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DE LA PHILOSOPHIE DU DROIT

par Jules CAUVET
Extrait de la Revue académique de Caen
( février 1844 )

On ne saurait mieux dire.

En droit une loi ne mérite le nom de loi
que si elle est conforme aux règles dictées par la nature,
que si elle découle de principes rationnels,
et que si elle tend au Bien commun.

Un texte voté par le Parlement en méconnaissance
de ces trois conditions constitue un simple acte de force,
généralement imposé par des groupes de pression
s’étant unis pour favoriser leurs intérêts particuliers.

§ 1  Les différentes sciences dont s’occupent les hommes ont toutes leur philosophie, puisque chacune d’elles repose sur un certain nombre de lois rationnelles primitives, dont la doctrine et l’observation doivent développer les conséquences et indiquer les ramifications. Ce caractère ne saurait échapper à la science du droit.

Il est évident, en effet, qu’à travers la variété infinie que la diversité des siècles et des peuples introduit dans les législations, elles ont ensemble des points de contact nombreux. Leurs dispositions, si éloignées les unes des autres qu’on veuille les supposer, reconnaissent pourtant certains principes générateurs communs. Il existe dans le droit des règles absolues placées en dehors de la puissance des législateurs. Elles sont une portion de la raison humaine ; elles y apparaissent avec un caractère impersonnel et fatal qui rend leur réalité indépendante des violations qu’elles pourraient recevoir.

D’un autre côté, même dans la partie variable des législations, il se rencontre, à des époques très éloignées, des similitudes frappantes ; et, lorsqu’on en recherche la cause, il est aisé de se convaincre qu’un état de civilisation identique a eu pour résultat d’amener avec lui des institutions analogues.

L’esprit humain, enfin, ne se croit-il pas en possession légitime d’apprécier les lois positives, de rechercher si elles réalisent fidèlement les rapports qui dérivent de la nature des choses et qui unissent ensemble les objets qu’elles sont appelées à régir ? S’il en est ainsi, n’est-ce pas là une preuve évidente que nous considérons instinctivement ces rapports comme possédant une vérité absolue, et que notre intelligence ne saurait les confondre avec les textes où ils se trouvent consacrés ?

§ 2  Au-dessus des dispositions contingentes et arbitraires, il est donc juste de reconnaitre dans le droit deux sortes de principes fondamentaux qu’il appartiendra à la philosophie de proclamer.

Les premiers, bases indispensables de la sociabilité parmi les hommes, ne peuvent recevoir, à aucune époque et chez aucune nation, ni abrogation ni dérogations. Les lois écrites essaieraient en vain de les anéantir. Elles viendraient se briser contre la voix de nos consciences, où la main de Dieu les a tracés en caractères ineffaçables. Ainsi, nulle loi humaine ne pourrait affranchir un fils du respect qu’il doit rendre aux auteurs de ses jours.

Les seconds, il est vrai, ne sont pas le produit d’une perception intellectuelle aussi directe, aussi instantanée. Ils exigent pour être connus les méditations d’une raison calme, éclairée de tous les secours qui peuvent la fortifier et la soutenir. Ils sont les conséquences de l’état social d’une nation, de son passé, de son climat, du génie qui l’anime. Mais, ces circonstances une fois bien connues, les institutions qu’elles doivent amener avec elles apparaissent à notre esprit comme des exigences nécessaires de la raison suprême qui régit l’univers. Elles appartiennent donc, elles aussi, au moins dans leurs parties principales, à cette législation idéale supérieure qui fait la base légitime du droit de tous les peuples.

Souvent, il est vrai, en cette matière, les faits seront en opposition avec le droit. Les ténèbres des passions déroberont aux dépositaires du pouvoir la vue de ces lois -nécessaires ; ils y substitueront des dispositions arbitraires ; ils tenteront de dénaturer les rapports essentiels qu’ils auraient dû reconnaitre et non détruire. Mais, ce ne sera pas en vain qu’ils auront placé la société qu’ils étaient appelés à régir en dehors de ses véritables voies. Des calamités inévitables viendront l’assaillir ; elle verra l’activité et la puissance l’abandonner sans retour, tandis qu’elle eût obtenu le bonheur et la gloire, si des institutions plus conformes à la nature des choses avaient combiné dans d’harmonieuses proportions les divers éléments dont elle se composait.

