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DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL

- Professeur Jean-Paul DOUCET -

Lettre  R
(Première partie)

RABAT D’ARRÊT

Cf. Arrêt*, Cour de cassation*.

Le « rabat d’arrêt » est la décision par laquelle une juridiction met à néant une précédente décision rendue dans la même affaire. Cette procédure, tout à fait exceptionnelle, se rencontre notamment devant la Cour de cassation*. Pour prendre un exemple extrême, la Chambre criminelle prononce le rabat de son précédent arrêt rendu dans la même affaire lorsqu’il apparaît que, le jour où elle a statué, l’action publique était éteinte du fait de la mort du défendeur.

Signe Doctrine Boré (La cassation en matière pénale) : En vertu d’une jurisprudence traditionnelle, lorsqu’un pourvoi a été rejeté, par suite d’une erreur de procédure non imputable au demandeur, la Chambre criminelle accepte de prononcer un rabat de l’arrêt de rejet, c’est-à-dire de rendre un arrêt de rétractation pour permettre un nouvel examen de l’affaire.

Signe Doctrine Atias (Le développement du rabat d'arrêts de la Cour de cassation, Gaz.Pal. 9 février 2010) : La requête en rabat d'arrêt consiste à demander l'annulation d'un arrêt de la Cour de cassation rendu à la suite d'une erreur de procédure non imputable à une partie. Mais alors que le rabat d'arrêt semblait initialement réservé à des hypothèses exceptionnelles, sa pratique tend en réalité à se développer jusqu'à toucher les décisions de non admission des pourvois.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 21 janvier 1969 (Bull.crim. n°37 p.85) : Par arrêt du 8 mai 1968, la Chambre criminelle a rejeté le pourvoi formé par Casanova Joseph, né le 8 juillet 1914 à Ucciani (Corse), contre un arrêt rendu le 21 mars 1968 par la Cour d’assises de la Corse. Or, il résulte des pièces produites et notamment d’un extrait des registres d’état civil de la commune de Bastia que Casanova, demandeur au pourvoi, était décédé dans cette commune le 25 mars 1968, soit antérieurement à l’arrêt précité. Par suite, rétracte l’arrêt du 8 mai 1968 et déclare l’action publique éteinte.

RACHAT

Cf. Wergeld*.

Certains législateurs ont autorisé celui qui encourt une peine privative de liberté ou une peine corporelle à se racheter en payant une amende. Si cette  technique est à la rigueur acceptable dans le domaine des infractions de police, voire dans celui des infractions non-intentionnelles, elle ne saurait être admise sur le terrain des infractions de pur droit pénal : ce serait permettre aux personnes fortunées de commettre des crimes en étant assuré d'une quasi impunité.

Signe Histoire Loi salique. T. XIII, Art. 1 : L’esclave qui sera convaincu d’avoir dérobé, hors d’une habitation, un objet valant deux deniers, sera condamné à recevoir 120 coups de fouet, à moins qu’il ne préfère se racheter de ce supplice, en payant 120 deniers, ou 3 sous d’or.

Signe Histoire Code annamite de Gia Long (trad. Philastre). Art. 1 (Explications coordonnées) : Actuellement, les fonctionnaires passibles des peines du rotin, du truong, du travail pénible, de l'exil, lorsque la culpabilité est relative, se rachètent toujours selon le tarif des personnes pourvues de ressources.

Signe Histoire Philastre, sur l'art. 261 du Code de Gia Long, rapporte cette annotation du Code chinois : Si un homme tue ou blesse deux personnes par mégarde ou accident, le prix de rachat est partagé entre les deux victimes ou entre les deux familles. Si deux hommes tuent ou blessent une seule personne par mégarde ou accident, ces deux hommes versent chacun le prix du rachat, une des sommes est donnée à la victime ou à sa famille et l'autre est attribuée à l'État. [ces précisions montrent que le prix du rachat constitue bien une sanction pénale]

RACISME

Cf. Associations - action civile*, Diffamation*, Dignité de la personne humaine*, Discrimination*, Génocide*, Haine*, Idéologie*, Injure*, Persécution*, Provocation à commettre une infraction - provocation à la haine raciale*, Wasp*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-I-148, p.404 (racisme et discrimination)

- Notion. Le racisme est un état d’esprit consistant à penser : soit que l’on appartient à une race supérieure aux autres, et que l’on se trouve dès lors placé au dessus des lois ordinaires ; soit que telle partie de l’humanité est inférieure à telle ou telle autre, et ne mérite dès lors qu’une protection limitée voire aucune.

