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DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL

- Professeur Jean-Paul DOUCET -

Lettre  Q
(Première partie)

QUALIFICATION (des faits)

Cf. Casuistique*, Chef (du chef de)*, Compétence*, Consentement de la victime*, Correctionnalisation*, Cumul des peines*, Délit*, Délits pénaux*, Disqualification*, Droits de la défense*, Faits*, Faits justificatifs*, In abstracto - in concreto *, Indivisibilité des faits*, Induire*, Légalité*, Lieu des faits*, Moment des faits*, Nécessité (état de)*, Peine justifiée*, B.Perreau*, Qualifier*, Raisonnement pénal*, Syllogisme judiciaire*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 11, p.21 / n° 102, p.56 / n° I-125 p.179 / n° II-101, p.290 / n° II-116, p.307

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-A, p.17 /  n° I-I-I, p.19 / n° I-I-I-301, p.65 / n° I-I-I-346, p.113 / n° I-I-I-351 et s., p.118 / n° I-I-II-217, p.153

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° 9 p.9 / n° 11 p.11 / n° I-109, p.67 / n° I-110, p.68 / n° I-114, p.71 / n° I-130, p.91 / n° I-131, p.91 / n° I-132, p.93 / voir la Table alphabétique

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents  », n° 104, p.39 / n° 223, p.111 / n° 304, p.127 / n° 305, p.130 / n° 308, p.137 / n° 314, p.146 / n° 417, p.261 / n° 420, p.263 / n° 434, p.283 / n° 508, p.332

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-113, p.351 / n° II-I-124, p.363 / n° II-I-148, p.405 / n° II-I-152, p.414 / n° II-I-156, p.424 / n° II-I-157, p.424 et 426 / n° II-I-204, p.432 et s. / n° II-I-213 et s., p.444 et s. / n° II-II-216, p.508/509 / n° II-II-233, p.521

Signe Renvoi rubrique Voir : P. Moriaud, De la justification du délit par l'état de nécessité

Signe Renvoi rubrique Voir : A. Badr, les effets du consentement de la victime

Signe Renvoi rubrique Voir : Ortolan, Le droit de légitime défense, suivant la science rationnelle

Signe Renvoi rubrique Voir : G. Levasseur, Les problèmes fondamentaux du droit pénal spécial

Signe Renvoi rubrique Voir : Merle et Vitu, La qualification simple et les qualifications multiples

- Notion. La qualification judiciaire se présente comme un raisonnement visant à établir que les faits particuliers reprochés au prévenu entrent dans le domaine d’application d’une incrimination légale, constituent dès lors une infraction pénale et relèvent donc bien de la compétence des tribunaux répressifs.

Signe Doctrine Boré (La cassation en matière pénale) : L’opération de qualification des faits consiste à jeter un pont entre le fait et le droit, pour déterminer si une situation de fait peut s’identifier à une notion légale.

Signe Doctrine Garraud (Traité de l’instruction criminelle) : La qualification est la première opération que doit faire toute autorité pénale.

Signe Doctrine Vitu (Traité de droit pénal spécial) : La qualification consiste dans la confrontation des agissements déférés aux organes de répression avec les divers types de faits incriminés par la loi pénale : par exemple le procureur de la République cherchera à découvrir, à la lecture des procès-verbaux de police, quelle disposition pénale exacte est susceptible de s’appliquer aux faits décrits, dans toute leur complexité, par les fonctionnaires de police qui ont enquêté à leur sujet ; la même opération intellectuelle devra être menée par le juge d’instruction ou par la juridiction de jugement au cours des étapes ultérieures de la procédure.

- Science criminelle. Dans un système juridique fondé sur le principe de la légalité criminelle, la mission du juge consiste essentiellement à s'assurer que les faits reprochés par l'accusation correspondent point par point aux agissements incriminés par le législateur.

