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CODE D’INSTRUCTION CRIMINELLE DE 1808
Texte publié dans « Le moniteur universel »
(en plusieurs livraisons, à partir du 18 novembre 1808)

(Troisième et dernière partie)

LIVRE II - DE LA JUSTICE
( suite )

TITRE IV - DE QUELQUES PROCÉDURES PARTICULIÈRES

CHAPITRE I - DU FAUX

Article 448

Dans tous les procès pour faux en écriture, la pièce arguée de faux, aussitôt qu'elle aura été produite, sera déposée au greffe, signée et paraphée à toutes les pages par le greffier qui donnera un procès-verbal détaillé de l'état matériel de la pièce, et par la personne qui l'aura déposée si elle sait signer, ce dont il sera fait mention ; le tout à peine de 50 fr. d'amende contre le greffier qui l'aura reçue sans que cette formalité ait été remplie.

Article 449

Si la pièce arguée de faux est tirée d'un dépôt public, le fonctionnaire qui s'en dessaisira la signera aussi et la paraphera comme il vient d'être dit, sous peine d'une pareille amende.

Article 450

La pièce arguée de faux sera de plus signée par l'officier de police judiciaire et par la partie civile ou son avoué, si ceux-ci se présentent.

Elle le sera également par le prévenu, au moment de sa comparution.

Si les comparants, ou quelques-uns d'entre eux, ne peuvent pas ou ne veulent pas signer, le procès-verbal en fera mention.

En cas de négligence ou d'omission, le greffier sera puni de 50 fr. d'amende.

Article 451

Les plaintes et dénonciations en faux pourront toujours être suivies, lors même que les pièces qui en sont l'objet auraient servi de fondement à des actes judiciaires ou civils.

Article 452

Tout dépositaire public ou particulier de pièces arguées de faux est tenu, sous peine d'y être contraint par corps, de les remettre, sur l'ordonnance donnée par l'officier du ministère public ou par le juge d'instruction.

Cette ordonnance et l'acte de dépôt lui serviront de décharge envers tous ceux qui auront intérêt à la pièce.

Article 453

Les pièces qui seront fournies pour servir de comparaison, seront signées et paraphées, comme il est dit aux trois premiers articles du présent chapitre pour celle arguée de faux, et sous les mêmes peines.

Article 454

Tous dépositaires publics pourront être contraints, même par corps, à fournir les pièces de comparaison qui seront en leur possession ; l'ordonnance par écrit et l'acte de dépôt leur serviront de décharge envers ceux qui pourraient avoir intérêt à ces pièces.

Article 455

S'il est nécessaire de déplacer une pièce authentique, il en sera laissé au dépositaire une copie collationnée, laquelle sera vérifiée sur la minute ou l'original par le président du tribunal de son arrondissement, qui en dressera procès-verbal ; et si le dépositaire est une personne publique, cette copie sera par lui mise au rang de ses minutes, pour en tenir lieu jusqu'au renvoi de la pièce, et il pourra en délivrer des grosses ou expéditions, en faisant mention du procès-verbal.

Néanmoins, si la pièce se trouve faire partie d'un registre de manière à ne pouvoir en être momentanément distraite, le tribunal pourra, en ordonnant l'apport du registre, dispenser de la formalité établie par le présent article.

Article 456

Les écritures privées peuvent aussi être produites pour pièces de comparaison, et être admises à ce titre, si les parties intéressées les reconnaissent.

Néanmoins les particuliers qui, même de leur aveu, en sont possesseurs, ne peuvent être immédiatement contraints à les remettre ; mais si, après avoir été cités devant le tribunal saisi pour faire cette remise, ou déduire les motifs de leur refus, ils succombent, l’arrêt ou le jugement pourra ordonner qu'ils y seront contraints par corps.

Article 457

Lorsque les témoins s’expliqueront sur une pièce du procès, ils la parapheront et la signeront ; et s'ils ne peuvent signer, le procès-verbal en fera mention.

Article 458

Si, dans le cours d'une instruction ou d'une procédure, une pièce produite est arguée de faux par l'une des parties, elle sommera l'autre de déclarer si elle entend se servir de la pièce.

Article 459

La pièce sera rejetée du procès, si la partie déclare qu'elle ne veut pas s’en servir, ou si, dans le délai de huit jours, elle ne fait aucune déclaration, et il sera passé outre à l'instruction et au jugement.

Si la partie déclare qu'elle entend se servir de la pièce, l'instruction sur le faux sera suivie incidemment devant la cour ou le tribunal saisi de l'affaire principale.

Article 460

Si la partie qui a argué de faux la pièce, soutient que celui qui l'a produite est l'auteur ou le complice du faux, ou s'il résulte de la procédure que l'auteur ou le complice du faux soit vivant, et la poursuite du crime non éteinte par la prescription, l’accusation sera suivie criminellement dans les formes ci-dessus prescrites.

Si le procès est engagé au civil, il sera sursis au jugement jusqu’à ce qu'il ait été prononcé sur le faux.

S'il s'agit de crimes, délits ou contraventions, la cour ou le tribunal saisi est tenu de décider préalablement, et après avoir entendu l'officier chargé du ministère public, s'il y a lieu ou non à surseoir.

Article 461

Le prévenu ou l'accusé pourra être requis de produire et de former un corps d'écriture ; en cas de refus ou de silence, le procès-verbal en fera mention.

Article 462

Si une cour ou un tribunal trouve dans la visite d’un procès, même civil, des indices sur un faux et sur la personne qui l'a commis, l'officier chargé du ministère public ou le président transmettra les pièces au substitut du procureur général près le juge d'instruction, soit du lieu où le délit paraîtra avoir été commis, soit du lieu où le prévenu pourra être saisi, et pourra même délivrer le mandat d'amener.

Article 463

Lorsque des actes authentiques auront été déclarés faux en tout ou en partie, la cour ou le tribunal qui aura connu du faux, ordonnera qu'ils soient rétablis, rayés ou réformés, et du tout il sera dressé procès-verbal.

Les pièces de comparaison seront renvoyées dans les dépôts d'où elles auront été tirées, ou seront remises aux personnes qui les auront communiquées, le tout dans le délai de quinzaine à compter du jour de l'arrêt où jugement, à peine d'une amende de 50 fr. contre le greffier.

Article 464

Le surplus de l'instruction sur le faux se fera comme sur les autres délits, sauf l'exception suivante.

Les présidents des cours d'assises ou spéciales, les procureurs généraux ou leurs substituts, les juges d'instruction, et les juges de paix, pourront continuer hors de leur ressort, les visites nécessaires chez les personnes soupçonnées d'avoir fabriqué, introduit, distribué de faux papiers nationaux, de faux billets de la banque de France ou des banques de département.

La présente disposition a lieu également pour le crime de fausse monnaie ou de contrefaction du sceau d'État.

CHAPITRE II - DES CONTUMACES

Article 465

Lorsqu'après un arrêt de mise en accusation, l'accusé n'aura pu être saisi, ou ne se présentera pas, dans les dix jours de la notification qui en aura été faite à son domicile ;

Ou lorsqu'après s'être présenté ou avoir été saisi, il se sera évadé ;

Le président de la cour d'assises ou celui de la cour spéciale, chacun dans les affaires de leur compétence respective, ou, en leur absence, le président du tribunal de première instance, et à défaut de l’un et de l'autre, le plus ancien juge de ce tribunal, rendra une ordonnance portant qu'il sera tenu de se représenter dans un nouveau délai de dix jours ; sinon qu'il sera déclaré rebelle à la loi, qu'il sera suspendu de l'exercice des droits de citoyen, que ses biens seront séquestrés pendant l'instruction de la contumace, que toute action en justice lui sera interdite pendant le même temps, qu'il sera procédé contre lui, et que toute personne est tenue d'indiquer le lieu où il se trouve.

Cette ordonnance fera de plus mention du crime et de l'ordonnance de prise de corps.

Article 466

Cette ordonnance sera publiée à son de trompe ou de caisse, le dimanche suivant, et affichée à la porte du domicile de l'accusé, à celle du maire, et à celle de l'auditoire de la cour d'assises ou de la cour spéciale.

Le procureur général ou son substitut adressera aussi cette ordonnance au directeur des domaines et droits d'enregistrement du domicile du contumax.

Article 467

Après un délai de dix jours, il sera procédé au jugement de la contumace.