Signe Dictionnaire Dictionnaire Larousse. Racisme - Attitude d'hostilité systématique à l'égard d'une catégorie déterminée de personnes.

Signe Exemple concret Monestier (Faits divers) : La mémé assassine son petit-fils… Elle avouera aux policiers de Saint-Étienne : « C’est le vrai enfant du péché, il était né de père français non musulman ».

Signe Exemple concret Exemple (Ouest-France 17 décembre 2010) : Les figures de proue de l'aile droite du Likoud sont au coude à coude avec les ténors de la gauche pour dénoncer une lettre signée par une cinquantaine de rabbins issus de la colonisation. Une lettre appelant à ne pas vendre de terrains ni à louer d'appartements aux Arabes... Figure du nationalisme israélien, Bennie Begin, fils du défunt premier ministre ne cache pas son indignation : "si un tel appel visait les juifs de la diaspora, cela aurait provoqué une levée de boucliers en Israël".

Signe Exemple concret Exemple (Ouest-France 10 avril 2015) : L'Inde perd son esprit de tolérance - . Depuis les années 1980, la « vague safran » enfle. Ses militants de base, se sentant protégés par le parti au pouvoir, s'attaquent  aux musulmans et aux chrétiens aux quatre coins du pays : incendie d'églises et viols se sont multipliés, sans que le gouvernement n'intervienne vraiment... et laisse se développer une campagne contre les conversions. La "moralpolitik" de Nehru paraît bien loin.

Au départ figure la notion de race, dont la définition est plus délicate à établir que l'on pourrait penser.

Signe Dictionnaire Alland et Rials (Dictionnaire de la culture juridique). V° Race et racisme, par F. de Fontette : Les caractères génétiques sont pris en compte depuis le début du XXe siècle : la race constitue une population qui diffère des toutes les autres par la fréquence d'un ou de plusieurs gènes qu'elle possède.

Signe Philosophie Jolivet (Traité de philosophie morale - Morale) éd. 1962 n° 438 : On sait qu'en fait il n'y a pas de races pures et que toutes les races se sont mêlées depuis les temps préhistoriques dans une sorte de brassage continu. Néanmoins, certains traits, physiques et moraux, surnagent à ce mélange et prennent parfois un nouveau relief par l'effet de la vie commune... Sous le nom de "race" on entendra donc simplement un fait ethico-historique consistant dans un ensemble de qualités ou une certaine mentalité développée par la vie en commun.

- Règle morale. Le racisme est condamné, tant par la doctrine philosophique contemporaine dominante et par l'Église catholique, que par les conventions internationales.

Signe Philosophie Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale. V° Racisme (Schnapper) : Le principe de l’égalité juridique des citoyens comme l’idéal moral de la nation démocratique interdisent les pratiques racistes dans l’espace abstrait du politique.

Signe Philosophie Leclercq (Leçons de droit naturel - T.I) : La vieille définition, d'après laquelle l'homme est un animal raisonnable, reste en dehors des atteintes de tout ce que les sciences positives ont découvert... Animal raisonnable : cette courte formule se révèle lourde de signification... Elle justifie à elle seule, l'idée d'un genre humain, uniforme dans ses traits fondamentaux.

Signe Philosophie Bruguès (Dictionnaire de morale catholique) : Au sens strict, le racisme consiste à juger en termes de suprématie et d’infériorité la différence existant  entre les groupes raciaux.

Signe Législation Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ONU 1966). Art. 2 al.1 : Les États parties au présent Pacte s’engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.

- Science criminelle. Le principe de matérialité, qui domine le droit criminel, limite le domaine d'intervention du législateur. Il ne lui permet d'incriminer que des actes, des écrits ou des propos traduisant dans les faits un état d'esprit déniant à certains peuples la pleine qualité d'homme.

Signe Droit comparé Code pénal de l'Équateur. Art. 212-A : Sera puni de six mois à trois ans de prison... Celui qui finance, assiste ou apporte son aide à  toute sorte d'activités racistes. Si les infractions précisées dans cet article sont ordonnés ou exécutés par des fonctionnaires ou des employés publics, la peine sera de un à cinq ans de prison.

Signe Droit comparé Code pénal du Luxembourg. Art. 454 : Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur... race ou d'une religion déterminée.

