Page d'accueil>Table des rubriques>La science criminelle>Pénalistes>La loi pénale>L'infraction>G. Levasseur, Le recel de chose selon la science criminelle

LE RECEL DE CHOSE
selon la science criminelle

Extrait du « cours de droit pénal spécial »
de Georges LEVASSEUR
( « Les cours de droit »,  Paris 1967-1968 )

Le fait de voler constitue un acte principal,
le fait de recéler constitue un acte accessoire.

Si l’on resserre le lien entre ces deux actes,
pour des raisons techniques on affaiblit la répression ;
si l’on relâche le lien entre ces deux actes,
pour les mêmes raisons on accentue la répression.

Mais il est impossible de négliger ce lien,
qui tient à la nature même des choses.

C’est ce que montre, de la manière la plus claire,
le maître dont j’étais l’assistant il y a cinquante ans.

LE RECEL DE CHOSE

Le recel est le fait d’accepter ou  de conserver par-devers soi des choses dont on connaît l’origine délictueuse, des choses que celui qui les a remises s’était procurées par une infraction. Le fait d’accepter de telles choses ou de les conserver, même provisoirement, constitue l’infraction de recel.

À l’origine et dans l’Ancien Droit la notion de recel impliquait une certaine clandestinité ; il fallait avoir reçu et conservé ces choses pour les cacher, mais à l’heure actuelle cette condition de clandestinité n’est pas nécessaire; même si c’est ouvertement que l’on possède les choses que l’on a reçues en connaissant leur origine délictueuse, il n’y en a pas moins recel.

Le recel constitue un grave danger social.

Tout d’abord, il rend la répression plus difficile, car il est plus difficile de retrouver les choses qui ont été procurées par l’infraction, et, faute de les retrouver, on aura plus de mal à établir la culpabilité de l’auteur de l’infraction originaire.

Le recel constitue aussi une aide incontestable à l’auteur de l’infraction et c’est pourquoi, pendant longtemps, le receleur a été considéré conne un complice de l’auteur, un complice de l’acte qui avait procuré la chose. C’était un acte de complicité qui se réalisait après l’infraction, prévu par les articles 62 et 63 anciens du Code pénal. « C’est, disait-on, le receleur qui fait le voleur », parce que c’est probablement la perspective de trouver un receleur qui a incité le voleur à commettre son infraction. D’ailleurs, dans la grande généralité des casle voleur professionnel ne conserve pas pour lui les choses qu’il a prises ; surtout quand ce sont des choses de valeur, il entend les monnayer. Or, il écoulera plus facilement les objets volés auprès des personnes qui n’y regarderont pas de très près sur l’origine des choses qu’il leur proposera, des personnes qui, par conséquent, accepteront ces choses en connaissant ou au moins en soupçonnant leur origine frauduleuse et chercheront à exploiter la situation en ne donnant au voleur qu’une somme très éloignée de la valeur véritable de ce qu’il leur cède.

Le receleur constitue un type assez net de délinquant, d’ailleurs fort dangereux pour les raisons que nous avons indiquées et également pour la raison que le recéleur est un individu qui enfreint consciemment les lois sociales, qui apporte son aide aux malfaiteurs ; il est difficilement récupérable pour la société lorsqu’il est un recéleur professionnel.

Le problème est de trouver des sanctions adéquates, qui frappent le recéleur et puissent le détourner de son activité, qui est, dans certains cas,assez habituelle chez lui. C’est pourquoi la loi utilise assez largement les amendes et les peines pécuniaires.

Les pouvoirs publics se sont également efforcés de prendre des mesures préventives pour rendre plus difficile la commission du recel, notamment de la part de certains commerçants spécialisés dans la vente et l’achat des choses d’occasion, tels que les brocanteurs. Ceux-ci sont soumis à une législation spéciale qui leur impose la tenue de certains registres, une certaine publicité pour les opérations qu’ils font, de façon à pouvoir déceler plus facilement l’origine frauduleuse de certains objets.

La jurisprudence a d’ailleurs élargi la conception du recel en l’appliquant non seulement à ceux qui ont reçu les choses, qui les ont reçues directement, mais également à tous ceux qui ont profité de l’infraction en connaissance de cause ; même s’ils ont reçu non pas les objets mêmes provenant de l’infraction, mais d’autres choses procurées par les premières, par une sorte d’application de la théorie de la subrogation réelle. Du moment que l’on a profité de l’infraction, on est un receleur.

Section I :
Évolution historique

C’est la loi du 22 mai 1915 qui a érigé le recel en délit distinct. Il ne constituait auparavant qu’un acte de complicité.

A -  Inconvénients du système de 1810

Deux grandes séries de raisons sont à l’origine de cette érection du recel en délit distinct.

Les premières sont d’ordre international. L’incrimination par la voie de la complicité ne permettait pas en effet de poursuivre des individus qui recelaient en France des objets que des étrangers s’étaient procurés à l’étranger au moyen d’infractions. L’infraction originaire, commise à l’étranger, par des étrangers, n’était en effet ni susceptible d’être poursuivie ni punissable en France, de sorte qu’ainsi le complice-receleur, bien que commettant en France son recel, échappait à la répression. Or, avec les facilités de communication modernes, il était devenu de pratique fréquente que les voleurs, leur acte accompli, s’empressent de transporter le produit de leur vol dans un autre pays.

Mais il y avait aussi des raisons d’ordre interne. L’inconvénient sur le plan interne du système de la complicité c’était qu’à partir du moment où l’infraction originelle était prescrite, aucune poursuite ne pouvait plus être intentée contre le receleur, puisque le complice ne peut pas être poursuivi lorsque la prescription de l’infraction principale est acquise.