§ 3  Puisons dans le droit politique un exemple frappant d’une de ces lois providentielles soumises néanmoins, dans leur application, aux influences des époques et des mœurs.

Le gouvernement d’un seul, la concentration de tous les pouvoirs sur la tête du même homme, peut convenir à un peuple encore en petit nombre et voisin de son berceau. C’est le régime patriarcal, auquel presque toutes les nations furent soumises à leur naissance. Alors, en effet, des relations fréquentes entre le monarque et ses sujets, le souvenir d’une origine commune, la possibilité pour le chef de tout voir par lui-même tempéreront efficacement ce que cette puissance sans limites porte avec elle d’enivrant et de dangereux. Supposez, au contraire, une nation nombreuse et amollie régie ainsi par la volonté unique d’un seul homme, et le despotisme vous apparaîtra inévitablement avec son cortège hideux de corruption et de barbarie. Livrés à leurs propres forces en face d’une tâche aussi redoutable, les esprits les mieux trempés seront pris de vertige, et, dans leur folle témérité, ils en viendront à prétendre diviniser leurs passions et leur orgueil.

Il est donc nécessaire chez un peuple semblable, pour que les lois sacrées de la justice et de la vertu puissent se maintenir intactes, qu’il existe de grands corps politiques ou religieux opposant à la puissance du monarque un équilibre salutaire. Le gouvernement représentatif, tel que nous le possédons, présenterait sans doute d’immenses dangers pour une nation encore peu avancée dans la carrière de la civilisation ; mais, sous toutes les latitudes et à toutes les époques, il est également indispensable au progrès de l’humanité qu’il se rencontre au sein d’un grand État des pouvoirs distincts, tempérant par leur action réciproque ce que celle de chacun d’entre eux pourrait avoir d’irrationnel et de violent, si elle était abandonnée à elle-même.

§ 4  On le voit, tandis que le jurisconsulte pratique étudie les textes pour saisir leur portée et développer leurs conséquences, tandis que l’historien de la jurisprudence recherche dans le passé les institutions des nations qui ne sont plus, le jurisconsulte philosophe aspire à quelque chose de plus élevé.

Au-dessus de la masse des faits juridiques est une sphère idéale d’où ces faits découlent, où ils puisent leur légitimité. C’est là qu’il entreprend de porter ses regards. Heureux si la pureté de ses intentions, si la vivacité de son intelligence lui permettent de fixer sans trouble cette lumière éclatante. Son œuvre pourtant ne s’isole pas de la leur. Selon la loi qui régit les opérations de notre âme, c’est par la connaissance de ce qui est relatif et borné qu’il parvient à la découverte de l’absolu. Une étude approfondie des lois positives de toute nature, et dans le présent et dans le passé, lui sera donc indispensable pour la tâche qu’il se propose d’accomplir. Ce n’est qu’à cette condition qu’il pourra sans témérité, chercher à pénétrer l’esprit qui les anime, et signaler, à travers la variété des textes, les formules supérieures et primitives qui communiquent à ceux-ci le mouvement et la vie :

Spiritus intus alit , totam que infusa per artus
Mens agitat molem et magno se corpore miscet

(Virgile Énéïde L.VI)).

§ 5  Le droit, c’est la vie, a dit l’allemand Gans. Ce mot a fait fortune dans l’école moderne. Il reproduit une idée déjà exprimée par Justinien dans les Institutes, lorsqu’il définit la jurisprudence :

Jurisprudentia est divinarum atque humanarum rerum notitia,
justi atque injusti scientia
.

