« COURS DE DROIT PÉNAL FRANÇAIS »
de J.-A. ROUX
( 2ème édition, T. I, Paris 1927 )
INTRODUCTION
I - LE PROBLÈME DE LA CRIMINALITÉ
§ 1. - La criminalité
Chaque année, les parquets des tribunaux de première instance reçoivent de 5 à 600 000 procès-verbaux, plaintes ou dénonciations (en 1911 : 591.141 ; en 1912 : 607.886 ; en 1913 : 584.492). C’est l’immense clameur adressée à la justice par tous ceux qui ont été victimes ou témoins d’une infraction.
Bien que ce chiffre comporte des corrections, nécessaires, les unes en plus et les autres en moins, il montre d’une manière saisissante l’importance de la tâche que la justice répressive a à remplir, et la grandeur du dommage que les criminels causent à la société.
Et ce qui est grave, c’est le perpétuel renouvellement des crimes et des délits, c’est la répétition avec laquelle les infractions se reproduisent annuellement, dans le même ordre, et souvent dans les mêmes saisons.
C’est ce. qui faisait dire à Quetelet, que « s’il y a un budget qui se paye avec une régularité effrayante, c’est celui des prisons, des galères, de 1’échafaud », et à son- disciple, Dufau, que « chaque année, il se produit, au sein d’une population, un nombre presque égal de faits criminels, qui se distribuent d’une manière presque constante, suivant l’âge, le sexe et les diverses circonstances de la vie sociale ».
En fait, la constance affirmée par Quételet et Dufau ne se rencontre pas ; pas plus que n’est prouvée la prétendue loi de saturation criminelle, formulée par Enrico Ferri, « qu’il se commet chaque année, dans un milieu social donné, avec des conditions individuelles et physiques données, un nombre déterminé de délits, pas un de plus, pas un de moins ».
Mais, ce que l’on peut admettre, c’est que la criminalité est réglée par des lois qui en déterminent la marche. On aurait tort de voir dans son développement l’œuvre incertaine du hasard. Le simple fait de son énormité montre que l’on est en présence d’un phénomène social, qui, comme les autres phénomènes de la vie en commun, est soumis à des règles.
Causes de la criminalité.
D’où vient-donc la criminalité ? Et pourquoi rencontre-t-on, dans la société, des hommes qui font le mal, qui tuent ou qui volent, alors que le reste de l’humanité vit dans la paix, respectant le droit d’autrui et observant la loi du travail ?
La question est importante, parce que de la solution qu’on lui donne dépendent logiquement le caractère, l’organisation et l’issue du combat de la société contre le crime.
Pendant longtemps, on a vu dans le délinquant un homme semblable aux autres hommes ; et l’on imputait simplement ses crimes à l’ardeur excessive et déchaînée de ses passions.
Maintenant, on reconnaît que le délinquant n’est pas, en général, semblable aux autres individus ; qu’il diffère, moralement ou physiologiquement, de l’honnête homme, sauf à varier sur la cause de ces différences.
Pour quelques-uns le criminel est l’individu normal, c’est-à-dire celui qui vit suivant la nature ; l’honnêteté étant une exception, et la vertu exigeant une contrainte exercée sur les appétits de l’être humain (Albrecht).
Plus couramment, on a prétendu que l’individu anormal était le délinquant, parce qu’il constituait une anomalie dans la société, comme il y forme une exception numériquement.
Et l’on a expliqué cette anomalie, - tantôt par l’atavisme : l’homme criminel serait, par une régression formidable, un sauvage attardé dans la civilisation, le descendant de l’homme primitif, dont il a conservé le type, et dont il reproduirait les sentiments violents et cupides (Lombroso) ; - tantôt par la dégénérescence : la folie et la criminalité auraient une parenté rapprochée et une commune origine (Maudsley, Despine) ; - tantôt par l’inaptitude de la vie en commun : les délinquants seraient les individus qui sont dépourvus, partiellement ou complètement, des sentiments altruistes, indispensables pour vivre en société (Garofalo) ; - tantôt enfin par le milieu social : le délit, se transformant avec la civilisation, serait un produit du milieu malsain on immoral, dans lequel vivent, surtout dans la classe populaire, un grand nombre d’individus (G.Tarde, Manouvrier, Lacassagne).
