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LA FAUSSE MONNAIE
( SOUS L’ANCIEN DROIT )

Extrait du « Traité de la justice criminelle »
de Daniel JOUSSE ( Paris 1771, T.III, p.442 )

La fabrication de fausse monnaie
ne concernait à l’origine que les monnaies métalliques.
Puisque le droit de battre monnaie constituait
l’un des principaux pouvoirs régaliens,
leur falsification, dénaturation ou contrefaçon s’analysait
en un crime de lèse-majesté humaine,
selon la terminologie alors en vigueur.
On parlerait plutôt de nos jours de crime contre l’État.

N.B. : Afin d’alléger le texte, nous n’avons pas reproduit
toutes les références fournies par l’auteur.
Le lecteur qui désirerait approfondir l’étude de cette période
du droit français s’y reportera avec profit.

ARTICLE PREMIER :
CE QUE C’EST QUE LA FAUSSE MONNAIE,
ET DE COMBIEN DE SORTES.

1 - Le crime de fausse monnaie se commet de plusieurs manières :

 En fabriquant de la monnaie sans l’autorité du Prince, quand même elle serait bonne.

 En la fabriquant de faux poids et de faux aloi ; comme quand on la fait trop légère ou qu’on y mêle du métal d’une valeur moindre; ou quand on blanchit des pièces de monnaie de cuivre, afin de les faire passer pour des pièces d’argent ; ou qu’on dore des pièces d’argent dans le dessein de les faire passer pour de l’or.

 En contrefaisant on falsifiant l’image du Prince, et l’inscription qui est sur les pièces de monnaie.

 En altérant ou rognant la monnaie par le secours des limes, des eaux-fortes, ou autrement.

 En exposant de la fausse monnaie.

2 - Le billonage des monnaies est aussi regardé comme un crime : il se commet :

1°  Lorsqu’on achète des espèces vieilles ou nouvelles, ou des rognures de monnaie pour les fondre, ou pour en faire trafic, et les vendre à plus haut prix que celui porté par les Édits et Règlements du Royaume.

2°  Quand les receveurs des deniers du Roi, ou autres, retiennent les bonnes espèces d’or et d’argent qu’ils ont reçues des contribuables, et n’envoient au Trésor royal que des espèces de billon et de cuivre ; ou qu’ils retiennent les espèces pesantes, et ne font les paiements qu’en espèces légères.

3°  Lorsque les changeurs remettent dans le commerce, des espèces défectueuses étrangères et décriées qu’ils ont reçues.

4°  Quand on choisit les espèces plus pesantes pour les fondre ; ou qu’on les vend aux orfèvres, qui les fondent pour leurs ouvrages.

et généralement quand on profite sur la monnaie…

3 - On peut aussi regarder comme une espèce de billonage le transport des espèces d’or et d’argent hors le Royaume ; ce transport étant défendu par les Ordonnances.

Le crime de fausse monnaie est considéré comme un crime de Lèse-majesté parce qu’il offense la majesté du Prince… Les Ordonnances du Royaume y sont formelles ; et plusieurs Coutumes en ont aussi des dispositions.

Ce crime est très grave : outre le crime de Lèse-majesté, il renferme encore le crime de faux, et ordinairement celui de vol : c’est pourquoi il a toujours été regardé comme un crime capital...

ARTICLE II :
PEINES CONTRE LES FAUX-MONNAYEURS,
ET LEURS COMPLICES.

4 - Par le Droit romain, les faux-monnayeurs étaient punis ; savoir, les personnes distinguées, de la peine de la déportation ; et les personnes d’une condition vile, de la peine des mines, ou de celle de la mort. À l’égard des esclaves, ils étaient condamnés au dernier supplice.

Constantin ensuite établit la peine d’être brûlés vifs, à l’égard des faux-monnayeurs…

Par les Capitulaires de nos Rois… la peine établie contre les faux-monnayeurs état d’avoir le poing coupé.

