DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre P
(Quatrième partie)
PENDAISON
Cf. Effigie (pendre en)*, Gibet*, Gibier de potence*, Hart*, Haute justice*, Mort (Peine de)*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-7, p.358 / n° III-114 1°, p.401 / n° III-212, p.427
Voir pour illustration, le Gibet de Monfaucon.
La pendaison est le mode d’exécution de la peine de mort qui consiste à suspendre, par un corde passée autour de son cou, le corps du condamné, mains liées derrière le dos, à une potence ; le procédé le moins douloureux consiste à ajouter un poids pour entraîner la rupture immédiate des vertèbres cervicales. La pendaison a été remplacée, en France sous la Révolution par la Guillotine*, puis, aux États-Unis, par la chaise électrique.
Le Foyer (Le droit pénal normand au XIIIe siècle) : La pendaison est alors le supplice le plus commun. Nous l'avons vu appliqué au meurtrier, au coupable de vol grave...
Jousse (Traité de la justice criminelle, 1771 ) : Ce supplice ne s’emploie guère que contre les roturiers. Il a lieu pour les crimes de simple homicide, fausse monnaie, banqueroute frauduleuse, rapt, sédition… On prétend que ce genre de peine n’avait pas lieu anciennement contre les femmes, et que le premier exemple de ce supplice, à leur égard, est en l’année 1449, où l’on pendit deux hommes et une femme, convaincus d’avoir volé plusieurs petits enfants.
Garofalo (La criminologie) : Mille oisifs ou vagabonds furent pendus sous le règne de Henri VIII.
Code pénal de Tunisie. Art. 7 : Tout condamné à mort est pendu.
Code pénal du Japon. Art. 11 : Peine de mort. La peine de mort sera exécutée par pendaison dans un établissement pénitentiaire.
Encyclopédie Microsoft Encarta, 2003 : Impliqué dans une rixe au cours de laquelle François Ferrebouc, notaire pontifical, fut blessé, Villon fut condamné à la pendaison ; il fit appel de la sentence. C’est probablement pendant ces jours d'angoisse qu’il écrivit la Ballade des pendus.
Exemple (Ouest-France 31 juillet 2015) 2003 : Inde : Yakub Memon, condamné à mort par le justice indienne, pour son implication dans les attentats qui ont ensanglanté Bombay en 1993, a été pendu hier. Les attentats de Bombay ont tué au moins 257 personnes au mois de mai. Ils auraient été commis en représailles après l'incendie d'une mosquée par des extrémistes hindous en 1992.
Dans l'Ancien droit, il était d'usage de pendre un mineur "sous les aisselles", de façon lui donner un avant-goût de ce qui l'attendait s'il persistait dans la voie de la délinquance.
Saint-Edme (Dictionnaire de la pénalité) : Pendre sous les aisselles, genre de supplice qui n'allait pas jusqu'à la mort. Le patient étant monté à une échelle posée contre une potence élevée comme pour pendre réellement ; on lui passait une sangle sous chaque aisselle, les deux bouts de cette sangle se trouvant attachés aux bras de la potence ; deux cordes traversaient deux trous faits aux extrémités d'une planche mise à plat sous les pieds du condamné, et ces cordes tenaient également au bras de la potence. L'exécuteur retirait alors l'échelle, et le patient restait dans cette position fatigante plus ou moins d'heures, suivant ce que l'arrêt avait ordonné... Le frère cadet du fameux Cartouche y mourut, parce que le bourreau supprima la planche qui soutenait ses pieds ; il y a apparence qu'en exécutant la sentence selon la loi, on voulut débarrasser la société d'un homme qui lui était nuisible.
À l'inverse, un criminel qui avait commis un méfait particulièrement grave était condamné par le juge à être "pendu haut et court". Ordinairement un délinquant était supplicié avec une corde assez longue afin que des amis puissent empoigner ses pieds afin de s'y suspendre et, par le fait de leur poids, briser les cervicales de leur compagnon mettant ainsi fin à ses souffrances. Cette ultime faveur était refusée à celui qui était suspendu hors de portée.
Lombroso (L'anthropologie criminelle) : Les routiers et les malandrins du moyen âge s'attendaient et se résignaient à finir, un jour de déveine, branchés haut et court.
Jadis il était parfois admis que si un individu condamné à la pendaison survivait au supplice, par exemple parce que la branche de l'arbre auquel la corde était attachée s'était cassée, le condamné était gracié. On peut voir là une survivance de la notion de Jugement de Dieu*.
Exemple (Ouest-France 24 octobre 2013) : Le condamné, qui a survécu, ne sera pas exécuté de nouveau, a annoncé le ministre de la Justice iranien. Le cas de Alizera, un homme condamné à mort pour trafic de drogue et pendu à la mi-octobre, est singulier. Il a passé douze minutes au bout de la corde avant d'être déclaré mort par le médecin. Le lendemain un employé de la morgue a remarqué qu'il respirait. Transféré à l'hôpital, il est, depuis, dans le coma.
Un pendu est un individu qui a fini ses jours à la potence. Un pendard est un gredin dont on peut dire qu'il mériterait presque d'être pendu (rappr. Coquin*).
Littré (Dictionnaire) : Pendard - Par exagération, celui ou celle qui est digne de pendaison, qui ne vaut rien du tout.
Chavanne (Jurisclasseur, v° Presse) : Dans le théâtre de Molière, les termes de "traître" et de "pendard" sont des injures.
Molière (L'Avare, I,3) : La Flèche : Pourquoi
me chassez-vous ?
Harpagon : C'est bien à toi, pendard, à me demander des raisons. Sors vite...
PÉNITENCE
Cf. Châtiment*, Peine - médicinale*, Pénitencier*, Sanction (4)*, Stage*.
La pénitence est une prière, un jeûne, un pèlerinage ou toute autre mesure expiatoire prescrite par un confesseur en réponse à un péché. Elle est le pendant, sur le plan spirituel, de la peine sur le plan temporel.
Lois de Manou : Tout homme qui n’accomplit pas les actes prescrits, ou qui se livre à des actes défendus … est tenu de faire une pénitence expiatoire.
Bourg Saint-Edme (Dictionnaire de la pénalité) : En 1497 Jean Le Clerc, avocat, maire de la justice de Saint-Magloire, à Charonne, prononça une sentence contre une truie qui y avait mangé le menton d'un enfant, lequel en mourut ; il la condamna à être assommée... il ordonna que son propriétaire et sa femme iraient à la Pentecôte en pèlerinage à Notre-Dame de Pontoise, où ils crieraient mercy, et dont ils rapporteraient certificat.
Naz (Droit canonique) : Une pénitence, en général, est une œuvre extérieure et pénible, imposée par le supérieur compétent et acceptée par le coupable pour donner à Dieu ou à l'Église une satisfaction convenable au sujet de la faute commise.
Héribert Jone (Théologie morale) : La pénitence doit correspondre à la gravité et à la qualité du péché, mais aussi tenir compte de la capacité du pénitent.
Vittrant (Théologie morale, 25e éd.) : Au Tribunal de la Pénitence, le Confesseur doit se souvenir de son rôle de juge, de docteur et de médecin... Le ministre du sacrement de la pénitence doit remplir les fonctions de père, de docteur, de médecin et de juge.
Domat (Traité des lois) : Les juges ecclésiastiques ne condamnent qu’à la prison, à des jeûnes et à d’autres oeuvres de pénitence.
Chauveau Hélie (Théorie du Code pénal) : Alphonse de Castro plaçait sur la même ligne, comme deux actes d’un caractère identique, la pénitence imposée au pécheur et le châtiment infligé au délinquant.