Signe Renvoi rubrique Voir : G. Levasseur, La qualification pénale

Signe Doctrine Bernard Perreau (De la qualification en matière criminelle) : Premier principe : Toute juridiction saisie a le pouvoir, et le devoir, de statuer sur la qualification. Ce principe n'est pas contesté, bien qu'on ne le trouve expressément formulé dans aucun texte. Le juge tient, en effet, de sa fonction même, le droit et le devoir de déterminer, en vue de l'application d'une sanction pénale, la consistance et la qualification des faits qui lui sont soumis. Il lui appartient de rechercher si ces faits réunissent bien les éléments constitutifs d'une infraction punissable et, dans ce cas, quel est, d'après la nature de la peine encourue, le classement, la qualification de cette infraction.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 27 janvier 2016, n° 15-80581 : Le juge répressif ne peut déclarer un prévenu coupable d'une infraction sans en avoir caractérisé tous les éléments constitutifs.

Signe Droit comparé Code de procédure pénale espagnol. Article 142. - Les jugements seront rédigés en respectant les règles suivantes … Seront consignés ... les fondements doctrinaux et légaux de la qualification des faits que l’on considère comme prouvés.

Signe Doctrine Donnedieu de Vabres (Traité de droit criminel) : La pratique de la correctionnalisation judiciaire consiste à porter devant le tribunal correctionnel une affaire qui relève normalement de la cour d’assises. Cette pratique est certainement incorrecte et illégale. Il n’appartient pas aux parties de porter atteinte aux lois de compétence qui ont un caractère d’ordre public.

Si un même fait tombe sous le coup d'une loi générale et d'une loi spéciale, c'est par préférence cette dernière qui doit recevoir application (specialia generalibus derogant).

Signe Histoire Digeste de Justinien (48, 19, 41). Papinien : La sanction des lois, qui fixe une peine déterminée à ceux qui n'obéiront pas à leur commandement, paraît n'être pas applicable aux espèces auxquelles une loi applique une peine particulière ; il n'est pas douteux que dans tout droit l’espèce déroge au genre.

- Jurisprudence. Tout d'abord, il est bien acquis que, par suite du principe de légalité, les tribunaux ne sauraient faire prévaloir leur opinion sur la règle de droit posée par la Parlement. Ils ont le devoir de donner aux faits leur qualification légale exacte, après avoir invité le défendeur à présenter ses observations sur ce point.

Signe Jurisprudence Trib.pol. Saint-Étienne 3 décembre 1959 (S. 1961 154), dans une affaire touchant les mœurs : Le juge n'est pas un moraliste qui puisse prononcer une condamnation dès qu'il constate une infraction aux règles de la société idéale qu'il peut concevoir ; c'est de l'observation purement objective des mœurs de la société de son temps et de son pays qu'il peut tirer le comportement de l'homme moyen ; en effet, au risque de tomber dans l'arbitraire, il a l'obligation de faire, dans toute la mesure du possible, abstraction de ses propres opinions.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 17 octobre 2001 (Gaz.Pal. 2002 J 1656) : S’il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c’est à la condition que le prévenu ait été en mesure de présenter sa défense sur la nouvelle qualification envisagée.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 19 mai 1999 (Gaz.Pal. 1999 II Chr.crim. 134) : Les juges ont le devoir, non contraire à l’art. 6.3 a) Conv. EDH, de restituer à la poursuite sa véritable qualification, pour autant qu’ils puisent les éléments de leur décision dans les faits mêmes dont ils sont saisis.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 27 février 1963 (Bull.crim. n°94 p. 185) : Lorsque la cour et le jury ont été interrogés in abstracto sur l’existence du fait principal et sur les circonstances aggravantes matérielles, les questions ultérieures relatives à la culpabilité de chaque accusé ne sauraient être entachées de complexité.

- Cumul de qualifications. Le principe de légalité impose au départ de retenir autant de qualifications pénales que de prohibitions légales enfreintes par le prévenu au cours de l’activité qui lui est reprochée. Si le conducteur d’une automobile, circulant sans permis de conduire, sans assurance et en état d’ivresse, cause un accident qui fait un mort et un blessé, il peut être poursuivi pour ces trois infractions de police et pour les deux infractions d’homicide et de blessures par imprudence.