Et aussi par la Loi des Wisigoths contre les personnes serves…

5 - Suivant la Constitution Caroline, chap. 111, ceux qui fabriquent de la fausse monnaie, qui la marquent, ou qui l’échangent, qui se l’approprient et la débitent ensuite sciemment, et avec malice pour tromper les autres, doivent être condamnés à la peine du feu. À l’égard de ceux qui en altèrent le poids de la bonne monnaie, ou qui la fabriquent sans en avoir le privilège, ils doivent être punis en leurs corps, ou en leurs biens, suivant les circonstances ainsi que ceux qui pour altérer la monnaie, la refondent et la font moindre.

L’article 634 de la Coutume de Bretagne, Titre 15, porte que les faux-monnayeurs doivent être bouillis et ensuite pendus. C’est aussi la disposition de la Coutume de Lodunois…

Mazuer, en sa Pratique (Titre Des Peines, n° 3), dit que les faux-monnayeurs doivent être bouillis et suffoqués en eau mêlée avec de l’huile.

PEINES ÉTABLIES PAR LES ORDONNANCES

6 - 1°  Tous faux-monnayeurs, et ceux qui contrefont les espèces qui ont cours, sont punis de mort (Ordonnance de St. Louis de l’année 1262)

Tous ceux qui altèrent les espèces qui ont cours, doivent aussi être punis de mort, de même que ceux qui contribuent à les exposer ou introduire dans le Royaume. (Voyez l’Ordonnance de Philippe-le-Hardi de l’année 1273, art. 4)

Ceux qui blanchissent ou dorent les pièces de monnaie, afin de les faire passer pour être d’un métal plus précieux, doivent aussi être punis comme faux-monnayeurs…

7 - La peine des faux-monnayeurs a lieu, non seulement contre ceux qui contrefont des espèces de monnaie au coin et aux Armes de France, mais encore contre ceux qui fabriquent des espèces étrangères, encore qu’elles n’aient point de cours dans le Royaume, et qu’elles n’y soient reçues que comme matière. (Déclaration du 5 octobre 1715)

À l’égard des particuliers qui réforment en fraude et pour leur compte, les espèces de France, même celles des pays étrangers, ils doivent aussi être punis de mort, de même que les fabricateurs et exportateurs de fausse monnaie ; sans que, sous quelque prétexte que ce puisse être, cette peine puisse être modérée par les Juges. (Déclaration du 12 décembre 1693)

8 - La peine des faux-monnayeurs a lieu même contre ceux qui fabriquent de la monnaie de bon aloi; mais qui le font fans l’autorité du Prince (Farinacius)…

2°  Tous ceux qui altèrent, rognent, fondent ou changent les monnaies, sont punis comme faux-monnayeurs. (Déclaration du t4 Juillet 1536, art. 2)…

Les Directeurs, Officiers ou Commis des Monnaies, qui altèrent les espèces, en mêlant dans l’or ou dans l’argent pur, du métal de moindre prix, ou en faisant les espèces plus légères, font punissables comme tes autres faux-monnayeurs. (Farinacius...)

9 -  ll en est de même de ceux qui exposent et distribuent de la fausse monnaie, ou qui contribuent à l’exposition des espèces contrefaites ; ils sont aussi punis comme faux-monnayeurs. (Ordonnance de Philippe-le-Bel de l’année 1303)…

L’article 2 de l’Édit de Février 1716, porte que tous payeurs et receveurs, même des deniers du Roi, ne peuvent recevoir, ni faire entrer dans aucun paiement, des espèces suspectes de fausseté ; à peine de supporter la perte à faire sur lesdites espèces et que s’ils distribuent sciemment des espèces de fausse fabrique, ou de faux poids, ils doivent être punis de mort.

À l’égard de ceux qui exposent ou distribuent de la bonne monnaie, mais qui par fraude la donnent pour plus qu’elle ne vaut, ils ne sont pas coupables du crime de fausse monnaie ; mais ils commettent un faux, et sont punis d’une peine arbitraire. (Julius Clarus…)

10 - Ceux qui font entrer dans le Royaume des espèces altérées, ou contrefaites, sont aussi punis de mort. (Édit du mois de février 1726, art. 1)

