DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL
- Professeur Jean-Paul DOUCET -
Lettre F
(Neuvième partie)
FONCTION
Cf. Fonctionnaire*, Incompatibilité*, Pouvoir*, Pouvoir politique*, Pouvoir temporel et pouvoir spirituel*, Préposé*, Séparation des pouvoirs*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-100 et s., p.339 et s.
- Notion. La fonction est l’activité mise en œuvre par une personne dans la pratique de son métier, de sa profession, de son emploi, de sa charge ou de ses attributions. Le droit criminel utilise ordinairement ce terme au pluriel : les fonctions résultent alors de l’ensemble des actes qu’une personne accomplit dans l’exercice de ses activités familiales, professionnelles ou sociales.
Littré (Dictionnaire) : Fonction : action propre à chaque emploi.
Larousse (Dictionnaire de synonymes) : La fonction a un sens plus particulier et plus relevé qu’emploi : il s’emploie surtout au pluriel et s’applique souvent d’une manière partielle à quelques-unes des occupations que l’emploi comporte.
Des dispositions particulières sont prévues selon que l’agent se trouvait « dans l’exercice de ses fonctions » ou que les actes en causes ont été accomplis « à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ». Voici une définition de ces deux expressions pouvant être généralisée à toutes les activités :
Vitu (Juris-classeur pénal, art. 432-4) : Il y a
atteinte à la liberté commise dans l’exercice des fonctions lorsque le dépositaire de l’autorité ou le chargé d’une mission
de service public, tout en se maintenant dans le cadre de son activité officielle, méconnaît les limites des pouvoirs dont il est titulaire et agit hors
les cas ou sans les formes imposées par la loi.
L’atteinte à la liberté individuelle sera, au contraire, réputée commise à l’occasion de l’exercice des fonctions
lorsque le dépositaire de l’autorité publique ou la personne chargée d’une mission de service public ne possède pas, dans ses attributions, le droit de
procéder ou de faire procéder à une arrestation, mais qui se prévaut faussement de sa qualité pour accomplir l’acte qui échappe à son pouvoir.
- La spécialisation des fonctions. Au regard du droit criminel, la fonction apparaît souvent comme une spécialité. Dès lors que deux activités, surtout complémentaires, supposent des connaissances et des capacités particulières, la raison invite à les distinguer. Ainsi, il existe des fonctions temporelles et des fonctions spirituelles, des fonctions législative, judiciaire et exécutive, des fonctions enseignante, médicale… Toute confusion comporte un risque ; c’est pourquoi, p.ex., un médecin n’est pas autorisé à vendre les médicaments qu’il prescrit ; Voir : Compérage*.
À l’intérieur d’une même sphère d’activité, on doit parfois distinguer deux ou plusieurs fonctions. En droit judiciaire, on oppose la fonction de poursuite à la fonction de jugement, la fonction d’accusation à la fonction de défense ; leur opposition est un gage d’équilibre dans le fonctionnement de l’institution.
Ardant (Droit constitutionnel) : Au départ, une analyse des tâches de l’État. C’est à elle que procède Aristote… Un certain nombre de fonctions du pouvoir, ou de l’État, apparaissent : délibérer, commander, juger… De cette constatation banale on passe à l’idée que si ces fonctions peuvent être exercées par le même organe, on peut aussi concevoir qu’elles soient confiées à des organes différents… Apparaît alors une spécialisation des organes dans chaque fonction définie.
Warée (Curiosités judiciaires) : Dans le jugement des procès, les fonctions de juge et d’avocat sont entièrement opposées. Le juge travaille à découvrir la vérité ; l’avocat travaille à la cacher ou à la déguiser. Le juge cherche le milieu, qui est le siège de l’équité ; l’avocat cherche les extrémités. Le juge doit être sévère, rigide, inflexible ; l’avocat doit être souple, pliant, accommodant, entrant dans les sentiments de son client, épousant ses intérêts. Le juge doit être constant, uniforme, invariable, marchant toujours sur la même ligne ; l’avocat doit prendre toutes sortes de formes. Le juge doit être sans passions ; l’avocat s’étudie à les exciter, et tâche de paraître passionné lui-même pour la cause qu’il défend. Le juge doit tenir la balance droite et dans l’équilibre ; l’avocat jette des poids dans la balance pour la faire pencher. Le juge est armé du glaive ; l’avocat tâche de le désarmer (Huetiana).
