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Section V

La FIXATION DES réparations civiles

A : Indications générales

N.B. : Voir aussi la rubrique Action civile, recevabilité de l’action.

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Action civile - Règle « electa una via non datur recursus ad alteram ».

Sur le choix entre la juridiction répressive et la juridiction civile, voir : Cass. 2e civ. 26 mars 1965 (Dame M...  c. Ets D...).

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Personnes pouvant prétendre à réparation – Adage nemo auditur propriam turpitudinem allegansCas du voleur et de son complice.

Cass.crim. 14 mars 2000 (Bull.crim. n° 111 p.332) :

Selon l’art. L.211-1 al.2 du Code des assurances, en cas de vol d’un véhicule, les contrats d’assurance, visés en son premier alinéa, ne couvrent pas la réparation des dommages subis par les auteurs, coauteurs ou complices du vol (en l’espèce vol d’une motocyclette, accident, et mort du complice).

 

Réparation civiles – Personnes ayant droit à réparation – Héritiers d’une victime qui décède en cours d’instance (oui).

Cass.crim. 28 juin 2000 (Bull.crim. n° 248 p.733) :

Le droit à réparation du dommage causé par une infraction à une victime qui vient à décéder, se transmet à ses héritiers ; chacun de ceux-ci l’exerce dans son intégralité.

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Personnes tenues à réparation - Auteur de l’infraction.

Cass.crim. 18 novembre 1986 (G...  c. S..., ci-dessus I 3°) :

L’auteur d’une infraction est tenu à la réparation intégrale du dommage qui en résulte pour une victime à laquelle aucune faute n’est imputée, même s’il n’en est pas le seul responsable.

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Civilement responsable – principe général de la responsabilité du fait des personnes dont on a la garde.

Cass.crim. 26 mars 1997 (Gaz.Pal. 1997 II Chr.crim. 151) :

Un établissement d’éducation est responsable, au sens de l’art. 1384 al.1 C. civ., du dommage causé à autrui par les mineurs qui lui sont confiés par le juge des enfants dès lors qu’aucune décision judiciaire n’a suspendu ou interrompu cette mission.

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Civilement responsable – responsabilité civile du commettant du fait de son préposé – fondement.

Cass.crim. 11 juillet 1978 (Bull.crim. n° 231 p. 610) :

La responsabilité civile du commettant a pour but unique de protéger les tiers contre l’insolvabilité de l’auteur de l’infraction, et non de décharger celui-ci dans une mesure quelconque de la responsabilité qui lui incombe.

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Civilement responsable – responsabilité civile du commettant du fait de son préposé – conditions.

Cass.crim. 22 avril 1977 (Bull.crim. n° 132 p. 332) :

Le commettant est civilement responsable de son préposé lorsque celui-ci a trouvé, dans l’emploi qu’il occupait, l’occasion et les moyens de sa faute.

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Personnes tenues à réparation – Salarié ayant agi uniquement dans le cadre de la mission qui lui est impartie (non).

Cass.crim. 23 janvier 2001 (Bull.crim. n° 21 p.57 G...d), sommaire :

N’engage pas sa responsabilité civile à l’égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui est impartie par son commettant.

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Personnes civilement responsables – Père et mère – Responsabilité de plein droit ne s’effaçant que devant la preuve d’un cas de force majeure ou d’une faute de la victime.

Cass.crim. 28 juin 2000 (Bull.crim. n°256 p.753) :

Les père et mère, ou celui d’entre eux à qui l’enfant est confié, et dont la cohabitation avec celui-ci n’a pas cessé pour une cause légitime, ne peuvent s’exonérer de la responsabilité de plein droit pesant sur eux, que par la force majeure ou la faute de la victime.

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B - Les restitutions

 

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C - Les dommages intérêts

a : Généralités

Action civile - dommages-intérêts - principe de la réparation intégrale du préjudice subi par la victime.

Cass.crim. 16 janvier 1980 (Bull.crim. n° 25 p. 61).

L...  c. Dame M...