Article 468

Autun conseil, aucun avoué, ne pourra se présenter pour défendre l'accusé contumax.

Si l'accusé est absent du territoire européen de l'Empire, ou s’il est dans l'impossibilité absolue de se rendre, ses parents ou ses amis pourront présenter son excuse et en plaider la légitimité.

Article 469

Si la cour trouve l'excuse légitime, elle ordonnera qu'il sera sursis au jugement de l'accusé et au séquestre de ses biens, pendant un temps qui sera fixé, eu égard à la nature de l'excuse et à la distance des lieux.

Article 470

Hors ce cas, il sera procédé de suite à la lecture de l'arrêt de renvoi à la cour d'assises ou à la cour spéciale, de l’acte de notification de l'ordonnance ayant pour objet la représentation du contumax, et des procès-verbaux dressés pour en constater la publication et l'affiche.

Après cette lecture, la cour, sur les conclusions du procureur général impérial ou de son substitut, prononcera sur la contumace.

Si l'instruction n’est pas conforme à la loi, la cour la déclarera nulle, et ordonnera qu’elle sera recommencée à partir du plus ancien acte illégal.

Si l'instruction est régulière, la cour prononcera sur l'accusation, et statuera sur les intérêts civils, le tout sans assistance ni intervention de jurés.

Article 471

Si le contumax est condamné, ses biens seront, à partir de l'exécution de l'arrêt, considérés et régis comme biens d'absent, et le compte du séquestre sera rendu à qui il appartiendra, après que la condamnation sera devenue irrévocable par l'expiration du délai donné pour purger la contumace.

Article 472

Extrait du jugement de condamnation sera, dans les trois jours de la prononciation, à la diligence du procureur général impérial ou de son substitut, affiché par l'exécuteur des jugements criminels, à un poteau qui sera planté au milieu de l'une des places publiques de la ville chef-lieu de l'arrondissement où le crime aura été commis.

Pareil extrait sera, dans le même délai, adressé au directeur des domaines et droits d’enregistrement du domicile du contumax.

Article 473

Le recours en cassation ne sera ouvert contre les jugements de contumace qu'au procureur général impérial et à la partie civile, en ce qui la regarde.

Article 474

En aucun cas, la contumace d'un accusé ne suspendra ni ne retardera de plein droit l'instruction, à l'égard de ses coaccusés présents.

La cour pourra ordonner, après le jugement de ceux-ci, la remise des effets déposés au greffe comme pièce de conviction, lorsqu'ils seront réclamés par des propriétaires ou ayants droit. Elle pourra aussi ne l'ordonner qu'à charge de représenter, s'il y a lieu.

Cette remise sera précédée d'un procès-verbal de description, dressé par le greffier, à peine de 100 fr. d'amende.

Article 475

Durant le séquestre, il peut être accordé des secours à la femme, aux enfants, au père ou à la mère de l'accusé, s'ils sont dans le besoin.

Ces secours seront réglés par l'autorité administrative.

Article 476

Si l'accusé se constitue prisonnier, ou s’il est arrêté avant que la peine soit éteinte par prescription, le jugement rendu par contumace et les procédures faites contre lui, depuis l'ordonnance de prise de corps ou de se représenter, seront anéantis de plein droit, et il sera procédé à son égard dans la forme ordinaire.

Si cependant la condamnation par contumace était de nature à emporter la mort civile, et si l'accusé n'a été arrêté ou ne s'est représenté qu'après les cinq ans qui ont suivi l'exécution du jugement de contumace, ce jugement, conformément à l’article 30 du Code Napoléon, conservera, pour le passé, les effets que la mort civile aurait produits dans l'intervalle écoulé depuis l'expiration des cinq ans, jusqu'au jour de la comparution de l'accusé en justice.

Article 477

Dans les cas prévus par l'article précédent, si, pour quelque cause que ce soit, des témoins ne peuvent être produits aux débats, leurs dépositions écrites et les réponses écrites des autres accusés du même délit, seront lues à l'audience ; il en sera de même de toutes les autres pièces qui seront jugées par le président être de nature à répandre la lumière sur le délit et les coupables.

Article 478

Le contumax qui, après s'être représenté, obtiendrait son renvoi de l'accusation, sera toujours condamné aux frais occasionnés par sa contumace.

CHAPITRE III - DES CRIMES COMMIS PAR DES JUGES, HORS DE LEURS FONCTIONS ET DANS L'EXERCICE DE LEURS FONCTIONS
SECTION I – DE LA POURSUITE ET INSTRUCTION CONTRE DES JUGES POUR CRIMES ET DÉLITS PAR EUX COMMIS HORS DE LEURS FONCTIONS

Article 479

Lorsqu’un juge de paix, un membre de tribunal correctionnel ou de première instance, ou un officier chargé du ministère public près l’un de ces tribunaux, seront prévenus d'avoir commis, hors de leurs fonctions, un délit emportant une peine correctionnelle, le procureur général près la cour impériale les fera citer devant cette cour, qui prononcera sans qu'il puisse y avoir appel.

Article 480

S'il s'agit d'un crime emportant peine afflictive ou infamante, le procureur général près la cour impériale et le premier président de cette cour, désigneront, le premier, le magistrat qui exercera les fonctions d'officier de police judiciaire ; le second, le magistrat qui exercera les fonctions de juge d'instruction.

Article 481

Si c'est un membre de cour impériale ou officier exerçant près d'elle le ministère public, qui soit prévenu d'avoir commis un délit ou un crime, hors de ses fonctions, l’officier qui aura reçu les dénonciations ou les plaintes, sera tenu d'en envoyer de suite des copies au grand juge ministre de la justice, sans aucun retard de l’instruction, qui sera continuée comme il est précédemment réglé, et il adressera pareillement au grand juge une copie des pièces.

Article 482

Le grand-juge transmettra les pièces à la cour de cassation, qui renverra l'affaire, s'il y a lieu, soit à un tribunal de police correctionnelle, soit à un juge d'instruction, pris l’un et l’autre hors du ressort de la cour à laquelle appartient le membre inculpé.

Sil s’agit de prononcer la mise en accusation, le renvoi sera fait à une autre cour impériale.

SECTION II – DE LA POURSUITE ET INSTRUCTION CONTRE DES JUGES ET TRIBUNAUX AUTRES QUE CEUX DÉSIGNÉS PAR L'ARTICLE 101 DU SÉNATUS-CONSULTE DU 28 FLORÉAL An 12, POUR FORFAITURES ET AUTRES CRIMES OU DÉLITS RELATIFS À LEURS FONCTIONS

Article 483

Lorsqu'un juge de paix ou de police, ou un juge faisant partie d'un tribunal de commerce, un officier de police judiciaire, un membre de tribunal correctionnel ou de première instance, ou un officier chargé du ministère public près l'un de ces juges ou tribunaux, sera prévenu d'avoir commis, dans l'exercice de ses fonctions, un délit emportant une peine correctionnelle, ce délit sera poursuivi et jugé comme il est dit à l'article 479.

Article 484

Lorsque des fonctionnaires de la qualité exprimée en l'article précédent seront prévenus d’avoir commis un crime emportant la peine de forfaiture ou autre plus grave, les fonctions ordinairement dévolues au juge d'instruction et au procureur impérial seront immédiatement remplies par le premier président et le procureur général près la cour impériale, chacun en ce qui le concerne, ou par tels autres officiers qu’ils auront respectivement et spécialement désignés à cet effet.

Jusqu'à cette délégation, et dans le cas où il existerait un corps de délit, il pourra être constaté par tout officier de police judiciaire ; et pour 1e surplus de la procédure, on suivra les dispositions générales du présent Code.

Article 485

Lorsque le crime commis dans l'exercice des fonctions et emportant la peine de forfaiture ou autre plus grave, sera imputé, soit à un tribunal entier de commerce, correctionnelle ou de première instance, soit individuellement à un ou plusieurs membres des cours impériales, et aux procureurs généraux et substituts près ces cours, il sera procédé comme il suit.

Article 486

Le crime sera dénoncé au grand-juge ministre de le justice, qui donnera, s'il y a lieu, ordre au procureur général impérial près la cour de cassation, de le poursuivre sur la dénonciation.

Le crime pourra aussi être dénoncé directement à la cour de cassation par les personnes qui se prétendront lésées, mais seulement lorsqu'elles demanderont à prendre le tribunal ou le juge à partie, ou lorsque la dénonciation sera incidente à une affaire pendante à la cour de cassation.