Signe Droit comparé Code pénal de Slovénie. Art. 300 : Quiconque provoque ou incite à la haine ethnique, raciale ou religieuse... ou répand des idées de suprématie d'une race sur une autre encourt un emprisonnement de deux ans au plus.

- Droit positif. Le législateur français a visé cette attitude en incriminant le crime de Génocide* (art. 211-1 C.pén.), les infractions de Diffamation* ou d’Injure* à caractère raciste (art. 32 al.2 et 33 al.3 de la loi du 29 juillet 1881), et le délit de Provocation à la discrimination raciale* (art. 24 al.6 de la même loi).

Signe Renvoi article Voir : Tableau des incriminations protégeant l'honneur et la considération  (en droit positif français)

Signe Jurisprudence Paris 10 avril 1991 (Gaz.Pal. 1992 I somm. 228) : Le «racisme anti-français et anti-chrétien» constitue une forme de racisme punissable, susceptible d’entraîner la mise en œuvre par les associations définies à l’art. 48-1 de la loi du 29 juillet 1881, de l’exercice des droits reconnus à la partie civile en la matière.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 16 avril 1991 (Gaz.Pal. 1991 II 619) : Le racisme visé par l'art. 48-1 de la loi du 29 juillet 1881, en sa rédaction issue de la loi du 1er juillet 1972, complétée par celle du 13 juillet 1990, applicable aux instances en cours, s'entend de toute discrimination fondée sur l'origine ou l'appartenance soit à une race, soit à une ethnie, soit à une nation, soit à une religion, sans restriction ni exclusion. Est dès lors justifié l'arrêt qui énonce que le racisme antifrançais et antichrétien constitue une forme de racisme punissable.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 27 septembre 2005 (Gaz.Pal. 25 mars 2006, p.27) : Les dispositions de l'art. 33 al.3 de la loi du 29 juillet 1881[susvisé] n'incluent pas l'injure visant une personne en raison de son origine raciale.

Signe Jurisprudence Cass (Ass.plén.) 16 février 2007 - Consistoire central union des communautés juives de France c. Dieudonné M'Bala M'Bala (Gaz.Pal. 20 février 2007 p.10) : L'accusation reprochait au prévenu d'avoir répondu à la question "Que pensez-vous de la montée de l'antisémitisme parmi certains jeunes beurs ?": - "Le racisme a été inventé par Abraham. Le « peuple élu », c'est le début du racisme. Les musulmans aujourd'hui renvoient la réponse du berger à la bergère. Juifs et musulmans pour moi, ça n'existe pas. Ce sont deux notions aussi stupides l'une que l'autre. Personne n'est juif ou alors tout le monde. Je ne comprends rien à cette histoire. Pour moi les juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c'est la première.". Arrêt : L'affirmation "les juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c'est la première", ne relève pas de la libre critique du fait religieux, participant d'un débat d'intérêt général mais constitue une injure visant un groupe de personnes en raison de son origine.

Signe Exemple concret Exemple (Ouest-France 16 avril 2004 : A.Y.Chérif, 34 ans, Imam autoproclamé à Brest, sous le coup d'arrêtés d'expulsion vers l'Algérie pris par le ministre de l'Intérieur et le préfet du Finistère a vu sa requête en suspension rejetée, hier par le juge des référés du Tribunal administratif de Rennes. L'État reproche à cet homme, entré régulièrement en France en 2000, débouté du droit d'asile, de faire du prosélytisme en faveur d'un Islam radical, d'inciter à la haine raciale et d'avoir des contacts avec des mouvements terroristes. Sa demande d'asile ayant également été rejetée, l' « iman » a été placé sur un bateau à destination de l'Algérie dès hier soir.

RACKET

Cf. Délits pénaux (Délit composé)*, Liberté*, Rançonnement*, Vol qualifié*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la personne humaine » (4e éd.),  n° V-202, p.637

Le racket consiste en l’activité criminelle d’une association de malfaiteurs se livrant à l’exploitation des commerçants ou de particuliers par l’exercice de la terreur. Il est spécialement incriminé par l’art. 312-6 C.pén. français (l’ancien art. 400 était moins spécifique). Il s’agit d’un Délit composé*.

Signe Doctrine Vitu (Le meurtre politique en droit international et extraditionnel) : Les groupes maffieux qui exploitent la drogue, le rapt, le racket, la prostitution et la corruption sont puissamment constitués.

