniateur.
Ménant
(Zoroastre, éd. 1844) : Il y a trois péchés qui ne peuvent
être compensés par des prières ou des bonnes œuvres : la
calomnie, la médisance et le vol ; la partie lésée doit
pardonner elle-même au coupable.
Les préceptes du Bouddhisme. Les dix préceptes se
divisent en trois classes : b) Les fautes commises par la parole : le mensonge, la calomnie, les paroles injurieuses... L'homme droit s'abstient
de toute parole calomnieuse.
Oldenberg (Bouddha,
Vie et religion) : Un moine cesse toute parole calomnieuse...
Ce qu'il a entendu ici, il ne le répète pas là, pour brouiller
celui-ci avec celui-là.
Le livre des récompenses et des peines (Traduction
par Stanislas Julien d'un ouvrage taoïste) : Lorsqu'on calomnie quelqu'un de manière à le mettre dans l'impossibilité de se justifier complètement, et
d'obtenir la réparation du tort qu'on lui a fait, on attire sur soi la colère des hommes et des démons.
Vittrant (Théologie morale) : Il y a calomnie
lorsqu’en parlant de quelqu’un à un tiers on lui attribue des défauts qu’il n’a pas ou des fautes qu’il n’a pas commises. Elle constitue une violation
évidente de la justice. Cette faute sera grave toutes les fois que l’affirmation mensongère sera de nature à nuire gravement à la réputation du
prochain.
Necker (De la morale naturelle) : Tel trait de
calomnie est plus cruel que le poignard d'un assassin, et ce trait est sans doute plus redoutable, qu'il peut être lancé par la main du plus faible comme
du plus puissant de vos ennemis.
Franck (Philosophie du droit pénal) : Sans aucun
doute, la calomnie est un crime ; elle est souvent de tous les crimes le plus lâche et le plus odieux, sans en excepter l’assassinat ; car l’assassinat
nous prive seulement da la vie, tandis que la calomnie peut nous ôter l’honneur.
Paulo
Coelho (Maktub) : De toutes les puissantes armes de
destruction que l'homme est capable d'inventer, la plus
terrible, la plus lâche est la parole... Veillez à ne pas
utiliser cette arme. Veillez à ce qu'on n'utilise pas cette arme
contre vous.
- Science criminelle. La calomnie est une infraction qui se caractérise par le mensonge, et qu’il convient dès lors de rapprocher des crimes de faux. Il en résulte notamment que des propos calomnieux sont punissables dès lors qu’ils ont été de nature à porter atteinte à l’honneur d’une personne, sans qu’il soit nécessaire pour le plaignant d’établir l’existence d’une dommage effectif.
Voir :
Tableau des
incriminations protégeant l'honneur et la considération (selon la science criminelle)
Pontas (Dictionnaire des cas de conscience) : La
calomnie est une fausse et malicieuse imputation d’un crime a quelqu’un qui en est innocent. Ce péché exige … une satisfaction suffisante envers la
personne calomniée, tant par rapport à l’honneur qu'on lui a ôté, que par rapport aux dommages temporels qu’on lui a causés.
Digeste de Justinien, 48, 16, 1, 4. Marcien : La décision
de condamnation ou d'acquittement du chef de diffamation ressort du prononcé du jugement sur le fait dénoncé. Car s'il est ainsi conçu : « vous n'avez
pas prouvé », il l'épargne ; mais s'il porte, « vous avez calomnié », il le condamne ; et, quoiqu'il n'ait rien ajouté touchant la peine, cependant la
puissance de la loi sera exercée contre lui.
Le Foyer (Le droit pénal normand au XIIIe siècle) : Toutes
les législations, sentant l'horreur de la calomnie, l'ont sévèrement punie... Selon une coutume de la ville de Rouen, la femme qui a diffamé recevait le
châtiment suivant : liée par une corde sous les aisselles, elle était plongée à plusieurs reprises dans l'eau de la Seine.
Code pénal roumain (1968). Art. 206 :
L’affirmation ou l’imputation en public d’un fait déterminé concernant une personne qui, s’il était vrai, exposerait cette personne à une
sanction pénale, administrative ou disciplinaire, ou au mépris public, est punie de l’emprisonnement de trois mois à un an ou d’une amende.