Mais, à ce qui semble, aucune des explications qui précèdent n’est satisfaisante, parce qu’elles sont toutes incomplètes. Et il est préférable d’attribuer la criminalité à l’action combinée de la nature, physique ou morale, de l’individu, et des conditions, économiques et sociales, qui s’exercent sur la volonté individuelle (E.Ferri, Garraud, Garçon).
Le crime a donc des facteurs biologiques et des facteurs sociaux.
Sans doute, le prétendu atavisme de Lombroso n’est pas établi ; il n’est pas non plus prouvé que les criminels soient tous des fous ou des dégénérés. Il n’en est pas moins avéré qu’un grand nombre de délinquants, surtout parmi les malfaiteurs d’habitude, présentent, acquises ou congénitales, des tares de dégénérescence physiologique ou morale.
Cette dégénérescence a sa cause dans l’hérédité, et pour une proportion vraisemblablement plus forte, dans la paresse, l’alcoolisme et la débauche.
Le criminel est souvent un défectueux. Mais, la responsabilité de cet état n’incombe pas toujours aux ascendants. Dans une large- mesure, le délinquant est, par les vice qu’il se donne, le propre artisan de sa déchéance, morale et ensuite physique. Ne voit-on pas dans une même famille, parmi des enfants élevés ensemble, un seul devenir criminel, quand les autres-demeurent honnêtes ? Et ne trouve-t-on pas fréquemment des malfaiteurs qui sont issus de familles où, jusqu’à eux, il n’y avait eu ni délinquant ni aliéné ? Il est certain que l’homme, par la direction qu’il se donne, ou qu’il reçoit, ajoute aux prédispositions héréditaires.
Il est manifeste aussi qu’il existe des facteurs sociaux du crime, entendant sous ce terme des forces, qui, au lieu de s’exercer pour maintenir ou porter les individus vers l’union et l’observation de la morale, leur inspirent des idées de désordre, de haine et de mépris des lois.
Ce caractère de forces désagrégeantes et dissolvantes appartient, à n’en pas douter, à l’école buissonnière, à la désorganisation de la vie de famille, produite ou développée par l’industrialisme, au divorce, ainsi qu’à la contagion de l’immoralité, provoquée par la débauche étalée dans la rue, dans la littérature, au théâtre, ou inoculée dans la famille par des parents criminels.
On doit reconnaître la même influence pernicieuse à la misère, au paupérisme, et spécialement aux conditions défectueuses d’hygiène dans lesquelles vit la classe ouvrière, à l’exiguïté et à l’insalubrité de son logement, aux perturbations économiques apportées à l’existence de cette partie de la -population, qui n’à d’autres ressources que son, travail, et, plus accidentellement, aux révolutions politiques.
Influence des facteurs criminogènes. Classification des criminels.
Aucun des facteurs qui précèdent ne possède une valeur absolue : on peut être pauvre et demeurer honnête, vivre dans un:taudis et rester vertueux, être fou ou épileptique et n’être jamais dangereux pour personne.
A l’exception de cas pathologiques particuliers assez rares, le crime n’est donc la conséquence fatale, ni d’une cause biologique, ni d’une cause sociale. Celles-ci produisent simplement des milieux favorables à la formation de la pensée criminelle, à sa réception et à son développement : elles sont les conseillères de la volonté, ses instigatrices écoutées, et souvent toutes puissantes.
Leur influence explique la diversité des infractions commises (criminalité violente et criminalité frauduleuse).
Elle rend également compte de la diversité des criminels. Les délinquants, en effet, ne différent pas seulement des honnêtes gens ; ils diffèrent aussi profondément entre eux.