Si donc il y avait eu vol simple, c’est-à-dire délit correctionnel, la prescription était de trois ans ; les 3 ans révolus, le vol étant prescrit, le receleur ne pouvait plus être poursuivi.

B -  Le système actuel : le recel délit distinct

C’est pour éviter ces deux inconvénients, majeurs pour l’ordre social, que l’on a fait du recel un délit distinct. Ainsi, en effet les deux difficultés disparaissaient

puisque le recel devenait un délit distinct, il devenait possible, s’il était commis en  France, que ce soit par des Français où par des étrangers, de le poursuivre devant les tribunaux français.

Par ailleurs, l’infraction de recel consistant dans le fait de conserver les choses par-devers soi, ce délit était un délit continu, de telle sorte que la prescription ne pouvait commencer à courir que du jour el le receleur se débarrassait des objets volés ; tant qu’il y avait les objets en sa possession la prescription ne pouvait commencer à courir.

Tels sont les résultats auxquels là loi du 22 mai 1915 est arrivée en faisant du recel un délit distinct.

La loi de 1915 a été incorporée dans le Code pénal [de 1810] aux articles 460 et 461 qui s’étaient trouvés vides du fait de l’abrogation des textes originaires qui visaient des délits d’un tout autre genre.

C -  Le lien entre le recel et l’infraction initiale

Le recel est donc, depuis 1915, un délit distinct, mais il n’est cependant pas absolument sans liens avec l’infraction primitive ; le recel garde des liens assez étroits avec elle, à la fois au point de vue de l’incrimination et au point de vue de la répression.

a) - Au point de vue de l’incrimination : il faut que les choses recelées aient été le produit d’un crime ou d’un délit : si donc la personne poursuivie pour recel arrive à démontrer que l’acte qui a procuré l’objet à son auteur ne tombait pas sous le coup de la loi, ou ne constituait qu’une contravention, il n’y a pas de recel de sa part.

De même, si la criminalité de l’acte initial a ensuite disparu du fait de l’amnistie dont le voleur a pu bénéficier, l’élément légal de l’infraction a disparu rétroactivement ; du moins en est-il ainsi lorsqu’il s’agit d’une amnistie à caractère réel ; mais non en cas d’amnistie à caractère personnel (voir : Cass.crim. 8 janvier 1926, Gaz.Pal. 1926 I 377; et Cass.crim. 19 mai 1949, J.C.P. 1949.II-5009).

Il faut toutefois rappeler (on l’a vu en étudiant l’article 380 sur l’immunité familiale) que si les membres de la famille de la victime du vol, ses parents ou ses alliés et les complices de ces personnes, ne peuvent être poursuivis, protégés qu’ils sont par l’immunité familiale, il en est différemment des receleurs. On considère donc que la possession pax eux de la chose recelée a tout de même une origine délictueuse.

Il en est autrement au cas où l’infraction initiale est couverte par un fait justificatif, car si le receleur peut démontrer que les agissements par lesquels la personne s’était approprié la chose étaient couverts par un fait justificatif, il n’y aurait plus alors d’origine délictueuse, donc plus de recel.

Il existe donc encore certains liens entre le recel et l’infraction initiale du point de vue de l’incrimination.

b) - Il en est de même sur le plan de la répression. Comme nous le verrons en étudiant la répression du recel, la peine qui menace le receleur a un certain rapport avec la peine encourue par l’auteur de l’infraction initiale; ce n’est pas la même peine, mais il y a un certain rapport entre les deux peines. Plus la peine menaçant l’auteur de l’infraction initiale est élevée, plus la peine du receleur est forte.

Cette érection du recel en un délit distinct a été généralement approuvée par la doctrine. Certains auteurs prétendent même que l’on devrait en faire autant pour d’autres formes de complicité. Certaines lois l’ont d’ailleurs déjà fait ; C’est ainsi qu’ont été érigés en délits distincts certains cas de provocation, alors que la provocation est normalement un cas de complicité. On a même parfois demandé que ce système soit généralisé, que soient incriminés à titres de délits distincts tous les agissements du complice.

Cela présenterait l’avantage que, si l’auteur principal échappe à la répression parce qu’il n’a pas dépassé le stade préparatoire, parce qu’il y a eu de sa part désistement volontaire au dernier moment, les complices qui s’étaient associés antérieurement à son entreprise par certains agissements puissent ne pas échapper à la répression.

Section II :
Les conditions de l’incrimination du recel

Il faut distinguer d’une part les conditions préalables et d’autre part les éléments .constitutifs, distinction que nous avons déjà rencontrée à propos d’autres infractions.

§ 1 -  Les conditions préalables

a) –  Il faut d’abord qu’il y ait eu une infraction ayant eu antérieurement pour effet de procurer les fonds, les choses ou les objets.

Article 460 : « Ceux qui, sciemment, auront recelé, en tout ou en partie, des choses enlevées, détournées ou obte­nues à l’aide d’un crime ou &’un délit, seront punis, etc. »

Ces trois termes - choses enlevées, détournées ou obtenues - font penser essentiellement, le premier au vol, le second à l’abus de confiance, le troisième à l’escroquerie ; mais ils sont très vagues et d’autres infractions que le vol, l’escro-querie ou l’abus de confiance peuvent être à l’origine de l’obtention des choses qui seront ensuite recelées. Par exemple, il est possible que ce soit à la suite d’un faux que l’on ait obtenu ‘certaines choses ; que l’on,soit devenu. possesseur de certains objets ou de certains fonds ; ceux qui recèleront ensuite ces objets ou ces fonds commettront un recel.