Signe Renvoi livresVoir : J-P. Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-I-I-346, p.113

Signe Doctrine Puech (Droit pénal général) : Les tribunaux acceptent l’idée, selon la maxime « tot acta, tot delicta », que la pluralité de faits matériels puisse emporter pluralité d’infractions et donc de déclarations de culpabilité.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 24 janvier 1973 (Gaz.Pal. 1973 I 289) : Les faits qui constituent le délit de fuite ne sauraient être considérés comme de simples circonstances aggravantes du délit d'homicide ou de blessures involontaires qui a pu le précéder ; il s'agit en réalité d'un délit distinct commis nécessairement dans un temps différent et caractérisé par des éléments constitutifs qui sont indépendants de ceux qui définissent les infractions prévues et réprimées par les articles 319 et 320 C.pén.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 4 mai 2004 (Bull.crim. n° 105 p.402) : Commet cumulativement le délit de publicité de nature à induire en erreur et celui de tromperie, le voyagiste qui a fait diffuser une publicité comportant des allégations fausses ou de nature à induire en erreur, et qui trompe volontairement les cocontractants sur la nature des prestations fournies.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 3 mars 1960 (Bull.crim. n° 138, p. 286)  : Si la loi punit de la peine de mort la destruction par l’effet d’un explosif d’un édifice habité ou servant à l’habitation, parce que ce fait met en péril des vies humaines, ce crime n’en est pas moins essentiellement établi en vue d’assurer la protection des propriétés ; il est constitué dans tous ses éléments dès que son auteur a agi volontairement sachant qu’il détruisait ou tentait de détruire un édifice de cette espèce, sans qu’il soit nécessaire qu’il ait eu aucun dessein homicide.
Il suit de là que si l’auteur d’un tel attentat a eu en vue, indépendamment de la destruction de l’édifice, la mort de personnes, qu’elles habitent ou non le local soumis à l’action de l’explosif, il commet un second crime, dont l’élément matériel est constitué sans doute par le même fait, mais qui se distingue du premier par son élément intentionnel, qui est la volonté de tuer. Il ne s’agit pas, en tel cas, d’un crime unique, dont la poursuite sous deux qualifications différentes serait contraire au vœu de la loi, mais de deux crimes simultanés, commis par le même moyen, mais caractérisés par des intentions coupables essentiellement différentes.

Signe Exemple concret Exemple (Ouest-France 27 octobre 2006) : Un homme de 37 ans a été interpellé avant-hier à Rives, dans l'Isère, alors qu'il conduisait ivre et en téléphonant. Mais les gendarmes ont également découvert que l'homme n'avait jamais passé son permis et que bien sûr sa voiture n'avait ni carte grise ni assurance. L'homme devra répondre de tous ces délits devant le tribunal.

Il y a notamment lieu à cumul de qualifications lorsqu'un seul et même acte porte atteinte à deux intérêts juridiques distincts protégés par la loi pénale.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 6 février 2007 (Bull.crim. n° 29 p. 209) : Est justifiée la décision des juges du fond qui déclare constitués, en raison des mêmes agissements d'un prévenu, les délits de discrimination syndicale et de harcèlement moral prévus par les art. L.481-3 C.trav. et 222-33-2 C.pén. qui sanctionnent la violation d'intérêts distincts.

- Qualification spécifique. Le principe ci-dessus comporte des tempéraments et des exceptions qui ne peuvent être présentement détaillées.
Ainsi, lorsque le prévenu a accompli un seul acte, le juge doit normalement retenir la qualification la plus adéquate. Le fait de couper un arbre pour emporter son bois ne peut être reproché que sous la qualification de vol, sans retenir en outre la qualification de destruction de plantation.
De même, lorsque les divers actes commis tombent sous le coup d’un article de loi qui les envisage globalement c’est ce texte spécial qui doit prévaloir. Un vol commis dans une maison d’habitation ne peut être reproché, d’un côté en tant que vol, de l’autre en tant que violation de domicile ; mais sur la base du texte incriminant le vol avec effraction.

