DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
Dictionnaire des noms propres
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Sur l’importance du rôle social des auteurs évoqués ci-dessous, voir notre étude :
La doctrine est-elle une source du droit ?
Lettre K
KANT Emmanuel
Cf. Ortolan*, Tissot*.
Voir : Kant, L'éducation morale
Kant est né en 1724 et mort en 1804 à Königsberg, ville à laquelle il demeura toujours attaché. Il consacra toute sa vie à l'étude des différents domaines de la philosophie, en particulier de la morale, et à travers elles des principes fondamentaux du droit pénal au sens strict (« Fondements de la métaphysique des mœurs »). Partisan de la justice absolue, il a imaginé une société, sur le point de se dissoudre, et invitant ses membres à suivre chacun sa propre destinée ; pour lui le dernier meurtrier devrait néanmoins être exécuté, afin que ses concitoyens ne se rendent pas complices du crime de complicité passive envers le Mal.
Kant, (Critique de la raison pratique) : Le ciel étoilé au dessus de moi, la loi morale en moi.
Kant (Préface à la Métaphysique des mœurs) : Lorsqu'il s'agit de ce qui doit être moralement bon, ce n'est pas assez qu'il y ait conformité à la loi morale ; il faut encore que ce soit pour la loi morale que la chose se fasse ; sinon cette conformité n'est que très accidentelle et très incertaine, parce que le principe qui est étranger à la loi morale produira sans doute de temps à autre ces actions conformes, mais souvent aussi des actions contraires à la loi. Or la loi morale dans sa pureté et dans sa vérité (ce qui est précisément en matière pratique le plus important) ne doit pas être cherchée ailleurs que dans une philosophie pure.
Malaurie (Anthologie de la pensée juridique) : Les rapports que Kant établit entre le droit et la morale sont complexes. Il définit la loi morale de manière compliquée en y voyant une notion nécessaire et universelle : « Agis de telle sorte que ta faculté d'agir puisse en tout temps servir en même temps de principe pour une législation universelle ». Cette loi morale constitue un impératif catégorique, absolu, a priori et inconditionnel. Elle est cependant, en pratique, d'une énergie inférieure à la règle juridique, qui est susceptible d'une plus forte contrainte que la règle morale -la contrainte de l'État-, contrainte qui est elle-même liée au caractère d'extériorité au sujet de droit que possède la règle juridique, à la différence de la règle morale. [voir dans cet ouvrage, p.125, un portrait de Kant et quelques citations assorties d'explications souvent nécessaires tant la pensée de ce philosophe est complexe]
Gaarder (Le monde de Sophie) :
— Kant a toujours ressenti que la distinction entre le bien
et le mal recouvrait quelque chose de réel. Il rejoignait en
cela les rationalistes pour qui la raison permettait de faire le
tri. Tous les hommes savent ce qui est bien et ce qui est mal,
et nous le savons, non parce que nous l'avons appris, mais parce
que c'est inscrit dans notre raison. Tous les hommes sont dotés
d'une raison pratique, c'est-à-dire d'une faculté propre à la
raison qui nous permet en toute occasion de distinguer le bien
du mal sur le plan de la moralité.
— C'est donc inné ?
— Oui, la faculté de distinguer le bien du mal est innée comme
toutes les autres qualités de la raison. De même que tous les
hommes admettent le principe de causalité au sein de l'univers,
tous ont accès à la même loi morale universelle. Cette loi est
aussi absolue que les lois physiques pour les phénomènes
naturels. Elle est le fondement de notre vie morale comme peut
l'être le principe de causalité pour notre entendement ou encore
que sept plus cinq égale douze.
— Et que dit cette loi morale ?
— Parce qu'elle précède toute expérience, elle est dite « formelle ».
En d'autres termes, elle n'est liée à aucune situation
particulière où se poserait un problème de choix. Elle vaut pour
tous les hommes quelles que soient leur époque et leur société.
Elle ne dit pas ce qu'il faut faire ou ne pas faire dans telle
ou telle circonstance, mais ce qu'il convient de faire en toute
circonstance.