De même si c’est à la suite d’un chantage que quelqu’un a obtenu des fonds ou des documents qui par la suite sont reçus sciemment par un autre individu, celui-ci commet un recel.

Il n’est même pas nécessaire que la propriété de la chose soit en cause. C’est ainsi qu’à l’époque où l’abattage clandestin constituait une infraction, la jurispru-dence a considéré que celui qui recevait sciemment de la viande dont il savait qu’elle avait été abattue clandestinement, commettait un recel, car il recevait des choses obtenues à l’aide d’un crime ou d’un délit. De même la Cour de cassation a condamné un individu qui avait recelé des choses qu’il savait avoir été achetées contre paiement par un chèque sans provision (Cass.crim. 4 avril 1962, Bull.crim. n° 163, p.336).

Donc, du moment qu’il s’agit d’un crime ou d’un délit, et à l’exclusion des choses obtenues par une contravention, il y a recel possible.

La loi se montre très exigeante sur cette condition préalable et c’est pourquoi, dans sa décision de condamnation, le juge doit constater cette origine frauduleuse (Cass.crim. 22 juillet 1959, Bull.crim. n° 571 p.736 : Cass.crim. 23 mai 1962, Bull. n°204 p.417) et la constater avec une certaine précision. La Cour de cassation l’a rappelé à diverses reprises (Cass.crim. 5 décembre 1946, Gaz,Pal. 1947 1.97).

On peut penser cependant qu’il n’est pas nécessaire de pousser cette précision aussi loin que lorsqu’il s’agit de condamner l’auteur de l’infraction initiale, car il n’est pas indispensable que le receleur lui-même ait connu avec exactitude et précision les circonstances de l’infraction qui avait permis de se procurer la chose.

Si l’infraction initiale est couverte par un fait justificatif, ou s’il est intervenu une amnistie réelle le recel de la chose procurée par cet agissement dépouillé de caractère délictueux ne tombe pas sous le coup de la loi pénale.

Par contre, si le coupable de l’appropriation délictueuse a échappé à la condam-nation parce qu’il a bénéficié d’une excuse absolutoire, cela n’empêche pas le fait qui a procuré la chose de rester un fait délictueux.

De même le fait que l’on n’ait pas identifié l’auteur du fait délictueux initial, ou qu’il ait échappé à la condamnation jusqu’à présent, n’empêche pas de punir le receleur. Ce qui importe c’est le caractère délictueux de l’acte qui a procuré les choses : du moment que ce caractère est établi, l’identification de l’auteur est indifférente.

b) –  La deuxième condition préalable est très simple, il faut qu’il s’agisse d’Une chose mobilière d’une chose quelconque, même d’un écrit qui ne forme pas titre, du moment que cette chose a été obtenue par une infraction quand il s’agit de vol, peu importe en effet la nature ou la valeur de la chose vo­lée. Au contraire il n’y aurait pas recel s’il s’agissait per exemple de lettres missives qui n’ont pas été volées, mais qui ont été obtenues par les procédés de l’escroquerie ou de l’abus de confiance (car cette obtention, portant sur un tel objet, ne constitue pas une infraction).

Mais - et ceci est important - il y a recel non seule­ment lorsqu’il porte sur dee choses qui ont été procurées

par une infraction mais aussi lorsque l’auteur de l’infraction initiale ayant pu par elle se procurer de l’argent, on profite en connaissance dé cause de cet.

argent ou des choses mobilières et con,crètes qui ont .été achetées avec l’argent provenant du vol ou de la vente d’une.chose volée.

§ 2  Les éléments constitutifs du recel

L’élément légal. C’est l’article 460 du Code pénal ac­tuel [voir in fine pour les textes du Code de 1993] qui constitue le siège de la matière et devrait donner la description de l’élément matériel.

A -  L’élément matériel

L’article 460 ne définit pas de façon très précise en quoi consistent les agis-sements matériels du, recel. Il parle de « ceux qui, sciemnent, auront recelé des choses », mais c’est là une expression juridique qui ne nous renseigne pas sur la matérialité des agissements visés. Il est donc nécessaire d’insister sur l’aspect matériel de ce recel, car c’est précisément le fait du recel qui va constituer l’élément matériel de l’infraction.

Cet élément matériel consiste dans l’acceptation de certaines choses provenant d’une infraction préalable ; c’est le fait de les accepter et ensuite de les conserver par-devers soi pendant un temps plus ou moins long.

Peu importe que les choses en question aient été reçues d’une autre personne que celle qui avait commis l’infraction initiale.

Peu importe que le tradens, le tiers qui a remis la chose obtenue fraudu-leusement ait été de bonne foi, du moment que celui qui l’a reçue est de mauvaise foi, qu’il savait de quoi il s’agissait : le seul fait de recevoir consciemment des choses dont on connaît l’origine délictueuse va constituer l’acte matériel du recel. (Cass.crim. 3 avril 1936, D.1937 I 94, note M. Leloir - arrêt rendu dans un procès de la fameuse affaire Stavisky).

Peu importe que l’on ait reçu ces choses à titre gratuit, à titre de présent ou à titre onéreux ; même si on a acheté ces choses il n’y en a pas moins un fait de recel si l’acquisition est faite de mauvaise foi.

Peu importe le titre en vertu duquel on a reçu et conservé ces choses ; ce peut être à titre de propriétaire, mais aussi de locataire, emprunteur, transporteur, dépo-sitaire, etc. Le seul fait d’avoir consenti à entreposer chez soi des objets dont on savait qu’ils provenaient d’une infraction, même si l’on n’entendait nullement en acquérir la propriété, est un fait de recel.