Signe Doctrine Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : Les tribunaux français considèrent généralement qu’un acte matériel unique à qualifications légales multiples constitue une seule infraction punissable « sous sa plus haute acception pénale ».

Signe Droit comparé Code pénal du Japon. Art. 54 : Quand un acte unique constitue deux ou plus de deux infractions distinctes, ou quand un acte qui apparaît comme le moyen ou le résultat d'une infraction constitue une autre infraction, la plus élevée des punitions prescrites pour ces infractions sera prononcée.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 13 mars 1984 (Bull.crim. n° 107 p.272) : Le fait objet de la poursuite peut et doit même être envisagé sous la plus haute acception pénale dont il est susceptible.

QUALIFIÉ (Crime)

Cf. Circonstance aggravante*, Majorité (des voix)*.

On parle de « crime qualifié » ou de « délit qualifié » pour désigner telle ou telle infraction lorsqu'elle est assortie d’une circonstance aggravante. Le parricide, par exemple, est un meurtre qualifié ; de même, le vol avec violence est un vol qualifié.
À propos du vote des magistrats lors du jugement d'un procès, on parle de "majorité qualifiée" lorsque le législateur exige une majorité renforcée (deux tiers...).

Signe Doctrine Vitu (Traité de droit pénal spécial) : L’expression « vol qualifié », utilisée déjà par certains criminalistes de l’ancien droit, désigne, par opposition au vol simple, le vol accompagné d’une ou de plusieurs circonstances aggravantes.

Signe Droit comparé Code pénal du Brésil. Art. 121 § 2 - [Homicídio qualificado] Homicide qualifié. Si l’homicide est commis moyennant paiement ou promesse d’une récompense … la peine est de douze à trente ans de réclusion.

Signe Droit comparé Code pénal de Thaïlande.  Dans son Art. 123 vise la  [Qualified piracy].

Signe Jurisprudence Cass.crim. 5 août 1992 (Gaz.Pal. 1993 I Chr.crim. 121) : Selon les énonciations de l’arrêt attaqué, l’inculpé se serait fait remettre par l’employé d’une agence bancaire une somme d’argent en menaçant le personnel d’un pistolet factice ; en cet état, la Chambre d'accusation a légalement justifié le renvoi de cet inculpé devant la juridiction criminelle, pour vol qualifié.

QUALIFIER, DISQUALIFIER, REQUALIFIER

Cf. Contraventionnaliser*, Correctionnalisation*, Disqualification*, Qualification*.

- Qualifier, comme il a été dit au mot Qualification*, c'est établir que les faits reprochés à un prévenu entrent dans la définition légale de telle incrimination. Puisqu'il a soustrait intentionnellement le bien en cause à son possesseur, le prévenu a commis un vol.

- Disqualifier, c'est modifier la qualification retenue au début des poursuites. Le plus souvent la Disqualification* consiste à descendre du niveau criminel au niveau correctionnel, ou du niveau correctionnel au niveau contraventionnel.
C'est de cette technique que le ministère public use lorsqu'il estime de bonne politique de traduire le prévenu devant le tribunal correctionnel plutôt que devant la cour d'assises (Voir : Correctionnalisation*).

Signe Dictionnaire Petit Robert. Disqualifier : Déclasser une infraction et la reclasser dans une autre catégorie.

Signe Doctrine Bouloc (Procédure pénale) : Lorsque la disqualification donnée par la juridiction de jugement atténue la gravité du fait, malgré le changement de qualification, la juridiction saisie demeure compétente.

Signe Droit comparé Code de procédure pénale du Mali. Art. 215 : La Cour d’assises a plénitude de juridiction pour juger les individus renvoyés devant elle par l’arrêt de mise en accusation. Elle peut disqualifier les poursuites et peut se saisir aussi d’office ou sur réquisition du ministère public de tous crimes ou délits imputés aux accusés qui se révéleraient au cours des débats.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 22 mai 1997 (Gaz.Pal. 1997 II Chr.crim. 206) : Pour disqualifier à bon droit en fourniture de renseignements d'identité imaginaires qui auraient pu provoquer des mentions erronées au casier judiciaire (art. 781 C.pr.pén. ) les faits poursuivis sous la qualification d'usurpation d'identité, et en déclarer le prévenu coupable, la Cour d'appel retient que, lors de son interpellation, S... a pris le nom de C..., dont l'existence réelle n'a pu être établie par l'enquête.