Sur le moyen de cassation, pris de la violation des art. 1382 C.civ., 7 de la loi du 20 avril 1810, et 455 C.proc.civ., pour violation de la loi, défaut de motifs, manque de base légale... Vu lesdits articles, ensemble l’art. 3 C.pr.pén.;

Attendu que, si les juges du fond apprécient souverainement le préjudice dans la limite des conclusions des parties, ils doivent tenir compte de tous les chefs de dommage, aussi bien matériels que corporels ou moraux découlant des faits, objets de la poursuite, pour en réparer l’intégralité;

Attendu que l’arrêt attaqué qui a reconnu la dame M... coupable de blessures involontaires sur la personne de L... et de contravention au Code de la route, a déclaré la prévenue entièrement responsable des conséquences dommageables de l’accident, au cours duquel la voiture conduite par L... a été mise hors d’usage;

Attendu que, statuant sur les intérêts civils, la Cour d’appel a retenu que le véhicule en question avait été donné en location par la société Loc... avec option d’achat, à la dame L... et qu’aux termes de l’article 5 du contrat, le matériel loué restait la propriété du bailleur;

Attendu que sans rechercher si le dommage subi par la société bailleresse du fait de la perte du véhicule ne se trouvait pas, en tout ou partie, compensé par le jeu des clauses du contrat de crédit-bail relatives aux obligations du locataire en cas de sinistre, la Cour d’appel, par une disposition devenue définitive dans les rapports entre la prévenue et la société Loc... , a alloué à ladite société, partie civile, une somme représentant selon les motifs de l’arrêt, la valeur de la voiture détruite;

Attendu qu’en revanche, pour débouter L... de sa demande ten­dant à la réparation du préjudice matériel résultant de l’impossibilité de faire usage de l’option d’achat consentie par la société Loc... , la Cour d’appel a déclaré que le dommage allégué ne résultait qu’indirectement de l’infraction, la perte patrimoniale éprouvée trouvant, sa source dans le contrat;

Mais attendu qu’en refusant ainsi de tenir compte de ce que l’infraction en mettant obstacle à l’exécution normale dudit contrat avait privé les époux L... des avantages qu’ils étaient fondés à en attendre en contre­partie des sommes qu’ils avaient déjà versées et qui ne correspondaient que pour partie au coût de la location du véhicule, la Cour d’appel a méconnu le principe ci-dessus rappelé;

D’où il suit que la cassation est encourue...

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Action civile - dommages-intérêts - préjudice indemnisable - perte d’une chance (oui).

Cass.crim. 24 février 1970 (Bull.crim. n° 73 p.162)

T...

Sur le moyen de cassation pris de la violation des art. 2 et 3, 85 C.pr.pén., 319 C.pén., 1382 C.civ., 593 C.pr.pén., et 7 de la loi du 20 avril 1810, défaut de motifs et manque de base légale...

Attendu qu’il résulte des constatations des juges du fond que B... a été mortellement blessé dans un accident de la circulation, dont T... chauffeur au service de la Sté R... a été reconnu entièrement responsable, et ladite société déclarée civilement responsable;

Que les juges du fond précisent que B... était au moment de sa mort étudiant en médecine de sixième année, très brillant interne des hôpitaux de Paris et qu’il se destinait à la chirurgie; qu’il voyait s’ouvrir devant lui à bref délai de belles perspectives d’avenir dont sa femme devait profiter et qui lui auraient assuré une situation très supérieure à celle qu’elle avait;

Attendu qu’en l’état de ces constatations, en tenant compte pour réparer le préjudice matériel et moral subi par la dame B... du fait de la mort accidentelle de son mari de la situation à laquelle celui-ci devait accéder, la Cour n'a violé aucun des textes visés au moyen;

Qu’en effet, la dame B... a perdu la chance de bénéficier de la situation à laquelle devait accéder son mari et que cette perte constitue un préjudice certain et actuel découlant directement de l’accident dont T... a été déclaré responsable;

Que le moyen ne saurait donc être accueilli...

Rejette

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b) L’évaluation des dommages-intérêts

Puisque le législateur se trouve dans l’impossibilité de déterminer à l’avance l’indemnité à laquelle la victime d’une infraction future aura légitimement droit, cette tâche incombe par la force des choses au tribunal saisi présentement de l’affaire.