De même celui qui a reçu à titre de gage une chose dont l’origine est délictueuse commet, s’il l’a reçue sciemment, un recel.

Celui qui reçoit un paiement, qu’il sait être fait avec des fonds provenant d’un vol, commet le délit de recel, car il profite des produits du vol et il en profite consciemment (Cass.crim. 4 juin 1942. D.C. 1943, p. 30). Il en était ainsi dans le cas d’un individu qui avait reçu de Stavisky un chèque qu’il avait touché alors qu’il ne pouvait pas ignorer que le compte sur lequel le chèque était tiré était alimenté par les infractions que commettait Stavisky; en acceptant de toucher ce chèque sur ce compte, l’intéressé s’était rendu coupable de recel car il avait reçu en paiement, par la voie de l’encaissement du chèque, des fonds obtenus de façon délictueuse. (Cass.crim. 3 août 1935, D. 1937 I 94 note Leloir).

Ce qui importe essentiellement pour constituer matériellement le délit de recel, c’est, après l’acceptation, là détention des choses dont l’origine est délictueuse. Celui qui les accepte et les détient, ne serait-ce qu’un instant de raison, et quelle que soit la façon dont elles sont venues entre ses mains, du moment qu’il les détient, accepte d’avoir  le corpus de la possession sur ces choses, quand bien même il n’en aurait pas l’animus, et par là il réalise l’élément matériel de l’infraction de recel.

Cette détention peut porter non seulement sur les choses qui ont été le produit de l’infraction, mais sur tous les biens qui se sont subrogés aux choses en question, sur les objets achetés par le voleur, ou l’auteur du: détournement, avec l’argent qu’il s’était procuré par la vente de biens volés ou détournés. (Cass.crim. 11 février 1964, Bull.crim. n° 46 p.100).

La jurisprudence a tendance à étendre de façon assez large cette notion de subrogation réelle et cette notion de détention. Le fait de profiter des produits du vol, du détournement, le fait de bénéficier d’un repas, d’une consommation et peut-être même d’un spectacle, d’un transport, payé en réalité avec les produits d’une infraction, constitue pour la jurisprudence, l’élément matériel du recel.

En réalité ce qui importe, semble-t-il, aux yeux de la jurisprudence, c’est essentiellement l’élément moral, dont on constate, ici encore, à quel point il est mêlé à l’élément matériel ; toutes les formes que pourra prendre le fait d’avoir profité de mauvaise foi des produits de l’infraction risquent de tomber sous le coup de la loi.

La jurisprudence va même jusqu’à incriminer ceux qui, sans avoir eu exacte-ment la chose entre les mains, ont cependant accepté de s’en charger, de la transmettre, et avant même que la chose leur ait été remise - il est, possible que, par suite de certaines circonstances, elle ne leur soit pas remise - l’élément matériel est d’après la jurisprudence suffisamment réalisé. On pourrait alors parler simplement de tentative de recel, mais en matière de recel la tentative n’est pas incriminée par la loi ; aussi les tribunaux estiment-ils que le délit est consommé dès qu’on a accepté de recevoir la chose, alors même qu’on ne l’a pas encore entre les mains ; l’acceptation d’une détention future suffit. Cette jurisprudence parait assez critiquable (cf. Trib.corr. Aix-en-Provence, 20 mai 1948, J.C.P. 1948. 4. 158).

B - L’élément moral

L’élément moral consiste, comme on le dit communément, dans la mauvaise foi du receleur, c’est-à-dire dans le fait d’avoir volontairement sciemment, intention-nellemept détenu, accepté ou abrité les objets dont la provenance était délictueuse et notamment dans le fait que l’accipiens avait parfaitement connaissance de l’origine délictueuse des choses recelées, Le recel nécessite donc une faute inten-tionnelle.

Les tribunaux paraissent d’ailleurs avoir trop tendance à l’oublier. Dans bien des cas on à l’impression que la personne qui est poursuivie et condamnée n’a été qu’imprudente, mais cela ne suffit pas pour constituer le recel (du moins en droit français, car il est des législations étrangères, par exemple le Code polonais de 1932, art. 161, qui se faisant une conception plus large de cette infraction punissent même le recel commis à la suite d’une imprudence).

Normalement, dans la conception française, le recel exige au contraire la pleine connaissance de l’origine délictueuse des choses et la volonté de profiter de l’infraction qui a été commise. L’intention de tirer parti de cette infraction est une façon de s’associer dans une certaine mesure, bien qu’après coup, à l’acte délic-tueux.

Il est donc incontestable, quoique certaines décisions de jurisprudence amène-raient parfois à en douter que l’élément moral consiste en une faute intentionnelle, dans la connaissance de l’origine délictueuse des choses. Mais, depuis longtemps, la jurisprudence admet qu’il n’est pas nécessaire que cette connaissance présente un caractère de précision parfaite. Il n’est pas indispensable que le receleur ait su exactement dans quelles circonstances et par qui les choses avaient été obtenues de façon délictueuse, si c’est par un abus de confiance, ou une escroquerie ou un vol ; la qualification est d’ailleurs parfois difficile à établir exactement. Il n’est pas nécessaire qu’il ait su à quelle date exacte et par l’intermédiaire de quelles personnes l’infraction initiale a été commise. Le fait qu’il n’ait pu douter de l’origine frauduleuse des choses suffit à caractériser sa mauvaise foi et à justifier sa condamnation de ce chef. (Cass.crim. 16 mars 1932, Gaz. Pal. 1932 II 83).

