ADAGES CLASSIQUES
Formules juridiques en français
- professeur Jean-Paul DOUCET -
On a vingt-quatre heures, pas plus, pour injurier ses juges quand on a perdu son procès.
Nul n’est censé ignorer la loi.
Cette rubrique comporte trois parties :
Maximes de l'Ancien droit
français (Pothier, Pandectes)
Maximes du droit canonique
(Grégoire IX et Boniface VIII)
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1° Maximes de l'Ancien droit français
(Pothier, Pandectes)
En mariage il trompe qui peut (dans la phase de
séduction)
Nul ne peut se faire justice à soi-même.
Nul ne plaide par procureur (mais doit plaider en
son nom propre)
Opposition sur opposition ne vaut.
On n’est pas censé consentir, quand on ne fait que céder
à l’autorité d’un père ou d’un maître.
Les droits du sang ne peuvent être détruits par aucune
loi civile.
Dans les choses obscures, il faut toujours se déterminer
pour la moindre chose.
L’équité naturelle exige que les profits appartiennent à
celui qui supporte les charges.
Lorsqu’il n’y a pas de terme fixé pour l’acquittement
d’une obligation, la chose est due incontinent.
Toutes les fois qu’il s’élève des doutes sur
l’interprétation d’une clause dans laquelle il s’agit de la liberté, c’est en faveur de la liberté que l’on doit se déterminer.
Une chose impossible ne saurait être le sujet d’aucune
convention, ni produire aucune action.
Lorsqu’il s’agit d’interpréter un contrat, il faut voir
quelle a été, en le faisant, l’intention des parties. En cas de doute, on doit prendre le parti le moins onéreux pour le débiteur.
Il y a faute à nous mêler de choses pour lesquelles nous
n’avons pas d’aptitude.
Celui qui a le pouvoir de condamner a nécessairement le
pouvoir d’absoudre.
L’insensé n’a point de volonté.
On ne doit pas accorder plus d’avantage au demandeur
qu’au défendeur (on parle aujourd’hui plus militairement de l’égalité des armes).
Les conventions des particuliers ne peuvent pas déroger
au droit public.
Ce que vous avez payé à titre de peine, vous ne pouvez le
répéter contre personne.
Ce qui se dit ou se fait dans la chaleur de la colère ne
doit pas passer pour un acte de volonté, à moins qu’on ne persévère dans les sentiments qu’elle a inspirés.
On n’est pas coupable d’une action qu’on sait se
commettre, mais qu’on n’est pas maître d’empêcher.
On ne peut accuser de dol celui qui use de son droit.
La bonne foi ne permet pas que l’on demande deux fois la
même chose.
Celui à qui on a donné la puissance du glaive, ou le
droit d’infliger toute autre peine, ne peut pas le déléguer à un autre.
Ce qui est inintelligible doit être regardé comme non
écrit.
Les actes qui doivent être l’ouvrage du consentement ne
sont parfaits qu’autant qu’ils se font en vraie et entière connaissance de cause.
Lorsqu’il s’agit de fraude, on doit avoir égard, non
seulement aux preuves que le demandeur présente, mais encore à celles dont le fait de son adversaire l’a privé.
Pour juger s’il y a fraude, il ne faut pas s’attacher
uniquement à l’événement, il faut aussi examiner s’il y a eu dessein de frauder.
C’est une maxime générale en droit, que l’espèce déroge
au genre, et que les dispositions spéciales doivent toujours l’emporter.
Dans toutes les affaires, mais surtout dans
l’administration de la justice, on doit se régler par l’équité.
Dans les discours ambigus, il faut principalement
considérer l’intention de celui qui les a proférés.
Personne ne peut être arraché par force de sa maison.
Il n’y a point de consentement véritable lorsque l’erreur
en est le principe.
La liberté est de toutes les choses du monde la plus
favorable.
L’impéritie est assimilée aux fautes.
Le crime ne peut jamais améliorer la condition de son
auteur.
Se taire n’est pas précisément avouer ; cependant il
est vrai de dire que ce n’est pas désavouer.
Ce qui est permis n’est pas toujours honnête.
Celui qui donne ordre de déposséder quelqu’un de ses
biens n’est pas moins coupable du crime de violence que celui qui le commet.
En fait de délits, la ratification équipolle au mandat.