C’est la prédominance des facteurs biologiques, et par conséquent des tares physiologiques, que l’on aperçoit chez les aliéné criminels, qui ne comprennent pas seulement les déments, dont les divagations prouvent l’altération de la raison, mais aussi les fous moraux, dont la maladie demeure cachée derrière une apparence d’intégrité de l’intelligence, les: épileptiques et les névropathes ; chez -les défectueux (idiots, mendiants et vagabonds) et chez les alcooliques. Peut-être, faut-il ranger encore sous cette influence, les criminels impulsifs ou criminels par passion, qui accomplissent leur infraction sous l’impulsion d’une vive passion, d’un sentiment violent : comme un amour méconnu ou outragé.
Ce sont au contraire les facteurs sociaux, qui l’emportent chez les criminels politiques, quoiqu’on les ait parfois rapprochés des demi-fous, et surtout dans la foule innombrable de délinquants qui ne présentent pas de tares physiologiques multiples ou accusées, et qui commettent leur délit plus par, accident que par perversité naturelle : d’où leur nom de criminels d’occasion ou d’accident.
Enfin, dans une mesure qui varie avec chaque individu, les facteurs biologiques et les facteurs sociaux se mêlent chez les malfaiteurs de profession et les délinquants d’habitude. A leur égard, il n’y a plus d’uniformité. L’habitude criminelle a tantôt son origine dans 1a perversité innée de l’individu, que le milieu renforce simplement ; tantôt elle a sa cause dans le milieu, et les tares physiologiques surviennent après.
On aperçoit aisément toute l’importance que présente la connaissance des facteurs criminogènes. Il ne peut y avoir de lutte méthodique contre les criminels, qu’à la condition de savoir préalablement ce qu’ils sont, où ils se recrutent; et pour quelles causes ils sont devenus les ennemis de la société. Jusque-là, il ne peut y avoir qu’une défense empirique, incertaine, et par conséquent peu efficace…
II - LES SOLUTIONS DU PROBLÈME DE LA CRIMINALITÉ
...
§ 2. C’est en faisant état des notions qui précèdent, que le problème soulevé par la criminalité doit être examiné.
Par la présence de délinquants dans son sein, la société a l’obligation de se défendre. La criminalité est un fait et constitue un danger. La société n’a pas à chercher longuement si le droit de punir est légitime, et d’où lui vient ce droit. Un péril la menace, auquel elle doit répondre, si elle ne-veut pas périr.
Ce qui peut être mis en question, c’est moins le droit de défense de la société, qui est indiscutable, que sa limitation.
On ne saurait, en effet, logiquement l’assimiler à la réaction que tout organisme vivant oppose à l’action d’un corps étranger, et par laquelle il tend à neutraliser, ou à éliminer, ce qui nuit à sa conservation.
Cette opinion, soutenue par les positivistes (E.Ferri), est inexacte parce qu’elle repose sur une comparaison qui ne paraît pas juste. Entre deux animalcules étrangers, il n’y a pas, en effet, de droit : il n’y a que la lutte pour l’existence, où le plus fort l’emporte sur le plus faible. Au contraire, la circonstance que les malfaiteurs sont des hommes, qu’ils font partie de la société, et qu’ils sont, malgré leur indignité, membres de celle-ci, fait qu’ils possèdent des droits et soumet la société, qui combat leurs entreprises, à des obligations qui n’existent pas au premier cas. On ne se défend pas contre son semblable, comme, on se préserve du froid, de la maladie, du poison, ou d’une bête féroce.
La lutte contre la criminalité ne doit-donc pas être une simple réaction de la force sociale. Elle doit être une action organisée, régularisée, qui tient compte à la fois du besoin de la société de se protéger, et des droits de l’individu, qui sont respectables même chez les malfaiteurs.
Prévention et répression
Pour concevoir comment doit s’organiser cette action, il convient d’observer deux choses :
La première c’est -que la criminalité poursuivie ne forme qu’une partie de la criminalité réelle ; et que, pour n’être pas découverts, les délinquants n’en commettent pas moins des infractions, dont la société a à souffrir.
La seconde, c’est qu’il ne faut pas perdre de vue l’importance particulière, que possèdent dans la genèse des crimes, les facteurs sociaux.