Mais on passe alors du plan de la légalité abstraite au plan de l’équité concrète, qui est « arbitrée » par les juges. Depuis de nombreuses années, la Gazette du Palais publie des tableaux de dommages-intérêts qui aident la jurisprudence à maintenir une certaine cohérence dans ses appréciations. Voici trois exemples pris dans le numéro du 7 novembre 2002.

RESPONSABILITÉ CIVILE - Fixation des dommages et intérêts – Homme de 22 ans - Incapacité permanente partielle de 8 % - Coursier en moto - Incidence professionnelle

C. Paris (17e ch. A), 17 juin 2002: A.M.F. c/ MM. D...t et N...r & C.P.A.M. de Paris.

I. EXPERTISE

Il convient, compte tenu des conclusions du rapport d’expertise qui n’est pas contesté et de l’ensemble des pièces versées aux débats d’indemniser le préjudice subi par la victime âgée de 20 ans lors de l’accident et de 22 ans à la consolidation et exerçant la profession de coursier, comme suit :

II. INDEMNISATION

1° Préjudice soumis au recours des organismes sociaux

- Frais médicaux et assimilés pris en charge par la C.P.A.M. (non contestés) : 23.774,82 F, soit............ 3.624,40 €

- Arrêt d’activité

Les parties sont d’accord sur le salaire mensuel de la victime mais divergent quant à l’indemnisation des périodes d’incapacité temporaire partielle, l’assureur estimant qu’elle ne doivent être indemnisées qu’à hauteur de 50 %.

S’il ressort effectivement du rapport d’expertise que la victime a subi un arrêt d’activité du 18 mars 1996 au 17 mai 1998 date de la consolidation et que l’expert a décomposé cette période en 3 périodes d’incapacité temporaire totale et 2 périodes d’incapacité temporaire partielle, il en ressort également que les 2 périodes d’incapacité temporaire partielle sont situées l’une et l’autre entre 2 périodes d’incapacité temporaire totale; que l’expert n’a pas précisé le taux de ces incapacités temporaires partielles, que l’état de santé de la victime ne lui a jamais permis de reprendre son activité professionnelle et qu’il a été déclaré inapte à la reprise du travail le 5 décembre 1996 par la médecine du travail ; qu’ainsi c’est à juste titre que le Tribunal a admis que la perte de revenus était totale pendant toute la durée de l’arrêt d’activité et a accordé de ce chef une indemnité de 163.072 F, soit… 24.860,17 €

- Déficit fonctionnel

Les séquelles décrites par l’expert justifient l’indemnité allouée, soit.… 8.537,14 €

- Préjudice économique

La victime travaillait depuis le 23 janvier 1995 en qualité de coursier pour la société S... avec un contrat à durée indéterminée. Du fait de l’accident il a été déclaré définitivement inapte à cette profession par la médecine du travail le 5 décembre 1996, puis a fait l’objet d’un licenciement économique avec indemnité le 18 mars 1998. Il est depuis au chômage et perçoit des indemnités A.S.S.E.D.I.C.

L’expert après avoir souligné qu’il persiste des séquelles au niveau des 2 poignets (douleurs, enraidissement des différents mouvements, fragilité et instabilité) qui expliquent la fatigabilité, les difficultés et la gêne lors des mouvements de serrage de la main et de l’écriture et des difficultés au port de charges a considéré qu’il existe un retentissement avec inaptitude à la profession de coursier en moto et noté qu’une reconversion était en cours et justifiée;

Si ces conclusions établissent incontestablement une dévalorisation de la victime sur le marché de l’emploi, une fatigabilité et une pénibilité accrue auxquels il y a lieu d’ajouter une perte de revenus, il convient également de constater que la victime, dont le déficit fonctionnel non discuté n’est que de 8 %, qui n’est pas déclaré inapte à tout travail et qui n’avait que 22 ans à la consolidation ne justifie ni des raisons pour lesquelles la reconversion en cours lors de l’expertise n’a pas abouti, ni d’autres tentatives de reconversion (étant relevé que s’il produit une lettre de l’A.N.P.E. datée du 3 décembre 2000 lui proposant une formation pour obtenir le permis poids lourds et un contrat à durée indéterminée il ne prouve pas pour quelle raison cette proposition n’a pas été suivie d’effet) ni avoir entrepris des recherches sérieuses pour retrouver un emploi.