Il importe, je crois, à la dignité de la science du droit de là faire sortir de ce vague qui pourrait la compromettre. Toutes les choses, il est vrai, ont leurs lois, mais toutes ces lois ne sont pas relatives au droit. Le droit, c’est la science du juste et de l’injuste, comme le veut Justinien ; mais en tant seulement qu’il s’agit d’établir ou de reconnaître des rapports de sociabilité existant entre les hommes et donnant naissance à des droits et à des devoirs.

Tout objet de nos connaissances, dès lors qu’il rentre dans ce cadre, fait partie du droit ; s’il s’en écarte, au contraire, il cesse de lui appartenir. Ainsi, la morale proprement dite se borne-t-elle à rechercher les devoirs que l’homme doit remplir envers lui-même, elle demeure étrangère au droit ; mais, lorsqu’elle entreprend de tracer les obligations qui nous sont imposées envers nos semblables, elle se confond alors avec le droit naturel qui est une partie de la jurisprudence.

De même encore, la théologie forme une science entièrement distincte du droit, soit qu’elle expose nos devoirs envers Dieu dont nous tenons l’être, soit qu’elle détermine les formes et l’esprit des cérémonies saintes qui doivent nous attirer ses bienfaits. Mais, quand, à raison de la discipline et de la hiérarchie sacrées, elle reconnaît entre les fidèles des relations sociales réciproques, la théologie elle-même vient se rattacher à la science du droit. Elle donne naissance au droit canonique, trop négligé de nos jours, et pourtant la source la plus féconde de la supériorité que possède la jurisprudence moderne sur celle des temps antiques.

§ 6  Ainsi restreinte dans ses véritables limites, la science du droit forme un ensemble assez vaste pour effrayer le jurisconsulte qui voudra parcourir tout entière la carrière ouverte devant ses pas. Un cours complet de philosophie du droit consisterait donc à aborder les unes après les autres les branches diverses dont la jurisprudence se compose, et à faire remonter, sur chacune d’elles, les lois écrites et les coutumes des nations vers une législation supérieure qu’elles auraient pour mission de refléter au sein du monde sensible.

Dans cette longue pérégrination scientifique, les regards de l’homme assez courageux pour oser l’entreprendre se porteraient d’abord sur les rapports qui unissent entre eux les différents états et constituent le droit international ou droit des gens. Envisageant ensuite séparément chacune des nations, il puiserait : dans le droit politique, les règles qui président à l’organisation des pouvoirs publics ; dans le droit administratif, celles qui déterminent leur mode d’action ; dans le droit pénal, les préceptes rationnels qui légitiment et circonscrivent les châtiments que les sociétés humaines infligent aux coupables qui troublent leur repos. Descendant, enfin, dans l’intérieur des familles et des cités, il signalerait les sources du droit civil, dont l’importance et l’étendue sont toujours si grandes chez un peuple parvenu à une civilisation développée.

Cette loi nécessaire qu’il puiserait dans les profondeurs de sa conscience lui servirait de point de départ pour juger les lois positives, pour proclamer les principes de raison auxquels il appartient de guider les nations et les individus, quand la législation écrite vient à faire défaut. Elle comprendrait, nous l’avons déjà fait voir, deux ordres de préceptes distincts, les uns possédant une vérité absolue, parce qu’ils reposent sur la nature intime de l’homme, les autres variables sans être arbitraires, consacrant des rapports accidentels soumis toutefois à des règles fixes et préexistantes.

Cependant, en s’efforçant d’arriver à la connaissance de la loi supérieure, le jurisconsulte philosophe devrait étudier en même temps de quelle manière elle fut observée ou négligée aux époques les plus célèbres de l’histoire. Il ferait apercevoir l’esprit des institutions qui s’écarteraient de cet idéal divin, il signalerait leurs conséquences funestes ; enfin il montrerait comment les fausses données législatives qui les avaient fait naître se sont longtemps transmises d’un peuple chez un autre, avant de disparaître à la présence d’une lumière plus pure.