Il est défendu à tous les sujets du Roi, et à tous les étrangers qui se trouvent dans le Royaume, de transporter, sous quelque prétexte que ce soit, aucunes espèces ou matières d’or et d’argent ou de billon hors le Royaume, sans en avoir la permission du Roi par écrit, à peine de la vie contre les contrevenants, marchands-banquiers, voituriers et autres ; de six mille livres d’amende, et de confiscation desdites matières, même des marchandises avec lesquelles elles pourront être emballées ; ainsi que des chariots et équipages qui auront servi audit transport. ( Déclaration du 11 septembre 1540 … )

11 - Il est pareillement défendu à tous orfèvres, joailliers, et autres ouvriers travaillant en or et argent, de déformer aucunes espèces pour les employer à leurs ouvrages, à peine des galères à perpétuité ; comme aussi d’acheter ou vendre les matières d’or et d’argent à plus haut prix que celui qui en doit être payé aux Hôtels des Monnaies, à peine de confiscation, et de trois mille livres d’amende. (Déclaration du 24 octobre 1771 …)

Un Édit du mois de Mars 1554, art. 20, défend à toutes personnes d’avoir ou tenir en leurs maisons, ni ailleurs, aucuns fourneaux, ni instruments propres à fondre ou affiner les métaux ; et d’en fondre, faire fondre ou affiner aucuns, sinon dans des lieux publics à ce destinés, et par gens du métier ayant serment ; à peine de confiscation de corps et de biens.

Mais il faut observer que le procès ne pourrait être fait à un Alchimiste, qui changerait les métaux en une autre matière ; comme de l’étain en argent, et du cuivre en or. ( Arrêt sans date du Parlement de Dijon , rapporté par Bouvot, au mot Monnaie, quest. 7.)

12 - Il est défendu à tous les sujets du Roi, et étrangers étant dans le Royaume, mêne à ceux qui jouissent du privilège de régnicoles, de faire aucune négociation d’espèces ; de vendre, acheter, marchander, ou offrir les espèces, ou matières d’or et d’argent, à plus haut prix que celui porté par les Édits, Déclarations et Arrêts ; et de faire aucune forte de billonage desdites espèces et matières ; à peine pour la première fois du carcan, de confiscation desdites espèces et matières et de trois mille livres d’amende ; et en cas de récidive, des galères à perpétuité ; lesquelles peines auront lieu, tant contre ceux qui auront offert ou donné, que contre ceux qui auront marchandé, reçu ou acheté lesdites espèces, ou matières à plus haut prix que celui pour lequel elles auront cours ; et au cas qu’il fût prouvé que lesdites espèces ou matières ont été surachetées dans le dessein de les faire sortir du Royaume, ou de les fournir aux faux fabricateurs, ils feront punis de mort. ( Déclaration du 8 février 1716 , art. 1;…)

Ceux qui sont trouvés saisis de rognures et billon, procédant de rognures de monnaies ; ou atteints et convaincus d’avoir acheté de ces rognures, et d’avoir sciemment participé avec les rogneurs et faux-monnayeurs, et acheté d’eux sciemment de la monnaie fausse, ou billon procédant des rognures des monnaies, font punis de la même peine que les faux-monnayeurs. ( Déclaration du 14 janvier 1549 art. 21 )

13 - Tous changeurs et autres qui se mêlent de faire le change y font tenus aussi, à peine de mort, de cisailler en présence du vendeur, les espèces d’or et d’argent légères, ou cassées, ou soudées qu’ils acheteur. ( Ordonnance d’Orléans, art. 147 )

Les complices des faux-monnayeurs sont punis de même qu’eux de la peine de mort. Tels sont, en premier lieu, ceux qui s'entremettent pour faire fabriquer de fausses espèces, ou qui leur procurent de l’aide et du secours à cet effet. (Farinacius)

En second lieu, ceux qui fournissent aux faux-monnayeurs les matières ou instruments nécessaires pour la fabrique de la fausse monnaie, ou qui la débitent pour eux. L’article 6 de l’Édit du mois de février 1726 porte, que les serruriers, forgerons, et autres ouvriers travaillants en fer, qui auront fabriqué des ustensiles, machines, balanciers, et outils servant aux monnaies, et dont l’usage ne leur est pas connu, feront punis de mort comme complices de ceux qui auront fait usage de ces outils ; à moins qu’ils n’en aient une permission par écrit des Officiers des Monnaies.