- Le régime des fonctions.
- La fonction, fait justificatif. D’abord, sa fonction autorise une personne à exercer telle activité ou à faire tel acte qui serait formellement interdit à tout autre. Ainsi seul un médecin peut dispenser certains soins ; voir p.ex. Médecine (exercice illégal)*. C’est de même sa fonction d’accusateur qui permet au ministère public de prononcer son réquisitoire à l’encontre du prévenu, sans risquer des poursuites pour diffamation.
Code pénal suisse. Art. 32 : Ne constitue pas une infraction l’acte ordonné par la loi, ou par un devoir de fonction ou de profession.
Cass.crim. 23 novembre 1950 (Bull.crim. n° 259 p.431) : Les magistrats du ministère public tiennent de la nature même de leurs fonctions, et du caractère dont ils sont revêtus, le droit sous le seul contrôle des autorités dont ils relèvent de dire et d’écrire tout ce que dans leur conscience ils estiment nécessaire à l’accomplissement de la mission dont ils sont chargés.
- La fonction, circonstance aggravante. A l’opposé, le titulaire d’une fonction ne doit pas utiliser les facilités qu’elle lui offre pour commettre une infraction. Le législateur peut voir dans ce dévoiement une Circonstance aggravante personnelle*. Ainsi, en droit rationnel, l’avortement est un délit ; mais il devient un crime lorsqu’il est commis par un médecin qui a solennellement prêté serment de respecter la vie.
Donnedieu de Vabres (Traité de droit criminel) : Le fait que l’auteur d’un avortement exerce une profession médicale détermine une augmentation de peine ; on peut y voir une circonstance aggravante.
Véron (Droit pénal spécial) : Les peines de l’abus de l’abus de confiance sont portées à dix ans d’emprisonnement lorsque ce délit est commis par un mandataire de justice dans l’exercice de ses fonctions (art. 314-3 C.pén.).
- Les devoirs d’une personne dans l’exercice de ses fonctions. Toute profession comporte, pour celui qui a été admis dans son sein, l’obligation de respecter, dans l’exercice de ses fonctions, certaines règles de loyauté, d’honneur et de bienséance. La violation de celles-ci constitue un délit disciplinaire, et même parfois un délit pénal. Tel est le cas du crime de Haute trahison*, que seul peut commettre le Président de la République « dans l’exercice de ses fonctions ».
Cass. (Ass. plén.) 10 octobre 2001 (Bull.crim. n° 206 p.660) : La Haute Cour de justice est compétente pour connaître des actes de haute trahison commis par le Président de la République dans l’exercice de ses fonctions.
Cass.crim. 22 décembre 1966 (Bull.crim. n° 305 p.714) : L’obligation au secret professionnel est établie pour assurer la confiance nécessaire à l’exercice de certaines fonctions…
- La protection de l'exercice des fonctions.
- La protection de la fonction elle-même est principalement assurée dans le cas de la fonction publique, qui agit au nom de l'État. Elle fait l'objet des articles 433-1 et s. du Code pénal, qui visent notamment l'Usurpation de fonction*, le port d'un Faux costume* ou d'une fausse Décoration*, et l'Usage irrégulier d'un document officiel*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-100 et s., p.329
- La protection des personnes dans l’exercice de leur fonction. L’exercice de certaines activités peut se révéler dangereux, c’est pourquoi le législateur est parfois conduit à viser spécialement les agressions dirigées contre telle ou telle catégorie de personnes en raison de sa mission. Constitue par exemple une Circonstance aggravante* du crime de meurtre, le fait d’avoir tué un magistrat « dans l’exercice de ses fonctions ».
Voir, en ce qui concerne les fonctionnaires : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-200 et s., p.427
Larguier (Droit pénal spécial) : Les circonstances aggravantes tenant à la qualité de la victime… Est spécialement protégé le magistrat dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, mais seulement si sa qualité est apparente ou connue de l’auteur des faits.