§ 7  Il est facile de comprendre quelle immensité d’érudition, quelle profondeur, quelle sérénité de pensée exigerait une philosophie complète du droit, telle que nous la concevons. Nul n’est parvenu jusqu’ici à accomplir cette entreprise, jamais peut-être nul ne touchera un but si difficile à atteindre. Mais c’est la gloire, c’est la tâche providentielle de l’esprit de l’homme de poursuivre sans cesse une perfection qu’il ne lui sera jamais donné de réaliser en entier. L’insuffisance prévue de nos efforts ne saurait donc légitimement ralentir notre zèle.

D’ailleurs, la mission du jurisconsulte philosophe est encore grande et noble, lorsque, désespérant d’embrasser l’ensemble de la science, il restreint ses travaux à l’une de ses parties. L’étude philosophique du droit international n’a-t-elle pas contribué puissamment à dissiper les antiques préjugés qui séparaient les peuples ? Ne lui appartient-il pas de faire prédominer de plus en plus dans les relations qu’ils entretiennent ensemble la pensée chrétienne de fraternité et d’amour ? Des travaux de même nature sur le droit politique peuvent offrir une égale importance. La contemplation de principes modérateurs immuables planant au-dessus des intérêts passagers ne saurait manquer d’amener dans les esprits un calme salutaire et de tempérer la violence des partis.

§ 8  Les autres parties de la jurisprudence possèdent de même leur philosophie particulière, puisque chacune d’elles, nous ne saurions trop le répéter, a pour point de départ des règles essentielles. Cependant, même en la divisant de la sorte, la science qui nous occupe présente encore des difficultés trop sérieuses pour qu’il soit donné à beaucoup d’oser se hasarder, en présence du public, sur une mer aussi parsemée d’écueils.

Parmi les jurisconsultes désireux d’associer la philosophie à l’objet spécial de leurs travaux, le plus grand nombre devra se contenter d’études individuelles ; mais ces études, si elles sont sagement conçues, n’en seront pas moins fécondes, par la multitude d’aperçus lumineux dont elles orneront les intelligences.

§ 9  Un des grands avantages de la philosophie du droit, c’est d’introduire dans l’étude de cette science un élément encyclopédique qui y manquerait sans elle. Quand on se livre exclusivement à l’examen des textes, on est tenté naturellement de concentrer tous les efforts de son esprit sur une portion isolée de la législation et d’oublier les rapports qui l’unissent aux autres parties du droit.

L’étude des principes premiers, en venant s’ajouter à celle du droit positif, combattra cette tendance. Elle nous fournira des données précieuses pour comparer les lois entre elles, pour saisir leur portée véritable et éclaircir leurs ténèbres. Élevant nos regards vers l’absolu, elle nous permettra d’embrasser d’un seul coup d’œil les diverses branches du droit. Enfin, par le lien qu’elle découvrira entre la science du jurisconsulte et les autres sciences morales, elle fera naître en lui une noble propension à enrichir son âme de toutes les connaissances qui peuvent l’améliorer et l’embellir.

Floriferes ut apes in saltibus omnia Iibant,
Omnia nos itidem depascimur aurea dicta
.

§ 10  Les efforts de la philosophie du droit pour constater les bases primitives des législations présenteront un autre résultat plus important encore. Ils serviront à combattre cette doctrine si funeste à nos pères, que la loi peut consacrer la spoliation et l’injustice, quand cela paraît nécessaire au salut de l’État.

Telle fut l’idée dominante de toutes les tyrannies, telle est la conséquence presque inévitable de l’opinion de ceux qui considèrent les lois comme ayant leur source dans l’utilité du grand nombre et la volonté du législateur. Que l’on rattache, au contraire, le droit positif aux notions inaltérables du juste et de l’injuste, que nous puisons dans nos consciences, dans le témoignage des hommes éclairés et vertueux, et l’on comprendra à l’instant que nulle raison politique ne saurait jamais venir légitimer l’iniquité et prévaloir contre cette voix intérieure et sacrée.

§ 11  Toutefois, à notre estime du moins, la réalité intrinsèque des vérités premières qui sont le fondement du droit ne serait qu’insuffisamment démontrée, si l’on se bornait à rechercher leur principe dans la raison de l’homme. Qui pourrait, en effet, dans cette hypothèse, obliger rationnellement à les admettre celui qui trouverait dans sa raison particulière une révélation opposée ?