Le problème s’est posé de savoir si l’infraction était réalisée lorsque les objets ont été reçus de bonne foi, dans l’ignorance de leur origine délictueuse, mais que par la suite le détenteur de ces objets a appris dans quelles circonstances exactes elles étaient parvenues aux mains de celui qui les avait remises. C’est le problème de la mala fides superveniens.

En droit civil la règle est que la mala fides superveniens n’a pas d’influence ; du moment que quelqu’un a reçu les meubles de bonne foi, l’article 2279 joue et cette personne devient propriétaire par le fait même de la possession, même si par la suite elle vient à avoir connaissance du défaut de qualité de celui de qui elle tient la chose en question. Au contraire en droit pénal la jurisprudence estime que la mauvaise foi survenant va rendre le détenteur coupable de recel s’il ne se débarrasse pas immédiatement des objets dont il apprend le véritable caractère. Cela est d’autant plus curieux que, sur le plan du droit civil, le receleur en est peut-être devenu propriétaire puisqu’il les avait reçues à titre de possesseur de bonne foi, et sa bonne foi venant à cesser, il n’en reste pas moins propriétaire. Ainsi cet individu va pouvoir être poursuivi pour recel de choses qui aujourd’hui lui appartiennent. Il y a là un exemple de l’autonomie du droit pénal, qui, ici, se sépare des règles du droit civil (Cass.crim. 7 juillet 1944, J.C.P. 1947. II 3410 ; Aix-en-Provence 19 octobre 1953, J.C.P. 1954 II 7831 ; Cass.crim. 23 janvier 1962, Bull.crim. n° 57, p.113 ; et cf. la chronique du professeur R. Vouin au Dalloz, 1947, chr. 81).

Ce n’est d’ailleurs pas le seul cas où l’on puisse être poursuivi comme recéleur de choses dont on est propriétaire : comme on l’a déjà signalé, celui qui conserve chez lui la viande d’un animal abattu clandestinement, bien que le propriétaire de cette viande commet un recel puisque cette viande lui avait été remise à la suite d’une infraction. (Cass.crim. 11 janvier 1945, J.C.P. 1945 IV.35). La jurisprudence est donc très sévère dans l’appréciation qu’elle fait de l’élément moral, et cette sévérité se manifeste aussi quant à la preuve de l’élément moral.

En principe la preuve de la mauvaise foi de la personne poursuivie pour recel incombe au ministère public, à la partie poursuivante, mais on constate que les tribunaux se montrent en cette matière extrêmement sévères à l’égard du prévenu. En général la preuve de la mauvaise foi du prévenu résultera de présomptions que l’on peut tirer des circonstances pour parvenir à l’intime conviction du juge. Or, c’est un fait que les juges (qui ont l’habitude d’entendre soutenir que l’on était de bonne foi, que, si l’on s’était douté qu’il s’agissait de choses volées ou détournées, jamais on n’aurait accepté de s’associer à l’infraction) sont extrêmement sceptiques par déformation professionnelle et sont assez facilement convaincus de la mauvaise foi du prévenu. La Cour de cassation, bien entendu, estime qu’il y a là une question de fait, que c’est au juge du fait à apprécier souverainement si la mauvaise foi existe ou non : (Cass.crim. 30 novembre 1961, Bull.crim. n°492 p.942 ; Cass.crim. 30 octobre 1962, Bull.crim. n° 298 p.618).

Sur quelles présomptions les tribunaux vont-ils s’appuyer ?

S’il s’agit d’objets ayant une certaine valeur et offerts gratuitement, les tribunaux. s’étonneront que l’intéressé ait pu trouver normal qu’on lui fasse ainsi ce cadeau de valeur, surtout qu’il devait trouver assez étrange que le tradens ait pu avoir ces objets en sa possession ou l’argent nécessaire pour les acheter. Le prévenu, pensera le tribunal, aurait dû se douter de l’origine délictueuse des choses qui lui étaient offertes et a fermé les yeux volontairement.

S’il s’agit de choses qui ont été achetées, les tribunaux examineront attenti-vement dans quelles conditions l’achat a eu lieu et en particulier à quel prix. Le fait que l’on proposait au receleur de lui vendre une bague en or ou un brillant de grosse valeur, pour un prix anormalement bas, devait lui faire soupçonner l’origine délictueuse de l’objet qu’on lui offrait. (Cass.crim. 4 avril 1962, Bull.crim. n°163 p.336).

S’il s’agit de choses simplement confiées, le tribunal s’attachera à rechercher dans quelles conditions la détention est intervenue. Si le prévenu cachait, dissi-mulait ces choses, le tribunal pensera qu’il n’avait pas la conscience tranquille et en déduira.qu’il savait que les choses qu’il avait acceptées provenaient en réalité d’une infraction.

De même, si les explications du prévenu sont assez embarrassées, si, au cours de l’enquête, il a changé de système de défense, parce que ses premières explications ont été démenties, le tribunal en conclura rapidement que le prévenu était parfaitement au courant. (voir : Cass.crim. 3 août 1935, D. 1937.1.94, note Leloir). Il s’agissait d’un journaliste qui avait reçu des fonds en rémunération de certaines démarches qu’il avait faites, et qu’il niait avoir faites, mais la réalité de ces démarches ayant été établie, le tribunal en avait conclu que le prévenu savait bien que l’argent qu’il touchait était de l’argent détourné ou escroqué. La Cour de cassation a admis (Cass.crim. 20 novembre 1947 J.C.P. 1948. IV.I) que l’offre de restitution faite par le prévenu démontrait par elle même sa culpabilité.