Cass.crim. 29 octobre 1980 (Bull.crim. n° 286 p. 730) : L’aggravation de peine portée par l’art. 233 (ancien) C.pén. est applicable lorsqu’il est constant que le crime a été commis envers un agent de la force publique dans l’exercice de ses fonctions.
Aggravation des violences (Ouest-France 5 décembre 2014) : Selon l'observatoire de la délinquance, les médecins ont déclaré, en 2013, 15% d'incidents en plus par rapport à 2012, dont 71 agressions ayant entraîné une incapacité de travail (contre 63 et 2012). Les violences contre les pompiers en intervention explosent également (+ 27%), tout comme celles contre les policiers (+ 5,6) et les gendarmes (+ 17 %). Elles n'épargnent pas non plus les douaniers : 113 agressions physiques en 2013 contre 73 en 2012.
Exemple (Ouest-France 20 février 2015) : À Paris, une directrice d'école poignardée par un parent... La directrice a été légèrement blessée par un parent d'élève qui lui a donné trois coups de couteau. L'agresseur présumé a été interpellé quelques minutes plus tard à quelques rues de l'école et placé en garde à vue.
-La responsabilité civile pour un délit commis dans l’exercice des fonctions. Si un préposé commet une infraction alors qu’il se trouve « dans l’exercice de ses fonctions », c’est en principe son commettant qui sera tenu pour responsable sur le plan civil, au regard des victimes. Voir : Dommages-intérêts*, Préposé*, Réparations civiles*.
Malaurie et Aynès (Droit civil) : Dans ou hors des fonctions. Le commettant répond certainement des dommages que le préposé a commis dans l’accomplissement de sa mission ; au contraire, avec la même certitude, il ne répond pas de ceux qui sont tout à fait étrangers à la mission du préposé…
Cass. (Ass. plén.) 19 mai 1988 (Gaz.Pal. 1988 II 640) : Le commettant ne s’exonère de sa responsabilité que si son préposé a agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions.
FONCTIONNAIRES
Cf. Concussion*, Corruption*, Dépositaire public*, Détournement*, Fonction*, Forfaiture*, Intégrité physique*, Péculat*, Malversation*, Policier*, Prise d'intérêt*, Probité*, Trafic d'influence*, Usage irrégulier d'une qualité*.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La Protection de la Personne humaine » (4e éd.), n° 16, p.15 / n° I-103, p.62 / n° I-212, p.106 / n° II-215, p.318 / n° II-219, p.322 / n° II-220, p.322 / n° II-230, p.333 / n° II-234, p.339 / n° III-108, p.439 / n° III-113, p.450 / n° III-205, p.483 / n° III-217, p.496 et s. /
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Famille, des enfants et des adolescents », n° 12, p.23
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-200 et s., p.427 et s.
- Notion. Un fonctionnaire est une personne titulaire d’un emploi public ou occupant un poste permanent dans un organisme public. Participant peu ou prou à l’exercice de la puissance publique, il bénéficie de garanties et de privilèges ; en contrepartie il devrait être soumis à une discipline particulièrement rigoureuse. L'incompétence et l'irresponsabilité des fonctionnaires entraîne le déclin de l'État.
Rigaux et Trousse (Les crimes et les délits du Code pénal belge) : La notion de fonctionnaire valable en droit pénal n'est pas [toujours] celle du droit administratif.
Rolland (Droit administratif) : Deux conditions sont nécessaires et suffisantes pour qu’un individu soit tenu pour fonctionnaire. 1° Il faut qu’il occupe un emploi institué pour assurer la marche d’un service public proprement dit. 2° Il faut que cet emploi soit permanent ou ait tout au moins une certaine permanence.
Code pénal roumain de 1968. Art. 147 : Par "fonctionnaire", on entend tout salarié qui exerce, en permanence ou temporairement, à n'importe quel titre et de n'importe quelle manière que ce soit, une fonction dans le service d'un organe ou d'une institution de l'État.
Cons. d’État 20 décembre 1946 (Gaz.Pal. 1947 I 179) voit un fonctionnaire dans une personne qui occupe un emploi permanent dans les cadres d’un service public.