Proal (Le crime et la peine), qui était magistrat. Que de fois j’ai entendu des accusés s’écrier : « J’ai fait la faute, je ferai la pénitence ; je l’ai méritée ! ».
Un pénitentiel était, au Moyen-âge, un ouvrage dans lequel se trouvaient répertoriés les principaux péchés (ou délit) qu'une personne pouvait commettre, et la pénitence qu'il convenait au confesseur de prononcer. À l'époque classique on parlait plutôt de " Manuel des confesseurs ". Comme les plus complets de ces ouvrages anticipaient nos actuels manuels de droit pénal spécial, on comprend qu'ils aient eu une influence considérable sur l'évolution du droit criminel.
Le Foyer (Le droit pénal normand au XIIIe siècle) : L'Église contribua beaucoup à l'évolution du droit pénal. En effet, dans ses pénitentiels, qui exercèrent une influence considérable, elle insiste sur les éléments moraux du péché. On prend cette influence sur le vif lorsqu'au milieu des lois d'Henri I, on rencontre la maxime "reum non facit, nisi mens rea". [un acte ne présente un caractère délictueux que s'il comporte une intention délictueuse]
Du Boys (Histoire du droit criminel) : Le Code pénal ou pénitentiel de saint Basile a 81 articles; celui de Burchard en a 88. Un pareil nombre d'articles suffit bien pour comprendre à peu près tous les crimes ou délits qui peuvent être commis dans une société encore peu avancée... Il y a dans le Code pénitentiel de Burchard une série d'interrogations relatives à 88 crimes ou péchés différents, avec les circonstances qui peuvent les aggraver ou les modifier. C'est un formulaire d'instruction criminelle qui comprend tous les crimes et délits connus ; rien n'échappe à la vigilance de cette inquisition ecclésiastique ; et en vérité on ne voit pas ce qui pouvait rester à faire aux comtes et officiers du roi pour découvrir et poursuivre les crimes commis dans les paroisses rurales.
PÉNITENCIER
Cf. Emprisonnement*, Établissement pénitentiaire*, Peines*, Pénitence*, Prison*.
Le terme pénitentier désignait au début du XIXe siècle une prison dans laquelle on s'efforçait d'amender les condamnés en leur rappelant les principes fondamentaux de la morale et de la vie en société. En fin de siècle, c'était dans un pénitentier que l'on préparait les condamnés à la relégation à la vie qui les attendait là où devaient être envoyés. Le terme n'est plus guère employé de nos jours (probablement parce qu'il trouve son origine dans une institution religieuse, la pénitence) que sous sa forme adjectivale : pénitentiaire ; certains ouvrages sont consacrés à la « Science pénitentiaire ».
Larousse des synonymes. Le pénitentier désigne une prison dans laquelle non seulement on détient, mais encore l'on cherche à amender les prisonniers.
Thonissen (Le droit pénal de la république Athénienne) : Le Sophronistère de Platon contient le germe du pénitentier du XIXe siècle. Platon se rapproche encore de la science moderne quand il place les moyens préventifs avant les moyens répressifs ; quand il réclame des lieux de détention séparés pour les prévenus et pour les condamnés ; quand il voit dans le caractère personnel du châtiment le corollaire naturel du caractère personnel de l'infraction ; quand il établit une distinction pleine de conséquences fécondes entre les actes volontaires et les actes prémédités ; quand, parmi les éléments de la culpabilité, il met au premier rang le caractère moral du délit ; quand il demande que la répression soit plus ou moins sévère suivant la nature des moyens employés par lés malfaiteurs.
Garraud (Précis de droit criminel) : Les récidivistes doivent subir, avant d'être embarqués, la dernière peine à laquelle ils ont été condamnés. Ils subissent cette peine, autant que possible, dans des pénitentiers spéciaux où ils sont entraînés à la vie coloniale. On leur fera commencer un apprentissage industriel ou agricole, dans des ateliers ou des chantiers annexés à l'établissement ; on les groupera par équipes, d'après leurs aptitudes.
Corre (les criminels) : Garofalo déclare que la laideur extrême, est très commune dans les établissements pénitenciers, surtout parmi les femmes. Tarde, sur 215 photographies de criminels, dit qu'il n'a pu découvrir qu'un joli visage (une femme) ; « le reste est repoussant en majorité, et les figures monstrueuses sont en nombre ».
Fauconnet (La responsabilité) : Les tribunaux, avec le concours de l’administration pénitentiaire, traitent les condamnés moralement les meilleurs un peu comme des mineurs : le rôle éducatif de la sanction devient prépondérant ; la peine varie, non plus en fonction du crime, mais en rapport avec la réforme morale du coupable.
Code pénal de Côte d'Ivoire. Art. 268 : Est puni d'un emprisonnement de quinze jours à six mois, quiconque, en violation des règlements de l'administration pénitentiaire, remet ou tente de remettre à un détenu, en quelque lieu qu'il soit, des sommes d'argent, correspondances ou objets quelconques.
Cass.crim. 13 septembre 2000 (n° 00-84590) : Il appartient à l’administration pénitentiaire, si l’état de santé de A… le nécessite, de le faire transférer dans un établissement pénitentiaire spécialisé ou de le faire admettre dans un hôpital civil.
PÉNOLOGIE
Cf. Criminologie*, Emprisonnement*, Établissement pénitentiaire*, Peines*, Prison*, Sanction (pénale)*.
La pénologie, ou science pénitentiaire, s’attache à l’étude des différentes sanctions dont le législateur peut assortir une incrimination pénale, entre lesquelles un tribunal peut être conduit à choisir, ou que l’administration est invitée à appliquer.
Constant (Traité de droit pénal) : La pénologie étudie l’origine et le développement des différentes sanctions et mesures de défense sociale auxquelles la société a recours pour réprimer la criminalité, ainsi que mode d’application et leur efficacité relative.
Larguier (Criminologie et science pénitentiaire) : L’étude des peines constitue la science pénitentiaire, entendue comme science des peines, ou pénologie, et non pas seulement comme « science des établissements pénitentiaires ».
Jeandidier (Droit pénal général) : La science pénitentiaire, ou pénologie, étudie le régime des sanctions prescrites par la loi.
PENSÉE UNIQUE - Voir : Autocensure*, Censure*, Dictature*.
La PENSÉE (l'Esprit)
Cf. Âme*, Corps de l'homme*, Être humain*, Personne humaine*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-215, p.429-430
Voir : J-P. Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-II-101, p.220 (sur la présomption de libre arbitre)
- Notion philosophique. À l'exception
des purs matérialistes, qui ne voient en l'homme qu'une
simple machine, au mieux qu'un
animal doté d'un main préhensible et d'un cerveau développé,
nombre de philosophes et plus encore de théologiens
considèrent que l'être humain est composé de trois éléments : le
Corps*, l'Esprit (la Pensée)*
et l'Âme*.
Sans doute ne s'entendent-il ni sur l'ordre dans lequel il
convient de les examiner, ni sur l'importance relative de
chacun d'entre eux ; mais ils s'accordent à dire que c'est
leur union intime qui confère à l'Homme une dignité particulière.
N'est-ce pas en raison du lien unissant l'Âme et l'Esprit, qu'il
prend conscience du Bien* et du Mal*, qu'il est invité à agir en
accord avec le premier et à rejeter la tentation du second ?
Le titre de cette rubrique, qui aurait pu aussi bien être
« l'Esprit
», a été déterminé par cette
observation de Pascal : «
L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature, mais
c'est un roseau pensant ».
Vergely (Dictionnaire de la philosophie) : Penser veut dire vivre les choses avec profondeur... Ainsi, quand Pascal écrit les « Pensées », il entend par pensée une façon de s'orienter dans l'existence.