C’est donc dans les faits, dans l’interprétation qu’ils font de ces faits, que les tribunaux trouvent des présomptions leur permettant de se convaincre de la mauvaise foi du receleur, mais il faut reconnaître que, ce faisant, la jurisprudence déforme l’élément moral de l’infraction. Les tribunaux sont en effet volontiers tentés de dire que le prévenu devait savoir, qu’il aurait dû se douter qu’il s’agissait d’objets de provenance frauduleuse et ils en déduisent immédiatement qu’il est coupable de recel. Or même si les circonstances sont telles qu’il aurait dû se douter de l’origine délictueuse des objets, il peut se faire qu’il n’ait pas réfléchi suffisam-ment, qu’il y ait eu imprudence de sa part, imprudence génératrice peut-être de responsabilité civile, mais cela ne prouve pas qu’il y ait eu là faute intentionnelle constitutive de mauvaise foi, comme l’exige l’article 460. En agissant comme elle le fait, la jurisprudence transforme l’élément moral : la faute constitutive de l’élément moral est, et doit être, une faute intentionnelle, et non une simple faute d’imprudence.

Souvent aussi les tribunaux s’appuieront sur les témoignages des autres parties en cause, notamment de celui qui a remis les choses recelées et qui les avait dérobées ou détournées. Ces témoignages aideront parfois le ministère public à faire la preuve que le receleur savait très bien de quoi il s’agissait (voir par exemple : Cass.crim. 4 avril 1962, Bull.crim. n°163 p.336), mais généralement, ils s’efforcent de décharger les receleurs éventuels. La jurisprudence n’en réussit pas moins dans la plupart des espèces à prononcer des condamnations.

Section III :
Le régime juridique du recel

A -  La nature de l’infraction

1 -  Il est difficile de dire si le recel est une infraction d’action ou une infraction d’omission : si l’on reproche à l’individu d’avoir accepté les choses, de les avoir conservées, il s’agit d’un délit d’action ; si on lui reproche de ne pas s’en être débarrassé, c’est plutôt un délit d’omission, et ici comme bien souvent, la distinc- tion entre les deux n’est pas tellement commode à établir.

2 - Mais ce sur quoi il ne peut y avoir de doute - et ceci est très important - c’est que le recel est une infraction continue. (Cass.crim. 16 juillet 1964, Bull.crim. n°241 p.514). Il en résulte :

a) Que la prescription ne commence à courir que du jour ou la détention des choses a cessé. Bien mieux, la jurisprudence considère que les recels successifs d’un même objet doivent faire considérer tous les receleurs comme les coauteurs d’une infraction unique et que, par conséquent, la prescription ne commence à courir, au regard de chacun qu’au moment où le dernier détenteur receleur a substitué l’objet ou l’a transmis à un tiers de bonne foi (Cass.crim. 17 mai 1939, Gaz. Pal. 1939-2- 182 ; R. Vouin, Précis de droit pénal spécial n° 1006-2°).

b) Que le tribunal dans le ressort duquel la détention s’est accomplie est compétent en tant que tribunal du lieu de l’infraction.

c) Que si une amnistie intervient englobant dans ses effets le recel, elle n’aura d’effet que pour la période antérieure à la date qu’elle a précisée. Il faut donc que, dès l’intervention de la loi d’amnistie, l’individu qui veut échapper à toute poursuite se débarrasse immédiatement des objets qu’il détient ; s’il ne s’en débarrasse pas, dès la loi d’amnistie, s’il continue à les conserver un certain temps, il aura de nouveau commis le délit de recel (Paris 2 juillet 1926, D. 1927.2.17, note Henry).

d) De même l’individu qui a été condamné pour recel de certains objets et qui conserve encore certains d’entre eux, peut faire l’objet à nouveau d’une poursuite pour recel portant sur les mêmes objets sans qu’il y ait atteinte à l’autorité de la chose jugée.

3 - Le recel étant une infraction portant sur des choses provenant d’une autre infraction, il y a forcément entre les deux infractions un lien de connexité et de ce lien il résulte des conséquences pratiques importantes.

C’est ainsi que le jugement de l’affaire de recel pourra être porté devant la même juridiction que celle qui a été saisie de l’infraction initiale. Si par exemple c’est au moyen d’un crime que l’on s’est procuré les choses recelées, le receleur, même lorsque son activité est purement délictuelle, devra répondre de cette activité devant la Cour d’assises, compétente pour juger non seulement les crimes, mais aussi les délits connexes aux crimes dont elle est saisie.

De même, d’après la jurisprudence, les personnes condamnées non seulement pour la même infraction, mais également pour des infractions connexes, sont solidairement responsables du paiement des amendes, des dommages-intérêts et des frais. Il s’ensuit que celui qui est condamné pour recel sera solidairement responsable de toutes les condamnations pécuniaires, civiles ou pénales, prononcées contre les auteurs de l’infraction initiale elle-même, de telle sorte que, s’agissant par exemple d’un vol très important de bijoux, le receleur d’un seul de ces bijoux pourra se voir réclamer par la victime du vol l’intégralité de son préjudice (Cass.crim. 30 novembre 1961, Bull.crim. n°492 p.942), ce qu’elle ne manquera pas de faire si le receleur est solvable. Celui-ci en sera réduit à un recours évidemment assez illusoire contre les autres personnes qui ont participé à l’infraction. (Cass.crim. 30 octobre 1962, Bull.crim. n°298 p.618).

B - La tentative et la complicité

1 – Latentative de recel ne peut être punissable que dans le cas exceptionnel où il s’agit d’un recel criminel, puni de peines criminelles, car la tentative de crime est toujours punissable. Dans le cas général où il s’agit simplement d’une infraction correctionnelle, la tentative de recel n’est pas punissable, la loi n’en ayant pas prévu l’incrimination. S’il en est ainsi, c’est probablement parce que, non seulement la tentative de recel ne peut causer qu’un préjudice social assez mince, mais aussi parce que, jusqu’à la loi de 1915, le recel n’était qu’un cas de compli- cité et nous savons que la loi n’incrimine npas la tentative de complicité.