Article 487

Si le procureur général près la cour de cassation ne trouve pas dans les pièces à lui transmises par le grand-juge, ou produites par les parties, tous les renseignements qu’il jugera nécessaires, il sera, sur son réquisitoire, désigné par le premier président de cette cour, un de ses membres pour l’audition des témoins, et tous autres actes d'instruction qu'il peut y avoir lieu de faire dans la ville où siége la cour de cassation.

Article 488

Lorsqu il y aura des témoins à entendre ou des actes d'instruction à faire hors de la ville où siége la cour de cassation, le premier président de cette cour fera à ce sujet toutes délégations nécessaires à un juge d’instruction, même d'un département ou d'un arrondissement autres que ceux du tribunal ou juge prévenu.

Article 489

Après avoir entendu les témoins et terminé l'instruction qui lui aura été déléguée, le juge d'instruction mentionné en l'article précédent renverra les procès-verbaux et les autres actes clos et cachetés au premier président de la cour de cassation.

Article 490

Sur le vu, soit des pièces qui auront été transmises par le grand-juge, ou produites par les parties, soit des renseignements ultérieurs qu’il se sera procurés, le premier président décernera, s'il y a lieu, le mandat de dépôt.

Ce mandat désignera la raison d'arrêt dans laquelle le prévenu devra être déposé.

Article 491

Le premier président de la cour de cassation ordonnera de suite la communication de la procédure au procureur général, qui, dans les cinq jours suivants, adressera à la section des requêtes son réquisitoire contenant la dénonciation du prévenu.

Article 492

Soit que la dénonciation portée à la section des requêtes ait été ou non précédée d'un mandat de dépôt, cette section y statuera toutes affaires cessantes.

Si elle la rejette, elle ordonnera la mise en liberté du prévenu.

Si elle l’admet, elle renverra le tribunal ou le juge prévenu, devant les juges de la section civile, qui prononceront sur la mise en accusation.

Article 493

La dénonciation incidente à une affaire pendante à la cour de cassation, sera portée devant la section saisie de l’affaire ; et si elle est admise, elle sera renvoyée à la section criminelle ou de celle des requêtes de la section civile, et de la section civile à celle des requêtes.

Article 494

Lorsque, dans l'examen d'une demande en prise à partie ou de toute autre affaire, et sans qu'il y ait de dénonciation directe ni incidente, l’une des sections de la cour de cassation apercevra quelque délit de nature à faire poursuivre criminellement un tribunal ou un juge de la qualité exprimée en l’article 479, elle pourra d'office ordonner le renvoi, conformément à l'article précédent.

Article 495

Lorsque l'examen d'une affaire portée devant les sections réunies donnera lieu au renvoi d'office exprimé dans l’article qui précède, ce renvoi sera fait à la section civile.

Article 496

Dans tous les cas, la section à laquelle sera fait le renvoi sur dénonciation ou d'office, prononcera sur la mise en accusation.

Son président remplira les fonctions que la loi attribue aux juges d'instruction.

Article 497

Ce président pourra déléguer l'audition des témoins et l'interrogatoire des prévenus à un autre juge d'instruction pris même hors de l'arrondissement et du département où se trouvera le prévenu.

Article 498

Le mandat d’arrêt que délivrera le président désignera la maison d’arrêt dans laquelle le prévenu devra être conduit.

Article 499

La section de la cour de cassation, saisie de l’affaire, délibérera sur la mise en accusation, en séance non publique ; les juges devront être en nombre impair.

Si la majorité des juges trouve que la mise en accusation ne doit pas avoir lieu, la dénonciation sera rejetée par un arrêt, et le procureur général fera mettre le prévenu en liberté.

Article 500

Si la majorité des juges est pour la mise en accusation, cette mise en accusation sera prononcée par arrêt qui portera en même temps ordonnance de prise de corps.

En exécution de cet arrêt, l'accusé sera transféré dans la maison de justice de la cour d'assises qui sera désignée par celle de cassation, dans l'arrêt même.

Article 501

L'instruction ainsi faite devant la cour de cassation, ne pourra être attaquée quant à la forme.

Elle sera commune aux complices du tribunal ou du juge poursuivi, lors même qu’ils n’exerceraient point de fonctions judiciaires.

Article 502

Seront au surplus observées les autres dispositions du présent Code qui ne sont pas contraires aux formes de procéder prescrites par le présent chapitre.

Article 503

Lorsqu’il se trouvera, dans la section criminelle saisie du recours en cassation dirigé contre l’arrêt de la cour d'assises à laquelle l’affaire aura été renvoyée, des juges qui auront concouru à la mise en accusation dans l'une des autres sections, ils s'abstiendront.

Et néanmoins, dans le cas d'un second recours qui donnera lieu à la réunion des sections, tous les juges en pourront connaître.

CHAPITRE IV - DES DÉLITS CONTRAIRES AU RESPECT DÛ AUX AUTORITÉS CONSTITUÉES

Article 504

Lorsqu'à l'audience ou en tout autre lieu où se fait publiquement une instruction judiciaire, l'un ou plusieurs des assistant donneront des signes publics, soit d'approbation, soit d'improbation, ou exciteront du tumulte, de quelque manière que ce soit, le président ou le juge les fera expulser ; s’ils résistent à ses ordres ou s’ils rentrent, le président ou le juge ordonnera de les arrêter et conduire dans la maison d'arrêt : il sera fait mention de cet ordre dans le procès-verbal ; et sur l'exhibition qui en sera faite au gardien de la maison d'arrêt, les perturbateurs y seront reçus et retenus pendant vingt-quatre heures.

Article 505

Lorsque le tumulte aura été accompagné d'injures ou voies de fait donnant lieu à l'application ultérieure des peines correctionnelles ou de police, ces peines pourront être, séance tenante et immédiatement après que les faits auront été constatés, prononcées, savoir :

Celles de simple police, sans appel, de quelque tribunal ou juges qu'elles émanent.

Et celles de police correctionnelle, à la charge de l’appel, si la condamnation a été portée par un tribunal sujet à appel, ou par un juge seul.

Article 506

S’il s'agit d’un crime commis à l'audience d’un juge seul, ou d'un tribunal sujet à appel, le juge ou tribunal, après avoir fait arrêter le délinquant et dressé procès-verbal des faits, enverra les pièces et le prévenu devant les juges compétents.

Article 507

à l’égard des voies de fait qui auraient dégénérées en crimes, ou de tous autres crimes flagrants et commis à l'audience de la cour de cassation, d'une cour impériale ou d'une cour d'assises ou spéciale, la cour procédera au jugement de suite et sans désemparer.

Elle entendra les témoins, le délinquant et le conseil qu'il aura choisi, ou qui lui aura été désigné par le président ; et après avoir constaté les faits et ouï le procureur général ou son substitut, le tout publiquement, elle appliquera la peine par arrêt qui sera motivé.

Article 508

Dans le cas de l'article précédent, si les juges présents à l'audience sont au nombre de cinq ou de six, il faudra quatre voix pour opérer la condamnation.

S'ils sont au nombre de sept, il faudra cinq voix pour condamner.

Au nombre de huit et au delà, l'arrêt de condamnation sera prononcé aux trois quarts des voix, de manière toutefois que, dans le calcul de ces trois quarts, les fractions, s'il s'en trouve, soient appliquées en faveur de l'absolution.

Article 509

Les préfets, sous-préfets, maires et adjoints, officiers de police administrative ou judiciaire, lorsqu'ils rempliront publiquement quelques actes de leur ministère, exerceront aussi les fonctions de police réglées par l'article 504 ; et, après avoir fait saisir les perturbateurs, ils dresseront procès-verbal du délit, et enverront ce procès verbal, s'il y a lieu, ainsi que les prévenus, devant les juges compétents.

CHAPITRE V - De la manière dont seront reçues, en matière criminelle, correctionnelle et de police, les dépositions des princes et de certains fonctionnaires de L'État

Article 510

Les princes ou princesses du sang impérial, les grands dignitaires de l'Empire et le grand-juge ministre de la justice, ne pourront jamais être cités comme témoins, même pour les débats qui ont lieu en présence du jury, si ce n'est dans le cas où l'Empereur, sur la demande d'une partie et le rapport du grand juge, aurait, par un décret spécial, autorisé cette comparution.