François
Cheng, de l'Académie française, (De l'âme) : Est une tâche
plus que malaisée -combien nécessaire cependant- celle de
distinguer l'âme de l'esprit, ainsi que la relation qu'ils
entretiennent. Tâche malaisée parce que la frontière entre les
deux est floue, tant ils sont interpénétrés, imbriqués, l'un
dans l'autre... En réalité, une définition nette de l'âme et de
l'esprit se révèle impossible ; on ne peut les cerner qu'en les
situant l'une par rapport à l'autre.
À défaut d'une définition, on peut du moins constater que chacun
des deux est une entité douée de capacité d'agir. Du coup, il
nous paraît possible de cerner le domaine et le type d'action de
chacun , en posant d'abord -de manière intuitive- ceci : l'âme
est en nous ce qui nous permet de ressentir, de nous émouvoir
et, par-dessus tout, de communier par affect ou par amour...
L'esprit est en nous ce qui permet de penser, de raisonner, de
concevoir, d'organiser, de réaliser et, par-dessus tout de
communiquer par échange...
L'esprit de chaque être, pour personnel qu'il soit, a un
caractère général. Fondé sur le langage, il implique un
apprentissage, une formation, un acquis. Son développement est
lié à un environnement culturel, à une collectivité issue d'une
certaine tradition, et à ses propres activités.
L'âme a quelque chose d'originel, de natif, comportant une
dimension inconsciente, insondable pour ainsi dire, qui la relie
au mystère même qui à l'origine avait présidé à l'avènement de
l'univers vivant.
Alexis Carrel, prix Nobel de médecine, (La prière) : Le corps vivant n'est pas entièrement compris dans le continuum physique. Il se compose d'esprit aussi bien que de matière. Et, l'esprit, quoique résidant dans nos organes, se prolonge hors des dimensions de l'espace et du temps.
Lucrèce (De la nature) : L'esprit, souvent nommé intelligence, où siègent le conseil et le gouvernement de la vie, est une partie de l'homme tout comme la main, le pied, les yeux sont des parties d'un ensemble vivant.
S.Daval (Cours de philosophie général) a cette heureuse formule : La conscience, c'est l'Esprit présent à lui-même.
- Science criminelle. Si
philosophes et théologiens ne s'accordent pas sur les
rapports existant entre
le Corps, l'Esprit et l'Âme, les
pénalistes ne se heurtent pas aux mêmes difficultés
doctrinales. En effet le principe de matérialité, qui domine le droit criminel, commande le
régime pénal de ces trois éléments.
Se situant sur un plan principalement matériel, le Corps de
l'homme apparaît comme un Intérêt juridique*
ne différant des autres que par le fait qu'il a acquis une
dignité particulière en raison de son rapport étroit avec son Âme. Ses
organes peuvent donc
être protégés comme tout autre intérêt juridique : d'où les
incriminations de voies de fait, de coups et blessures et d'homicide. Il est même
sauvegardé après sa mort, par le biais de l'incrimination
d'outrage au cadavre d'un défunt.
À l'inverse l'Âme, essentiellement immatérielle, se situe a
priori hors
du domaine du droit criminel. Seule la théologie morale autorise
à considérer comme une faute, comme un péché, le fait d'avoir
tenté de faire perdre à un être humain le sens du Bien et du Mal, du bon et
du mauvais, du vrai et du faux, du juste et de l'injuste, du
beau et du laid. Peuvent uniquement être incriminés au pénal le
fait de s'efforcer de briser les liens reliant l'Âme à l'Esprit.
Établissant, pour sa part, une sorte de pont entre le Corps même de
l'homme et son Âme, la Pensée a son siège dans un organe physique
spécifique : le cerveau. Or celui-ci peut être
matériellement atteint par des actes volontaires émanant
d'autrui ; c'est pourquoi sont légitimes des incriminations
prohibant de porter atteinte, soit à son intégrité physique (du
fait d'une opération chirurgicale telle la lobotomie),
soit à son équilibre psychique
(par administration de substances psychotropes déréglant son activité naturelle).
Cette technique juridique d'incorporation se rencontre fréquemment en droit
criminel : sa Vie privée*
ne le matérialise-t-elle pas dans le Domicile* de l'intéressé ?
Digeste de Justinien, 47, X, 15, pr. Ulpien : Labéon examine la question de savoir si, par des médicaments ou par tout autre moyen, on a aliéné l'esprit de quelqu'un, il y aura l’action d'injures. Il dit qu'elle est accordée contre lui.
Code pénal d'Haïti. Il condamne l'administration d'hallucinogènes, au nombre desquelles figure : La Datura stramonium (nom vulgaire en Haïti «Cocombre zombi»).
Code
pénal de Côte d'Ivoire- Loi du 22 juillet 1988 portant
répression du trafic ... de substances psychotropes.
Article premier - Seront punis d'un emprisonnement de cinq à
dis ans ceux qui... 2°/ auront facilité à autrui l'usage de
substances psychotropes de nature à provoquer des troubles du
comportement.
- Droit positif français.
Si l'on se tourne vers la doctrine contemporaine et vers le Code
pénal de 1993, on sent que le matérialiste ambiant a enrayé une
législation spécifique. Sans doute les pénalistes sont-ils dans
leur ensemble opposés, d'une part à des interventions
chirurgicales altérant le fonctionnement du cerveau, d'autre part
à l'administration de drogues entravant les processus de cet
organe majeur ; mais le législateur ne s'est guère
manifesté sur ce terrain.
Il est vrai que l'article 222-15 du Code pénal incrimine le fait
d'administrer à autrui une substance nuisible ayant porté
atteint à son intégrité ou psychique. Mais cette disposition
nous semble fort insuffisante. D'abord elle place le cerveau,
siège de la Pensée et du Libre arbitre, sur le même plan que
tout autre
organe de l'être humain, tel un doigt de pied ; en outre elle refuse, à la fois,
d'incriminer la tentative et de se placer sur le terrain des
délits formels (ne supposant pas la constatation d'une atteinte
effective).
Code de la santé publique. Art. 3421-4 : La provocation à l'usage de stupéfiants... ou le fait de présenter les stupéfiants sous un jour favorable est puni de cinq ans d'emprisonnement.
Stéfani, Levasseur et Jambu-Merlin (Criminologie et science pénitentiaire) : Certaines législations étrangères appliquent des mesures graves et irréversibles... telle la lobotomie. La législation française se refuse à admettre cette mesure attentatoire au respect de la dignité de la personne humaine, même si l'intéressé y donnait son consentement.
Les PENSÉES
Cf. Actes humains*, Délibération*, Délits pénaux (délit d'intention)*, For interne*, Iter criminis*, Liberté*, Matérialité*, Opinion (délit d')*, Tentative*, Velléité*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-121, p.173 / n° I-135 1°, p.191
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), p.96 et p.101
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° III-238, p.529
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 211 3°, p.92 / n° 217, p.101-102
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° 10, p.14
- Notion. Au sens large, les pensées sont le fruit de l'activité psychique de la personne (même à l'état de rêve). Elles peuvent être spontanées et fugitive, méditées et approfondies, exposées et développées. Elles passent alors progressivement du for interne au for externe.
Cuvillier (Vocabulaire philosophique) : Pensée, Penser... Ces termes peuvent s'appliquer : 1 - Lato, à l'activité psychique dans son ensemble... 2 - à la pensée réfléchie et organisée.