Signe Jurisprudence Cass. (2e civ.) 26 septembre 2002 (Gaz.Pal. 2003 somm. 3971) : Le racket est l’extorsion d’argent ou d’objets par intimidation et violence, ce qui recouvre l’expression d’un délit pénal.

Signe Droit comparé Modèle de Code criminel australien : L’incrimination de la fraude organisée a existé pendant un certain temps aux Etats-Unis avec la loi sur le joug des racketteurs et des groupes pratiquant la corruption.

Signe Exemple concret Encyclopédie Microsoft Encarta : La prohibition permit à la Mafia d’acquérir une grande puissance dans l’univers du crime aux États-Unis. Après l’abolition de celle-ci, la Mafia se livra à de nouvelles activités illicites comme le jeu, le racket, la prostitution puis le trafic de drogue.

Signe Exemple concret Exemple. (Le Télégramme 22 août 1998) : Un « gang des minettes » de 10 à 16 ans arrêté à Toulon … Tous les jours, à la mi-journée, elles se réunissaient dans une ruelles du centre de Toulon pour établir leur programme. Elles se déplaçaient en bus et rackettaient, agressaient ou rançonnaient, d’abord des jeunes filles, puis des personnes âgées et des passants.

RACOLAGE

Cf. Bonnes mœurs*, Bordeau*, Lieu public*, Prostitution*, Racolage commercial*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-110, p.167, sur le racolage actif

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° I-II-111, p.168, sur le racolage passif

- Notion. Le racolage consiste, de la part d’une personne se livrant à la prostitution, à chercher, en un lieu ou par un moyen public, à attirer des clients.

Signe Doctrine Vitu (Traité de droit pénal spécial) : Les personnes qui se prostituent ne se contentent guère d’attendre les éventuels clients ; elles les sollicitent, soit directement, soit plus discrètement par une attitude éloquente. Ces façons d’agir constituent le racolage, qui est toute invitation adressée, par quelque moyen que ce soit, à un partenaire de l’un ou l’autre sexe, connu ou inconnu, en vue de le provoquer à la débauche.

- Règle morale. Il est évident que les déambulations sur la voie publique de personnes portant des vêtements de nature à éveiller l'instinct sexuel des passants tombe sous le coup de la loi morale, comme attentatoire à la dignité de la personne humaine.

Signe Doctrine Merlin (Répertoire de jurisprudence, 1827). Bordel. … S’il est impossible d’anéantir les filles publiques, il serait à désirer, au moins, que l’administration voulût bien s’occuper des moyens propres à les empêcher de révolter journellement les yeux du public, par le désordre de leur habillement, leurs gestes lascifs et leurs invitations, dont l’impudence étonne sans cesse, malgré la longue expérience qu’on acquiert, surtout dans la capitale.

Signe Doctrine Vitu (Traité de droit pénal spécial).  Les personnes qui se prostituent ne se contentent guère d'attendre d'éventuels clients ; elles les sollicitent, soit très directement, soit plus discrètement par une attitude éloquente... Le but du système français est de protéger la décence de la rue.

Signe Exemple concret Exemple. Télétexte du 13 février 2000. Les riverains d’un quartier de Strasbourg en ont appelé aux autorités pour protester contre la présence de nombreuses prostituées, venues en majorité d’Europe de l’Est. « Elles sont là, en plein jour, quand nous rentrons de l’école avec les enfants » déplore une habitante… [Au mois d’août, quai des Alpes, on a vu déployer des banderoles et des pancartes portant : « Halte à la prostitution »].

- Science criminelle. Cette activité est de nature à troubler les passants, à gêner les habitants du quartier et à perturber leuss jeunes enfants. Aussi doit-elle faire l’objet de dispositions de police.

Signe Renvoi article Voir : Tableau des incriminations luttant contre la dépravation des mœurs  (selon la science criminelle)

La doctrine distingue deux manières de procéder, soit en abordant ou interpellant (racolage actif), soit en adoptant une attitude provocante (racolage passif). Le premier consiste en un acte positif de commission, et ne soulève donc pas de difficulté anormale pour la qualification judiciaire. Le second repose en revanche sur une simple attitude ou posture, et peut parfois donner lieu à une interprétation discutable ; aussi certains législateurs hésitent-ils à l'incriminer. Mais la frontière entre les deux n'est pas toujours facile à établir.