Un dépositaire ou agent de l’autorité publique est une personne qui, sans avoir la qualité de fonctionnaire, n’en exerce pas moins une fonction publique dans l’intérêt général. Tel est le cas d’un conseiller municipal.
Cass.crim. 25 mai 2004 (Bull.crim. n° 136 p.519) : La qualité de dépositaire ou agent de l’autorité publique ou de citoyen chargé d’un service ou d’un mandat public, au sens de l’art. 31 de la loi du 29 juillet 1881, n’est reconnue qu’à celui qui accomplit une mission d’intérêt général en exerçant des prérogatives de puissance publique.
Cass.crim. 29 juin 2011 (n° 10-86771, Gaz.Pal. 10 novembre 2011) sommaire : Remplit une mission de service public toute personne chargée d'accomplir des actes ayant pour but de satisfaire l'intérêt général, peu important qu'elle ne dispose d'aucun pouvoir de décision à ce titre.
Une personne chargée d'une mission de service public est une personne qui n'a pas la qualité de fonctionnaire ni celle d'agent de l'autorité publique mais qui est chargée d'accomplir un acte dans l’intérêt général.
Cass.crim. 30 janvier 2013, n° 11-89224 : Doit être regardée comme chargée d'une mission de service public, au sens de l'art. 432-12 C.pén., toute personne chargée, directement ou indirectement, d'accomplir des actes ayant pour but de satisfaire à l'intérêt général, peu important qu'elle ne disposât d'aucun pouvoir de décision au nom de la puissance publique... tel est le cas du dirigeant de fait de l'Association pour le bien-être des personnes âgées chargée de la gestion de mesures de protection judiciaire.
Les ministres d'un culte, même reconnu par l'État, n'entrent pas en principe dans la catégorie des agents publics. Cette règle peut toutefois connaître une exception dans les pays qui ignorent la séparation des fonctions temporelle et spirituelle et qui ont consacré une religion d'État.
Cour sup. du Luxembourg (Pas. 1890 III 509). Les ministres du culte, dépositaires d'un pouvoir purement spirituel n'exercent aucune partie de la puissance publique et ne tiennent du Gouvernement aucun emploi institué dans un intérêt public ; ils ne sauraient donc être rangés parmi les personnes ayant un caractère public.
- Devoirs. Représentants de l'État, chargés de servir la Nation, les élus et les fonctionnaires ont le devoir de remplir leur mission avec zèle, loyauté et probité.
Garcillasso de la Vega (Histoire des Incas) : L'Inca Viracocha avait accoutumé de dire que les mauvais fonctionnaires étaient beaucoup plus punissables que les voleurs, parce qu'ils abusaient de l'autorité publique qui ne leur est donnée que pour rendre justice aux administrés.
Chemin (Code de religion et de moralité) cite Cicéron : Le devoir du magistrat est de se souvenir qu'il représente l'État, qu'il est chargé d'en soutenir la gloire et la dignité, et de maintenir les lois.
Chemin (Code de religion et de moralité) cite William Penn : Il y a cinq qualités requises pour un homme en place : du talent, de l'intégrité, de l'activité, de la patience et de l'impartialité.
Sertillanges
( La philosophie des lois) : La condition n’est pas la même
des dirigeants et des simples citoyens.
À la rigueur, il suffit que les citoyens obéissent aux lois, ce qui
ne suppose qu’une vertu médiocre, vu que la loi se défend elle-même
d’une trop grande sévérité.
Mais, s’agissant des chefs, la morale publique exige davantage : ils
ne peuvent être, eux, de bons chefs que s’ils sont des hommes
vertueux. Il doivent en effet donner l’exemple.
Rolland
(Précis de droit administratif) : Les devoirs des agents
dans l'exercice de leurs fonctions.
1° Les agents doivent exercer leur fonction... Sauf disposition
contraire, ils doivent l'exercer eux-mêmes, ils sont tenus
d'effectuer leur tâche sans autres arrêts et interruptions que
ceux prévus par les textes et résultant des indications données
par leurs supérieurs.
2° Ils doivent, dans cet exercice, se conformer à la loi et à
l'esprit de la loi créatrice de leur emploi.