14 - L’article 17 du même Édit de 1726 porte, que les graveurs, et autres, qui auront gravé des poinçons, quarrés, et autres pièces propres à là fabrication des espèces, sans permission des Officiers des Monnaies, feront punis de la même peine de mort.

La même peine est aussi prononcée par l’article 18 du même Édit, contre les voituriers, messagers, et autres, qui auront transporté sciemment les machines et outils qui peuvent servir aux monnaies, sans en donner avis aux Procureurs-Généraux ou aux Intendants des Provinces, comme contre-fauteurs et complices de fausse monnaie.

Ceux qui recèlent la fausse monnaie, sont aussi punis de mort, comme complices de faux-monnayeurs.

Celui qui loue sa maison à un homme qu’il sait depuis être faux-monnayeur, s’il ne le décèle, confisque sa maison suivant la Loi … ce qui est conforme à l’article 1 chap. 39 de la Coutume du Lodunois, qui porte que la maison où la fausse monnaie est fabriquée au su du Seigneur de cette maison, est confisquée au Roi.

15 - Bien plus, quelques Auteurs ont prétendu que la maison où se fabriquait la fausse monnaie, devait toujours être confisquée, soit que le propriétaire de cette maison eût connaissance, ou non, qu’il s’y fabriquait de la fausse monnaie ; pourvu néanmoins qu’il ne se fût pas éloigné de cette maison ; autrement il serait présumé être dans l’ignorance…

À plus forte raison cela doit-il avoir lieu, lorsque le propriétaire a su qu’il se fabriquait de la fausse monnaie en sa maison, et qu’il ne l’a point empêché, ni dénoncé à Justice ; quand même il ne serait point coupable, ni complice de ce crime, comme on vient de l’observer.

Ceux qui, pouvant empêcher la fabrique de la fausse monnaie, ne l’empêchent point, doivent être punis de la peine ordinaire du faux suivant la Loi Cornelia … Parmi nous cette peine est arbitraire.

16 - Enfin, ceux qui connaissant des faux-monnayeurs, ne les révèlent point sont aussi punissables, mais d’une peine arbitraire, suivant les circonstances. S’ils ont reçu quelque argent pour ne les pas révéler, la peine est celle du bannissement ou des galères, suivant les circonstances et la qualité des personnes.

La femme qui voit son mari faire de la fausse monnaie, ainsi que le fils qui voit son père ou un frère qui verrait son frère commettre ce crime, ne font punissables d’aucune peine, pourvu qu’ils n’y aient point contribué, ni aidé ; autrement ils seraient punissables de mort. Il n’y a que le crime de Lèse-majesté au premier chef, où la femme est obligée de déceler fon mari, et le fils son père ; parce qu’on suppose qu’il n’y a point de vie qui ne doive être sacrifiée à la conservation du Prince. (Voyez cependant ce qui est dit ci-après, n°4)

17 - 10° L article 4 de l’Édit du mois de février 1726, porte, que toutes les espèces décriées, même les espèces étrangères qui se trouveront en la possession des particuliers et communautés, parmi les meubles et effets des parties saisies, ou des personnes décédées, et généralement de quelque manière que ce soit, sont confisquées au profit du Roi, et portées aux Hôtels des Monnaies, pour y être converties en nouvelles espèces ; sans que la mainlevée desdites pièces puisse être accordée, sous quelque prétexte que ce soit.

L’article suivant enjoint aux Juges ou autres Officiers, dans le cas d’opposition ou levées de scellés, confections d’inventaires et de saisies et annotations de biens, saisies et exécutions de meubles, et autres où il échet transport de leur part, de saisir les espèces décriées ou étrangères qu’ils trouveront ; et après en avoir dressé procès-verbal, d’en donner aussitôt avis aux Procureurs-Généraux des Cours des Monnaies et à leurs Substituts ; à peine d’interdiction de payer la valeur des espèces et d’être condamnés, en leur propre nom, à payer la valeur des espèces qui auront été recélées, et en une amende, qui ne pourra être moindre du quadruple desdites espèces.