Code pénal espagnol (1944). Art. 462 : Le
délit de calomnie … peut être commis, non seulement d’une manière manifeste, mais encore au moyen d’allégories, de caricatures, d’emblèmes ou
d’allusions.
Code pénal de Bolivie (revu en 2003). Art. 283 :
Celui qui, par tout moyen, impute faussement à autrui la commission d'une infraction sera sanctionné de la privation de liberté de six
mois à trois ans et d'une amende...
- Droit positif. En droit français le délit de calomnie a été supplanté par le délit de Diffamation*.
Voir :
Tableau des incriminations
protégeant l'honneur et la considération (en droit positif français)
Loi du 29 juillet 1881. Art. 29 : Toute
allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une
diffamation.
Cass.soc. 26 octobre 1994 (Gaz.Pal. 1994 II panor.
cass. 246) : Une salariée ayant proféré vis-à-vis de son employeur des accusations calomnieuses mettant en cause son honnêteté …l’arrêt a pu
décider que son comportement était de nature à rendre impossible son maintien dans l’entreprise pendant la durée du préavis et constituait une faute
grave.
Cass.crim. 18 mars 1997 (Gaz.Pal. 1997 II Chr. crim.
151) : L’Assemblée générale du Tribunal de grande instance de Nice, régulièrement réunie le 25 avril 1996 pour délibérer de la mise en cause par
les médias des magistrats du tribunal, après avoir évoqué les affaires complaisamment relatées dans la presse, a déploré l’inaction de la Chancellerie
face à cette campagne de calomnie.
CAMBRIOLAGE (Cambrioleur)
Cf. Burglarie*, Clef*, Délits pénaux (Délit composé)*, Monte-en-l'air*, Pince-monseigneur*, Rossignol*, Violation de domicile*, Vol*, Vol qualifié*.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.),
n° V-501, p.645
- Notion. Le cambriolage est un vol avec effraction commis dans un domicile privé ou un local professionnel. Dans le langage familier, on parle aussi d'un "casse".
Tarde (la philosophie pénale) : Le cambrioleur a
la spécialité de dévaliser les appartements inoccupés.
Joly (Le crime, étude sociale) : Camer comptait dans
Paris douze espèces distinctes de vol. Chacune a ses facilités et ses dangers, que le voleur connaît vite. A-t-il réussi dans l'une d'elles ; il s'y
applique uniquement. Les uns ne volent que dans les chambres, ce sont les cambrioleurs ...
Sainéan (L'Argot ancien) : Cambriolle, chambre
... d'où cambrioleur, voleur qui dévalise spécialement les chambres.
Observatoire national de la délinquance. Il en
relève de août 2005 à juillet 2006 : 337.436.
Exemple (Ouest-France 18 juillet 2008) : À 5
h.45 du matin, des bruits sourds provenaient d'une joaillerie située dans le centre de Lorient. Deux hommes, armés d'une masse, sont parvenus à faire un
trou dans la vitrine blindée du magasin, dont ils avaient auparavant forcé le rideau métallique. Ils ont pu y glisser la main et s'emparer de montres de
luxe vendues entre 6.000 et 15.000 €.
Actualité
(Ouest-France 24 janvier 2014). Les cambriolages toujours en
hausse... Ce phénomène remonte à 2008, mais d'accentue ces
dernières années... Nous avons à faire à des groupes venus
d'Europe de l'est et des Balkans détaille Manuel Valls, ministre
de l'Intérieur. Ils s'installent durablement en France et
écument notre territoire. Une criminalité très organisée
et un mode opératoire délibéré. En ciblant principalement
les résidences secondaires, les malfaiteurs évitent la
confrontation avec l'occupant et tout risque de violence. C'est
plus sûr et pénalement moins puni qu'un braquage. En
revanche, pour que le butin soit aussi conséquent, il faut
multiplier les "visites".
- Règle morale. On n'insistera pas sur le fait que, comme tout vol, le cambriolage est condamné tant par la loi morale que par la loi naturelle.