3° Ils doivent se plier aux obligations spéciales attachées à un
emploi déterminé. Ces obligations varient presque à l'infini.
Citons l'obligation, pour le professeur, de faire son cours ou
sa classe à certains jours et à certaines heures.
Ahrens (Cours de droit naturel) : Dans l'exercice des diverses fonctions publiques, le gouvernement doit s'abstenir de provoquer des conflits entre les devoirs des fonctionnaires et leurs intérêts ; et, de même que la justice doit rendre des arrêts et non des services, de même l'administration doit être probe elle-même et ne pas employer des moyens de corruption envers des administrés.
- Protection pénale. Les fonctionnaires sont protégés, tantôt par des textes spécifiques, tels les délits de Menaces*, d’Intimidation*, d’Outrage* ou de Rébellion*, tantôt par des délits de droit commun, tel le délit d’Injure* ou celui de Diffamation*, éventuellement assortis d’une circonstance aggravante, tel le délit Violences* et voies de fait.
Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-200 et s., p.427
Cass.crim. 20 décembre 1995 (Bull.crim. n° 393 p.1148) : La chambre d’accusation a renvoyé, à bon droit, B. devant la cour d’assises sous l’accusation de meurtre commis sur une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, en l’espèce un gendarme dans l’exercice de ses fonctions.
Exemple (Ouest-France 13 août 2010) : Un homme venu au Festival interceltique de Lorient, pour assister à un concert, s'est enivré et cherche la bagarre en ville. Les policiers interviennent et réussissent à le menotter, qui ne se calme pas. D'un coup de tête, il frappe l'un des CRS au visage, entraînant un arrêt de travail de quatre jours. Jugé hier en comparution immédiate, l'homme a été condamné à douze mois de prison, dont six mois ferme, et à une mise à l'épreuve de deux ans. Il devra indemniser les trois policiers à hauteur de 1.600 €. En outre, il est interdit de séjour à Lorient.
La collectivité publique de laquelle relève le fonctionnaire agressé peut demander aux les tribunaux répressifs de réparer le dommage causé par cette agression.
Cass.crim. 2 septembre 2014, n° 13-84663 : Il se déduit de l'art. 11 de la loi du 13 juillet 1983 que la collectivité publique, tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté, est subrogée aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques la restitution des sommes versées au fonctionnaire intéressé et dispose, en outre, aux mêmes fins, d'une action directe qu'elle peut exercer au besoin par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale qui inclut la possibilité d'obtenir le remboursement des frais engagés pour la défense de l'agent victime dont elle est l'employeur.
- Responsabilité pénale. Dans le cas où il se voit reprocher une infraction pénale, le fonctionnaire relève des tribunaux répressifs selon les règles de droit commun. Bien plus, ceux qui se considèrent comme victimes de ses actes peuvent exercer l’action civile contre lui ; Voir : Biens publics*.
Voir : Décret du 26 frimaire an II (16 décembre 1793), sur la prévarication de fonctionnaires publics
Voir : A. Vitu, La corruption et le trafic d’influence
Cass.crim. 14 décembre 1971 (Gaz.Pal. 1972 I 183) : Les tribunaux de l’ordre judiciaire sont compétents pour l’instruction et le jugement des crimes, délits et contraventions, même dans le cas où le fait constitutif de l’infraction poursuivie a été commis dans son service par un agent public, cette circonstance n’étant pas de nature à relever le juge répressif du devoir qui, sauf disposition contraire de la loi, n’incombe qu’à lui d’appliquer la loi pénale.
Cass.crim. 22 janvier 1953 (D. 1953 109 rapport Patin) : Hors les exceptions prévues par la loi, la victime d’une infraction à la loi pénale, en portant son action devant la juridiction répressive, met l’action publique en mouvement ; et cela aussi bien à l’encontre des fonctionnaires et agents du Gouvernement, même pour les infractions commises dans leur service, qu’à l’encontre des particuliers.
- Responsabilité civile.
Si la faute reprochée apparaît comme une simple faute de service, c’est à la
juridiction administrative qu’il faut ordinairement en demander la réparation civile.