- Requalifier, c'est aussi modifier la qualification retenue au début des poursuites. Mais cette fois, c'est pour tenir compte des éléments qui ont été apportés, soit au cours de l'instruction préparatoire, soit au cours de l'instruction à l'audience. Il s'agit ici de donner une qualification définitive exacte.

Signe Dictionnaire Petit Larousse. Requalifier : Donner à un acte ou à un fait sa qualification exacte, en parlant d'un juge.

Signe Droit comparé Code d'instruction criminelle du Luxembourg. Art. 215.  Note : Délit requalifié en contravention. Lorsque le fait qui gît en prévention a été originairement qualifié de délit et que cette qualification n'a été modifiée dans le sens d'une contravention qu'ensuite des débats d'audience, la Cour a compétence pour en connaître (Cour 31 janvier 1914, 9, 344).

Signe Jurisprudence Cass.crim. 13 octobre 1998 (Gaz.Pal. 1999 I Chr. crim. 154) : Pour requalifier à bon droit les faits de «conduite sous l'empire d'un état alcoolique» en «conduite sous l'empire d'un état d'ivresse manifeste», les juges retiennent que, si le taux d'alcoolémie n'est pas régulièrement établi et ne peut servir de base à la prévention, il résulte toutefois des éléments du dossier que R... titubait, que son haleine sentait l'alcool, qu'il était agité et confus, tenait des propos incohérents et qu'il reconnaissait, après dégrisement, avoir bu, peu de temps avant l'accident.

QUALITÉ DE L'AUTEUR DE L'INFRACTION

Cf. Circonstances aggravantes*, Complicité*, Délits pénaux - délit de fonction*, Fonction -fonctionnaire*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-335, p.502

Le fait que l'auteur d'une infraction soit une personne investie d'une fonction ou d'une mission de service public rend ses agissements délictueux particulièrement graves pour la société. Aussi de nombreux textes voient-ils dans cette qualité une circonstance aggravante de l'infraction (quand elle n'en est pas déjà un élément constitutif). P.ex. l'art. 228-8 7° C.pén. voit dans la qualité de dépositaire de l'autorité publique une circonstance aggravante du crime de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
Dans la pratique, on hésite à classer cette circonstance parmi les circonstances réelles, les circonstances individuelles ou les circonstances mixtes. Il semble que cette dernière catégorie soit la plus appropriée puisque la qualité de l'agent relève des faits de l'espèce ; mais, dès lors qu'elle ne revêt pas un caractère matériel, cette cause d'aggravation ne peut se communiquer au complice que s'il est établi qu'il en a eu connaissance.

Signe Philosophie De Curban (La science du gouvernement, 1765) : Plus un homme est élevé en dignité, et plus le crime qu'il commet paraît énorme. Les mauvaises actions des Grands sont contagieuses, et elles sont d'autant plus criminelles qu'elles sont plus généralement imitées.

Signe Doctrine Villey (Cours de droit criminel) : On comprend très bien que la qualité de l'agent joue un rôle considérable en matière de pénalité. Ainsi, il est naturel que la qualité de fonctionnaire ou d'officier public chez l'agent aggrave le délit ; car le fonctionnaire public doit avoir une notion plus exacte de ses devoirs, et, d'autre part, il abuse de la confiance publique.

Signe Droit comparé Code pénal d'Andorre. Art. 25 : Constituent des circonstances aggravantes de la responsabilité : 5) L'abus d'autorité, de situation ou de confiance.

Signe Droit comparé Code pénal d'Italie. Art.61 - Circonstances aggravantes communes aggravant le délit, lorsqu'elles n'en sont pas des éléments constitutifs ... 9) avoir commis le fait délictueux avec abus des pouvoirs, ou avec violation des devoirs inhérents à une fonction publique ou à un public service, ou bien avec la qualité de ministre d'un culte.