Signe Doctrine Rigaux et Trousse (Les crimes et les délits du Code pénal belge) : En vue d'éviter une extension exagérée des poursuites, le législateur belge a limité l'incrimination au racolage actif ; il ne retient que la proposition faite dans l'une des trois formes qu'il précise : par paroles, par gestes ou par signes. N'est donc pas punissable la provocation purement passive, celle qui résulte d'attitudes, d'allures extérieures, d'un comportement général.

Signe Droit comparé Code pénal d’Algérie. Art. 347 : Est puni d’un emprisonnement de 6 mois à 2 ans … quiconque, par gestes, paroles, écrits ou par tous autres moyens procède publiquement au racolage de personnes de l’un ou de l’autre sexe en vue de les provoquer à la débauche.

Signe Droit comparé Code pénal du Luxembourg. Art. 379 bis... Est proxénète celui ou celle qui d'une manière quelconque aide, assiste ou protège sciemment le racolage en vue de la prostitution.

Le racolage peut être imputé, soit à la personne qui se prostitue, soit à un complice qui lui apporte aide et assistance .

Signe Jurisprudence Cass.crim. 30 octobre 1956 (Bull.crim. n° 690 p.1220) sommaire : Des annonces publiées dans un journal en vue de provoquer à la débauche constituent un procédé de racolage. Et le directeur du journal se rend complice du délit en les publiant.

- Droit positif français. L’art. 225-10-1 C.pén. incriminait le fait, par tout moyen, y compris par une attitude même passive, de procéder publiquement au racolage d’autrui en vue de l’inciter à des relations sexuelles en échange d’une rémunération ou d’une promesse de rémunération (l’art. R.625-8, qui incriminait le fait de procéder publiquement au racolage d’autrui en vue de l’inciter à des relations sexuelles, a été abrogé par un décret du 27 septembre 2004).
N.B. L'incrimination de racolage a été abrogée par l'article 15 de la loi du 6 avril 2016, qui a en même temps incriminé le fait d'avoir des rapports avec une prostituée . En sorte que, si le ou la prostituée peut légalement procéder publiquement au racolage d'autrui, la personne qui accepte sa proposition commet une contravention ; législation d'une rare hypocrisie qui peut être source de chantage (et rendre l'entôlage non punissable ?) .

Signe Renvoi article Voir : Tableau des incriminations luttant contre la dépravation des mœurs)  (en droit positif français)

Signe Doctrine Lambert (Droit pénal spécial) : Nous ne décomposerons pas en éléments constitutifs cette infraction : l’acte et l’intention y sont confondus ; les gestes, les signes, les démarches, les paroles de la prostituée (ou du prostitué) ne font qu’exprimer son intention de provoquer à la débauche celui (ou celle) à l’adresse de qui sont faites ces invites.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 22 juin 1983 (Gaz.Pal. 1984 I 57) : Encourt la cassation le jugement qui, pour condamner une prévenue poursuivie du chef d’avoir eu sur la voie publique une attitude de nature à provoquer la débauche, contravention prévue et réprimée par l’art. R 34-13 C.pén., s’est fondé essentiellement sur le fait que cette prévenue était une prostituée notoire. En statuant ainsi, sans préciser en quoi l’attitude de la prévenue était de nature à provoquer la débauche, le Tribunal de police n’a pas justifié sa décision.

Signe Jurisprudence Paris 29 novembre 2000 (JCP 2001 IV 1402) : L’activité de prostitution n’est pas en elle-même une activité illégale, seules certaines conditions de son exercice sont interdites comme constituant les infractions de racolage et de proxénétisme.

RACOLAGE COMMERCIAL

Cf. Commerce*, Publicité commerciale*

Un arrêté du préfet de police du 26 juin 1933 interdit l’offre d’opérations commerciales et le racolage de clients éventuels sur la voie publique, notamment aux abords des lieux et des immeubles destinés à l’exploitation d’un commerce, d’une industrie ou d’un négoce quelconque. Les commerçants qui ont recours à des « piqueurs » pour attirer la clientèle commettent donc une faute.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 8 avril 1992 (Gaz.Pal. 1993 I 8 note Doucet) : Il est reproché au prévenu d’avoir interpellé, de la porte du restaurant qu’il exploite, des passants et d’avoir ainsi commis la contravention de racolage commercial. Pour rejeter l’exception d’illégalité de l’arrêté du préfet de police de Paris du 26 juin 1933, fondement des poursuites, le Tribunal de police énonce à bon droit que cet arrêté, qui interdit sur la voie publique l’offre d’opérations commerciales et notamment le racolage des clients éventuels aux abords des lieux et des immeubles destinés à l’exploitation d’un commerce, comportement de nature à troubler l’ordre, la tranquillité publique ainsi que la liberté et la commodité de la circulation, n’entrave en rien le principe de la liberté du commerce et de l’industrie.