L’article 8 porte, que les dépositaires d’anciennes espèces d’or et d’argent, décriées ou étrangères, seront tenus ne les porter aux Hôtels des Monnaies ; à peine de confiscation, et de répondre de leur valeur envers les propriétaires ou créanciers.

18 - L’article 10 du même Édit défend à tous marchands, négociants et autres, de tirer, accepter, ni négocier des lettres de change payables en espèces décriées ; à peine pour la première fois de confiscation, avec amende du double de leur valeur ; et pour la seconde fois, d’an bannissement de trois ans ; le tout néanmoins sans préjudicier à l’usage des lettres de change payables en espèces au cours du jour où elles ont été tirées.

L’article 14 défend de transporter ou envoyer les espèces qui n’ont point de cours, hors les Villes du Royaume, où il y a Hôtel de Monnaie, à peine de confiscation et d’amende.

Et l’article 15 prononce la peine des galères contre les conducteurs des voitures publiques, qui se chargent, ou emportent sciemment des espèces décriées.à moins qu’il n’en soit fait mention sur les registres des Messageries, et sur les lettres de voiture.

Outre la peine de mort établie ci-dessus contre les faux-monnayeurs la confiscation a lieu sur tous leurs biens indistinctement, même dans les Provinces où la confiscation n’a pas lieu ; ce crime étant regardé comme crime de lèse-majesté. Plusieurs Coutumes en ont des dispositions. ( Coutume de Calais, art. 250 …)

ARTICLE III :
CONFIDÉRATIONS NÉCESSAIRES AUX JUGES
TOUCHANT LE CRIME DE FAUSSE MONNAIE

19 - Ceux qui fabriquent des monnaies, quoiqu’étrangères , et non ayant cours dans le Royaume, sont également coupables du crime de fausse monnaie, et punis comme faux-monnayeurs. ( Déclaration du 5 octobre 1715, ci-dessus citée )

Les étrangers qui étant dans le Royaume, falsifient, contrefont ou altèrent la monnaie du Prince, sont punis de même que s’ils étaient regnicoles. ( Voyez ci-dessus , n° 10 )

Lorsque la contrefaction, ou falsification de la monnaie, ne tombe que sur des espèces de peu de valeur ; comme si quelqu’un contrefaisait des liards, quelques Auteurs prétendent que les coupables doivent être punis d’une peine moindre que de la peine ordinaire établie contre les faux-monnayeurs…

20 - Ceux qui rognent ou altèrent des espèces qui se trouvent trop pesantes, pour les réduire à leur juste poids, sont aussi coupables du crime de fausse monnaie. Il ne parait pas cependant qu’ils doivent être punis de la peine ordinaire, mais d’une autre peine. ( Ainsi Farinacius )

5°. De même celui qui ne ferait convaincu d’avoir altéré qu’une légère quantité d’espèces ; p.ex. un seul écu, mérite aussi d’être puni moins sévèrement que sil en avoir rogné ou altéré une grande quantité. ( Voyez Farinacius )

On doit dire aussi la même chose de celui qui aurait exposé, quoique sciemment, une seule espèce de fausse monnaie, des espèces de peu de valeur, p.ex. des liards, quoique de fausse fabrique. ( Voyez Farinacius )

21 - L’ignorance et la bonne foi excusent dans ce crime, comme dans tous les autres, et elle se présume ordinairement ; ce qui dépend cependant des circonstances. Mais si celui qui expose de la fausse monnaie, refuse de déclarer d’où lui proviennent les espèces par lui exposées ; ou qu’elles fussent en si grande quantité, qu’on ne pût supposer qu’il les a exposées innocemment, ou qu’il fût connu d’ailleurs pour homme de mauvaise réputation ; dans ce cas, il serait réputé être dans la mauvaise foi. ( Voyez Julius Clarus et Farinacius )

La minorité, et surtout l’âge au-dessous de puberté, excusent aussi dans ce crime, comme dans tous les autres, ou du moins sert à diminuer la peine (Farinacius)

La simple tentative non suivie d’effet, excuse aussi ; comme si quelqu’un ayant commencé à fabriquer, ou à altérer de la fausse monnaie, pressé ensuite de repentir, ne l’avait point achevée, ni exposée. ( Farinacius, Julius Clarus ).Mias il en serait autrement, si cette fausse monnaie n’avoir pu être achevée, parce qu’il en aurait été empêché par la Justice. ( Farinacius )