Compte tenu de ces éléments, il lui sera alloué à ce titre la somme de ... 32.000 €

Total ... 69.021,71 €

Déduction faite de la créance de la sécurité sociale qui s’élève à 25.730,70 €

il convient d’allouer à la victime une indemnité complémentaire de 43.291,01 €.

2° Préjudice personnel

- Gêne dans les conditions d’existence pendant l’incapacité temporaire totale

Ce poste qui correspond à un préjudice d’agrément subi avant consolidation doit être exclu du recours des organismes sociaux et justifie une indemnité totale de 54.650 F, soit... 8.331,34 €

- Souffrances : caractérisées par le traumatisme initial et les traitements subis et cotés 4,5/7 par l’expert, elles seront indemnisées par la somme de ... 9.146,94 €

- Préjudice esthétique (non contesté) : 5.000 F soit ... 762,25 €

- Préjudice d’agrément: l’expert a estimé que du fait des séquelles de l’accident et notamment de la bilatéralité des lésions, la victime est inapte aux activités de tennis, moto-course et aux sports de musculation qu’il justifie avoir pratiqués antérieurement.

Les premiers juges, après avoir relevé qu’il n’avait que 22 ans lors de la consolidation lui ont justement alloué de ce chef, la somme de 50.000 F qu’il sollicite soit... 7.622,45 €

Total ................................................... 25.862,98 €

La victime recevra ainsi en réparation de son préjudice corporel, une indemnité totale de 43.291,01 € + 25.862,98 € = 69.153,99 €.

Il est inéquitable de laisser à la charge de la victime la totalité des frais non compris dans les dépens d’appel;

Il lui sera alloué de ce chef la somme complémentaire de 1.500 €.

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RESPONSABILITÉ CIVILE - Fixation des dommages et intérêts - Application en matière d’incapacité permanente - 38 ans, sexe masculin - I.P.P. de 10 %

C. Paris (17e ch. A), 10 juin 2002 : Michel D...s & autre c. G. R...s & autre.

I. Expertise

Sur l’indemnisation de la victime.

Il résulte en substance des conclusions du rapport d’expertise médicale que la victime a subi, en conséquence de l’accident du 23 mai 1995, une incapacité temporaire totale s’étant étendue de cette date au 31 mars 1996, suivie d’une incapacité temporaire partielle à 15 % du 1er avril 1996 au 7 septembre 1997; une incapacité permanente partielle chiffrée à 10 % à l’issue de la consolidation de ses blessures acquise le 7 septembre 1997 ; un préjudice professionnel nul ; un pretium doloris chiffré à 4/7 ; un préjudice esthétique à 2/7 et un préjudice d’agrément ;

II. Indemnisation

A - Postes de préjudice soumis à recours

1 - Frais médicaux et assimilés exposés pour le compte du blessé par la Ville de Paris selon relevé de celle-ci non discuté par les parties… 2.712,90 €

2 - Incapacité temporaire totale : Les appelants ne contestent l’indemnité de 80.352,65 F retenue par le Premier juge à ce titre que parce que doivent en être déduites, selon eux, les sommes de 46 F, de 5.748,18 F et de 1,052,20 F correspondant aux heures supplémentaires et primes de transport qui n’ont pas à être prises en compte puisque, par définition, le blessé n’a pas travaillé pendant une incapacité temporaire totale et que la Ville de Paris n’avait donc pas à lui payer puisqu’elles ne sont que «le corollaire d’un travail effectif ». Or ces heures supplémentaires et primes doivent bien, comme le Tribunal l’a retenu, être prises en considération, non seulement pour les motifs qu’il a développés avec raison mais encore parce qu’elles doivent en fait être considérées comme un élément du salaire de la victime dont elles font partie et que ladite victime aurait donc dû percevoir sans la survenance de son incapacité temporaire totale; soit donc la contre-valeur à retenir de ... 12.249,68 €