Ce n’est pas user de violence que de faire valoir son
droit par les voies juridiques.
Dans les causes pénales, on doit envisager les faits du
côté le plus favorable et le plus doux.
Hors les délits marqués au coin de l’atrocité et de la
scélératesse, on pardonne au coupable, ou du moins on adoucit sa peine, lorsqu’il n’a fait qu’obéir à un maître.
Celui qui fait une chose par ordre du juge n’est pas
présumé être en dol, parce qu’il est obligé d’obéir.
Celui qui commande de faire du dommage à quelqu’un, est
censé le faire lui-même ; mais celui qui n’a fait qu’obéir à une autorité majeure est exempt de tout reproche.
Ce que fait un juge, en choses qui excèdent sa
compétence, est nul.
Lorsque la loi parle de restitution, les fruits y sont
compris.
A l’impossible, nul n’est tenu.
Il n’y a point de loi qui puisse valider ce qui est
défendu par la nature.
On ne peut pas échapper au reproche de dol, lorsqu’on a
résisté à l’ordonnance d’un magistrat.
La chose jugée est regardée comme la vérité même.
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2° Maximes du droit canonique
(Grégoire IX et Boniface VIII)
Il vaut mieux s’exposer à causer du scandale que de
trahir la vérité (décrétale de Grégoire IX).
La nécessité rend quelquefois licite ce qui est
défendu ; ainsi la maladie dispense du jeûne commandé par l’Église (décrétale de Grégoire IX).
On n’est point obligé d’exécuter les conventions
illicites, ou qui sont l’effet de la violence ou de la fraude (décrétale de Grégoire IX).
On n’obtient la rémission des péchés, qu’en réparant le
tort qu’on a fait (décrétale de
Boniface VIII).
On n’obtient la rémission des péchés, qu’en se corrigeant
(décrétale de Boniface VIII).
On a droit de présumer que celui qui a été convaincu d’un
crime, peut en avoir commis un autre (décrétale de Boniface VIII).
En justice, il ne doit point y avoir d’acception de
personnes (décrétale de Boniface VIII).
L’ignorance de fait excuse, mais non celle de droit
(décrétale de Boniface VIII).
Il faut restreindre tout ce qui est odieux, et étendre
tout ce qui est favorable (décrétale de Boniface VIII).
Il faut qu’une personne ait commis un crime pour qu’on
puisse la punir (décrétale de
Boniface VIII).
La loi, en défendant une action, est censée défendre tout
ce qui est la suite de cette action (décrétale de Boniface VIII).
On ne doit point imputer à une personne de n’avoir pas
fait ce qu’elle devait faire, quand cela n’a point dépendu d’elle (décrétale de Boniface VIII).
A défaut de preuve qu’une personne a su un fait, la
présomption est qu’elle l’a ignoré (décrétale de Boniface VIII).
On ne doit pas tenir les promesses qui vont contre les
bonnes mœurs (décrétale de
Boniface VIII).
C’est la même chose de faire faire par un autre que de
faire soi-même (décrétale de
Boniface VIII).
Ce qui est valable à l’origine, ne peut devenir nul dans
la suite, quoiqu’il soit depuis arrivé des choses qui auraient rendu nul ce qui a été fait (décrétale de Boniface VIII).
Il n’est point permis de faire indirectement ce que la
loi a défendu de faire de manière directe (décrétale de Boniface VIII).
C’est contrevenir à la loi, que d’en suivre la lettre, et
d’agir contre son esprit (décrétale de Boniface VIII).
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3° Maximes diverses
La condamnation d’innocents est un plus grand mal que
l’absolution de coupables.
Jusqu’au moment de la condamnation, le coupable est
réputé innocent.
La preuve n’existe pas, tant qu’elle n’est pas complète.
La peine doit avoir pour base le délit, et non le plus ou
moins de certitude de la preuve.
Il n’existe pas de crime, là où il n’y a pas eu volonté
de le commettre.
Le mal fait à la société est la première mesure des
crimes.
Les peines sont moins faites pour punir les crimes que
pour les prévenir.
On ne doit punir que celui qui a commis le crime.
La peine est suffisante si elle empêche le coupable de le
devenir de nouveau.
La peine est injuste si elle est inutile, ou si elle est
trop sévère.