2 - Quant à la complicité de recel, elle peut être poursuivie. On peut évidemment se rendre complice d’un receleur, notamment par instructions, et par conséquent être poursuivi pour complicité, même sans avoir jamais détenu la chose (Cass.crim. 13 janvier 1959, Bull. n° 36 p.61). Mais le plus souvent, ceux qui ont ainsi aidé le receleur ont eu à un moment donné, plus ou moins longtemps, la détention de la chose et peuvent alors être eux-mêmes poursuivis aussi pour recel à proprement parler. Il peut y avoir toutefois intérêt à les poursuivre comme complices parce que la prescription applicable sera celle du recel lui-même : tant que les poursuites restent possibles contre l’auteur principal du recel, le complice pourra être poursuivi, tandis que si on le poursuit comme receleur la prescription aura commencé à courir contre lui dès le moment où il s’est dessaisi des objets dont il a confié la détention à un tiers de bonne foi.

Il y a d’ailleurs des cas où l’on peut être embarrassé sur la qualification à adopter pour poursuivre des agissements de ce genre, et l’on peut signaler à cet égard que la jurisprudence a pris une position qui apparaît d’ailleurs assez critiquable relativement à la situation initiale. L’hypothèse est la suivante : un individu a soustrait, détourné ou escroqué... des fonds ou des choses qui ont été ensuite recelées. Il a commis une infraction instantanée, qui ne peut être poursuivie que pendant un temps relativement bref ; mais ces choses, après les avoir volées, soustraites, ou détournées, il les a eues en sa possession, il les a détenues. N’a-t-il pas alors commis en plus l’infraction de recel ? Cette question offre un intérêt du point de vue de la prescription car l’infraction initiale peut être prescrite alors que la prescription de l’infraction de recel n’est pas acquise et n’est peut-être pas encore commencée.

Il semble à première vue que nous soyons là en présence d’un concours réel d’infractions, il s’agit de deux infractions parfaitement différentes, dont les éléments sont différents et qui se sont succédé dans le temps. Néanmoins la Cour de cassation a pris position en faveur de la solution inverse ; elle estime qu’il y a incompatibilité entre les deux infractions, qu’on ne peut donc poursuivre une même personne à la fois pour l’infraction initiale qui lui a procuré les choses et comme receleur pendant un temps plus ou moins long de ces mêmes choses : on doit le poursuivre du chef de l’infraction initiale seulement (Cass.crim. 15 décembre 1959, Bull.crim. n°350).

Cela est d’autant plus étonnant que la jurisprudence admet, dans le cas où il s’agit non pas de l’auteur de l’infraction antérieure mais du complice de cette infraction initiale, que si ce complice de l’infraction initiale accepte la détention des choses procurées par cette infraction, il commet, lui, un concours réel et peut être poursuivi à la fois pour complicité de l’infraction initiale et comme receleur pour recel commis ultérieurement.

Cette solution en ce qui concerne le complice est d’ailleurs à peu près imposée par l’alinéa 3 de l’article 460, qui, après avoir prévu les peines du recel, ajoute : « Le tout sans préjudice de plus fortes peines s’il y échet, en cas de complicité de crime, conformément aux articles 59, 60 et 61 ». C’est donc admettre qu’il peut y avoir poursuites pour complicité de l’infraction initiale sans préjudice des peines prévues pour sanctionner le recel. (En ce sens, Cass.crim. 18 novembre 1965, D. 1966.248 note Combaldieu).

III - L’immunité de l’article 380

Nous savons déjà que les complices de la personne protégée par l’immunité de l’article 380 bénéficient aussi de cette immunité; mais il n’en est plus de même des receleurs depuis la loi de 1915 qui, en érigeant le recel en délit distinct, a pris soin d’ajouter que les receleurs qui ne bénéficient pas personnellement de l’immunité de l’article 380 pouvaient être poursuivis. Le receleur étranger à la famille est punissable, ce qui démontre que le fait originel restait délictueux. Par exemple le fils qui a commis une soustraction ou un détournement au préjudice de son-père échappe à toute répression, mais la petite amie à qui il a offert un cadeau ou un bijou avec l’argent ainsi soustrait peut être poursuivie en tant que receleuse et exposée à la répression.

Section IV :
La répression du recel

Nous avons cru devoir remplacer cette 4e section, principalement descriptive, par les textes en vigueur dans les deux Codes successifs de 1810 et 1993.

I –  Le Code de 1810 (remanié) comportait les dispositions suivantes :

Article 460 : Ceux qui, sciemment, auront recelé, en tout ou en partie, des choses enlevées, détournées ou obtenues à l'aide d'un crime ou d'un délit, seront punis d'un emprisonnement de 3 mois à 5 ans et d'une amende de 10.000 F à 2.500.000 F ou de l'une de ces deux peines. L'amende pourra être élevée au-delà de 2.500.000 F jusqu'à la moitié de la valeur des objets recelés.

Le maximum de la peine d'emprisonnement sera porté à dix ans lorsque le recel aura été commis de manière habituelle ou en utilisant les facilités que procure l'exercice d'une activité professionnelle.