Catéchisme
de l'Église catholique : La loi naturelle est immuable et
permanente à travers les variations de l'histoire ; elle
subsiste sous le flux des idées et des mœurs et en soutient le
progrès... Le vol est assurément puni par la loi qui est écrite
dans le cœur de l'homme.
- Science criminelle. Puisqu'il porte atteinte, d'une part à la propriété d'autrui, d'autre part à la vie privée de la victime, le cambriolage s’analyse en un Vol* aggravé par une Violation de domicile*, et constitue dès lors un Délit composé*.
Voir :
Tableau des incriminations
protégeant la propriété (selon la science criminelle)
Garraud (L'anarchie) : Il y a ... les cambrioleurs, qui
couvrent du prétexte de l'anarchie leurs rapines.
Lombroso (L'homme criminel) : Non seulement le voleur ne
fera jamais que voler, mais encore, parmi ces malfaiteurs, il en est qui ne s'attaquent qu'aux magasins ; d'autres qu'aux maisons particulières. Et même,
dans ces derniers, on distingue des sous-divisions : Vidocq cite les voleurs de maisons, qui entrent au hasard (cambrioleurs) ; ceux qui préparent de
loin leur coup...
Digeste de Justinien, 47, XI, 7. Ulpien, à propos du
directarius : Ceux qu'on nomme directaires [cambrioleurs], qui s'introduisent dans les maisons des autres pour y dérober, doivent être
punis plus que des voleurs.
Code pénal du Texas, § 30.02 : Commet un
cambriolage la personne qui entre dans une habitation, ou un bâtiment … avec l'intention de commettre un vol.
Code criminel du Canada. Son art. 351 incrimine la
Possession d’outils de cambriolage.
- Droit positif. Le terme « cambriolage » ne figure pas dans le Code pénal français, qui vise toutefois le vol avec circonstance aggravante. Mais il se rencontre dans quelques décisions de justice.
Voir :
Tableau des incriminations
protégeant la propriété (en droit positif français)
Cass.crim. 5 janvier 1984 (Gaz.Pal. 1984 II somm.
264) : Caractérise en tous ses éléments constitutifs le délit d’association de malfaiteurs l’arrêt qui énonce que le prévenu et son co-prévenu,
l’un étant porteur, au moment de son interpellation, d’un matériel complet de cambriolage, et l’autre étant en possession d’armes en état de marche,
avaient l’intention de commettre ensemble un crime contre les biens dont ils avaient préparé la réalisation.
Cass.1e civ. 25 janvier 2005 (Gaz.Pal. 22 mars 2005)
retient la responsabilité de la puissance publique, à la suite d’une série de cambriolages commis à l’encontre d’un même fonds de commerce, au
motif : qu’il n’est pas établi que les services de police aient pris les mesures topiques pour obvier à la perpétuation de ces cambriolages et en
arrêter les auteurs.
CAME
Cf. Stupéfiants* et les renvois.
Terme argotique qui désigne les stupéfiants. Se camer = se droguer. Traiter publiquement une personne de « camée » constitue une injure.
TGI Paris (Ord. réf.) 4 février 1986 (Gaz. Pal. 1986
I somm. 227) : Un article intitulé « Bonjour Camée ! » manifeste une intention de nuire, et une évidente atteinte à la vie privée
de F. S....
CAMORRA - Voir : Criminalité organisée*.
CAMOUFLET
Cf. Gifle*, Honneur*, Soufflet*, Voie de fait* .
Le camouflet est un soufflet, une gifle, une vexation, un affront ; plus généralement un atteinte à l'honneur ou à la considération résultant d'un geste, d'une attitude, d'un simple regard méprisant.
Voir :
Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.),
n° II-318, p.377
Dictionnaire Petit Robert. Camouflet :
Mortification, vexation humiliante - affront, claque, gifle, nasarde, offense.
Sainéan (L'argot ancien) : Qu'est-ce que recevoir
un soufflet ? La métaphore banale répond : C'est en voir trente-six chandelles. Ici l'argot intervient, et reprend : Chandelle = camoufle. Sur ce, le
langage usuel donne au soufflet pour synonyme camouflet. Ainsi, par une sorte de pénétration de bas en haut, la métaphore, cette trajectoire
incalculable, aidant, l'argot monte de la caverne à l'académie.