Lalande (Vocabulaire de la philosophie) : Au sens le plus large, le mot pensée enveloppe tous les phénomènes de l'esprit... Plus ordinairement, il se dit de tous les phénomènes cognitifs (par opposition aux sentiments et aux volitions). Pensée est alors synonyme d'intelligence... Au sens le plus propre, il se dit de l'entendement et de la raison.
St Marc (Évangile 7, 21-23) : Jésus dit à ses disciples : "C'est du dedans, du coeur des hommes que sortent les pensées perverses : débauche, vols, meurtres, adultères, cupidités, méchancetés, fraude, impudicité, envie, diffamation, orgueil et démesure. Tout ce mal vient du dedans, et rend l'homme impur".
- Règle morale. Les moralistes estiment que les pensées fugitives, survenues spontanément et hors de toute réflexion, ne sauraient être reprochées à leur auteur. En revanche, ils considèrent que le simple fait de se complaire à méditer et développer des pensées mauvaises constitue une faute morale ; il leur apparaît plus grave encore de les communiquer à autrui.
Morale de Zoroastre (trad. Anquetil de Perron) : Après avoir établi dans la société les lois de la justice distributive, il convient de prévenir ou d'arrêter ce qui pourrait la troubler. En conséquence, la simple pensée du mal est péché.
Buddhist monastic code, par Thanissaro Bhikkhu (2009) : Un moine, voyant un vêtement cher, est saisi du désir de le voler, mais il ne donne pas suite à ce désir. Les commentaires prennent cet exemple comme principe général : celui qui a simplement la pensée de commettre une infraction ne commet pas cette infraction.
Pontas (Dictionnaire de cas de conscience) : Les pensées et les tentations impures, que l'on a sans sa faute, par surprise et malgré soi, ne sont point péchés. Si vous êtes négligent à y renoncer, il y a péché au moins véniel ; si vous les avez, si vous les retenez, si vous les continuez volontairement dans l'esprit, c'est-à-dire avec connaissance et avec une complaisance sensuelle, elles sont péchés mortels.
Héribert Jone (Précis de théologie morale) : Les péchés de pensée. Dans la "délectation morose" on se réjouit d'une chose mauvaise à laquelle on pense... La simple pensée d'une chose coupable est un péché véniel quand on l'entretient pas simple curiosité ; elle devient un péché mortel si, en l'entretenant, on s'expose à un péché grave.
Merton (Aphorismes des pères du désert) : L'un des anciens disait : Ce n'est pas parce que de mauvaises pensées nous viennent que nous sommes coupables, mais parce que nous nous y complaisons.
Simon Foucher (La morale de Confucius, selon Kong zi) : Travaille à purifier tes pensées : si tes pensées ne sont pas mauvaises, tes actions ne le seront point.
- Science criminelle. Les pénalistes enseignent que le droit pénal a pour objet d'assurer la paix publique ; en outre il répugnent à voir les juges sonder le for interne des justiciables. Aussi excluent-ils en principe les simples pensées du domaine du droit criminel ; ils n'acceptent de les prendre en considération que si elles se sont extériorisées par des actes matériels, notamment par des écrits ou par des discours : d'où l'incrimination de l'instigation et de la provocation. C’est pourquoi les pensées ne sauraient ordinairement être incriminées par le législateur, ou sanctionnées par les juges.
Voir : Glanville L. Williams, La nécessité d'un acte humain
Bertaut (Le directeur des confesseurs, Lyon 1674) : La puissance du législateur, qui n'est fondée que sur la société des hommes, matérielle et sensible, ne peut pas s'étendre à des actes internes et immatériels, qui ne peuvent être connus par les voies humaines.
Pufendorf (Le droit de la nature) : Les actes purement internes, ou les simples pensées... ne sont pas sujets à la peines devant les hommes, quand même il arriverait ensuite que les autres en eussent connaissance. En effet, ces mouvements intérieurs ne faisant du mal à personne, il n'y a personne qui ait intérêt qu'on les punisse, quoique d'ailleurs ils soient par eux-mêmes de véritables péchés.
Digeste de Justinien (48, 19, 18). Ulpien : Cogitationis poenam nemo patitur. - Nul ne peut être puni pour de simples pensées.
Servant (Discours sur l’administration de la justice) : Gardons-nous bien des dangereuses inquisitions sur les pensées des hommes.
De Curban (La science du gouvernement, 1765) : Les simples pensées, les simples desseins, les actes purement intérieurs, ne soumettent à aucune peine devant les hommes, lors même qu'ils sont manifestés, ou par l'aveu qu'on en fait, ou par quelque circonstance. La raison en est que ces mouvements intérieurs ne faisant de mal à personne, il n'y a personne aussi qui ait intérêt à ce qu'on les punisse...Ce qui se dit dans ces épanchements de cœur que la conversation produit entre deux amis doit être mis au rang des pensées ; sinon il n'y a plus de liberté dans les festins.
Ortolan (Éléments de droit pénal) : Les pensées, les simples projets de la veille, échappent par eux-mêmes à l’action pénale.
Chauveau Hélie (Théorie du Code pénal) : La justice sociale n’a pas pour mission d’exercer la justice morale ; le cercle où elle se meut est limité ; elle ne peut avoir d’action que sur les faits extérieurs, sur les actes matériels. Elle saisit les choses et non les pensées ; elle s’arrête aux actions qui troublent la paix publique, et non à celles qui dévoilent la perversité intérieure des âmes.
Garçon (Code pénal annoté) : La pensée, plus ou moins vague, que le coupable peut avoir eu du crime antérieurement à l'exécution ne constitue pas la préméditation légale... Il faut que la pensée ait pris corps, que la délibération ait abouti à un plan tracé d'avance et, comme le dit la définition légale, à un dessein formé.
Trousse (Novelles de droit pénal belge) : Malgré l'avènement de l'élément intentionnel, l'intervention répressive s'est arrêtée au seuil de la conscience. La tradition juridique n'a jamais quitté le terrain plus sûr des faits externes ; elle a laissé à la morale laïque et religieuse le domaine de la conscience ; elle n'a jamais voulu d'une inquisition qui prétendît violer le secret du for intérieur et "asservir l'accusé aux conjectures arbitraires des juges" a dit Fauconnet (La responsabilité).
Carrara (Cours de droit criminel - éd. française) : Le dommage que produit une action perverse de l'homme doit être un dommage social... Ainsi, les pensées, les vices et les péchés, quand ils ne troublent pas l'ordre extérieur, ne peuvent pas être déclarés des infractions.
Il en va toutefois autrement dans les régimes politiques répressifs, où sont réprimés le fait d'exprimer une opinion subversive, et à plus forte raison le fait proclamer son intention de s'attaquer à un dirigeant.
Bertin (Les procès de Moscou) formule ainsi la ligne de conduite de Vychinski, procureur général de Staline : Les opinions, conceptions ou agissement qui peuvent être considérés comme d'inspiration bourgeoise sont des crimes ou regard de la loi.
Warée (Curiosités judiciaires) : Un gentilhomme, étant malade à l’extrémité, se confessa d’avoir eu la pensée de tuer le roi, qui était Henri II. Le confesseur en donna avis au procureur général. Ce gentilhomme étant revenu de sa maladie, fut, sur cette confession, condamné à être décapité aux Halles, et ce jugement fut exécuté.
- Droit positif. Le droit français est en ce sens. Il consacre l’impunité des pensées fugitives : la seule idée que l’on pourrait avec profit commettre une infraction, dès lors qu’elle n’est pas suivie d’un acte préparatoire et n’est pas exposée publiquement, ne trouble pas l’ordre social et ne relève dès lors pas du droit criminel.
Versailles 29 novembre 1996 (Gaz.Pal. 1997 I somm. 288), refuse de sanctionner de simples arrière-pensées qu’aucun élément objectif ne vient caractériser.