3 - Incapacité temporaire partielle : Les auteurs du dommage ne contestent l’indemnité totale de 80.035,76 F retenue à ce titre par le Premier juge que a) pour le même motif ci-dessus, inopérant pour les raisons sus-indiquées ; b) parce que l’incapacité temporaire partielle dont s’agit étant de 15 %, l’application de ce taux s’imposait et non de celui de 50 % apprécié, à tort selon eux, par le Tribunal. Or, c’est avec raison que ce dernier a retenu ce dernier taux, un travail à 85 % ne pouvant, comme il l’a formulé à juste titre, se concevoir, contrairement à une reprise à mi-temps; soit donc la contre valeur de ... 12.201,37 €

4 - Perte de rémunération du blessé: Pour les raisons ci-dessus exposées dans l’examen de l’incapacité temporaire totale de la victime, les heures supplémentaires et indemnités diverses que celui-ci aurait dû percevoir s’il avait travaillé pendant son incapacité temporaire totale et incapacité temporaire partielle et qu’il n’a de ce fait pas perçues, doivent lui être remboursées, contrairement à ce que soutiennent à tort les appelants. Les sommes de 16.994,94F et de 21.120,25F retenues par le premier juge à ce titre n’étant pas autrement discutées seront donc retenues. Le Tribunal n’ayant par ailleurs ainsi pris en compte que la seule perte de rémunération de la victime allant jusqu’au 30 novembre 1996 et omis celle s’étendant du 1er décembre 1996 au 7 septembre 1997, il convient d’ajouter l’indemnisation à ce titre de cette dernière période à hauteur de la somme justifiée par ladite victime de 4.635,62 F, soit un total général de 25.755,87 F, soit encore la contre-valeur de... 3.926,46 €

5 - Déficit fonctionnel séquellaire : chiffré à 10%, ce poste de préjudice, pour une victime âgée de 38 ans (née le 15 novembre 1958) lors de la consolidation de ses blessures (acquise le 7 septembre 1997) a été convenablement indemnisé par le premier juge, dans une disposition qui sera donc confirmée, soit la somme de 70.000 F, soit encore la contre-valeur de... 10.671,43 €

Ensemble ...........................................  41.761,84 €

En sorte qu’après application de la limitation du droit à indemnisation de la victime, puis déduction des créances tant de la Ville de Paris que de la Caisse des dépôts et consignations, il ne revient aucune indemnité complémentaire à cet intimé ; le jugement sera par conséquent confirmé sur ce dernier point.

B - Postes de préjudice personnel et matériel

Les dispositions y relatives du jugement ne sont remises en cause par les parties…

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RESPONSABILITÉ CIVILe - Fixation des dommages et intérêts - Application en matière dincapacité permanente partielle – 42 ans - Sexe féminin - Employée de bureau - I.P.P. 15 %

Paris (17e ch. A), 13 mai 2002: S.A. Compagnie W...r Assurances c. Mme M.-F. J...x et la S.N.C.F.

I - Principes généraux

La victime demande à la Cour d’indemniser son préjudice corporel en distinguant les préjudices économiques patrimoniaux des préjudices moraux extra-patrimoniaux; qu’elle classe notamment au chapitre préjudices moraux extra-patrimoniaux les postes préjudice fonctionnel d’agrément et gêne dans les conditions de vie pendant l’arrêt d’activité ce qui est contesté par les appelants;

Considérant que la méthode d’évaluation ainsi proposée va dans le sens de la loi du 5 juillet 1985 qui tend à l’amélioration de l’indemnisation des victimes d’accidents et permet de mieux respecter le principe de la réparation intégrale du dommage;

En effet, conformément à la nature subrogatoire du recours des tiers payeurs, il est juste que l’objet des recours (créances à récupérer) et l’assiette de ceux-ci (créances sur lesquels ils s’exercent), portent sur les mêmes chefs de préjudice;

Qu’ainsi les préjudices économiques patrimoniaux sur lesquels les organismes sociaux peuvent exercer leurs recours subrogatoires ne sont pas proportionnels aux taux d’incapacité; qu’ils englobent l’ensemble des pertes subies et des gains manqués;

En revanche, les préjudices moraux sont attachés à la personne de la victime et donc exclus du recours des tiers payeurs; qu’ils sont essentiellement constitués du pretium doloris, du préjudice esthétique et du préjudice fonctionnel d’agrément.