Signe Droit comparé Code pénal du Japon. Art. 65 : Lorsqu'une personne collabore à une activité criminelle dans laquelle le statut social de l'auteur des faits conditionne la criminalité de l'acte, cette personne est tenue pour complice quand bien même elle n'aurait pas cette qualité. Toutefois, lorsque la gravité de la sanction varie selon que le coupable possède ou non un certain statut social, la sanction ordinaire sera infligée à la personne qui ne possède pas cette qualité.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 26 juillet 1994 (Gaz.Pal. 1994 II Chr. 693) : L’art.14 de la Conv. EDH ne fait pas obstacle à l’existence en droit interne d’une circonstance aggravante personnelle tirée de la profession de l’auteur d’une infraction commise dans l’exercice de ses fonctions.

QUALITÉ DE LA VICTIME DE L'INFRACTION

Cf. Circonstances aggravantes*, Égalité*, Délits pénaux*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° III-323, p.488

Par exception au principe de l'égalité devant la loi, certaines personnes bénéficient d'une protection pénale renforcée. Il en est ainsi (art. 221-4), dans le cas du meurtre, du mineur de quinze ans, d'un ascendant légitime ou naturel, d'une personne vulnérable, d'un magistrat, juré ou officier public, d'un témoin, victime ou partie civile ...
Cette circonstance aggravante revêt un caractère objectif, puisqu'elle peut être constatée lors de l'examen des faits reprochés ; mais elle ne revêt pas toujours un caractère matériel, notamment lorsqu'elle concerne le statut social de l'intéressé ; aussi faut-il la ranger dans les circonstances aggravantes mixtes qui ne se communiquent aux complices que s'ils en ont eu connaissance.

Signe Doctrine Merle et Vitu (Traité de droit criminel) : Les circonstances aggravantes réelles ... La loi retient la qualité de la victime (fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions, père, ou mère de l'agent..., personne d'une particulière vulnérabilité etc.) .

Signe Histoire Riché (La vie quotidienne dans l'empire carolingien) : Le roi carolingien, gardien de l'ordre public, prévoit une amende de 60 sous qui punit les atteintes au "ban royal" : meurtres de pélerins...

Signe Droit comparé Code criminel de Moldavie. Art. 77 : Constituent des circonstances aggravantes ... e) l’action dirigée contre un mineur de moins de 14 ans, contre une femme enceinte ou une autre personne particulièrement vulnérable ; f) l’action dirigée contre une personne se trouvant dans l’exercice de ses fonctions.

Signe Droit comparé Code pénal d'Andorre. Art. 308 : Sera puni d'un emprisonnement d'une durée maximale d'un an quiconque aura causé volontairement des lésions dont le temps de guérison est supérieur à quinze jours et ne dépasse pas trente jours, s'il n'en résulte pas d'incapacité d'une durée supérieure ou de préjudice esthétique notable. Cependant, si les blessures ont été infligées à une personne hors d'état de se protéger du fait de son âge ou de son état physique ou mental, ou à des ascendants ou à des fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions, la peine encourue sera de deux ans d'emprisonnement.

Signe Jurisprudence Cass.crim . 20 décembre 1995 (Bull.crim. n°393 p.1148) : L'art. 221-4 C.pén. érige en circonstance aggravante la qualité de la victime d'un meurtre, ici une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public.

QUANDO  -  L'une des questions que doit se poser le tribunal lors de l'individualisation de la sanction : quand l'infraction a-t-elle été commise ?

Cf. Quis*, Quid*, Ubi*, Quibus auxilliis*, Cur*, Quomodo* - et Motifs (de l'individualisation de la sanction)*

Signe Renvoi livres Voir : J-P. Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-III-II-3 p. 295

QUARANTAINE  -   Voir : Épidémie*, Épizootie*.

