DICTIONNAIRE DE DROIT CRIMINEL

- Professeur Jean-Paul DOUCET -

Lettre  X

X… (Poursuites contre)

Puisqu’une juridiction d’instruction est simplement saisie in rem (donc de faits matériels), elle peut à l’évidence informer « contre inconnu » tant qu’elle n’a pas découvert l’identité de l’auteur des actes reprochés. Elle peut également faire arrêter une personne dont l’identité civile est encore ignorée, mais qui est matériellement impliquée dans les faits de l’espèce.

Cf. Accusé*, Anonymat*, Auteur (de l'infraction)*, Défendeur*, Droit au silence*, Prévenu*, Pseudonyme*, Signalement*, Suspect*.

 Voir : Jean-Paul Doucet, « Le jugement pénal » (3e éd.), n° I-II-I-202, p.165/166

 Ordonnance criminelle de 1670 (T.X, art.18) : Pourra être rendu un décret de prise de corps contre des personnes non connues, sous les désignations de l’habit de la personne et autres indications suffisantes.

 Pradel (Procédure pénale) : Rien n'empêche de lancer des poursuites avant l'identification du coupable (information contre X) en vue justement découvrir son identité.

- Dès lors qu’une juridiction de jugement doit être saisie, à la fois, in rem et in personam, les débats ne peuvent s’ouvrir que contre une personne précise. Mais le réalisme du droit criminel le conduit à se satisfaire que comparaisse l’auteur physique des faits reprochés. S’il est parvenu à cacher son identité civile aux autorités, il sera jugé puis condamné sous X… Par exemple, un certain Prado, surnommé « le tueur de filles » fut exécuté le 28 décembre 1888 sans que l’on fût parvenu à établir son identité exacte.

 Garraud (Traité d'instruction criminelle) : L'action publique doit être dirigée contre un individu certain et déterminé. Le nom de cet individu peut être inconnu, son état civil ignoré : qu'importe ? on le poursuivra et on le condamnera si l'identité entre l'inculpé et l'individu qui a commis le fait peut être établie.

 Le crime de la rue du Regard. En août 1883 M. et Mme Ducros de Sixt étaient assassinés par un individu dont on ne put jamais établir l’identité et qui reste connu sous le nom qu’il se donnait de Campi. L’avocat général passa outre en ces termes : « - Qui êtes-vous ? Qu’importe ! Vous êtes l’assassin de la rue du Regard ! ». Condamné à mort le 23 mars 1884 il ne confia son nom qu’à son avocat, Me G. Laguerre, qui le communiqua au président Jules Grévy lors du recours en grâce. La grâce fut refusée, Campi exécuté, son secret strictement gardé.

 Cass.crim. 15 février 1849 (S. 1849 I 605), sommaire : Une condamnation pénale peut être prononcée contre un prévenu sous la dénomination « homme inconnu » ou « femme inconnue », lorsque son nom est inconnu et qu’il refuse de le déclarer à la justice, dès lors que l’identité entre l’individu condamné et celui qui a commis le fait incriminé est constante. (De même : Trib.corr. Le Puy 11 janvier 1966, Gaz.Pal. 1966 I 205).

- On observera que le demandeur, quant à lui, ne peut taire son identité civile. Voir la règle : Nul ne plaide par procureur*.

XÉNOPHOBIE. Voir : Racisme*.