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SECTION III - La théorie générale de l’imputation

Responsabilité pénale. Une personne ne peut être considérée comme pénalement responsable que si l’on peut lui imputer un acte matériel positif de participation à l’infraction : Cass.crim. 29 janvier 1936 (C...t).

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Principe de la responsabilité individuelle. Lorsqu’il n’est pas possible de déterminer laquelle des quatre personnes présentes lors des faits a commis l’imprudence dommageable, toutes doivent être relaxées : Cass.crim. 22 mars 1966 (R...d c. W...h et autres).

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Responsabilité pénale - personnes dont la responsabilité peut être recherchée - enfants en bas âge (non).

Cass.crim. 13 décembre 1956, (D.1957 p.349 note Patin)

L...

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des art. 1 et 2 de l’ordonnance du 2 février 1945 : Vu lesdits articles ;

Attendu que saisie de l’appel d’un jugement du tribunal pour enfants de Strasbourg qui avait déclaré le mineur L... (Jean) coupable du délit de blessures involontaires, dit n’y avoir lieu à sanction pénale et ordonné la remise du mineur à sa famille, tout en déclarant également le père civilement responsable, la Cour d’appel de Colmar a confirmé ce jugement dans la mesure où il avait déclaré les faits matériellement établis et dans la mesure où il avait décidé que l’enfant de­vait être remis à sa famille, mais l’a infirmé dans la mesure où il a déclaré le mineur convaincu du délit de blessures par imprudence et le père civilement responsable de ce délit, le mineur Jean L..., qui n’était âgé que de six ans au moment des faits délictueux, ne pouvant, faute de raison suffisante, répondre devant la juridiction des enfants du fait à lui reproché; que l’arrêt attaqué déclare que l’imputation à un mineur d’une infraction qualifiée crime ou délit n’est concevable que si la question préalable de raison suffisante et d’éveil de la conscience a été posée, implicitement tout au moins, et si elle a reçu une réponse affirmative; que la responsabilité pénale d’un tout jeune enfant, permettant de qualifier ses actes crimes ou délits, ne peut être retenue s’il ne ressort pas des faits de la cause et de l’examen de sa personnalité que cet enfant possédait le minimum de raison nécessaire pour comprendre la nature et la portée de l’acte qu’on lui reproche; qu’en l’espèce le fait de maladresse ou d’impéritie reproché au prévenu trouve dans l’âge de l’enfant une explication suffisante ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, et abstraction faite de tous autres motifs surabondants, fussent-ils erronés, l’arrêt attaqué a pu légalement décider que le mineur Jean L..., en raison de son jeune âge au moment des faits, ne pouvait, faute de raison suffisante, répondre devant la juridiction pénale des enfants de l’infraction à lui reprochée ;

Attendu, en effet, que si les art. 1 et 2 de l’ordonnance du 2 février 1945, modifiés par la loi du 24 mai 1951, posent le principe de l’irresponsabilité pénale du mineur, abstraction faite du discernement de l’intéressé, et déterminent les juridictions compétentes pour statuer lorsqu’un fait qualifié crime ou délit est imputé à des mineurs de 18 ans et pour prendre à l’égard de ces mineurs des mesu­res de redressement appropriées, sauf la faculté, quand il s’agit de mineurs âgés de plus de 13 ans, de prononcer une condamnation pénale si les circonstances et la personnalité du mineur paraissent l’exiger, encore faut-il, conformément aux principes généraux du droit, que le mineur dont la participation à l’acte matériel à lui reprochée est établie, ait compris et voulu cet acte; que toute infraction, même non intentionnelle, suppose, en effet, que son auteur ait agi avec intelligence et volonté ;

Attendu toutefois qu’après avoir décidé que le mineur Jean L..., qui n’était âgé que de 6 ans au moment des faits délictueux, ne pouvait répondre devant la juridiction répressive de l’infraction relevée contre lui, l’arrêt ne pouvait que prononcer sa relaxe et ne pouvait sans contradiction prendre à son égard une mesure de redressement; qu’il suit de là que la décision de remise de l’enfant à sa famille n’est pas légalement justifiée ;

Par ces motifs, casse... (dans le seul intérêt de la loi et sans renvoi)…

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Responsabilité pénale - responsabilité des personnes morales - ancien principe d’irresponsabilité.

Cass.crim. 8 mars 1883 (S. 1885 I 470)

Compagnie parisienne de v...

Sur les moyens tirés : l°) de la violation des principes en matière de respon­sabilité pénale; 2°) de la violation de l’art. 52 C.pén., de l’art. 3 de la loi du 22 juillet 1867, et de la loi du 19 décembre 1871, en ce que la Compagnie des v... , société anonyme, aurait été condamnée à l’amende, aux dépens et à la contrainte par corps ;

Attendu que l’amende est une peine ; que toute peine est personnelle, sauf les exceptions spécialement prévues par la loi; qu’elle ne peut donc être prononcée contre une société commerciale, être moral, laquelle ne peut encourir qu’une responsabilité civile ;

Que, de même, une société commerciale ne peut être assujettie à la contrainte par corps pour le payement des frais; que si, en fait de profession industrielle réglementée, le chef ou directeur de l’établissement peut être personnellement tenu à exécuter les prescriptions édictées par des arrêtés de police dans un intérêt de salubrité ou de sûreté publique, et, par suite, être passible pénalement des infractions commises, cette exception est sans application dans l’espèce ;

Qu’en fait, on ne peut admettre que le directeur de la Compagnie ait été substitué à la Compagnie même; que les procès-verbaux de contravention ont été dressés contre la Compagnie; que si, dans deux des assignations, elle a été citée en la personne de son directeur, c’est elle qui fi­gure comme partie aux qualités des trois jugements, et qui comparaît par le mandataire qu’elle a choisi, c’est contre elle que les condamnations à l’amende et aux frais avec contrainte; par corps ont été prononcées ;

Attendu, en conséquence, que la Compagnie a été condamnée en violation des lois sus-visées ;

Casse...

Note. – Si le nouveau Code pénal n’écarte pas la responsabilité pénale des personnes morales (art. 121-2), il ne l’admet toutefois que dans les cas prévus par la loi. D’un point de vue purement technique, le principe posé par l’arrêt rapporté demeure donc valable.

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