Il admet aussi la liberté d'expression des pensées réfléchies, sauf lorsqu’elle se traduit en des écrits ou propos caractérisant une Instigation* ou une Provocation* à commettre une infraction.
Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Art. 18 : Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion.
E. de Girardin (Le droit) : Entière liberté de penser, avec tous les attributs qui la composent : voilà ce que j’appelle, non pas un droit, mais le Droit.
Le Conseil constitutionnel a rappelé, le 29 juillet 1994, que l’art. 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen proclame : «La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi».
Cass.crim. 17 mai 1994 (Gaz.Pal. 1994 II somm. 558) : La seule crainte du risque de racisme ne saurait priver les citoyens de la liberté de pensée et d’expression, dans la mesure où le débat se déroule de bonne foi.
PENSION ALIMENTAIRE - Voir : Abandon de famille*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », consulter la Table alphabétique
PENTHOTAL - Voir : Narco-analyse*.
PERDUELLION - Terme de l'ancien français, venant du latin « perduellio » : Haute trahison*.
PÉREMPTION
Cf. Prescription de l’action publique*.
La péremption est une technique judiciaire faisant que l’instance est déclarée éteinte, dans le cas où les parties à un procès laissent la procédure dormir pendant un certain temps (temps de durée variable selon les matières). Contrairement à ce qui se passait dans l'Ancien droit français, cette sorte de prescription n’a pas été retenue par le Code de procédure pénale.
Vincent et Guinchard (procédure civile) : Lorsque les plaideurs restent pendant longtemps sans faire aucun acte de procédure, une idée vient naturellement à l’esprit, c’est que l’affaire ne les intéresse plus et qu’ils aimeraient mieux en rester là. C’est sur cette idée très naturelle que repose la péremption d’instance, c’est-à-dire l’anéantissement de l’instance par suite de l’inaction des plaideurs.
De Ferrière (Dictionnaire de droit, 1762) : Suivant la loi, tous les procès criminels doivent être terminés dans deux ans, et les procès civils dans trois ans, à compter du jour de la contestation en cause.
Code de droit canonique de 1983, Canon 1520 : Si les parties ne posent aucun acte de procédure pendant six mois sans qu’il y ait eu aucun empêchement, l’instance est périmée. Ses lois particulières peuvent fixer d’autres délais de péremption.
Garraud (Précis de droit criminel, 1934) : La péremption d’instance, prévue par le Code de procédure civile, n’est pas applicable en matière criminelle.
PÉRICOLOSITÉ - Voir : Témibilité*.
Casanbianca (Introduction au Code pénal d'Italie de 1930) : C’est la "pericolosità" sociale qui est l'unique fondement des mesures de sûreté.
PÉRIL - Voir : Danger*, Mise en danger d'autrui*, Non-assistance à personne en péril*.
PÉRIODE DE SÛRETÉ
Cf. Emprisonnement*, Mesures de sûreté*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° II-117, p.322
Lorsqu’un tribunal prononce une peine privative de liberté de dix ans et plus, il peut préciser que le condamné ne pourra pas bénéficier d’autorisation de sortie pendant une certaine période, dite de période de sûreté (art. 132-23 C.pén.).
Jeandidier (Droit pénal général) : La période de sûreté, réservée aux majeurs, est la période pendant laquelle le détenu ne peut bénéficier des divers avantages que sont la suspension et le fractionnement de la peine, les permissions de sortir, le placement à l’extérieur, la semi-liberté et la libération conditionnelle.
Cass.crim. 5 juillet 1993 (Gaz.Pal. 1993 II Chr.crim. 475) : La période de sûreté prévue par l’art. 720-2 C.pr.pén. n’est qu’une modalité d’exécution de la peine. Il en résulte que la décision qui la prononce n’a pas à être motivée et doit être acquise à la majorité absolue.
Cass.crim.
12 mars 2014, n° 13-83536 (à paraître au Bulletin criminel) :
Selon l'art. 132-23 C.pén., la cour d'assises peut, par
décision spéciale, porter la durée de la période de sûreté à
vingt-deux ans, s'il s'agit d'une condamnation à la réclusion
criminelle à perpétuité ;
En l'espèce, après avoir déclaré l'accusé coupable de meurtre,
viol ... en récidive, l'arrêt attaqué l'a condamné à la
réclusion criminelle à perpétuité et fixé aux deux tiers de la
peine la durée de la période de sûreté. En prononçant ainsi, la
cour d'assises a méconnu le texte susvisé.
Sur la computation du délai, lorsque l'intéressé avait été placé en détention provisoire.
Cass.crim. 25 juin 2014, n° 14-81793 : La période de sûreté prévue par l'art. 132-23 C.pén. n'étant qu'une modalité d'exécution de la peine privative de liberté qu'elle assortit, court à compter de la mise à exécution de celle-ci ; si la condamnation qui l'emporte ou la prononce a été précédée d'une détention provisoire, l'entier temps de celle-ci doit s'imputer sur la durée de la période de sûreté, sans qu'il y ait lieu de tenir compte, pour diminuer d'autant cette durée, du temps pendant lequel ont été simultanément exécutées une ou plusieurs condamnations à des peines non assorties d'une période de sûreté.
PÉRIPATÉTICIENNE - Dénomination littéraire de la prostituée. Voir : Prostitution*.
PERMIS DE CONDUIRE
Cf. Carte d'identité*, Code de la route*, Conduite automobile*, Passeport*, Peines complémentaires*.
- Notion. Le permis de conduire est un document administratif qui autorise son titulaire à conduire tel ou tel type de véhicule. Il est délivré à ceux qui ont satisfait à un examen d’aptitude portant à la fois sur la connaissance du Code de la route et sur la capacité à maîtriser le véhicule en cause.
- Obtention frauduleuse. La fraude commise aux examens par un candidat au permis de conduire tombe sous le coup de la loi du 23 décembre 1901 : Voir : Examens (Fraude aux*). Mais le fait d’obtenir un permis de conduire par une fausse déclaration relève de l’art. L.224-18 du Code de la route. De toute manière le document obtenu par tricherie est entaché de nullité.
Cass.crim. 19 décembre 1935 (Gaz.Pal. 1936 I 60) : La loi du 23 décembre 1901, conçue dans les termes les plus généraux, est applicable à la fraude commise pour se présenter à l’examen en vue de l’obtention du permis de conduire une automobile.
Exemple. Ouest-France du 26 mars 2004 : Au terme d’investigations qui ont duré plusieurs semaines, les enquêteurs du SRPJ de Rouen ont mis au jour une filière très astucieuse qui permettait de réussir l’examen du Code de la route, même sans reconnaître un panneau ! Grâce à des boîtiers de transmission électrique, un émetteur envoyait des signes au candidat muni d’un récepteur discret : 1 impulsion électrique signifiait réponse A, 2 signifiait réponse B… Le journaliste observe : Faut-il rappeler que l’insécurité routière est promue grande cause nationale ? Le pénaliste ajoute : voici un exemple de délinquance routière qui relève d’actes intentionnels, c’est dans de telles hypothèses que l’on peut parler de « violence routière »
- Falsification. Le fait de forger un Faux* permis de conduire tombe sous le coup de l’art. 441-2 C.pén., et est punissable même au stade de la tentative. La loi sanctionne également de manière générale la détention de documents administratifs frauduleux.
Cass.crim. 8 novembre 1972 (Bull.crim. n° 331 p.85) rejette le pourvoi formé contre un arrêt constatant une tentative de contrefaçon de permis de conduire après avoir relevé que les défendeurs ont été surpris par la police alors qu’ils se livraient à l’impression, et qu’ayant tous l’intention de réaliser la fabrication de faux permis, leurs agissements étaient en relation directe avec la réalisation.