Article 511

Les dépositions des personnes de cette qualité seront, sauf l'exception ci dessus prévue, rédigées par écrit et reçues par le premier président de la cour impériale, si les personnes dénommées en l'article précédent résident ou se trouvent au chef-lieu d'une cour impériale, sinon par le président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel elles auraient leur domicile ou se trouveraient accidentellement.

Il sera, à cet effet, adressé par la cour ou le juge d'instruction saisi de l'affaire, au président ci-dessus nommé, un état des faits, demandes et questions sur lesquels le témoignage est requis.

Ce président se transportera aux demeures des personnes dont il s'agit, pour recevoir leurs dépositions.

Article 512

Les dépositions ainsi reçues seront immédiatement remises au greffe, ou envoyées closes et cachetées à celui de la cour ou du juge requérant, et communiquées sans délai à l'officier chargé du ministère public.

Dans l'examen devant le jury, elles seront lues publiquement aux jurés et soumises aux débats, sous peine de nullité.

Article 513

Dans le cas où' l'Empereur aurait porté un décret ordonnant ou autorisant la comparution de quelques-unes des personnes ci-dessus désignées, devant le jury, le même décret impérial désignera le cérémonial à observer à leur égard.

Article 514

A l’égard des ministres, autres que le grand-juge, grands-officiers de l'Empire, conseillers d'état chargés d'une partie dans l'administration publique, généraux en chef, actuellement en service, ambassadeurs ou autres agents de l'Empereur accrédités près les cours étrangères, il sera procédé comme il suit :

Si leur déposition est requise devant la cour d'assises ou devant le juge d'instruction du lieu de leur résidence, ou de celui où ils se trouveraient accidentellement, ils devront la fournir dans les formes ordinaires.

S'il s'agit d'une déposition relative à une affaire poursuivie hors du lieu où ils résident pour l’exercice de leurs fonctions, et de celui où ils se trouveraient accidentellement ; et si cette déposition n'est pas requise devant le jury, le président ou juge d'instruction saisi de l'affaire adressera à celui du lieu où résident ces fonctionnaires, à raison de leurs fonctions, un état des faits, demandes et questions sur lesquels leur témoignage est requis.

S'il s'agit du témoignage d'un agent résidant auprès d'un gouvernement étranger, cet état sera adressé au grand-juge ministre de la justice, qui en fera le renvoi sur les lieux, et désignera la personne qui recevra la déposition.

Article 515

Le président ou juge d'instruction auquel sera adressé l'état mentionné en l'article précédent, fera assigner le fonctionnaire devant lui, et recevra sa déposition par écrit.

Article 516

Cette déposition sera envoyée close et cachetée au greffe de la cour ou du juge requérant, communiquée et lue comme il est dit en l'article 512, et sous les mêmes peines.

Article 517

Si les fonctionnaires de la qualité exprimée dans l'article 513, sont cités à comparaître comme témoins devant un jury assemblé hors du lieu où ils résident pour l'exercice de leurs fonctions, ou de celui où ils se trouveraient accidentellement, ils pourront en être dispensés par un décret de l'Empereur.

Dans ce cas, ils déposeront par écrit, et l'on observera les dispositions prescrites par les articles 514 et 515.

CHAPITRE VI - De la reconnaissance de l'identité des individus condamnés, évadés et repris

Article 518

La reconnaissance de l'identité d'un individu condamné, évadé et repris, sera faite par la cour qui aura prononcé sa condamnation.

Il en sera de même de l'identité d'un individu condamné à la déportation ou au bannissement, qui aura enfreint son ban et sera repris ; et la cour en prononçant l'identité, lui appliquera de plus la peine attachée par la loi à son infraction.

Article 519

Tous ces jugements seront rendus sans assistance de jurés, après que la cour aura entendu les témoins appelés tant à la requête du procureur général qu'à celle de l'individu repris, si ce dernier en a fait citer.

L'audience sera publique, et l'individu repris sera présent, à. peine de nullité.

Article 520

Le procureur général impérial et l'individu repris pourront se pourvoir en cassation, dans la forme et dans le délai déterminé par le présent Code, contre l'arrêt rendu sur la poursuite et reconnaissance d'identité.

CHAPITRE VII – Manière de procéder en cas de destruction ou d'enlèvement des pièces ou du jugement d'une affaire

Article 521

Lorsque, par l'effet d'un incendie, d'une inondation ou de toute autre causse extraordinaire, des minutes d'arrêts rendus en matières criminelle ou correctionnelle, et non encore exécutés, ou des procédures encore indécises, auront été détruites, enlevées, ou se trouveront égarées, et qu'il n’aura pas été possible de les rétablir, il sera procédé ainsi qu'il suit.

Article 522

S'il existe une expédition ou copie authentique de l'arrêt, elle sera considérée comme minute, et en conséquence remise dans le dépôt destiné à la conservation des arrêts.

A cet effet, tout officier public ou tout individu dépositaire d'une expédition ou d'une copie authentique de l'arrêt, est tenu, sous peine d'y être contraint par corps, de la remettre au greffe de la cour qui l’a rendu, sur l'ordre qui en sera donné par le président de cette cour.

Cet ordre lui servira de décharge envers ceux qui auront intérêt à la pièce.

Le dépositaire de l'expédition ou copie authentique de la minute détruite, enlevée ou égarée, aura la liberté, en la remettant dans le dépôt public, de s'en faire délivrer une expédition sans frais.

Article 523

Lorsqu'il n'existera plus, en matière criminelle, d'expédition ni de copie authentique de l'arrêt, si la déclaration du jury existe encore en minute ou en copie authentique, on procédera d'après cette déclaration, à un nouveau jugement.

Article 524

Lorsque la déclaration du jury ne pourra plus être représentée, ou lorsque l'affaire aura été jugée sans jurés, et qu'il n’en existera aucun acte par écrit, l'instruction sera recommencée à partir du point où les pièces se trouveront manquer, tant en minute qu’en expédition ou copie authentique.

TITRE V - DES RÈGLEMENTS DE JUGES
ET DES RENVOIS D'UN TRIBUNAL À UN AUTRE

CHAPITRE I - DES RÈGLEMENTS DE JUGES

Article 525

Toutes demandes en règlement de juges seront instruites et jugées sommairement et sur simples mémoires.

Article 526

Il y aura lieu à être réglé de juges par la cour de cassation, en matière criminelle, correctionnelle ou de police, lorsque des cours, tribunaux ou juges d'instruction ne ressortissant point les uns aux autres, seront saisis de la connaissance du même délit ou de délits connexes, ou de la même contravention.

Article 527

Il y aura lieu également à être réglé de juges par la cour de cassation, lorsqu'un tribunal militaire ou maritime, ou un officier de police militaire, ou tout autre tribunal d'exception, d'une part, une cour impériale ou d'assises, ou spéciale, un tribunal jugeant correctionnellement, un tribunal de police ou un juge d'instruction, d'autre part, seront saisis de la connaissance du même délit, ou de délits connexes, ou de la même contravention.

Article 528

Sur le vu de la requête et des pièces, la cour de cassation, section criminelle, ordonnera que le tout soit communiqué aux parties, ou statuera définitivement, sauf l'opposition.

Article 529

Dans le cas où la communication serait ordonnée sur le pourvoi en conflit du prévenu, de l'accusé ou de la partie civile, l'arrêt enjoindra à l'un et à l'autre des officiers chargés du ministère public près les autorités judiciaires concurremment saisies, de transmettre les pièces du procès et leur avis motivé sur le conflit.

Article 530

Lorsque la communication sera ordonnée sur le pourvoi de l'un de ces officiers, l'arrêt ordonnera à l'autre de transmettre les pièces et son avis motivé.

Article 531

L'arrêt de soit communiqué fera mention sommaire des actes, d’où naîtra le conflit, et fixera, selon la distance des lieux, le délai dans lequel les pièces et les avis motivés seront apportés au greffe.

La notification qui sera faite de cet arrêt aux parties, emportera de plein droit sursis au jugement du procès ; et en matière criminelle, à la mise en accusation, ou, si elle a déjà été prononcée, à la formation du jury dans les cours d'assises, et à l'examen dans les cours spéciales, mais non aux actes et aux procédures conservatoires ou d'instruction.

Le prévenu ou l'accusé, et la partie civile, pourront présenter leurs moyens sur le conflit, dans la forme réglée par le chapitre II du titre III du présent livre pour le recours en cassation.