Il devient alors évident que les moyens de combat contre le crime, pour être complets, doivent logiquement, et abstraction faite de toute considération sur l’efficacité du système répressif, revêtir une double forme.
Ils doivent, d’abord, emprunter la forme de la prévention, et consister notamment en mesures d’hygiène sociale, afin de s’attaquer aux facteurs de la criminalité, de diminuer leur virulence, et, par là, d’atteindre, cette criminalité triomphante, qui, ne peut-être directement combattue, puisqu’elle sait demeurer cachée. Prévenir le crime est, au point de vue de 1a paix sociale, aussi nécessaire et aussi indispensable, que l’est, au point de vue de la santé, le fait d’éviter la maladie au moyen d’une bonne hygiène.
Ils doivent ensuite prendre la forme de la répression, et comporter des mesures de souffrance, infligées aux délinquants arrêtés, afin que le mal qu’ils subissent, les éloigne de la perpétration de nouvelles infractions, et serve d’exemple à ceux qui seraient tentés de les imiter. En réprimant, on ne s’occupe plus des causes de la criminalité, mais seulement des criminels : c’est de la thérapeutique que l’on essaye.
Le droit pénal est la partie de l’action organisée de la lutte contre la criminalité, qui emprunte la forme- répressive, et tend, au moyen de souffrances (peines), à protéger la paix publique. Il est aussi cette partie de la défense sociale, qui, en supposant la condition d’un délit commis, tend au moyen de mesures de redressement ou de protection (mesures de sûreté) à prévenir la rechute du délinquant.
L’exposé qui précède, montre que ce ne sont pas les seuls moyens, ni même les meilleurs que la société possède pour se défendre. C’est d’eux seuls néanmoins, et des principes qui les régissent, qu’il sera désormais question.
§ 3. - La solution répressive
La solution répressive de la criminalité n’a pas toujours été considérée de la même manière. Les conceptions philosophiques sur le droit de punir, et la connaissance plus exacte du monde des criminels l’ont influencée.
Pendant des siècles, la répression pénale fut la manifestation de la vengeance privée, puis de la colère divine (Domat, Jousse) : elle fut barbare, excessive et cruelle.
Ce n’est :qu’à la fin du XVIIIe siècle, sous l’action des doctrines philosophiques, que le droit criminel s’est humanisé. L’exemplarité et l’intimidation restèrent en honneur ; mais il vint s’y ajouter l’idée de correction comme but de la peine ; et c’est cette idée qui, s’est développée au cours du XIXe siècle avec les théories pénitentiaires.
La Révolution ayant sécularisé la société; il fallut donner un fondement au droit pénal en dehors de celui tiré de la justice divine. Tour à tour, on le demanda à la supposition d’un contrat, qui devait intervenir, pour l’application d’une peine en cas de désobéissance à la loi, entre la société et le délinquant ou sa victime (Rousseau) ; à 1’utilité même de la défense sociale (Bentham) ; et surtout à l’idée du droit réagissant contre la violation qui en est la négation (Kant). Dominée par les principes contenus dans la Déclaration des droits de l’homme, la peine fut déterminée par les deux notions de nécessité et de justice.
C’est sur ces bases que l’École classique s’est édifiée. Continuant à faire du droit criminel une étude juridique et abstraite, elle se rattache directement aux grands juristes du XVIIe siècle, mais elle extirpe de leurs théories tout ce qui est contraire au droit public moderne formulé par la Révolution (suppression de l’arbitraire dans les lois pénales, condamnations pénales fixes, peines individuelles, responsabilité morale comme condition de l’imputabilité). Malgré les horizons qu’une notion plus approfondie de la responsabilité morale aurait pu dégager, l’École classique, faute de connaissances précises sur le monde des criminels, est restée dans le dogmatisme abstrait, loin de la réalité vivante, asservie à la lettre des codes criminels, et envisageant la lutte contre la criminalité plutôt comme un combat contre le délit, que comme une défense contre le délinquant.