Cass.crim. 22 mai 1997 (Gaz.Pal. 1997 II Chr.crim. 184) : Après avoir relevé que les éléments constitutifs des infractions ont été caractérisés de manière instantanée lors de l'interpellation de S... à Colmar, l'arrêt confirmatif attaqué déclare à bon droit le demandeur coupable de recel de faux documents administratifs, énonce notamment qu'un faux passeport, un faux permis de conduire, ainsi que des ébauches de cartes grises néerlandaises et de permis de circulation suisses, ont été découverts dans le véhicule automobile qu'il conduisait, et que le prévenu, qui ne conteste pas la matérialité des faits, ne donne pas d'explications convaincantes sur la détention de ces faux documents.
- Retrait ou suspension. Le retrait et la suspension du permis de conduire font partie des peines complémentaires. Elles interviennent, soit de manière spécifique par application du Code de la route, soit de manière générale en vertu de l’art. 131-6 du Code pénal.
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : Le retrait du permis de conduire les véhicules à moteur est une sanction complémentaire très efficace que le législateur contemporain utilise à des fins diverses. Dans la plupart des circonstances, il s’agit incontestablement d’une mesure de sûreté destinée à éliminer pendant un certain temps les conducteurs dangereux.
Cass.crim. 24 janvier 2007 (Bull.crim. n°16 p.47) : La suspension du permis de conduire prononcée en application du § 1 de l'art. L.234-2 II C.route contre toute personne coupable de l'un des délits prévus à l'art. L.234-1 du même code ne peut être assortie de sursis, même partiellement.
PERMISSION DE LA LOI - Voir : Ordre de la loi*.
PERMISSION DE L’ADMINISTRATION
Cf. Autorisation de l’administration*, Commandement de l’autorité légitime*, Condé*, Ordre de la loi*, Tolérance de l’administration*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-II-108 et 109, p.133 et s.
Certaines activités ou certains travaux, considérés comme sensibles pour l’intérêt général, ne sont autorisés que sous réserve d’obtention d’une autorisation de l’administration. Autant dire que cette activité ou ce travail est en principe prohibé, sous menace de telle ou telle sanction. C’est une permission régulièrement donnée par l’administration qui lève cette interdiction. Plus règne le dirigisme, plus cette situation se rencontre ; et plus le risque de corruption se renforce.
Vitu (Traité de droit pénal spécial) : Dans certaines hypothèses, l’exercice d’une activité est subordonnée à l’obtention d’une décision favorable de l’administration, qui exerce ainsi un contrôle préventif lui permettant d’écarter immédiatement les indésirables ou d’éviter d’inutiles encombrements dans certaines branches. La permission s’appelle, tantôt « autorisation », tantôt « licence », mais ces deux termes recouvrent, en fait, des situations qu’il est malaisé de distinguer. L’autorisation aurait ordinairement un caractère réel, parce qu’attachée à l’activité elle-même … La licence, elle, serait plutôt subordonnée à certaines conditions en la personne du requérant …
Cons d’État. 30 janvier 1980 (D. 1980 IR 300, note Delvolvé) : Aux termes de l’art. 25 C. domaine fluvial, «aucun travail ne peut être exécuté, aucune prise d’eau ne peut être pratiquée sur le domaine public fluvial sans autorisation de l’Administration». Le propriétaire riverain qui a construit les digues sur l’emplacement du domaine fluvial, dont elles font donc partie, n’a bénéficié d’aucune autorisation lui permettant d’occuper ce domaine sur le territoire de la commune. Ainsi, la construction de ces digues et l’occupation sans titre des lieux par le propriétaire sont constitutives d’une contravention de grande voirie. Le contrevenant est passible d’une amende et doit en outre démolir les ouvrages établis ou à défaut payer les frais de démolition d’office par l’Administration.
Miraben (Précis de droit annamite [ancien] ) : Le village où l’on est inscrit, où se trouvent les tombeaux des ancêtres, voilà le domicile ; il n’est pas possible d’en changer sans la permission de l’administration.
PERMISSION DE SORTIR
Cf. Emprisonnement*, Fractionnement de la peine*, Libération conditionnelle*, Placement à l’extérieur*, Semi-liberté*.
Voir : Tableau des incriminations protégeant le système judiciaire quant aux personnes placées sous main de justice (en droit positif français)
Prévue par l’art. 723-3 C.pr.pén. français, la permission de sortir autorise un condamné à s’absenter d’un établissement pénitentiaire pendant un temps relativement court. Elle a pour objet de préparer la réinsertion professionnelle ou sociale du condamné, de maintenir ses liens familiaux, ou de lui permettre d’accomplir une obligation exigeant sa présence. Mais il ne faut pas se cacher qu'elle comporte un risque pour les tiers et plus généralement pour la société.
Jeandidier (Droit pénal général) : La permission de sortir autorise un condamné à s’absenter d’un établissement pénitentiaire pendant une période de temps déterminée qui s’impute sur la durée de la peine en cours d’exécution. La durée de cette mesure varie en fonction du motif pour lequel elle est accordée. Ainsi, elle n’excède pas un jour lorsque le détenu doit se rendre à une convocation administrative…
Cass.crim. 22 juin 1994 (Bull.crim. n° 251 p.623) : Constitue une évasion le fait, pour un condamné bénéficiant d’une permission de sortie d’un établissement pénitentiaire, de ne pas rejoindre cet établissement à l’expiration de sa permission.
Trib. admin. Dijon 2 juin 1981 (Gaz.Pal. 1981 II somm. 321) : La responsabilité du service public en raison des dommages causés aux tiers par les détenus bénéficiaires de la permission de sortie ne saurait être subordonnée à la preuve d’une faute commise par l’Administration pénitentiaire mais découle des conditions mêmes dans lesquelles fonctionne le service, dès lors que le régime de ladite permission de sortie, instituée par le législateur en vue notamment de favoriser le maintien des liens familiaux ou de préparer la réinsertion sociale des détenus, crée un risque spécial pour les tiers qui ne bénéficient pas des garanties qui résultent pour eux de la détention continue du condamné.
Exemple (Ouest-France 14 septembre 2012) : Une psychiatre, chef de service dans un hôpital de Marseille, va être jugée pour homicide involontaire. L'affaire remonte à 2004. Depuis plusieurs mois, elle avait accordé à un patient un régime de sortie qui lui permettait de quitter l'établissement pour quelques jours. Schizophrène, il était hospitalisé pour des actes de violence, dont une tentative d'assassinat. Lors d'une ses sorties, le patient a tué un octogénaire, compagnon de sa grand-mère.
Exemple (Le Figaro 7 octobre 2015) : De nombreux détenus profitent des permissions de sortir pour s'évader. Le sujet est devenu crucial après qu'un braqueur, ayant écopé de six ans de prison, a grièvement blessé un policier en Seine-Saint-Denis. En fuite depuis le 27 mai dernier de la prison de Réau, le détenu, connu pour une trentaine d'antécédents judiciaires, notamment des vols à main armée et des violences volontaires, avait bénéficié d'une permission de sortir pour démarches successorales après le décès de son père.
PERQUISITION
Cf. Coffre-fort*, Commission rogatoire*, Enquête de police*, Instruction *, Juge d’instruction*, Nuit*, Preuve (recherche des)*, Sonorisation*, Vie privée*.
Voir : Procès de Charlotte Corday (n°I-9)
Pour un exemple : Procès verbal de perquisition
- Notion. Une perquisition consiste en la visite d’un lieu où peuvent se trouver des objets dont la découverte permettrait de faire avancer la recherche de la vérité.
Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : La perquisition est la recherche minutieuse de tous les éléments de preuve utilisables, effectuée au domicile d’un particulier.
Cass.crim. 20 septembre 1995 (Gaz.Pal. 1996 I Chr.crim. 7) : Toute perquisition implique la recherche d’indices permettant d’établir l’existence d’une infraction ou d’en déterminer l’auteur.
Balzac (Splendeurs et misères des courtisanes) : Après avoir opéré rue Saint-Georges, la Justice était descendue quai Malaquais y faire ses perquisitions.
- Régime. Elle s’effectue en principe sur l’ordre et sous le contrôle du juge d’instruction (art. 94 C.pr.pén.), mais peut être diligentée d’office par un officier de police judiciaire en cas d’enquête de flagrance (art. 56).
Cass.crim. 21 juillet 1982 (Bull.crim. n° 196 p. 535) : La «fouille à corps», assimilable à une perquisition, est nulle ainsi que les actes qui ont suivi, si elle a été pratiquée par un officier de police judiciaire alors qu’aucune information n’était ouverte et que l’existence d’un délit imputable à la personne fouillée n’était révélée par aucun indice apparent.
Versailles 29 novembre 1996 (Gaz.Pal. 1997 I somm. 288), refuse de sanctionner de simples arrière-pensées qu’aucun élément objectif ne vient caractériser.
- Si elle concerne un lieu public, la perquisition n’est pas soumise à des conditions spéciales.
Code de procédure pénale espagnol, Art. 546 : Le juge ou le tribunal qui connaît de l’affaire pourra ordonner l’entrée et la perquisition, de jour et de nuit, dans tous les édifices et lieux publics, s’il y a des indices que s’y trouvent la personne poursuivie ou des effets et instruments du délit, ou des livres, documents ou autres objets qui peuvent servir pour le découvrir et en établir la preuve.
Art. 547 : Seront réputés édifices ou lieux publics pour l’application des dispositions du présent chapitre:
1.° Ceux qui sont destinés à un service officiel militaire ou civil de l’Etat, la Province ou la commune, encore qu’y habitent les personnes chargées
dudit service ou celles qui entretiennent ou surveillent l’édifice ou le lieu.
2.° Ceux qui sont destinés à être des lieux de réunion ou de loisir, qu’ils le soient d’une manière licite ou non.
3.° Tous autres édifices ou lieux clos qui ne constituent pas le domicile d’un particulier aux termes de l’article 554.
4° Les navires de l’État.
Code de procédure pénale allemand, § 104 : La limitation d’heures ne vaut pas pour les lieux accessibles de nuit au public ou connus de la police comme refuges ou lieux de réunion de personnes pénalement condamnées, comme, dépôts de choses obtenues au moyen d’infractions, ou comme locaux servant de refuge aux jeux de hasard, au de trafic illicite de stupéfiants ou d’armes ou à la prostitution.
- Si elle vise un domicile privé, elle ne peut être commencée de nuit (après 21 h. et avant 6 h. du matin) que dans des circonstances exceptionnelles (art. 59 et 706-24-1).
Faustin Hélie (Traité de l’instruction criminelle) : Une condition de la légalité des perquisitions domiciliaires est qu’elles aient lieu pendant le jour. Aux termes de l’art. 76 de la loi du 22 frimaire an VIII, nul n’a le droit d’entrer dans une maison pendant la nuit, si ce n’est dans le cas d’incendie, d’inondation ou de réclamations faites de l’intérieur de la maison.
Code de procédure pénale allemand. § 104 : (1) De nuit, les lieux d’habitation, les locaux commerciaux et les propriétés encloses ne peuvent être l’objet d’une perquisition qu’en cas de poursuites pour flagrance, en cas d’urgence ou lorsqu’il s’agit de reprendre un détenu évadé.
Cass.crim. 24 juin 1987 (Bull.crim. n° 267 p.724) : Le mot domicile ne signifie pas seulement le lieu où une personne a son principal établissement, mais encore le lieu où, qu’elle y habite ou non, elle a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre juridique de son occupation et l’affectation donnée aux locaux.
Cass.crim. 8 juillet 2015, pourvoi n° 15-81731 : Il résulte de ces articles 706-91 et 706-92 C.pr.pén. et 8 Conv. EDH que l’ordonnance autorisant des perquisitions dans des locaux d’habitation en dehors des heures prévues à l’art. 59 C.pr.pén. doit être spécialement motivée, en droit et en fait, au vu de l’urgence et au regard des conditions prévues aux 1° à 3° de l’art. 706-91 de ce code ; l’absence d’une telle motivation de cette atteinte à la vie privée, qui interdit tout contrôle réel et effectif de la mesure, fait nécessairement grief aux intérêts de la personne concernée.
Cass.crim. 18 octobre 2006 (Gaz.Pal. 17 avril 2007) : Les agents de police judiciaire, agissant en enquête de flagrance sur un vol avec arme qui venait de se commettre, tenaient des dispositions de l'art. 54 C.pr.pén. le pouvoir d'appréhender le véhicule susceptible d'avoir été utilisé pour commettre un crime, afin de procéder à toutes constatations utiles, une telle opération ne pouvant être assimilée à une perquisition.
- Lorsqu'elle doit avoir lieu dans une entreprise industrielle ou commerciale, elle peut être autorisée par le juge des libertés et de la détention (art. L.450-4 zl.1 du Code de commerce).
Cass.crim. 22 janvier 2014, n°13-81013 : Il résulte de l'art. L.450-4 al.1 du Code de commerce qu'après avoir vérifié que la demande qui lui est soumise est fondée, le juge des libertés et de la détention peut autoriser des opérations de visite et saisie dans toute entreprise.
- Si elle est effectuée dans le cabinet d’un membre d’une profession libérale elle comporte des formes particulières (art. 56-1 et s. C.pr.pén.).
Cour EDH 24 juillet 2008 (Gaz.Pal. 11 janvier 2009) : La Cour estime que des perquisitions et des saisies chez un avocat portent incontestablement atteinte au secret professionnel, qui est la base de la relation de confiance qui existe entre l'avocat et son client. D'ailleurs, la protection du secret professionnel est notamment le corollaire du droit qu'a le client d'un avocat à ne pas contribuer à sa propre incrimination.
Cass.crim. 24 mars 1960 (D. 1960 531) : Aux termes de l’art. 96 C.pr.pén., les opérations de perquisition entrent dans les attributions du juge d’instruction ; en conséquence il a seul le droit de prendre connaissance des papiers et documents avant de procéder à leur saisie ; et le bâtonnier, lorsque la perquisition a lieu dans le cabinet d’un avocat, a pour rôle d’assurer le respect du secret professionnel et des droits de la défense, et non pas, comme le soutient à tort le demandeur, de procéder lui-même à la perquisition.
Cass.crim. 8 juin 1999 (Gaz.Pal. 1999 II Chr.crim. 159) : Pour rejeter la demande d’annulation de la perquisition effectuée par un officier de police judiciaire dans la chambre d’hôtel de T. -C..., médecin attaché à l’équipe cycliste Once, l’arrêt attaqué retient que cette chambre d’hôtel ne peut, en l’espèce, être considérée comme un cabinet médical.