Article 532

Lorsque, sur la simple requête, il sera intervenu arrêt qui aura statué sur la demande en règlement de juges, cet arrêt sera, à la diligence du procureur général près la cour de cassation, et par l'intermédiaire du grand-juge ministre de la justice, notifié à l'officier chargé du ministère public près la cour, le tribunal ou le magistrat dessaisi.

Il sera notifié de même au prévenu ou accusé, et à la partie civile, s'il y'en a une.

Article 533

Le prévenu ou l'accusé et la partie civile pourront former opposition à l'arrêt dans le délai de trois jours, et dans les formes prescrites par le chapitre II du titre III du présent livre pour le recours en cassation.

Article 534

L'opposition dont il est parlé au précédent article, entraînera de plein droit sursis au jugement du procès, comme il est dit en l'article 531.

Article 535

Le prévenu qui ne sera pas en arrestation, l'accusé qui ne sera pas retenu dans la maison du justice, et la partie civile, ne seront point admis au bénéfice de l'opposition, s'ils n'ont antérieurement ou dans les délais fixés par l’article 531, élu domicile dans le lieu où siège l'une des autorités judiciaires en conflit.

A défaut de cette élection, ils ne pourront non plus exciper de ce qu'il ne leur aurait été fourni aucune communication, dont le poursuivant sera dispensé à leur égard.

Article 536

La cour de cassation, en jugeant le conflit, statuera sur tous les actes qui pourraient avoir été faits par la cour, le tribunal ou le magistrat qu'elle dessaisira.

Article 537

Les arrêts rendus sur des conflits ne pourront pas être attaqués par la voie de l'opposition, lorsqu'ils auront été précédés d'un arrêt de soit communiqué dûment exécuté.

Article 538

L'arrêt rendu, ou après un soit communiqué, ou sur une opposition, sera notifié aux mêmes parties et dans la même forme que l'arrêt qui l'aura précédé.

Article 539

Lorsque le prévenu ou l'accusé, l'officier chargé du ministère public, ou la partie civile, aura excipé de l'incompétence d'un tribunal de première instance ou d'un juge d'instruction, ou proposé un déclinatoire, soit que l'exception ait été admise ou rejetée, nul ne pourra recourir à la cour de cassation pour être réglé de juges, sauf à se pourvoir devant la cour impériale contre la décision portée par le tribunal de première instance ou le juge d'instruction, et à se pourvoir en cassation, s'il y a lieu, contre l’arrêt rendu par la cour impériale.

Article 540

Lorsque deux juges d'instruction ou deux tribunaux de première instance, établis dans le ressort de la même cour impériale, seront saisis de la connaissance du même délit ou de délits connexes, les parties seront réglées de juges par cette cour, suivant la forme prescrite au présent chapitre, sauf le recours, s'il y a lieu, à la cour de cassation.

Lorsque deux tribunaux de police simple seront saisis de la connaissance de la même contravention ou de contraventions connexes, les parties seront réglées de juges par le tribunal auquel ils ressortissent l'un et l'autre ; et s’ils ressortissent à différents tribunaux, elles seront réglées par la cour impériale, sauf le recours, s'il y a lieu, à la cour de cassation.

Article 541

La partie civile, le prévenu ou l'accusé qui succombera dans la demande en règlement de juges qu'il aura introduite, pourra être condamné à une amende qui toutefois n’excédera point la somme de 300 fr., dont moitié sera pour la partie.

CHAPITRE - DES RENVOIS D'UN TRIBUNAL À UN AUTRE

Article 542

En matière criminelle, correctionnelle et de police, la cour de cassation peut, sur la réquisition du procureur général près cette cour, renvoyer la connaissance d'une affaire d'une cour impériale ou d'assises ou spéciale, à une autre, d'un tribunal correctionnel ou de police à un autre tribunal de même qualité, d'un juge d'instruction à un autre juge d'instruction, pour cause de sûreté publique ou de suspicion légitime.

Ce renvoi peut aussi être ordonné sur la réquisition des parties intéressées, mais seulement pour cause de suspicion légitime.

Article 543

La partie intéressée qui aura procédé volontairement devant une cour, un tribunal ou un juge d'instruction, ne sera reçue à demander le renvoi qu’à raison des circonstances survenues depuis, lorsqu'elles seront de nature à faire naître une suspicion légitime.

Article 544

Les officiers chargés du ministère public pourront se pourvoir immédiatement devant la cour de cassation, pour demander le renvoi pour cause de suspicion légitime ; mais, lorsqu'il s'agira d'une demande en renvoi pour cause de sûreté publique, ils seront tenus d'adresser leurs réclamations, leurs motifs et les pièces à l'appui au grand-juge ministre de la justice, qui les transmettra, s'il y a lieu, à la cour de cassation.

Article 545

Sur le vu de la requête et des pièces, la cour de cassation, section criminelle, statuera définitivement, sauf l’opposition, ou ordonnera que le tout soit communiqué.

Article 546

Lorsque le renvoi sera demandé par le prévenu, l'accusé ou la partie civile, et que la cour de cassation ne jugera à propos, ni d'accueillir, ni de rejeter cette demande sur-le-champ, l'arrêt en ordonnera la communication à l'officier chargé du ministère public près la cour, le tribunal ou le juge d'instruction saisi de la connaissance du délit, et enjoindra à cet officier de transmettre les pièces avec son avis motivé sur la demande en renvoi ; l'arrêt ordonnera de plus, s'il y a lieu, que la communication sera faite à l'autre partie.

Article 547

Lorsque la demande en renvoi sera formée par l'officier chargé du ministère public, et que la cour de cassation n'y statuera point définitivement, elle ordonnera, s’il y a lieu, que la communication sera faite aux parties, ou prononcera telle autre disposition préparatoire qu'elle jugera nécessaire.

Article 548

Tout arrêt qui, sur le vu de la requête et des pièces aura définitivement statué sur une demande en renvoi, sera, à la diligence du procureur général près la cour de cassation, et par l'intermédiaire du grand-juge ministre de la justice, notifié, soit à l'officier chargé du ministère public près la cour, le tribunal ou le juge d’instruction dessaisi, soit à la partie civile, au prévenu ou à l'accusé en personne, ou au domicile élu.

Article 549

L'opposition ne sera pas reçue, si elle n'est pas formée d'après les règles et dans le délai fixé au chapitre 1 er du titre V du présent livre.

Article 550

L'opposition reçue emporte de plein droit sursis au jugement du procès, comme il est dit en l'article 531.

Article 551

Les articles 525, 530, 531, 534, 535, 536, 537, 538 et 541 seront communs aux demandes en renvoi d'un tribunal à un autre.

Article 552

L'arrêt qui aura rejeté une demande en renvoi, n'exclura pas une nouvelle demande en renvoi, fondée sur des faits survenus depuis.

TITRE VI – DES COURS SPÉCIALES

CHAPITRE UNIQUE – DE LA COMPÉTENCE, DE LA COMPOSITION DES COURS SPÉCIALES, ET DE LA PROCÉDURE
SECTION I – COMPÉTENCE DE LA COUR SPÉCIALE

Article 553

Les crimes commis par des vagabonds, gens sans aveu, et par des condamnés à des peines afflictives ou infamantes seront jugés sans jurés par les juges ci-après désignés et dans les formes ci-après prescrites.

Article 554

Le crime de rébellion armée à la force armée, celui de contrebande armée, le crime de fausse monnaie, et les assassinats, s'ils ont été préparés par des attroupements armés, seront jugés par les mêmes juges et dans les mêmes formes.

Article 555

Si, parmi les prévenus des crimes spécifiés en l’article 553, et qui sont, par la simple qualité des personnes, attribuées à la cour spéciale, il s'en trouve qui ne soient point par ladite qualité justiciables de cette cour, le procès et les parties seront renvoyés devant les cours d'assises.

PARAGRAPHE I - COMPOSITION DE LA COUR SPÉCIALE

Article 556

La cour spéciale ne pourra juger qu'au nombre de huit juges ; elle sera composée :

1° Du président de la cour d'assises, lorsqu'il sera sur les lieux ; en son absence, ou en cas d'empêchement, d’un des membres de la cour impériale qui aurait été délégué à la cour d'assises ; et à leur défaut, du président du tribunal de première instance dans le ressort duquel la cour tiendra ses séances ;

2° Des quatre juges formant, aux termes des articles 253 et 254, avec le président, la cour d'assises ;

3° De trois militaires ayant au moins le grade de capitaine.