Signe Doctrine Merlin (Répertoire de jurisprudence, 1827) : On appelle quarantaine le séjour que ceux qui viennent du Levant ou de tout autre pays infecté ou soupçonné de contagion, sont obligés de faire dans un lieu séparé de la ville où ils arrivent. On prend cette précaution pour éviter que les équipages ou passagers ne rapportent d'Orient l'air des maladies contagieuses et pestilentielles qui y sont fort fréquentes... [sous peine de sanction pénale arbitraire].

QUASI-DÉLIT

Cf. Délit civil *, Faute*, Impéritie*, Imprudence*, Inattention*, Négligence*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° I-126, p.180 / n° I-212, p.218 

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° II-126, p.293 / n° I-212, p.194 / n° II-309 p.366 / n° V-603 p.651/ Table alphabétique v° Délit civil 

- Notion. Le quasi-délit est caractérisé par une faute ayant causé un préjudice à autrui, faute consistant en une simple maladresse, inattention, imprudence ou impéritie. Il correspond à une faute involontaire.

Signe Doctrine Carbonnier (Droit civil) : Selon la terminologie la plus usuelle, le délit est la faute intentionnelle et le quasi-délit la faute non intentionnelle.

Signe Droit comparé Carrara (Cours de droit criminel) : Dans un langage parfaitement exact, on réserve le nom de délit pour les faits dolosifs ; aux faits entachés de faute, les praticiens ont appliqué le nom de quasi-délit.

Signe Jurisprudence Cass.com . 6 mai 1986 (Gaz.Pal. 1986 II panor. cass. 182) : L’action en concurrence déloyale suppose seulement une faute ; le quasi-délit prévu par les textes ne requiert pas un élément intentionnel.

- Règle morale. La simple imprudence, négligence, inattention constitue un manquement dans les rapports sociaux. Dès lors qu'avec un peu de vigilance cette faute aurait pu être évitée, elle oblige celui qui l'a commise à réparer le dommage qui en est résulté.

Signe Philosophie Pontas (Dictionnaire de cas de conscience) : Au for extérieur, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Si ce fait a été commis avec l’intention de nuire, c’est un délit ; si c’est par négligence ou par imprudence, c’est un quasi-délit.

Signe Philosophie Proal (Le crime et la peine) : L'intention, qui aggrave la culpabilité, n'est pas une condition de la responsabilité morale. Il y a un mal moral dans une négligence qu'on aurait pu éviter ; il y a une faute dans une imprudence préjudiciable pour nos semblables. L'homme doué de raison et de liberté a le devoir de veiller aux conséquences de ses actes, de manière à ne causer la mort de personne.

- Science juridique. On pose généralement en principe que la simple faute constitue, moins un délit au sens propre du terme, qu'un quasi-délit ; lequel relève du droit civil et non du droit criminel, comme il donne lieu à des dommages-intérêts et non à une sanction pénale.

Signe Histoire Denisart (Collection de jurisprudence, 1768) : On appelle quasi-délit certaines fautes qui procèdent de l’inadvertance ou de l’impéritie que l’on commet sans mauvais dessein, comme lorsqu’on jette quelque chose sur la voie publique et que cela nuise aux passants… La peine se réduit à des dommages-intérêts ou à une amende de police.

Signe Doctrine Merlin (Répertoire de jurisprudence) : Le quasi-délit est un fait par lequel une personne, sans malignité, mais par imprudence, cause quelque préjudice à une autre personne. Le quasi-délit produit, contre son auteur, l'obligation de réparer le mal qui en résulte.

Signe Philosophie Lombroso (Sociologie criminelle) : Pour le dommage privé et social qui n’est pas causé avec malice … Ces faits devraient être éliminés du Code pénal et devenir seulement des délits ou quasi-délits civils.

Il en va autrement pour la protection d'intérêts juridiques particulièrement importants, telle la vie ; ou dans la lutte contre les agissements les plus dangereux, tel l'incendie.

Signe Droit comparé Code pénal de Malte. Art. 225 : Quiconque, par imprudence, inattention, impéritie dans son art ou sa profession, ou inobservation de la réglementation, cause la mort de quelque personne ... encourt une peine d'emprisonnement de quatre ans au plus.