Cass.crim. 14 novembre 2001 (Gaz.Pal. 2002 II somm.1657) : Justifie sa décision la chambre de l’instruction qui, pour rejeter le moyen d’annulation pris de l’irrégularité d’une perquisition à laquelle a procédé le juge d’instruction, en présence du bâtonnier, dans un cabinet d’avocat, relève que des indices de participations à des faits délictueux existaient à l’encontre de cet avocat au jour de cet acte et que la copie du disque dur du système informatique, effectuée par l’expert, assistant le magistrat, n’avait d’autre but que de perturber le moins possible le fonctionnement du cabinet collectif, ladite copie ayant été placée sous scellé et rien n’ayant été transcrit qui ne concernait la procédure.
Cass.crim. 1er mars 2006 (Bull.crim. n°60 p.231) : Sont régulières les perquisitions effectuées dans le cabinet et au domicile d'un avocat par un juge d'instruction, en présence du bâtonnier, dès lors que les saisies opérées étaient en relation directe avec l'infraction poursuivie, qu'elles étaient destinées à apporter la preuve de la participation de cet avocat à cette seule infraction et ont été limitées aux seuls documents nécessaires à la manifestation de la vérité.
Cass.crim.
8 juillet 2015, pourvoi n° 15-81179 : Il résulte des art.
56-1 et 96, dernier alinéa, C.pr.pén. que la confidentialité des
documents susceptibles d'être saisis lors d'une perquisition au
cabinet ou au domicile d'un avocat est assurée par la
circonstance que leur consultation est réservée au magistrat
instructeur et au bâtonnier ou à son délégué et que ce dernier
peut s'opposer à la mesure envisagée, toute contestation étant
soumise au juge des libertés et de la détention ;
Il résulte de l'arrêt que, sur les directives du juge
d'instruction, les gendarmes ont réalisé des photographies de
documents et d'objets lors des perquisitions effectuées au
domicile et au cabinet de l'avocat ; que, pour rejeter le moyen
fondé sur l'illégalité de cette opération, la cour retient que
ces clichés photographiques, susceptibles d'être en lien avec
les infractions, constituent des pièces à conviction soumises au
débat contradictoire et que la simple prise de clichés ne peut
être assimilée à une consultation ou à une prise de connaissance
desdits objets ou documents par les enquêteurs ;
Mais en prononçant ainsi, alors que les photographies de pièces
ont été versées au dossier de la procédure sans qu'aient été
mises en oeuvre les garanties prévues par la loi, la chambre de
l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe
ci-dessus rappelé ; d'où il suit que la cassation est encourue.
PERSÉCUTION
Cf. Discrimination*, Génocide*, Harcèlement*, Idéologie*, Provocation à commettre une infraction - provocation à la haine raciale*, Tolérance*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « Le protection de la personne humaine » (4e éd.), n° III-108 et s., p.522 et s.
- Notion. La persécution consiste en un traitement injuste, discriminatoire et inhumain, infligé à une personne, ou à un groupe de personnes, en raison de sa nationalité, de sa race, de ses convictions ou de sa religion.
Littré (Dictionnaire) : Persécution - Poursuite injuste et violente, vexation... se dit, en particulier, des poursuites pour cause religieuse.
Ali Sina (La psychologie de Mohamed et des musulmans) : La persécution suppose une action conduisant à des atteintes comme la privation des droits humains, l'emprisonnement, la torture et la perte de la vie. Un boycott étant une non-action ne peut être considéré comme une persécution.
Mg Di Falco (Le livre noir de la condition des chrétiens dans le monde) : Le vendredi 13 juin 2014, à la Une du quotidien barcelonais "La Vanguardia", le pape François exprimait toute son inquiétude : « Dans certains endroits, il est interdit de posséder une bible ou d'enseigner le catéchisme ou de porter une croix... Je voudrais qu'une chose soit claire : je suis convaincu que la persécution contre les chrétiens est aujourd'hui plus forte qu'aux premiers siècles de l'Église ».
- Règle morale. La vertu de tolérance condamne toute persécution perpétrée au nom d'une religion, d'une philosophie ou d'une idéologie.
Holbach (La morale universelle et les devoirs de l'homme) : Toute opinion, toute doctrine, tout culte, qui contrarient la nature de l' homme raisonnable et vivant en société, doivent être rejetés comme contraires aux intentions de l' auteur de la nature humaine : tout système religieux qui porterait à violer la justice, la bienfaisance, l' humanité, ou à fouler aux pieds les vertus sociales, doit être détesté comme un blasphème contre la divinité : enfin toute hypothèse qui produirait en son nom des dissensions, des haines, des persécutions et des guerres, doit être regardée comme un mensonge abominable.
Bautain (Manuel de philosophie morale, éd. 1866) : Les sectes poussent en général au fanatisme, et comme chacune prétend avoir pour soi la vérité et la parole de Dieu, toutes concluent que leurs adversaires sont des instruments de mensonge et d'iniquité. De là des haines aveugles, et d'autant plus impitoyables qu'elles s'autorisent de la sanction céleste, et pensent servir la divinité en se satisfaisant. C'est ainsi que la violence, le meurtre, la dévastation, le carnage et tous les genres de persécutions ont pu être ordonnés au nom de la religion, L'homme dans ces cas a mis sa volonté passionnée à la place de celle de Dieu, et en s'imaginant soutenir sa cause, il l'a en fait déshonorée par des horreurs commises en son nom. Les plus grands forfaits dont le monde ait été épouvanté, ont été accomplis par le fanatisme, qui le plus souvent les exécute froidement, avec le calme d'une conviction profonde et comme des œuvres agréables à Dieu. Cette aberration du coeur suppose une grande ignorance ou une intelligence foncièrement pervertie.
- Science criminelle. Dans une société libérale toutes les persécutions doivent être prohibées, qu'elles soit commises pour des motifs religieux ou politiques.
Franck Adolphe (Philosophie de droit pénal) : Il n’appartient pas à l’homme de se constituer le vengeur de la divinité ; aucun pouvoir sur la terre n’a reçu une telle mission et n’est en état de l’accomplir. Les obligations que nous avons à remplir envers la divinité étant comprises d’autant de manières qu’il y a de cultes différents, il en résulterait, si la société devait les placer sous la protection de la loi pénale, un système de persécution et d’intolérance qui rendrait impossible toute liberté et anéantirait le droit dans son principe. Il faudrait poursuivre avec la plus épouvantable rigueur non seulement les actes extérieurs, mais la pensée ; car, dans l’esprit d’un grand nombre de théologiens, l’hérésie, c’est-à-dire une certaine manière de penser, est le plus grand de tous les crimes.
Bluntschli (Droit public général) : Un sénat ou une chambre des pairs est une importante barrière contre la mobilité démocratique de la chambre des députés, ses excès de pouvoir, son abâtardissement possible, l'oppression ou la persécution des minorités.
- Droit positif français. Il condamne les persécutions, qu'elles soient commises dans un cadre politique ou sur un plan privé.
Code
pénal. Art. 212-1 (texte en 2010 : Constitue un crime contre
l'humanité et est puni de la réclusion criminelle à perpétuité
l'un des actes ci-après commis en exécution d'un plan concerté à
l'encontre d'un groupe de population civile dans le cadre d'une
attaque généralisée ou systématique :
8° - La persécution de tout groupe ou de toute collectivité
identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial,
national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste ou en
fonction d'autres critères universellement reconnus comme
inadmissibles en droit international.
Cass. soc. 1er octobre 1996 (Gaz.Pal. 1996 II Panor. 271) : S'agissant d'un salarié, ouvrier nettoyeur, délégué du personnel et délégué syndical qui a donné sa démission en soutenant y avoir été contraint par le comportement de l'employeur à son égard, la Cour d'appel qui a relevé que l'attitude de ce dernier caractérisait une volonté de brimade et de persécution à l'égard du salarié, ayant contraint celui-ci à démissionner, a pu décider que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.