Une loi particulière règlera l'organisation de la cour spéciale du département de la Seine.

Article 557

Dans le département où siège la cour impériale, le procureur général, ou l'un de ses substituts, remplira, auprès de la cour spéciale, les fonctions du ministère public.

Le greffier de la cour, ou un de ses commis assermentés, y exercera ses fonctions.

Article 558

Dans les autres départements, les fonctions du ministère public seront exercées par le procureur impérial criminel ;

Et les fonctions de greffier, seront remplies par le greffier du tribunal de première instance, ou par un de ses commis assermenté.

Article 559

Les trois militaires seront âgés d’au moins trente ans, et nommés chaque année par S. M. Ils auront trois suppléants de même grade, nommés également par S. M.

PARAGRAPHE II - ÉPOQUES ET LIEUX DES SESSIONS DE LA COUR SPÉCIALE

Article 560

La cour spéciale sera convoquée toutes les fois que l'instruction d'une affaire de sa compétence sera complétée.

Article 561

Le jour et le lieu où la session devra s’ouvrir, seront fixés par la cour impériale.

La session ne sera terminée qu'après que toutes les affaires de sa compétence, qui étaient en état lors de son ouverture, y auront été portées.

Article 562

Les dispositions contenues aux articles. 254, 255, 256, 257, 258, 261 264 et 265 relatifs aux cours d'assises, reçoivent leur application pour les cours spéciales.

PARAGRAPHE III - FONCTIONS DU PRÉSIDENT

Article 563

Le président est chargé d’entendre l’accusé lors de son arrivée dans la maison de justice.

Il pourra déléguer ses fonctions à l’un des juges.

Il dirige l'instruction et les débats.

Il détermine l'ordre entre ceux qui demandent à parler.

Il a la police de l’audience.

Article 564

Les dispositions contenues aux articles 268, 269 et 270, relatives aux autres attributions du président de la cour d'assises, sont communes au président de la cour spéciale.

PARAGRAPHE IV - FONCTIONS DU PROCUREUR GÉNÉRAL IMPÉRIAL, ET DU PROCUREUR IMPÉRIAL CRIMINEL

Article 565

Le procureur général impérial et son substitut le procureur impérial criminel exercent respectivement, dans les cours spéciales, les fonctions qui leur sont attribuées pour la poursuite, l’instruction, le jugement, dans les affaires de la compétence des cours d'assises, et qui sont réglées par les articles 271 272, 273, 274, 275, 276, 277, par la première disposition de l'article 278, par l'article 279 et suivants, jusque et compris l'article 290.

SECTION II - INSTRUCTION ET PROCÉDURE ANTÉRIEURE À L'OUVERTURE DES DÉBATS

Article 566

La poursuite des crimes qui sont de la compétence de la cour spéciale, sera faite suivant les formes établies pour la poursuite des crimes dont le jugement est de la compétence des tribunaux ordinaires.

Article 567

L’arrêt de la cour impériale qui renvoie à la cour spéciale, et l'acte d'accusation, seront, dans les trois jours, signifiés à l'accusé.

Article 568

Le procureur général impérial adressera, dans le même délai, expédition de l'arrêt au grand-juge ministre de la justice pour être transmise à la cour de cassation.

Article 569

La section criminelle de cette cour prendra connaissance de tous les arrêts de renvoi aux cours spéciales qui lui auront été déférés, et y statuera, toutes affaires cessantes.

Article 570.

La cour de cassation, en prononçant sur la compétence, prononcera en même temps et par le même arrêt sur les nullités qui, d'après l’article 299, pourraient se trouver dans l’arrêt de renvoi.

Article 571

Aussitôt que l'accusation aura été prononcée, et sans attendre l'arrêt de la cour de cassation, l'instruction sera continuée sans délai jusqu’à l'ouverture des débats exclusivement, et dans les formes ci-après.

Article 572

Les dispositions contenues aux articles 291, 292, 293, 294, 295, au dernier paragraphe de l’article 276, et aux articles 302, 303, 304, 305, 307 et 308, relatifs à l'instruction des procès de la compétence des cours d'assises, sont applicables à l'instruction des procès de la compétence des cours spéciales.

SECTION III – De l'examen

Article 573

Dans, les trois jours de la réception de l'arrêt de la cour de cassation, le ministère public près la cour impériale fera ses diligences pour la convocation la plus prompte de la cour spéciale.

Article 574

Les dispositions contenues aux articles 310, 311, 313, 314, 315, 316, 317, 318, 319, 320, 321, 322, 323, 324, 325, 326 et 327, relatifs à l'examen et aux débats devant la cour d'assises, seront observées dans l'examen et les débats devant la cour spéciale.

Chaque témoin, après sa déposition, restera dans l'auditoire, si le président n'en a ordonné autrement, jusqu'à ce que la cour se soit retirée en la chambre du conseil pour y délibérer le jugement.

Article 575

Pendant l'examen, le ministère public et les juges pourront prendre note de ce qui leur paraîtra important, soit dans les dépositions des témoins, soit dans la défense de l’accusé, pourvu que la discussion n’en soit pas interrompue.

Article 576

Les dispositions contenues aux articles 329, 330 331, 332, 333, 334 et 335, seront observées dans l'examen devant la cour spéciale.

Le ministère public donnera des conclusions motivées, et requerra, s’il y a lieu, l’application de la peine.

Article 577

Le président fera retirer l'accusé de l’auditoire.

Article 578

L'examen et les débats, une fois entamés, devront être continués sans interruption. Le président ne pourra les suspendre que pendant les intervalles nécessaires pour le repos des juges, des témoins et des accusés.

Article 579

Les dispositions contenues aux articles 354, 355 et 356 seront exécutées.

SECTION IV – Du jugement

Article 580

La cour se retirera en la chambre du conseil, pour y délibérer.

Article 581

Le président posera les questions, et recueillera les voix.

Les trois juges militaires opineront les premiers, en commençant par le plus jeune.

Article 582

Le jugement de la cour se formera à la majorité.

Article 583

En cas d’égalité de voix, l’avis favorable à l'accusé prévaudra.

Article 584

L'arrêt qui acquittera l’accusé, statuera sur les dommages-intérêts respectivement prétendus, après que les parties auront proposé leurs fins de non-recevoir ou leurs défenses, et que le procureur général aura été entendu.

La cour pourra néanmoins, si elle le juge convenable, commettre l’un des juges pour entendre les parties, prendre connaissance des pièces, et faire son rapport à l'audience, où les parties pourront encore présenter leurs observations, et où le ministère public sera de nouveau entendu.

Article 585

Les demandes en dommages intérêts, formées soit par l'accusé contre ses dénonciateurs ou la partie civile, soit par la partie civile contre l'accusé ou le condamné, seront portées à la cour spéciale.

La partie civile est tenue de former sa demande en dommages-intérêts avant le jugement ; plus tard, elle sera non recevable.

Il en est de même de l'accusé, s’il a connu son dénonciateur.

Dans le cas où l'accusé n'aurait connu son dénonciateur que depuis le jugement, mais avant la fin de la session, il sera tenu, sous peine de déchéance, de porter sa demande à la cour spéciale. S’il ne l’a connu qu’après la clôture de la session, sa demande sera portée au tribunal civil.

A l’égard des tiers qui n’auraient pas été parties au procès, ils s'adresseront au tribunal civil.

Article 586

Les articles 360 et 361 recevront leur exécution.

Article 587

Si la cour déclare l'accusé convaincu du crime porté en l'accusation, son arrêt prononcera la peine établie par la loi, et statuera en même temps sur les dommages-intérêts prétendus par la partie civile.

Article 588

La cour pourra, dans les cas prévus par la loi, déclarer l'accusé excusable.

Article 589

Si, par le résultat des débats le fait dont l'accusé est convaincu était dépouillé des circonstances qui le rendaient justiciable de la cour spéciale, ou n'était pas de nature à entraîner peine afflictive ou infamante, au premier cas, la cour renverra, par un arrêt motivé, l'accusé et le procès devant la cour d'assises, qui prononcera, quel que soit ensuite le résultat des débats ; au deuxième cas, la cour pourra appliquer, s'il y a lieu, les peines correctionnelles ou de police encourues par l'accusé.

Article 590

L'article 367 sera exécuté.

Article 591

L'arrêt sera prononcé à haute voix par le président, en présence du public et de l'accusé.

