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LES LOIS CRIMINELLES DE FRANCE
DANS LEUR ORDRE NATUREL

de Muyart de Vouglans
( Paris 1783, extraits )

Épitre dédicatoire au roi Louis XVI ( extrait )

Votre Majesté voudra bien ne pas tant considérer dans cet ouvrage ce qui en appartient à l’auteur, que l’importance de ce qui en est l’objet.

Eh ! quelles lois, Sire, pourraient être plus dignes de notre attention et de la bonté de votre cœur paternel, que celles qui font l’objet de ce recueil ? puisque sans elles toutes les autres resteraient absolument sans vigueur ; qu’elle sont la base de la sûreté de L’État, et de la tranquillité publique ; qu’elles décident de tout ce que l’homme a de plus précieux, de sa vie et de son honneur ; qu’en un mot elles sont la sauvegarde de l’innocence, et la terreur du crime, ce mal contagieux dont l’impunité fut toujours regardée comme la principale cause de la décadence des empires…

Discours préliminaire sur l’origine, l’importance et la division des lois criminelles ( extrait )

I  –  De l’origine des lois

L’homme étant né pour la Société, et la Société ne pouvant subsister que le maintien de l’Ordre public qui en est le fondement, il a fallu nécessairement une Autorité qui pût réprimer les troubles qu’on voudrait apporter à cet Ordre public.

C’est cette Autorité que la Providence fait exercer par deux sortes de Puissances qu’elle a établies sur la terre, l’une purement spirituelle, qui tend à régler l’esprit et le cœur, et à insinuer l’amour de la justice, sans l’usage d’aucune force temporelle pour l’extérieur ; l’autre temporelle, qui a principalement pour objet de régler l’extérieur , et ne s’exerce que sur les choses temporelle.

Cependant, quoique distinctes de leur nature, comme ces deux puissances reconnaissent le même Auteur, et qu’elles sont également destinées au maintien de l’ordre qu’il a établi dans l’Univers, elles doivent aussi par cette raison s’aider mutuellement dans l’exercice de leur autorité.

De la distinction de ces deux Puissances suit naturellement celle des Lois qui en sont émanées. Les lois de la Puissance spirituelle sont appelées Lois divines, et celles de la puissance temporelle, Lois humaines.

Les lois divines sont connues proprement sous le nom de Lois de la Religion, parce qu’elles ont singulièrement pour objet les règles de la Foi et des Mœurs, et prescrivent les devoirs de l’homme envers son Créateur. L’on doit aussi y rapporter pour la même raison cette Loi naturelle que Dieu a gravée dans le cœur de tous les hommes, et qui les porte à la recherche de ce souverain bien qui seul est capable de les fixer ; n’ayant rien dans eux-mêmes, ni dans les objets que l’Univers présente à leurs regards, qui soit digne d’être leur fin. On sait d’ailleurs que c’est sur le fondement de cette première Loi, que s’est établie celle de la Société qui ne tend qu’à entretenir, parmi les hommes, cet amour mutuel ; qui les lie entre eux, comme devant être unis dans la possession de ce Bien unique qui doit faire leur félicité commune.

Mais quoique rien ne dût être plus inviolablement observé que cette Loi naturelle, les hommes n’étant malheureusement pas assez portés d’eux-mêmes à en suivre les sages préceptes, et s’étant au contraire laissé entraîner par les passions de l’envie, de l’ambition, de l’avarice, d’où sont ensuivies les querelles, les violences et les procès, il a fallu nécessairement des Lois particulières pour les contenir dans leur devoir, et pour empêcher l’oppression des bons par les méchants, des pauvres par les riches, des faibles par les puissants : ce sont ces Lois que nous venons de désigner sous le nom général de Lois humaines. On les appelle aussi Lois de police, parce qu’elles regardent principalement l’ordre extérieur de la Société, où les devoirs particuliers que les hommes ont à remplir les uns envers les autres, soit qu’ils connaissent ou non la Religion.

Signe de fin