Mais si la faute commise apparaît détachable du service, la
victime peut demander réparation, dans le cadre de l'action
civile, tant à l'État qu'à l'agent public reconnu coupable du
délit constaté.
Cass.crim. 17 octobre 2007 (Bull.crim. n°248 p.1032) : D'une part, les tribunaux répressifs de l'ordre judiciaire sont incompétents pour statuer sur la responsabilité d'une administration ou d'un service public en raison d'un fait dommageable commis par l'un de ses agents ; d'autre part, l'agent d'un service public n'est personnellement responsable des conséquences de l'acte délictueux qu'il a commis que si celui-ci constitue une faute détachable de ses fonctions.
Cass.crim.
10 février 2009, n° 08-84339 (Bull.crim. n°34 p.107) :
Si la responsabilité de l’État est engagée en raison des fautes
commises par ses agents lorsqu’elles ne sont pas dépourvues de
tout lien avec le service, cette responsabilité n’est pas
exclusive de celle des fonctionnaires auxquels est reprochée une
faute personnelle détachable du service.
Encourt la cassation l’arrêt d’une cour d’appel qui, après avoir
condamné un fonctionnaire de la police nationale pour des
violences aggravées commises sur le conducteur d’un véhicule
qu’il venait d’interpeller, en lui portant des coups de poing au
visage et en usant de « bien plus de force que nécessaire », se
déclare incompétente pour connaître des demandes en réparation
formées par la partie civile à l’encontre du policier, aux
motifs que, si les violences exercées par le policier
constituent une infraction pénale, elles l’ont été avec les
moyens du service et à l’occasion de l’interpellation d’un
délinquant, de sorte que la faute commise n’est pas détachable
du service et que le contentieux de sa réparation relève des
juridictions administratives.
FONDS DE GARANTIE AUTOMOBILE
Le Fonds de garantie automobile a pour mission d’indemniser les victimes d’accidents corporels de la circulation causés par une personne inconnue ou insolvable. Depuis une ordonnance du 23 septembre 1958 il jouit du droit d’Intervention* devant les tribunaux répressifs.
Cass.crim. 1er décembre 1987 (Gaz.Pal. 1988 II 559) : Il résulte des dispositions de l’art. L. 420-1 C.assur. que le Fonds de garantie n’est tenu de verser des indemnités aux victimes d’accidents corporels que dans la mesure où ces indemnités ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre. Mettent par suite à bon droit hors de cause le Fonds de garantie, en ce qui concerne la demande de la victime, les juges d’appel qui retiennent que les indemnités allouées à celle-ci peuvent être supportées par le gardien du véhicule dans lequel elle était transportée et par son assureur sur le fondement des art. 1 et 3 de la loi du 5 juillet 1985.
Cass.crim. 28 avril 1987 (Bull.crim. n° 172 p.459) : Le Fonds de garantie automobile peut intervenir dans toutes les instances engagées entre les victimes d’accidents ou leurs ayants droit, d’une part, les responsables ou leurs assureurs, d’autre part… toutes les fois qu’il y a intérêt.
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D’ACTES DE TERRORISME …
S’inspirant du modèle fourni par le Fonds de garantie automobile, le législateur a créé un Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (voir : art. 706-3 C.pr.pén. et Code des assurances). Bénéficie de ces dispositions, par exemple et sous certaines conditions, la victime d’un viol. Ce nouveau Fonds peut agir devant les tribunaux répressifs, non seulement par voie d’intervention, mais encore par voie de constitution de partie civile.
Cass.crim. 31 mai 2000 (Gaz.Pal. 2000 II Chr.crim. 2515) : D’une part, aux termes de l’article L. 422-1 du Code des assurances, le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions est subrogé dans les droits que possède la victime contre la personne responsable du dommage. D’autre part, l’article 706-11 du Code de procédure pénale dispose que le Fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir, des personnes responsables du dommage causé par l’infraction ou tenues à un titre quelconque d’en assurer la réparation totale ou partielle, le remboursement de l’indemnité ou de la provision versée par lui, dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes ; le Fonds peut exercer ses droits par toutes voies utiles, y compris par voie de constitution de partie civile devant la juridiction répressive, et ce, même pour la première fois en cause d’appel.