Article 592

L'arrêt contiendra, sous les peines prononcées par l'article 369, le texte de la loi sur lequel il est fondé ; ce texte sera lu à l'accusé.

Article 593

La minute de l'arrêt sera signée par les juges qui l'auront rendu, à peine de 100 fr. d'amende contre le greffier, et de prise à partie tant contre le greffier que contre les juges. Elle sera signée dans les vingt-quatre heures de la prononciation de l'arrêt.

Article 594

Après avoir prononcé l'arrêt le président pourra, selon les circonstances, exhorter l'accusé à la fermeté, à la résignation ou à réformer sa conduite.

Article 595

La cour, après la prononciation de l'arrêt, pourra, pour des motifs graves, recommander l'accusé à la commisération de l’Empereur.

Cette recommandation ne sera point insérée dans l'arrêt, mais dans un procès-verbal séparé, secret, motivé, dressé en la chambre du conseil, le ministère public entendu, et signé comme la minute de l’arrêt de condamnation.

Expédition dudit procès-verbal, ensemble de l’arrêt de condamnation sera adressé de suite par le procureur général impérial au grand-juge ministre de la justice.

Article 596

Les dispositions contenues en l'article 372 seront applicables à la cour spéciale.

Article 597

L’arrêt ne pourra être attaqué par voie de cassation.

SECTION V – DE L’EXÉCUTION DE L’ARRÊT

Article 598

L’arrêt sera exécuté dans les vingt-quatre heures, à moins que le tribunal n’eût usé de la faculté qui lui est accordée par l’article 595.

Article 599

Les articles 376, 377, 378, 379 et 380 seront exécutés.

TITRE VII - DE QUELQUES OBJETS D'INTÉRÊT PUBLIC
ET DE SÛRETÉ GÉNÉRALE

CHAPITRE I - DU DÉPÔT GÉNÉRAL DE LA NOTICE DES JUGEMENTS

Article 600

Les greffiers des tribunaux correctionnels et des cours d'assises et spéciales, seront tenus de consigner, par ordre alphabétique, sur un registre particulier, les noms, prénoms, professions, âge et résidence de tous les individus condamnés à un emprisonnement correctionnel ou à une plus forte peine : ce registre contiendra une notice sommaire de chaque affaire et de la condamnation, à peine de 50 fr. d'amende pour chaque omission.

Article 601

Tous les trois mois, les greffiers enverront, sous peine de 100 fr. d'amende, copie de ces registres au grand juge ministre de la justice et au ministre de la police générale.

Article 602

Ces deux ministres feront tenir, dans la même forme, un registre général composé de ces diverses copies.

CHAPITRE II DES PRISONS, MAISONS D'ARRÊT ET DE JUSTICE

Article 603

Indépendamment des prisons établies pour peines, il y aura dans chaque arrondissement, près du tribunal de première instance, une maison d’arrêt pour y retenir les prévenus ; et près de chaque cour d'assises une maison de justice pour y retenir ceux contre lesquels il aura été rendu une ordonnance de prise de corps.

Article 604

Les maisons d’arrêt et de justice seront entièrement distinctes des prisons établies pour peines.

Article 605

Les préfets veilleront à ce que ces différentes maisons soient non seulement sûres, mais propres, et telles que la santé des prisonniers ne puisse être aucunement altérée.

Article 606

Les gardiens de ces maisons seront nommés par les préfets.

Article 607

Les gardiens des maisons d’arrêt, des maisons de justice et des prisons, seront tenus d'avoir un registre.

Ce registre sera signé et paraphé à toutes les pages, par le juge d'instruction, pour les maisons d’arrêt ; par le président de la cour d'assises, ou, en son absence, par le président du tribunal de première instance, pour les maisons de justice ; et par le préfet, pour les prisons pour peines.

Article 608

Tout exécuteur de mandat d'arrêt, d’ordonnance de prise de corps, d'arrêt ou de jugement de condamnation, est tenu, avant de remettre au gardien la personne qu'il conduira, de faire inscrire sur le registre l'acte dont il sera porteur ; l'acte de remise sera écrit devant lui.

Le tout sera signé tant par lui que par le gardien.

Le gardien lui en remettra une copie signée de lui, pour sa décharge.

Article 609

Nul gardien ne pourra, à peine d’être poursuivi et puni comme coupable de détention arbitraire, recevoir ni retenir aucune personne qu’en vertu, soit d'un mandat de dépôt, soit d’un mandat d'arrêt décerné selon les formes prescrites par la loi, soit d'un arrêt de renvoi devant une cour d'assises ou une cour spéciale, d'un décret d'accusation ou d'un arrêt ou jugement de condamnation à peine afflictive ou à un emprisonnement, et sans que la transcription en ait été faite sur son registre.

Article 610

Le registre ci-dessus mentionné contiendra également, en marge de l'acte de remise, la date de la sortie du prisonnier, ainsi que l'ordonnance, l'arrêt ou le jugement en vertu duquel elle aura lieu.

Article 611

Le juge d'instruction est tenu de visiter, au moins une fois par mois, les personnes retenues dans la maison d'arrêt de l'arrondissement.

Une fois au moins dans le cours de chaque session de la cour d'assise, le président de cette cour est tenu de visiter les personnes retenues dans la maison de justice.

Le préfet est tenu de visiter, au moins une fois par an, toutes les maisons de justice et prisons, et tous les prisonniers du département.

Article 612

Indépendamment des visites ordonnées par l’article précédent, le maire de chaque commune où il y aura soit une maison d'arrêt, soit une maison de justice, soit une prison, et, dans les communes où il y aura plusieurs maires, le préfet de police ou le commissaire général de police est tenu de faire, au moins une fois par mois, la visite de ces maisons.

Article 613

Le maire, le préfet de police ou le commissaire général de police veillera à ce que la nourriture des prisonniers soit suffisante et saine : la police de ces maisons lui appartiendra.

Le juge d’instruction et le président des assises pourront néanmoins donner respectivement tous les ordres qui devront être exécutés dans les maisons d'arrêt et de justice, et qu'ils croiront nécessaires, soit pour l'instruction, soit pour le jugement.

Article 614

Si quelque prisonnier use de menaces, injures ou violences, soit à l'égard du gardien ou de ses préposés, soit à l'égard des autres prisonniers, il sera, sur les ordres de qui il appartiendra, resserré plus étroitement, enfermé seul, même mis au fers, en cas de fureur et de violence grave, sans préjudice des poursuites auxquelles il pourrait avoir donné lieu.

CHAPITRE III – Des moyens d’assurer la liberté individuelle contre les détentions illégales, ou d'autres actes arbitraires

Article 615

En exécution des articles 77, 78, 79, 80, 81 et 82 de l'acte des constitutions de l'Empire, du 22 frimaire an 8 [voir ci-dessous note 1], quiconque aura connaissance qu'un individu est détenu dans un lieu qui n'a pas été destiné à servir de maison d'arrêt, de justice ou de prison, est tenu d'en donner avis au juge de paix, au procureur impérial ou à son substitut, ou au juge d'instruction, ou au procureur général près la cour impériale.

Article 616

Tout juge de paix, tout officier chargé du ministère public, tout juge d'instruction est tenu d'office, ou sur l'avis qu'il en aura reçu, sous peine d'être poursuivi comme complice de détention arbitraire, de s'y transporter aussitôt, et de faire mettre en liberté la personne détenue, ou, s'il est allégué quelque cause légale de détention, de la faire conduire sur-le-champ devant le magistrat compétent.

Il dressera du tout son procès-verbal.

Article 617

Il rendra, au besoin, une ordonnance dans la forme prescrite par l'article 95 du présent code.

En cas de résistance, il pourra se faire assister de la force nécessaire, et toute personne requise est tenue de prêter main forte.

Article 618

Tout gardien qui aura refusé, ou de montrer au porteur de l'ordre de l’officier civil ayant la police de la maison d'arrêt, de justice ou de prison, la personne du détenu, sur la réquisition qui en sera faite, ou de montrer l’ordre qui le lui défend, ou de faire au juge de paix l’exhibition de ses registres, ou de lui laisser prendre telle copie que celui-ci croira nécessaire de partie de ses registres, sera poursuivi comme coupable ou complice de détention arbitraire.

CHAPITRE IV – DE LA RéHABILITATION DES CONDAMNÉS

Article 619

Tout condamné à une peine afflictive ou infamante qui aura subi sa peine, pourra être réhabilité.