Dans tous les cas, la juridiction pourra, sous réserve des droits des tiers, prononcer la confiscation des choses qui ont été recelées, qui ont servi à commettre le recel ou qui en sont le produit. La juridiction pourra également prononcer, pour une durée de dix ans au plus :

1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille mentionnés à l'article 42 ;

2° L'interdiction d'exercer, directement ou par personne interposée, toute activité professionnelle consistant en la cession d'objets mobiliers ;

3° L'interdiction d'exercer l'activité professionnelle qui a permis de se livrer au recel.

Dans le cas prévu par le deuxième alinéa, la juridiction pourra prononcer la fermeture, pour une durée de dix ans au plus, de l'établissement ayant servi à l'activité professionnelle du receleur ou au dépôt des choses recelées, que le receleur en soit propriétaire ou en ait la disposition en droit ou en fait.

Article 461 : Lorsque l'infraction qui a servi à procurer la chose recelée est punie d'une peine privative de liberté d'une durée supérieure à celle de l'emprisonnement encouru en application des premier ou deuxième alinéas de l'article 460, le receleur sera puni des peines prévues pour l'infraction dont il aura eu connaissance, et si cette infraction s'est accompagnée de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances dont il aura eu connaissance. L'amende et les peines complémentaires prévues par l'article 460 pourront être prononcées.

Article 461-1 : Sera considéré comme receleur et puni des peines prévues par le premier alinéa de l'article 460 celui qui, ayant autorité sur un mineur qui vit avec lui et se livre habituellement à des crimes ou délits contre les biens d'autrui, ne peut justifier de ressources correspondant à son train de vie.

Article 461-2 : Toute personne qui aura détruit, détourné ou tenté de détruire ou de détourner une chose confisquée en application de l'article 460 sera punie des peines prévues par le premier alinéa de l'article 43-6.

Sera punie des mêmes peines la personne qui aura exercé une activité professionnelle en violation d'une interdiction prononcée en application des 2° ou 3° du troisième alinéa de l'article 460.

II -  Le Code de 1993 comporte les dispositions suivantes :

Peines principales :

Article 321-1 : Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit.

Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit.

Le recel est puni de 5 ans d'emprisonnement et de 375.000 € d'amende.

Article 321-2 : Le recel est puni de 10 ans d'emprisonnement et de 750000 € d'amende :

1° Lorsqu'il est commis de façon habituelle ou en utilisant les facilités que procure l'exercice d'une activité professionnelle ;

2° Lorsqu'il est commis en bande organisée.

Article 321-3 : Les peines d'amende prévues par les articles 321-1 et 321-2 peuvent être élevées au-delà de 375.000 euros jusqu'à la moitié de la valeur des biens recelés.

Article 321-4 : Lorsque l'infraction dont provient le bien recelé est punie d'une peine privative de liberté d'une durée supérieure à celle de l'emprisonnement encouru en application des articles 321-1 ou 321-2, le receleur est puni des peines attachées à l'infraction dont il a eu connaissance et, si cette infraction est accom-pagnée de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances dont il a eu connaissance.

Article 321-5 : Le recel est assimilé, au regard de la récidive, à l'infraction dont provient le bien recelé.

Peines complémentaires :

Article 321-9 : Les personnes physiques coupables des infractions prévues au présent chapitre encourent également les peines complémentaires suivantes :

1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille, suivant les modalités prévues par l'article 131-26 ;

2° L'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-27, soit d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, cette interdiction étant définitive ou provisoire dans les cas prévus aux articles 321-2 et 321-4 et pour une durée de 5 ans au plus dans les cas prévus aux articles 321-1, 321-6, 321-7 et 321-8, soit d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d'exercice peuvent être prononcées cumulativement ;

3° La fermeture des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés, cette fermeture étant définitive ou temporaire dans les cas prévus aux art. 321-2 et 321-4 et pour une durée de 5 ans au plus dans les cas prévus aux art. 321-1, 321-6, 321-7 et 321-8 ;

4° L'exclusion des marchés publics à titre définitif ou temporaire dans les cas prévus aux articles 321-2 et 321-4 et pour une durée de cinq ans au plus dans les cas prévus aux articles 321-1, 321-6, 321-7 et 321-8 ;

5° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ;

6° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit, à l'exception des objets susceptibles de restitution ;

7° La confiscation d'une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition ;

8° L'interdiction de séjour, suivant les modalités prévues par l'article 131-31, dans les cas prévus aux articles 321-1 à 321-4 ;

9° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 ;

10° L'obligation d'accomplir un stage de responsabilité parentale, selon les modalités fixées à l'article 131-35-1.

Article 321-10 : Dans les cas prévus aux articles 321-1 à 321-4, peuvent être également prononcées les autres peines complémentaires encourues pour les crimes ou les délits dont provient le bien recélé.

Article 321-10-1 : Les personnes physiques coupables des délits prévus aux articles 321-6 et 321-6-1 encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meuble ou immeuble, divis ou indivis, dont elles n'ont pu justifier l'origine.

Peuvent également être prononcées les peines complémentaires encourues pour les crimes ou les délits commis par la ou les personnes avec lesquelles l'auteur des faits était en relations habituelles.

Article 321-11 : L'interdiction du territoire français peut être prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable de l'une des infractions définie à l'article 321-2.

Article 321-12 : Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies aux articles 321-1 à 321-4, 321-7 et 321-8 encourent, outre l'amende suivant les modalités prévues par l'article 131-38 :

1° (Abrogé) ;

2° Dans les cas prévus par les articles 321-1 à 321-4, les peines mentionnées à l'article 131-39 ;

3° Dans les cas prévus par les articles 321-7 et 321-8, les peines mentionnées aux 2°, 4°, 5°, 6°, 7°, 8° et 9° de l'article 131-39.

L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise.

Signe de fin