II - Expertise

II ressort du rapport d’expertise médical qu’à la suite de l’accident la victime a présenté une contusion de l’épaule gauche avec fracture du trochiter et peut être luxation, qui a été traitée par réduction, immobilisation du coude au corps pendant environ un mois puis rééducation au cours d’une hospitalisation du 4 décembre 1996 au 6 janvier 1997, puis en hôpital de jour jusqu’au 28 février 1997, poursuite ensuite de la rééducation en externe jusqu’à la rentrée 1997; Que l’incapacité temporaire totale a duré du 4 octobre 1996 au 4 mai 1997; que la consolidation peut être fixée au 21 décembre 1998; qu’il persiste une raideur moyenne de l’épaule avec petite hypoesthésie de la région deltoïdienne dans sa partie antérieure et une petite hypotrophie de la racine du bras qui justifient une incapacité permanente partielle de 15 %; que les souffrances peuvent être chiffrées à 3/7; qu’il existe une gêne pour la pratique de certains sports nécessitant l’usage libre de l’épaule gauche;

III - indemnisation

Eu égard à l’ensemble de ces éléments, il convient d’indemniser le préjudice corporel de M.-F. J. qui était âgée de 42 ans au moment de l’accident et de 44 ans à la consolidation et exerçait la profession d’agent S.N.C.F. (employée de bureau) comme suit :

Préjudices économiques patrimoniaux :

1 - Frais médicaux et assimilés exposés par la S.N.C.F. 130.676,03 F, soit... 19.921,43 €

2 -- Les gains professionnels manqués

- salaires maintenus par la S.N.C.F. : 102.641,22 F, soit ... 15.647,55 €

- perte sur prime, il est justifié par la production de documents émanant de la S.N.C.F. que la victime a subi du fait de l’accident, une perte sur prime de travail d’un montant de 1.727,33 F, soit ... 263,33 €

- après consolidation : si l’on constate que sur la base du taux d’incapacité permanente partielle en droit commun de 15 % retenu par les médecins d’assurance qui représentaient la Compagnie et la S.N.C.F., cette dernière verse à la victime une rente accident du travail dont les arrérages échus s’élèvent au 31 décembre 1998 à 254,30 F et le capital constitutif calculé au 1er janvier 1999 est de 143.856,70 F soit au total 144.111 F (= 21.969,58 €) rente dont on peut penser qu’elle indemnise l’incidence professionnelle future de l’incapacité permanente partielle, la Cour ne peut que constater que la victime ne demande aucune indemnité de ce chef.

Total... 35.832,31 €

Après déduction de la créance de la S.N.C.F., laquelle s’élève à 377.428,25 F soit 57.538,57 €, il ne revient aucune indemnité complémentaire à la victime.

Préjudices moraux extra-patrimoniaux :

1 - Gêne dans les actes de la vie courante pendant l’arrêt d’activité

Ce poste de préjudice correspond à un préjudice d’agrément subi avec la consolidation. C’est donc à juste titre que le Tribunal l’a exclu du préjudice soumis à recours et a accordé, compte tenu des troubles importants qu’a connu la victime durant cette période une indemnité de 21.000 F, soit... 3.201,43 €

2 - Préjudice fonctionnel d’agrément

Ce poste de préjudice est corrélatif au déficit fonctionnel de la victime et traduit l’ensemble des troubles dans les conditions d’existence causés après la consolidation par le handicap dans les actes essentiels de la vie courante, dans les activités affectives et familiales et dans les activités de loisirs. Compte tenu du taux du déficit fonctionnel, de l’âge de la victime, des pièces versées aux débats notamment des attestations établissant que depuis son accident, elle ne peut skier et jouer au tennis comme auparavant, il lui sera accordé de ce chef, une indemnité de ...15.000 €

3 - Souffrances

Caractérisées par le traumatisme initial et les traitements subis, cotées à 3/7, elles ont été justement indemnisées par la somme de 25.000 F, soit ... 3.811,23 €

Total ... 22.012,66 €

La victime recevra ainsi, en réparation de son préjudice corporel, une indemnité totale de 22.012,66E en deniers ou quittances, provisions et somme versée en vertu de l’exécution provisoire non déduite, et au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile 1.200 €.

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D - Les modalités de la réparation