La demande en réhabilitation ne pourra être formée par les condamnés aux travaux forcé à temps ou à la réclusion, que cinq ans après l'expiration de leur peine ; et par les condamnés à la peine du carcan, que cinq ans à compter du jour de l’exécution de l'arrêt.

Article 620

Nul ne sera admis à demander sa réhabilitation, s’il ne demeure depuis cinq ans dans le même arrondissement communal, s’il n’est pas domicilié depuis deux ans accomplis dans le territoire de la municipalité à laquelle sa demande est adressée, et s'il ne joint à sa demande des attestations de bonne conduite qui lui auront été données par les conseils municipaux et par les municipalités dans le territoire desquelles il aura demeuré ou résidé pendant le temps qui aura précédé sa demande.

Ces attestations de bonne conduite ne pourront lui être délivrées qu’à l’instant où il quitterait son domicile ou son habitation.

Les attestations exigées ci-dessus devront être approuvées par le sous-préfet et le procureur impérial ou son substitut, et par les juges de paix des lieux où il aura demeuré ou résidé.

Article 621

La demande en réhabilitation, les attestations exigées par l’article précédent et l’expédition du jugement de condamnation, seront déposées au greffe de la cour impériale dans le ressort de laquelle résidera le condamné.

Article 622

La requête et les pièces seront communiquées au procureur général impérial ; il donnera des conclusions motivées et par écrit.

Article 623

L’affaire sera rapportée à la chambre criminelle.

Article 624

La cour et le ministère public pourront, en tout état de cause, ordonner de nouvelles informations.

Article 625

La notice de la demande en réhabilitation sera insérée au journal judiciaire du lieu où siége la cour qui devra donner son avis, et du lieu où la condamnation aura été prononcée.

Article 626

La cour, le procureur général impérial entendu, donnera son avis.

Article 627

Cet avis ne pourra être donné que trois mois au moins après la présentation de la demande en réhabilitation.

Article 628

Si la cour est d’avis que la demande en réhabilitation ne peut être admise, le condamné pourra se pourvoir de nouveau après un nouvel intervalle de cinq ans.

Article 629

Si la cour pense que la demande en réhabilitation peut être admise, son avis, ensemble les pièces exigées par l'article 620, seront, par le procureur général impérial, et dans le plus bref délai, transmises au grand-juge ministre de la justice, qui pourra consulter le tribunal qui aura prononcé la condamnation.

Article 630

Il en sera fait rapport à Sa Majesté par le grand juge, dans un conseil privé, formé aux termes de l’article 86 de l'acte des constitutions de l’Empire, du 16 thermidor an 10.

Article 631

Si la réhabilitation est prononcée, il en sera expédié des lettres où l'avis de la cour sera inséré.

Article 632

Les lettres de réhabilitation seront adressées à la cour qui aura délibéré l’avis ; il en sera envoyé copie authentique à la cour qui aura prononcé la condamnation, et transcription des lettres sera faite en marge de la minute de l’arrêt de condamnation.

Article 633

La réhabilitation fera cesser, pour l’avenir, dans la personne du condamné, toutes les incapacités qui résultaient de la condamnation.

Article 634

Le condamné pour récidive ne sera jamais admis à la réhabilitation.

CHAPITRE V – DE LA PRESCRIPTION

Article 635

Les peines portées par les arrêts ou jugements rendus en matière criminelle se prescriront par vingt années révolues, à compter de la date des arrêts ou jugements.

Néanmoins, le condamné ne pourra résider dans le département où demeurait, soit celui sur lequel ou contre la propriété duquel le crime aurait été commis, soit ses héritiers directs.

Le Gouvernement pourra assigner au condamné le lieu de son domicile.

Article 636

Les peines portées par les arrêts ou jugements rendus en matière correctionnelle se prescriront par cinq années révolues, à compter de la date de l'arrêt ou jugement rendu en dernier ressort ; et à l'égard des peines prononcées par les tribunaux de première instance, à compter du jour où ils ne pourront plus être attaqués par la voie de l’appel.

Article 637

L’action publique et l’action civile résultant d'un crime de nature à entraîner la peine de mort, ou des peines afflictives perpétuelles, ou de tout autre crime emportant peine afflictive ou infamante, se prescriront après dix années révolues, à compter du jour où le crime aura été commis, si dans cet intervalle il n’a été fait aucun acte d'instruction ni de poursuite.

S'il a été fait, dans cet intervalle, des actes d'instruction ou de poursuite non suivis de jugement, l'action publique et l’action civile ne se prescriront qu'après dix années révolues, à compter du dernier acte, à l’égard même des personnes qui ne seraient pas impliquées dans cet acte d’instruction ou de poursuite.

Article 638

Dans les deux cas exprimés en l'article précédent, et suivant les distinctions d'époques qui y sont établies, la durée de la prescription sera réduite à trois années révolues, s'il s'agit d'un délit de nature à être puni correctionnellement.

Article 639

Les peines portées par les jugements rendus pour contraventions de police seront prescrites après deux années révolues, savoir, pour les peines prononcées par arrêt ou jugement en dernier ressort, à compter du jour de l'arrêt ; et à l'égard des peines prononcées par les tribunaux de première instance, à compter du jour où ils ne pourront plus être attaqués par la voie de l'appel.

Article 640

L'action publique et l'action civile pour contravention de police, seront prescrites après une année révolue, à compter du jour où elle aura été commise, même lorsqu'il y aura eu procès-verbal, saisie, instruction ou poursuite, si, dans cet intervalle, il n'est point intervenu de condamnation ; s'il y a eu un jugement définitif de première instance de nature à être attaqué par la voie de l'appel, l'action publique et l'action civile se prescriront après une année révolue, à compter de la notification de l'appel qui en aura été interjeté.

Article 641

En aucun cas, les condamnés par défaut ou par contumace, dont la peine est prescrite, ne pourront être admis à se présenter pour purger le défaut ou la contumace.

Article 642

Les condamnations civiles portées par les arrêts ou par les jugements rendus en matière criminelle, correctionnelle ou de police, et devenus irrévocables, se prescriront d'après les règles établies par le Code Napoléon.

Article 643

Les dispositions du présent chapitre ne dérogent point aux lois particulières relatives à la prescription des actions résultant de certains délits ou de certaines contraventions.

FIN DU CODE

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(1) Acte des constitutions de l'Empire du 22 frimaire an 8 – 13 décembre 1799 (Extraits)

Article 77

Pour que l’acte qui ordonne l’arrestation d'une personne puisse être exécuté, il faut :

1° qu'il exprime formellement le motif de l’arrestation, et la loi en l’exécution de laquelle elle est ordonnée ;

2° qu'il émane d’un fonctionnaire à qui la loi ait donné formellement ce pouvoir ;

3° qu'il soit notifié à la personne arrêtée, et qu’il lui soit laissé copie.

Article 78

Un gardien ou geôlier ne peut recevoir ou détenir aucune personne qu'après avoir transcrit sur son registre l'acte qui ordonne l’arrestation ; cet acte doit être un mandat donné dans les formes prescrites par l’article précédent, ou une ordonnance de prise de corps, ou un décret d'accusation, ou un jugement.

Article 79

Tout gardien ou geôlier est tenu, sans qu’aucun ordre puisse l'en dispenser, de représenter la personne détenue à l'officier civil ayant la police de la maison de détention, toutes les fois qu'il en sera requis par cet officier.

Article 80

La représentation de la personne détenue ne pourra être refusée à ses parents et amis porteurs de l'ordre de l'officier civil, lequel sera toujours tenu de l’accorder, à moins que le gardien ou le geôlier ne représente une ordonnance du juge pour tenir la personne au secret.

Article 81

Tous ceux qui, n'ayant point reçu de la loi le pouvoir de faire arrêter, donneront, signeront, exécuteront l’arrestation d'une personne quelconque ; tous ceux qui, même dans le cas de l'arrestation autorisée par la loi, recevront ou retiendront la personne arrêtée dans un lieu de détention non publiquement et légalement désigné comme tel, et tous les gardiens ou geôliers qui contreviendront aux dispositions des trois articles précédents, seront coupables du crime de détention arbitraire.

Article 82

Toutes rigueurs employées dans les arrestations, détentions ou exécutions, autres que celles autorisées par les lois, sont des crimes.

Signe de fin