RADIO -  Voir : Médias*.

RADIOACTIVITÉ -  Voir : Choses suspectes et dangereuses*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-II-261, p.567

RAISON (raisonnable)

Cf. Actes humains*, Arbitraire*, Conscience*, Doctrine*, Raisonnement pénal*, Rationnel*, Sagesse*, Science criminelle*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 106, p.66

- Notion. La raison est une faculté de l’esprit qui permet à l’homme, d’abord de prendre conscience de la réalité qui l’entoure, ensuite d’adopter la conduite convenable dans cette situation.
Elle s’affine par l’acquisition de connaissances, et par la pratique de la réflexion. Sur le plan des activités intellectuelles, elle assure la logique dans l’enchaînement des idées, elle permet une démonstration rigoureuse et sans failles.

Signe Dictionnaire Vergely (Le dico de la philosophie) : On appellera raison la faculté que les hommes possèdent de représenter le monde d’une façon objective, grâce à un processus de réflexion.

Signe Dictionnaire Cuvillier (Dictionnaire philosophique) : La raison est la puissance de bien juger et de discerner le vrai d’avec le faux … la faculté directrice de la pensée et de l’action humaine.

Signe Dictionnaire Lalande (Vocabulaire de la philosophie). Raison. A - Faculté de raisonner discursivement, de combiner des concepts et des propositions. La raison est presque universellement considérée, en ce sens, comme le propre de l'homme... B - Faculté de "bien juger", c'est-à-dire de discerner le bien et le mal, le vrai et le faux (ou même le beau et le laid) par un sentiment intérieur, spontané et immédiat.

Signe Philosophie Bruguès (Dictionnaire de morale) : La raison recouvre une double opération. La première appréhende la réalité telle qu’elle est ; on l’appelle « intellect ». La seconde cherche à comprendre, à argumenter et à rendre compte ; elle reçoit le nom d’« entendement » (il s’agit de la raison raisonnante).

- Raison et actes humains. Dans la vie quotidienne, la raison permet de distinguer le bien du mal, le bon du mauvais, le vrai du faux, le juste de l’injuste et le beau du laid, voire le légitime de l’illégitime, le probable de l’improbable, le possible de l’impossible et l’opportun de l’inopportun… On dit qu’un acte humain revêt un caractère raisonnable lorsqu’il répond exactement aux circonstances de fait, de temps et de lieu dans lesquelles son auteur se trouve plongé.
Il semble que la laideur (si prisée de nos jours) constitue la marque extérieure de la perte du sens du beau, du bon, du vrai et du juste.

Signe Philosophie Ahrens (Cours de droit naturel) : Les caractères constitutifs de la personnalité subjective sont la raison et la liberté.

Signe Philosophie Chemin (Code de religion et de moralité) cite Cicéron : Il est une première loi, éternelle, invariable et gravée dans le cœur de tous les hommes : c'est la droite raison. Ce n'est jamais en vain qu'elle parle à l'homme vertueux, soit qu'elle ordonne, soit qu'elle défende : les méchants seuls ne sont pas touchés de sa voix. Facile à comprendre, elle n'est pas différente dans un pays et différente dans un autre : elle est aujourd'hui ce qu'elle sera demain : elle oblige toutes les nations, et dans tous les temps.

Signe Philosophie Neufbourg (La loi naturelle) : Les conseils de la raison et de la conscience, leurs interdictions et leurs commandements sont les mêmes ; ce que l’une voit, l’autre le sent. Toutes les deux nous éclairent, en distinguant, chacune à sa manière, le juste de l’injuste, le droit du devoir, en nous conseillant et en nous montrant le bon chemin : celui de la sagesse et de la vertu.

Signe Doctrine Domat (Traité des lois) : C’est la lumière de la raison qui fait sentir à tous les hommes les règles communes de la justice et de l’équité.

Signe Doctrine Tardif (Le procédure civile et criminelle) observe que lorsqu’on permet à un magistrat d’intervenir pour tout motif raisonnable, on lui laisse une bien grande liberté d’action.