ARTICLE IV :
DES PREUVES EN CRIME DE FAUSSE-MONNAIE

22 - Pour prouver contre quelqu’un qu’il est coupable du crime de fausse monnaie, il n’est pas toujours nécessaire d’avoir une preuve complète ; et il suffit d’avoir une preuve résultant de présomptions, si ces présomptions sont violentes, et telles qu’elles portent avec elles un caractère de vérité…

Celui qui est trouvé saisi d’espèces fausses est sensé complice et participant au crime de fausse monnaie ; surtout si on trouve chez lui une grande quantité de ces espèces ainsi falsifiées ; et que ce soit d’ailleurs un homme d’une mauvaise réputation. ( Farinacius )

À plus forte raison cette maxime doit-elle avoir lieu à l’égard de celui chez lequel on trouve des machines et outils propres à la fabrique de la fausse monnaie ; à moins qu’il ne justifie d’ailleurs de son innocence. ( Farinacius )

23 - Mais si celui chez lequel on trouve ainsi des espèces fausses, fait connaître son innocence, en déclarant la manière dont elles lui ont été remises par qui ; et que d’ailleurs ce soit une personne d’une bonne réputation, alors il peut être excusable ce qui dépend des circonstances et de la prudence du Juge. ( Farinacius )

Dans le doute, la fraude est toujours présumée dans celui qui est trouvé saisi d’espèces fausses ; surtout si la fausseté de ces espèces était visible, ou qu’il ne fût pas possible par les circonstances qu’il l’eût ignorée ; ce qui doit avoir lieu à plus forte raison, dans celui qui est convaincu d’en avoir vendu ou acheté ; parce qu’alors le dol et la connaissance est prouvée par l’action même. ( Fannacius )

ARTICLE V :
OBSERVATIONS GÉNÉRALES
SUR LE CRIME DE FAUSSE-MONNAIE

24 - Ceux qui dénoncent, on arrêtent les coupables de fausse monnaie, doivent être payés de la somme de 300 livres, pour gratification, suivant les certificats qui leur en feront donnés par les Procureurs-Généraux des Cours des Monnaies, ou par leurs Substituts. ( Édit de février 1726, art. 5.)

Il en est de même des billoneurs, ou négociateurs qui déclarent leuss complices aux Juges, avant d’être compris dam une instruction criminelle pour le même fait ; ils sont exempts des peines, et reçoivent la même part des confiscations et amendes qui doit appartenir au dénonciateur. ( Édit de Février 1726, art. 19 )

Mais on n’a point obligé de dénoncer ce crime, comme on y est obligé pour celui de Lèse-majesté ; ce qui résulte des récompenses qui font promises aux dénonciateurs par l’Édit qu’on vient de rapporter.

À plus forte raison, une femme n’est point obligée de déclarer son mari coupable de fausse monnaie…

25 - Le crime de fausse monnaie est au nombre des crimes prévôtaux qui se jugent sans appel, suivant l’article 12 du titre I de l’Ordonnance de 1670 ; et la Déclaration du 3 Février 1731, art. 5.

On a prétendu aussi que les Ecclésiastiques ne jouissaient pas du privilège de Cléricature pour raison de ce crime, suivant l’Ordonnance de Henri II, du 14 Janvier 1549 art. 20, ainsi que pour le crime de Lèse-majesté ; mais l’usage est aujourd’hui contraire…

Dans l’instruction de ce crime, le coupable peut être interrogé sur ses complices ; parce que ce crime est tel par sa nature, qu’il ne peut guère être commis par une personne seule ( Farinacius )

Enfin, il n’y a point dans l’accusation de ce crime de dommages et intérêts contre les faux dénonciateurs, ni contre les accusateurs mal-fondés qui n’ont pu prouver leur accusation ; à moins qu’il n’y ait d’ailleurs contre ces accusateurs et dénonciateurs des preuves, ou présomptions de calomnie et de mauvaise foi (Farinacius)

Signe de fin