Signe Droit comparé Code pénal d'Argentine. Art. 189 : Sera puni d'un mois à un an de prison, celui qui, par imprudence ou négligence, par impéritie dans son art ou profession ou par inobservation des règlements ou des décrets, cause un incendie ou d'autres dommages.

- Droit positif. Le législateur pénal français n'incrimine guère les quasi-délits que dans le cas d'homicide par imprudence, ou lorsqu'ils caractérisent des délits de fonction.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 9 octobre 2001 (Gaz.Pal. 2002 J 361) : Pour déclarer le directeur d'un camp de vacances et l'organisateur du raid nautique, auquel participait l'équipage du dériveur, coupable d'homicides et de blessures involontaires aggravés par un manquement délibéré à des obligations de sécurité et de prudence imposées par la loi ou les règlements, commis en ce qui concerne les sept victimes mineures, et d'homicide involontaire commis, la Cour d'appel relève à sa charge des fautes d'imprudence, d'inattention, de négligence et des manquements à plusieurs obligations de sécurité ou de prudence imposées par la loi ou les règlements ayant contribué à la réalisation du dommage.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 21 novembre 1991 (Droit pénal) : Si l'information n'a pas identifié les auteurs de la soustraction des quarante-quatre scellés, celle-ci a été permise par la négligence du prévenu auquel la garde des scellés incombait. Est donc constitué à son égard le délit de l'art. 254 C.pén. [art. 432-16 nouveau]

QUERELLE

Cf. Batterie*, Coups et blessures*, Homicide*, Meurtre*, Rixe*.

Une querelle est une dispute grave, où les insultes peuvent s’envenimer jusqu’à entraîner des coups et blessures, et relever ainsi du droit criminel. Si les opposants sont nombreux on parle plutôt de Rixe*.

Signe Doctrine Langlade (Code pénal de 1810) : Les rixes et les querelles peuvent entraîner à tous tes excès ; cet esprit d'animosité qu'elles fomentent sans cesse a été la cause de bien des crimes.

Signe Histoire Loi des bourguignons (dite Loi Gombette) : Nous avons voulu, par de sages lois prohibitives, prévenir les abus qui pouvaient être pour nos sujets une occasion de querelle.

Signe Droit comparé Leclère (Codes cambodgiens). Art. 26 : Si, au cours d’une querelle, quelqu’un, prenant un bâton, frappe, blesse, contusionne, casse les dents, arrache les cheveux, éborgne sen adversaire, il sera condamné à une double amende ; s’il a frappé avec la main, l’amende sera simple. S’il a frappé avec du fer, l’amende sera triple.

Signe Droit comparé Code criminel des Indiens Ute. §13-4-113 : Une personne est coupable d'un délit aggravé ... si elle utilise une arme dangereuse au cours d'un combat ou d'une querelle.

Lorsque des coups sont portés au cours d’une querelle, ils revêtent normalement la qualification d’actes volontaires ; mais on peut difficilement y voir des actes prémédités.

Signe Jurisprudence Cass.soc. 4 juin 1984 (Tables Gaz.Pal.) : Ayant retenu qu’un ouvrier agricole avait cherché querelle à son chef de culture, s’était saisi d’une barre de fer pour le frapper et n’en avait été empêché que par l’intervention du fils de l’employeur… la Cour d’appel a pu déduire de ces constatations que comportement de l’intéressé était constitutif de faute grave.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 9 janvier 1990 (Gaz.Pal. 1990 II somm. 375) : Au cours d’une querelle concernant l’exploitation de leur commerce, l’accusé aurait porté à la victime un coup de couteau à la poitrine ayant entraîné sa mort. Les juges saisis de ce fait n’ont pas entaché leur arrêt de contradiction en constatant, d’une part, que l’accusé n’aurait pas eu, avant cette querelle, l’intention de tuer la victime et qu’il n’aurait donc pas prémédité son acte, et en déduisant, d’autre part, de la force avec laquelle le coup aurait été donné et de la région du corps où il aurait été porté, que son auteur aurait eu, au moment de la commission de l’acte, une intention homicide.

Suite de la lettre Q