Signe Droit comparé Code criminel du Canada. Art. 254 : L’agent de la paix qui a des motifs raisonnables de croire qu’une personne est en train de commettre, ou a commis au cours des trois heures précédentes, par suite d’absorption d’alcool, une infraction à l’article 253 peut lui ordonner …de lui fournir soit les échantillons d’haleine, soit les échantillons de sang.

Signe Jurisprudence Cass.crim. 8 octobre 2002 (Gaz.Pal. 2003 J 2428) : Selon l’art. L. 231-8-1 C.trav., aucune sanction ne peut être prise à l’encontre d’un salarié qui s’est retiré d’une situation de travail dont il avait un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

RAISON D’ÉTAT

Cf. Bien commun*, Coup d’État*, Démocratie*, Dictature*, État*, Fait justificatif ? *, Nation*, Secret d'État*.
- Rapprocher, pour la Prison d'État : Bastille (La)*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La protection de la Société », n° II-7, p.286

- Notion. De même qu’un simple particulier peut invoquer la légitime défense lorsqu’il blesse une personne qui l’agresse, de même l’État* peut se prévaloir du fait justificatif de sauvegarde de l’intérêt public lorsqu’il réagit à une attaque visant la Nation* qu’il a en charge.

Signe Histoire Olivier-Martin (Histoire du droit français) : Les mesures les plus rigoureuses sont assez justifiées, aux yeux du Roi, par la raison d’État, c’est-à-dire par l’idée qu’il se fait des exigences du bien commun. D’ordinaire le Roi s’explique volontiers sur les motifs qui le déterminent à agir. Mais si l’intérêt de l’État l’oblige a garder secrets ses mobiles, ses sujets s’inclinent tout de même devant des « raisons d’État ». C’est qu’ils savent que le Roi, tout absolu qu’il soit, use avec modération de ses pouvoirs.

Signe Exemple concret Télétexte du 13 février 2001, après l’assassinat d’un officier de la garde de Y.Arafat : Le premier ministre Israélien a reconnu et justifié hier la pratique de la liquidation physique de Palestiniens, estimant qu’elle « ressort d’une situation de guerre et du droit à l’autodéfense de façon concrète ».

- Doctrines extrêmes. Les dirigeants des régimes totalitaires abusent de la notion de Raison d’État pour excuser certains de leurs actes qui ne tendent, en réalité, qu’à asseoir leur pouvoir et à les affranchir des règles morales ; à les entendre, ce fait justificatif les dispenserait en toute hypothèse d’observer la loi ordinaire.

Signe Philosophie Saint-Just, à la tribune de la Convention le 10 octobre 1793 : Dans une République, il n’y a point de considération qui doive prévaloir sur l’utilité commune.

Signe Doctrine Prélot et Lesquyer (Histoire des idées politiques) :  L’idée de raison d’État est essentielle chez Richelieu... Cependant il n’en rend pas l’accès facile. Elle n’est pas à la portée du vulgaire… C’est une intuition des grands esprits. L’homme d’État ne doit pas se laisser distraire des desseins que dicte la raison d’État par les présents des ennemis de l’État, ou par leurs artifices. Il doit bannir tout autre sentiment, même bon, s’il est préjudiciable à l’État .

Signe Doctrine Proal (La criminalité politique) Chap. 1 - Le machiavélisme : La théorie immorale de la raison d'État a été pratiquée par tous les gouvernements, par les monarchies comme par les républiques. Aucun gouvernement ne la pratiqua avec plus de cruauté que le Conseil des Dix à Venise. Nous agissons plus que nous parlons écrivait un ambassadeur de Venise à Rome nous faisons périr secrètement ceux qui le méritent... Les Vénitiens avaient l'habitude de dire : "Nous sommes vénitiens et puis chrétiens". [lors de ma visite du Palais des Doges, la guide vénitienne passa sans commentaire dans la salle du Conseil des Dix].

Signe Histoire Michelet (Histoire de la Révolution française) : C’est l’abus du principe d’intérêt public qui a perdu la France révolutionnaire, en débouchant sur la Terreur et la haine qu’elle a inspirée.

À l’inverse les théoriciens de l’anarchisme interdisent tout recours à la Raison d’État .

Signe Philosophie Bakounine (Catéchisme révolutionnaire). Il demandait, au nom de l’anarchisme, l’exclusion absolue de tout principe d’autorité et de raison d’État.