C’était perdre de vue que le danger que court la société a sa cause, non dans le délit, mais dans son auteur. Aussi, en face d’elle, s’est opposée depuis une quarantaine d’années environ l’École moderne, dite aussi École positiviste, parce qu’elle s’inspire des principes de la philosophie positive. Partant d’études sur les criminels et d’une tendance manifeste à expliquer les phénomènes psychiques de la même manière que les phénomènes physiologiques, elle a nié l’existence du libre arbitre, combattu le principe de la -responsabilité morale, qu’elle a considéré comme pratiquement insondable et théoriquement erroné, vu dans les criminels des malades, et assimilé le droit pénal à la science-médicale. Elle a donc assis le devoir de punir sur la seule idée de défense, transformant les châtiments en mesures de sûreté ou d’assistance, et les prisons en asiles et en hospices. La lutte -contre le criminel remplaçait la lutte stérile contre le délit : le délinquant devait être frappé, non pour ce qu’il avait fait, mais pour ce qu’il était, en proportion du danger qu’il faisait courir à la paix sociale à raison de son état ; et, comme le juge ne pouvait pas apprécier là durée de cet état dangereux, l’arbitraire dans les peines réapparaissait sous le nom de sentences indéterminées (Lombroso, Ferri, Garofalo, van Hamel).
Actuellement, une pénétration s’est faite entre les deux; écoles.
L’École classique, devenue l’École néo-classique (ou mieux École éclectique), tout en demeurant fidèle au principe de la responsabilité morale, a fait siennes plusieurs idées, mises en lumière par l’École positiviste. Instruite par l’expérience, elle reconnaît toute l’importance du facteur humain dans l’infraction, admet la nécessité d’une classification des criminels, et accepte de faire varier la peine, en tenant compte de leur nature, pour la faire indulgente à l’égard des délinquants occasionnels, énergique et sévère à l’encontre des récidivistes et des malfaiteurs d’habitude (Garraud, Vidal, Saleilles, Garçon, Cuche).
Pareillement, de l’École positiviste s’est détachée, en Italie, sous le nom de Troisième École (Terza Scuola), une école qui tout eu demeurant sur le terrain de la science positive, distingue les phénomènes psychiques des phénomènes physiologiques, laisse au droit pénal sa personnalité propre, et refuse tout fatalisme dans les infractions (Alimena). Il ne serait même pas impossible de trouver chez certains positivistes, comme par exemple chez Ferri, l’abandon de quelques conséquences extrêmes de leurs principes, et le maintien d’une violation matérielle de la loi pénale comme condition de la répression.
Dans la lutte des doctrines, qui persiste toujours, et qui peut être rattachée à une autre, plus ancienne et plus élevée, entre le matérialisme et le spiritualisme, on peut dire cependant, qu’à côté de nombreux points de désaccord, le délit, c’est-à-dire la manifestation extérieure de la violation de la loi pénale, demeure dans le droit théorique, comme il l’est dans le droit positif, le fondement de toute sanction répressive.
Nature juridique de la solution répressive
Du -moment qu’on ne peut pas refuser : des droits aux délinquants parce qu’ils sont membres de la société, et peut-être aussi, parce qu’il est nécessaire de prévoir l’hypothèse où de paisibles citoyens seraient en butte ,à la tyrannie des Pouvoirs publics, on est conduit à donner à la répression pénale un caractère particulier, qui lui attribue une nature juridique.
Entre la société qui est victime de l’infraction, et le délinquant qui est l’auteur de-celle-ci, s’établit un rapport, qui, par ses deux côtés, touche au droit : par son côté social, pour déterminer les cas qui donneront lieu à une sanction pénale, et pour la mesurer ; et par son côté individuel, pour en fixer les conditions d’application.
La répression apparaît donc comme la sanction d’un droit violé, et à ce titre comme accomplissement d’une œuvre de justice.
La conception que l’on s’est faite de cette justice, a pu varier. Il en a été de même du domaine, que le pouvoir social a cru devoir donner aux châtiments, ou des libertés individuelles, que, dans leur restriction même, il devait respecter. Mais, ce qui n’a point changé, c’est l’idée de la peine, que l’on a toujours considérée comme la sanction juridique d’un droit, privé ou public, violé par le délinquant.