Il faut donc remonter plus haut que notre intelligence propre ; il faut s’élever jusqu’à l’essence divine, où ces vérités possèdent leur existence réelle, immuable, éternelle, absolue. Auteur des lois si sages que les sciences physiques nous font connaître, et qui président à la conservation du monde matériel, Dieu ne pouvait laisser sans direction le monde moral bien plus précieux devant lui. Il a fixé des modes pour la constitution des relations diverses que la société produit entre les hommes.

Les gouvernements, comme les individus, sont tenus de conformer leurs actions et leurs lois à ces règles premières. Quand ils abusent de la liberté qui est le propre de notre nature, quand ils tentent de leur substituer des principes contraires, ils n’altèrent en rien leur réalité. Loin de là, celle-ci devient plus éclatante encore par la manifestation que reçoivent, dans notre intelligence, les préceptes qu’elle atteste, au moment même où ils sont méconnus dans le domaine des faits.

§ 12  Il suffit de réfléchir aux opérations de notre esprit pour se convaincre que la vérité est indépendante de l’acceptation qu’elle reçoit de nous.

Ainsi, le genre humain tout entier nierait en vain la parité de deux corps identiques ; cette parité n’en existerait pas moins dans la nature des choses, et la nature des choses n’est plus qu’un vain mot quand on entreprend de l’isoler de l’essence divine. Avant qu’il y eût des êtres intelligents, a dit Montesquieu, ils étaient possibles ; ils avaient donc des rapports possibles, et par conséquent des lois possibles. L’univers était encore plongé dans le néant, et déjà il était vrai qu’en supposant plus tard la création de l’homme, ce serait un crime pour lui de trahir ses serments, d’immoler son semblable.

Mais, si les lois essentielles des choses sont antérieures à la création du monde sensible, elles sont donc éternelles ; donc elles font partie de l’essence divine, puisqu’elles existaient déjà à une époque où rien n’était que Dieu.

§ 13  En faisant ainsi remonter les préceptes du droit vers une source divine, il faut se garder pourtant de méconnaître la part dévolue légitimement, dans la confection des lois, aux dépositaires de l’autorité sociale.

Non seulement il existe dans les législations une partie variable fondée sur la différence des époques et des civilisations ; il s’y rencontre encore une partie arbitraire prenant sa cause dans la volonté du législateur.

Deux chemins différents peuvent également bien conduire au même but. Dès-lors, si les bases essentielles des lois sont hors de sa portée, parce qu’elles dérivent de rapports nécessaires, c’est à sa volonté propre, c’est à son libre arbitre qu’il appartient de promulguer les dispositions de détail, les règles secondaires d’organisation.

§ 14  La présence du pouvoir public au sein des sociétés, l’exécution des lois qu’il ordonne, sont pour l’humanité des besoins impérieux. Un des axiomes fondamentaux de la philosophie du droit sera, par suite, l’indispensable nécessité d’allier le respect de la législation existante avec la recherche des principes premiers. Quand donc les lois de notre patrie nous sembleraient insuffisantes pour arriver à leur but véritable, elles n’en auraient pas moins droit à notre obéissance, dès lors qu’elles ne commandent rien de contraire à l’exacte justice. Une règle imparfaite à quelques égards est assurément préférable à l’absence de toute règle.

Usons des moyens légitimes qui sont en notre pouvoir pour éclairer l’esprit de nos concitoyens, pour faire pénétrer dans la législation de notre pays l’observation fidèle des rapports primitifs existant entre les choses ; mais, tant qu’elle n’aura pas été changée, ne nous croyons jamais dégagés du devoir d’y conformer nos actions. Avec cette sage restriction, l’introduction de la philosophie dans l’étude du droit positif ne pourra amener avec elle aucun élément dissolvant, et la stabilité dans le présent se conciliera avec le perfectionnement dans l’avenir.

Signe de fin