- Doctrine libérale. Une Constitution libérale ne saurait, ni exclure, ni généraliser la Raison d’État. Elle doit impérativement rappeler que l’action des hommes politiques doit toujours être dictée par le souci du Bien commun* et de l’intérêt général de la Nation*.

Signe Philosophie Burlamaqui (Principes de droit naturel) : La raison d’État, que l’on allègue si souvent pour justifier les procédés ou les entreprises des princes, ne peut véritablement avoir cet effet, qu’autant qu’elle se concilie avec l’intérêt commun des nations, ou, ce qui revient au même, avec les règles invariables de la bonne foi, de la justice et de l’humanité.

Signe Philosophie Condorcet, à la tribune le l’Assemblée législative le 25 octobre 1791 : C’est une erreur de croire que le salut public puisse commander une injustice.

Signe Philosophie Bautain (Philosophie des lois) : La théologie et la morale n’ont jamais approuvé ce qu’on appelle la politique du monde, ou la raison d’État. Sans doute, quand on gouverne, on est quelquefois obligé de faire ou de tolérer des choses suspectes ou odieuses à une conscience délicate, et que les circonstances peuvent seules excuser. Mais instituer une morale pour les gouvernants et une morale pour les gouvernés, c’est un mensonge et un crime. Il n’y a qu’une morale, petite ou grande, celle qui commande le bien et la justice, qui proscrit le mal et condamne ce qui est injuste. Si la raison d’État, ou la conduite du pouvoir, se trouvent en opposition avec l’équité et la morale naturelle, c’est une mauvaise politique.

RAISONNEMENT PÉNAL

Cf. Analogie*, Casuistique*, Faits*, Induire (3e sens)*, Imputation*, Matérialité*, Objectivité*, Qualification des faits*, Raison*, Rationnel*, Sophisme*, Syllogisme*, Techniques juridiques*.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « La loi pénale » (4e éd.), n° 22 et s., p.41 et s.

Signe Renvoi livres Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n°1, p.1 / n°8, p.9 / n° I-II-I, p.155 / n° I-III-I-304, p.278 / n° I-III-I-316, p.291

 Signe Renvoi article Voir : J-P. Doucet, Le raisonnement judiciaire

- Notion. On appelle raisonnement pénal (ou méthode pénale) l’ordre dans lequel un tribunal répressif doit examiner les diverses questions qui se posent à lui. Cet ordre n’est pas indifférent, car il balise la voie la plus apte à faire apparaître la vérité dans le respect des droits de la défense. Ses trois étapes successives sont la Qualification* des faits, l’Imputation* de l’infraction et la détermination de la Sanction*. Tel est le plan que nous avons suivi dans notre ouvrage sur « Le jugement pénal ».

Signe Dictionnaire Cuvillier (Vocabulaire philosophique) : Le raisonnement est une opération discursive de la pensée consistant à enchaîner logiquement des jugements et à en tirer une conclusion.

Signe Dictionnaire Vergely (Dico de la philosophie) : La méthode désigne une certaine discipline, un certain nombre de règles, ainsi qu’un certain nombre de procédures auxquelles l’esprit se soumet afin de pouvoir parvenir à un résultat dans l’ordre du savoir ou de l’action.

Signe Doctrine Von Jhering (L’esprit du droit romain) : La méthode juridique n’est pas une règle extérieure, arbitrairement appliquée au droit ; c’est le moyen unique, fourni par le droit lui-même, en vertu d’une nécessité contenue dans son essence, de régler d’une manière assurée, la marche du droit dans le domaine de la pratique.

- Importance. On n’insistera jamais assez sur cette règle essentielle que le juge doit s’attacher par priorité aux faits, les examiner sous tous leurs aspects et en extraire tout ce qu’ils peuvent révéler, avant de se demander, l’infraction une fois établie, qui en est l’auteur et qu’elle est l’étendue de sa responsabilité.

Signe Doctrine Servant (Discours sur l’administration de la justice criminelle) : Le premier soin du juge doit être de bien connaître le crime dont il va juger l’accusation. Nulle circonstance n’est à négliger le lieu, le temps, les personnes, tous les signes qui accompagnent le délit ; il faut observer le crime par tous les côtés : on a vu souvent sortir d’une ouverture imperceptible, une lumière soudaine qui éclairait le magistrat.

Suite de la lettre R